Mario Del Curto : Au large des yeux (28.09.2008)
«Mario Del Curto à Sarraz», c’est le nom du vaisseau spatial qui a croisé la trajectoire de mon aéronef. C’était pendant la torpeur d’une profonde nuit. A travers la porte des étoiles, l’équipage de l’Association Mordache qui soutient le travail de ce photographe bien connu des brutolâtres, s’est adressée à votre petite âme errante pour qu’elle répercute dans «la communauté animulienne» une info in-con-tour-na-bleue.
Une nouvelle expo de portraits et de vues de lieux «à l’identité forte» prises par MDC chez des créateurs et dans des environnements d’art singuliers internationaux mènera la vie de château à partir du vernisseux jeudi 2 octobre jusqu’au 2 novembre 2008, date de mort.
Cherchez pas l’adresse de l’Asso Mordache, j’ai essayé : nada. Le mot, lui, existe bien. Ce n’est pas un anagramme de mocharde. C’est une pièce en bois qu’on place entre les mâchoires d’un étau pour serrer un objet sans l’endommager. C’est aussi un baillon que les capucins novices se collaient dans la tronche pour éviter de tchatchter. Tout un programme !
Quant au Château de La Sarraz, à 15 kms de Lausanne et à 12 de la frontière française, il abrite un musée du cheval, vocable toujours évocateur de palais de «l’anti-académisme spontané».
Parmi ceux-ci, Mario Del Curto a choisi: les Etats-uniens Bernard du Mississipi, Clyde Casey de la nouvelle-Orléans, Kenny Hill du Bayou Petit Caillou, les Italiens de Bordighera, Oreste Fernando Nannetti, Luigi Lineri de Zevio, NOF4, «Astronaute Ingénieur Minier du Système Mental» qui graffita le mur d’un hosto psy avec sa boucle de veste.
Les Français sont représentés par Charles Billy, Henri Ughetto de Lyon, Le Jardin de Rosa Mir à la Croix-Rousse, Marilena Pelosi.
Du Japon viennent les images du temple Otagi Nenbutsu-Ji de Kyoto (1200 statues représentant Rakan, un disciple de Buddha).
De Suisse, celles de Pietro Angelozzi de St Gall, de l’Asso CREAHM de Fribourg, de Linda Naeff.
Si vous êtes pas du genre à vous contenter du menu, reportez-vous au dossier de presse. C’est un modèle du genre et il a l’avantage de contenir des images où le photographe invite à puiser, ce dont je me prive pas.
Une restriction toutefois : quand l’Asso Mordache nous apprend que «en résonnance aux images argentiques», les spectateurs admireront aussi des œuvres de créateurs «dévoilés pour la première fois en Suisse romande», il me semble qu’elle tire un peu la couverture vers le photographe. Excès d’enthousiasme pardonnable dans un document qui souligne par ailleurs le «rôle documentaire» indispensable du témoignage de MDC après le saccage du Jardin de Marcello Cammi.
Belle, attirante et forte, la machine de Mario Del Curto a tendance à passer pour la seule (sa bio parle de «démarche unique») aux yeux de ses mordacheux supporteurs.
C’est oublier un peu vite Gilles Ehrmann et Clovis Prévost. C’est oublier par avance les petits reporters qui poussent comme des champignons avec leurs nouvelles technologies dans la poche-téléphone. L’avenir dira s’ils se laisseront intimider par des travaux du calibre de celui de MDC ou s’ils sauront s’en servir comme d’une formidable rampe de lancement au profit d’une nouvelle esthétique et de nouvelles recherches.
Levez-vous, jeunes photographes désirés ! L’univers brut est sans limites et il y aura toujours à explorer.
17:38 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : art brut, mario del curto, otagi nenbutsu-ji, kenny hill, marcello cammi, henri ughetto, jules senis | | Imprimer | | |
Commentaires
Connaissant l'ironique et tendre Mario, qui n'a rien d'un capucin, je peux vous dire que l'helvétisme Mordache doit être pris au sens figuré, à savoir : la faconde, la "tchatche" comme dirait notre Ani.
Nul capucin à l'horizon, l'homme del Curto serait plutôt de ceux qui veulent rompre avec les ordres.
Écrit par : Christian Berst | 01.10.2008
j'étais hier à l'expo
belle "mordache" de ton commentaire !
merci - bien ri
max
Écrit par : max jacot | 03.11.2008
Chers Animuliens,
Une petite note pour vous signaler le décès d’un grand artiste lyonnais : Henri Ughetto.
Voilà un an que nous consacrions à cet artiste polymorphe une exposition de photos de Mario Del Curto en parallèle de ses œuvres, au Fort de Vaise à Lyon (http://www.biennaledelyon.com/artcontemporain2009/menu-resonance/resonance/lieux/fondation-renaud.html). Henri nous avait accueillis dans l’intimité de son atelier et le huis clos de son « musée », un espace empli de ses souvenirs, œuvres et collections, véritable prolongement de son imaginaire et temple de son iconoclaste création… en quelque sorte son palais idéal, tant il admirait Cheval !
Aussi contradictoires que puissent paraitre ces qualificatifs, l’œuvre d’Henri Ughetto tient tout à la fois de l’art conceptuel : à la manière d’un Opalka, il scandait le temps en constellant œufs et pastiches d’une myriade de gouttes de sang, de l’art baroque par son extravagance, son amour des courbes et de la pompe (voir l’article de Damien Chantrenne http://www.performarts.net/performarts/index.php?option=com_content&view=article&id=306:ughetto&catid=19:entretiens&Itemid=24), et enfin de l’Art brut : il avait la sincérité d’un auteur d’Art brut, qui ne peut faire autrement que de donner forme, sans cesse, à son turbulent univers intérieur.
Voici quelques pages qui vous permettront d’en savoir plus sur l’œuvre de cet artiste inclassable :
http://www.et-alors.org/dossier-les-Artistes/Ughetto-2008.html
http://momofuente.over-blog.com/article-16997329.html
http://web.lyon.iufm.fr/confluences/archive/txughetto_treppoz.html
… et un livre incontournable pour comprendre sa démarche, ses entretiens avec l’artiste Guillaume Treppoz : http://www.evene.fr/livres/livre/collectif-henri-ughetto-18523.php, aux éditions Fage.
Écrit par : Céline Muzelle | 31.01.2011