Les sylvistructures d’un plombier provençal (24.04.2011)
«Branchée» comme je suis, il était écrit que je m’intéresserais à la Maison de l’amandier qui regorge de «sylvistructures». Pierre Leron-Lesur, l’inventeur de ce joli mot savant qui désigne des «œuvres originales provenant de la nature» a installé dans sa maison de Saint-Rémy-de-Provence un très captivant musée personnel de poésie naturelle.
Il est constitué de troncs, de loupes et de branches (nous y voilà) aux formes suggestives, aéoridynamiques ou mystérieuses, belles comme tout.
Elles sont pour la plupart empruntées à des amandiers séculaires, morts naturellement, carbonisés par le feu ou détruits par le gel. L’amandier, que voulez-vous, fleurit avant tous ses petits camarades, ce qui lui vaut quelques ennuis en cas d’offensive tardive du froid. Il mérite bien une association pour le défendre et celle-ci loge dans l’ancien Hôtel de Lubières où Pierre abrite cette collection probablement sans égale, constituée patiemment au cours du dernier demi-siècle.
A 88 ans, il reste des heures debout pour recevoir les visiteurs. Puis il glisse en souriant sa longue silhouette un peu voûtée (il finirait presque par ressembler à un amandier!) dans son atelier qu’il appelle pour rire «l’antre du diable».
Dans ce laboratoire, interdit au public mais où il a bien voulu que je le photographie, il socle, cire, rafraîchit et chouchoute ses objets raffinés et subtils que lui prodigue la campagne provençale.
Bien que doté, derrière ses grosses lunettes, d’un «œil» que nombre d’antiquaires lui envieraient, bien que visiblement pourvu d’un goût très sûr, Pierre Leron-Lesur, petit-fils de tonnelier, ne se veut qu’artisan.
Si on lui fait observer que ses sylvistructures sont plutôt des «sylvisculptures», il récuse ce terme carrément.
Il met à ne pas se vouloir artiste la même énergie que mettent certains créateurs d’art brut à refuser tout label d’ordre esthétique. Pourtant il me semble que les objets de sa collection relèvent pour la plupart du ready made et même pour beaucoup du ready made aidé.
Ce que semble dire avec ses mots à elle, Jacqueline de Romilly : «Mais le vrai miracle n’est pas là. Il est dans le fait que ces fragments de troncs morts deviennent entre ses mains, sans qu’il n’y change rien d’essentiel, des œuvres d’art. Il élague seulement; il n’ajoute rien. On pourrait dire qu’il libère la forme encore prisonnière dans le bois».
Au bois, Pierre Leron-Lesur doit la vie et il la lui rend bien. Grâce aux sabots isolants de son grand-père, il a pu échapper à une grave électrocution dans sa jeunesse. Il raconte cet accident et beaucoup d’autres anecdotes pleines d’un savoir technique disparu dans un livre de souvenirs où il fait preuve d’un très moderne sens de la valeur de l’eau : Fils du Rhône, Tribulations et mémoires d’un plombier provençal.
On comprend que son activité professionnelle lui ait permis d’arpenter ce pays qu’il aime et qu’il connait sur le bout des doigts. Il est aussi l’auteur d’un bouquin bien illustré consacré à ses œuvres. Chimères du bois, Les sylvistructures de Pierre Leron-Lesur, tel est son titre.
Il paraît que les magasins Nature et Découverte le vendaient mais maintenant il est épuisé parce que paru en 1994 à 1000 exemplaires seulement. Alors je le cherche.
23:55 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : pierre leron-lesur, sylvistructures, poésie naturelle, saint-rémy-de-provence, hôtel de lubières, maison de l'amandier | | Imprimer | | |
Commentaires
Bonjour,
Vous pouvez aller voir sur le site "justbooks", moteur de recherche sur les divers possesseurs de livres épuisés / recherchés , "Chimères du bois, Les sylvistructures " s'y trouve pour environ 46 euros (port compris).
Bonne chance.
Cordialement.
Écrit par : laurent le meur | 25.04.2011
LES HAUTEURS DU PLOMBIER
Mon plombier est un poète.
Le nez dans ses tuyauteries, les bottes dans la fange et les mains plongées dans le bidet, le dépanneur de la ménagère en larmes est un trouvère des temps modernes.
Qu'il a fière allure dans sa combinaison maculée de suif lorsque d'un pas lent et assuré, noble et serein il sillonne quelque ruelle aux égouts bouchés empestant la marée montante ! Mais miracle ! Ce parfum de mystère qu'il laisse sur son sillage suffit à couvrir toute odeur impie : au passage du plombier les coeurs s'apaisent.
Messie des Dupont trahis par leur évier, fécondeur des caniveaux asséchés, libérateur des canalisations obstruées, sauveur des bons-à-rien empêtrés dans leur ignorance des systèmes d'écoulements, il va partout répandre la bonne nouvelle : "C'est l'plombier!" car en toutes saisons le plombier refait la pluie et défait la sécheresse (...)
Raphaël Zacharie de IZARRA
Écrit par : Raphaël Zacharie de IZARRA | 03.09.2011
@ R. Z. de Izarra
J'ai croisé Pierre Leron-Lesur au mois d'août.
Il "sillonne" toujours les ruelles de St-Rémy en compagnie de touristes à qui il fait découvrir les ruines romaines.
C'est un monsieur très respectable, doté d'un sens très rare de la poésie naturelle. Comme il ne manque pas d'humour, il appréciera sûrement votre texte.
Votre prose poétique décalée et vos vidéos sur le Net me font penser à Georges Le Gloupier.
Mais je ne suis pas un blogue littéraire. Votre commentaire est trop riche pour ma petite boutique.
Vous comprendrez donc que je ne puisse conserver ci-dessus que les 3 premiers paragraphes de ces captivantes "Hauteurs du plombier".
Mes lecteurs qui voudront connaitre la suite se reporteront à:
http://izarralune.blogspot.com/2011/09/928-les-hauteurs-du-plombier.html
Écrit par : Ani | 03.09.2011
Bonjour,
je faisais un petit tour sur le net et je suis tombée sur votre blog. Merci de nous faire découvrir l'art et les artistes comme mons. Pierre Leron-Lesur !
Lisa
Écrit par : dentiste paris 15eme arrondissement | 26.09.2011