Le voyage divers de Laurent Hasse (10.01.2013)
J’ai beau faire (ou ne pas faire), je reste une incomprise.
Prenez mon nom, c’est fou ce qu’on le charcute : «chère Anima» par ci, chère «Vague Hoola» par là (chez les surfeurs). Prenez mon titre, il est limpide! Pas de jours pourtant où l’on n’en restreigne la signification. Rives encore ça va mais dérives!
On croit toujours que je m’acharne sur ce qui cloche, que je stigmatise les déviations. Comme si l’art brut pouvait être une norme! Alors que ce soit une fois pour toute gravé dans le marbre : par dérives, j’entends aussi, j’entends surtout le passage hâtif à travers des ambiances variées. Point barre.
Ces temps-ci comme naguère, on dérive dans sa tête et on dérive avec les pieds. C’est pourquoi je me suis dirigée d’emblée vers Le Lucernaire, attirée par Le Bonheur…, le film de Laurent Hasse.
Question «ambiances variées», il s’y connaît, ce jeune réalisateur. Il a parcouru, 82 jours durant, une France d’hiver, pas trop vaillante mais où des gens aux accents différents s’efforcent quand même de «faire corps avec la vie». Laurent Hasse se sert de sa tête et de ses pieds à raison de 30 kms par jour. Sans laisser à l’une plus qu’aux autres le poste de commandement.
Dans l’Aude, en Aveyron ou dans le Cantal, dans la Creuse, le Cher, sur les bords de la Loire, à Aubervilliers ou dans la Somme, il a emboîté le pas et la solitude de ceux qu’il a rencontré, qui lui ont offert un café, une place près de leur feu, de leurs souvenirs, de leurs regrets.
«On ne s’improvise pas nomade, on le devient pas après pas» dit la belle voix off de ce témoin armé d’une caméra numérique et de la patience nécessaire pour laisser venir la parole de ses interlocuteurs.
Et le pâtissier, le soldat, la veuve, l’ornithologue, la fermière sans ferme de la Beauce agro-alimentaire finissent par lui communiquer leur conception de cette terre promise, seconde partie du titre de ce film. «Aucune idée» dit l’un, «être capable de se fabriquer de bonnes heures» dit l’autre. «Je cherche le calme», «c’est pas quelque chose d’universel», «le verre et le bonheur, ça casse très vite»… On imagine les quantités de rushes qu’il a fallu pour apprivoiser ces hommes, ces femmes, ce brouillard farouche, ce soleil timide qui caresse les grosses chaussures du marcheur.
Soulignons le travail de Matthieu Augustin, le monteur. Les images sont limite japonisantes mais ce parti pris esthétique a de la grandeur : oh, les éoliennes! Pas le moindre patenteux parmi les personnages rencontrés. Encore qu’avec un bâtisseur qui ligature l’osier comme un oiseau avant de staffer, on n’en soit pas loin.
Sorti du coma où l’avait plongé une automobile qui l’avait renversé, Laurent Hasse s’est mis à marcher des Pyrénées orientales jusqu’à la mer du Nord, la mer toujours recommencée et son rire en ressac (dernière image).
23:55 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : laurent hasse, matthieu augustin, le bonheur, dérives | | Imprimer | | |
Commentaires
Bonjour ... et merci !
A vous lire, je sais qu'il y a au moins une personne qui a compris mes intentions et l'état d'esprit dans lequel j'étais en entreprenant ce voyage.
L.H.
Écrit par : Laurent Hasse | 11.01.2013
Moi aussi je l'ai vu au Lucernaire le Bonheur... Terre promise. Vu et apprécié.
Il passe aussi à l'Entrepot, métro Pernety mais pas besoin d' habiter forcément à côté, ça vaut le déplacement!
En dehors de Paris, je ne sais pas où il passe.
Si quelqu'un peut nous dire...
Écrit par : Catherine | 11.01.2013
Bonjour Catherine ... et les autres.
Pour répondre à votre question, le film démarre une "promenade" dans les cinémas en régions, en programmation régulière et/ou séance unique suivi d'un débat.
Toutes les infos seront régulièrement mises à jour sur la page FB du film :
http://www.facebook.com/lebonheurterrepromise
Et aussi sur :
http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=198384.html
Écrit par : Laurent Hasse | 22.01.2013