De la nuit des fous aux Silvesterklaüse (07.01.2007)
Photo : Archives Bouvier-Creux
Relisez mon A propos. Je vous l’avais dit. Je suis méchante, mauvaise langue, poison. En plus je lis dans mon bain parfumé au Rêve de miel. Comme je n’ai pas de marque-page dans ma baignoire, je corne les parties qui m’intéressent pour les retrouver.
C’est ainsi que j’ai bousillé, au grand dam de mon chéri qui a la religion des livres, le bouquin de Wolfgang Büscher intitulé Allemagne, un voyage. Dommage. Ce Wolfgang est un écrivain-voyageur très estimable. Du genre qui pense avec sa tête mais aussi avec ses pieds qui l’ont porté autour de l’Allemagne pendant 3500 kms. Son récit est à mettre à côté de Chemin faisant de Jacques Lacarrière, même si Büscher s’accorde de courts répits en bus. La relation de son périple effectué en 2004 fait penser à de l’Hermann Hesse revu par le Wim Wenders d’Au fil du temps. Funambule sur les frontières géographiques et historiques de son pays, Büscher commence au bord du Rhin, longe les côtes de la Mer du nord et de la Baltique, descend vers le sud en longeant la Pologne, la République tchèque, l’Autriche et la Suisse. C’est à Oberstdorf en Bavière qu’il tombe dans la nuit des fous, «un genre de chasse païenne» qui m’a rappelé ma note du 7 avril 2006 (Esprit de la forêt), sur les silvesterklaüse, ces «masques» ruraux de la Suisse voisine.
Büscher nous décrit les jeunes gens d’Oberstdorf déguisés en démons incontrôlables: «Ce n’était pas de la plaisanterie (…). Les têtes étaient parfois d’une grosseur surnaturelle (…) Ils portaient des bois ou des cornes qui sortaient (…) et formaient un étrange mélange
W Ecoutez les zäuerli des Silvesterklaüse X
Merci Mr Hasard qui m’a fait tomber ensuite, au cours de mes explorations chez les bouquinistes sur 2 catalogues suisses oubliés relatifs à ces productions paysannes, voisines de l’art brut, du fait de leur sauvagerie.
De ce Masques de la Suisse primitive (Auvernier,1963)
et de Masques, traditions populaires (Martigny, 1965), voici quelques images.
Ceux que ce sujet intéressent consulteront aussi le chapitre Les Masques dans L’Art populaire en Suisse de Nicolas Bouvier (juste après le chapitre Ex-voto).
21:20 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : silvesterklaüse, jacques lacarrière | | Imprimer | | |
Commentaires
J'aime aussi beaucoup ce livre de Nicolas Bouvier.
D'ailleurs, Mr. Hasard a primé aussi mon ami. Comme il aime parfois fuiner chez l'Emmaüs de Genève, et mieux encore, parmi les objets les plus disparates qui jettent en dehors de leur magazin, il est tombé sur un livre très touchant: L'art rustique en Suisse par Daniel Baud-Bovy, édition 1924, mandaté par la Commission Fédérale des Beaux-Arts dont il était le Président a repertorier pour la première fois des productions artisanales de la vallé du Lötschental, dans le Valais. Dans cette édition finement illustrée on voit entre autre plusieurs exemples d'armoires ornés de peintures, qui étaient très diffusés dans le milieu rural d'antan, surtout dans l'Appenzell. Il est très intéressant de répenser à coté de ces exemplaires le mobilièr peint par Adolf Wölfli dans sa chambre à la Waldau. A sa façon, il était effectivement calé dans une longue et belle tradition.
Écrit par : Teresa | 08.01.2007
Je suis tout à fait d'accord avec ce qu'avance Teresa dans le commentaire précédent. Wolfli suivait, probablement de façon diffuse, une tradition bernoise d'ornementation des armoires, coffres de sa région. Il y a eu une étude sur la question, que j'aurai du mal à vous fournir de là où je me trouve sur le moment -mais gageons que Mme Animula va nous sortir ça aussi sec de son grand cabas bibliographique!
Cependant, je crois me souvenir que Michel Thévoz dans son bouquin sur l'Art Brut, de 1975, avait l'air de dire au sujet de cette étude: circulez y a rien à voir! Parce qu'il faut à tout prix que les créateurs de l'art brut ne soient reliés à rien, il faut qu'ils soient aérolithes, météores surgis de "Pologne", c'est-à-dire de nulle part, comme disait Jarry. Rien à voir avec une quelconque filiation avec l'art naïf, l'art rustique populaire, l'art des enfants, les graffitis, etc. Pas l'ombre d'une once de dialogue imaginable...
Écrit par : Bruno Montpied | 08.01.2007
Comment faites-vous pour connaître tout ça?
c'est merveilleux, et puis vous semez à tout vent, sans demander de contrepartie. Généreux donateurs de votre culture, modestes bienfaiteurs de l'humanité... Je vous baise les mains Madame.
Écrit par : Basile Aulard | 09.01.2007