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Des cercueils sous le Siège d’Arthur

Sombre jour. D’ordinaire, je mets pas mon nez dans les cérémonies mortuaires mais là : une amie à soutenir dont le grand-père vient de perdre son combat en 15 rounds contre la maladie. Tout de même je m’ennuyais ferme en écoutant les histoires de l’oncle saint-paul tomber cahotiquement (et catholiquement) de l’accent polonais du curé.

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 Mon esprit s’envolait pour retomber dans le memento mori. Je pensais à l’art brut qui aurait intérêt à s’enterrer pour échapper aux inopportunes dévotions dont il est l’objet.

arthur’s seat coffins,edimbourg,national museum of scotland,burke et hare,sorcellerie,art brut

Les petits cercueils du National Museum of Scotland ont alors refait surface dans ma petite âme errante.

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De retour dans mon laboratoire animulien, j’ai rouvert mon dossier sujets-à-traiter. Ils attendaient là, sur le site de l’écossais musée, que je m’occupe d’eux.

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Sont-ils pas mimi avec leur 95 mm de long ces coffins contenant de petits corps rudement sculptés et vêtus?

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Il n’en resterait plus que 8 aujourd’hui mais ils étaient 17 en 1836 quand une bande de gamins chasseurs de lapins tomba dessus.

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Empilés en trois couches avec un solitaire sur le dessus, ces cercueils étaient enfouis dans une grotte proche du Siège d’Arthur (Arthur’s Seat), une colline de légende de la ville d’Édimbourg.

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Diverses théories ont été émises à leur propos.

arthur’s seat coffins,edimbourg,national museum of scotland,burke et hare,sorcellerie,art brutLa plus pittoresque voudrait que ces cercueils et leurs contenus évoquassent les 17 victimes de Burke et Hare. Deux joyeux drilles accusés d’avoir en 1828 zigouillé des gens pour vendre leurs corps comme matériel de dissection à un toubib du coin.

coffins détail.jpgPlus probablement, ce pourrait être des statuettes conjuratoires ou des objets de sorcellerie.

La sorcellerie c’est souvent à touche-touche avec l’art brut. Du point de vue formel au moins.

En l’absence d’informations précises, je ne saurais cependant affirmer que ces productions de l’époque romantique sont de l’art brut.

En tout cas c’est mieux que bien des choses qu’on nous présente aujourd’hui comme tel, n’est-ce-pas ?

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Montauban : Promo Brico au Mémo

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Babar et Bruno dans le même mémo.

Jusqu’au 1er mars 2014, les œuvrettes gentillettes de Jacques Chaubard seront à Montauban.

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autour_art_brut.jpgCe n’est pas un service à rendre à ce retraité habile de ses mains que de le comparer à Chaissac mais la médiathèque de Montauban n’hésite pas à sortir le gros mot d’art brut pour un cycle de rencontres autour de lui.

Jacques Chaubard (alias Babar) n’en demande sans doute pas tant.

En 2011, quand Paul Duchein, l’incontournable collectionneur de la ville, l’avait invité au musée Ingres, la presse de l’époque qualifiait bien ses travaux de «surréalistes»! Les temps changent et les aimables Messieurs Bricolage sont automatiquement bombardés inventifs de première classe aujourd’hui.

après midi avec bruno.jpgBruno Montpied (pas d’alias), premier invité du cycle montalbanais, en connaît un rayon sur la question. Il saura nous dire dans l’après-midi du samedi 25 janvier 2014 si l'expo Chaubard c’est du bon lard ou, comme je le crains, du trompe-pigeons.

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Pour rester dans un registre pachydermique, mémorisez que Bricoleurs de Paradis (le gazouillis des éléphants), le film de Rémy Ricordeau, sorti il y a 3 ans, sera projeté en lever de rideau.

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Jean Smilowski exposé à Saint-Pry

L’art brut à la Poterne! C’est le moment de béthuner!

chapelle st pry.jpgCe soir à 18h, vernissage de l’exposition Infiniment Jean Smilowski au musée d’ethnologie régionale, c’est à dire à la chapelle Saint-Pry, témoignage du renouveau architectural après la première guerre mondiale dans le Pas de Calais.

C’est Béthune qui invite mais c’est toujours l’association la Poterne qui veille sur l’œuvre de cet émouvant créateur dont je vous ai déjà dit beaucoup dans ma note du 28 février 2010 rédigée à l’occasion d’une précédente expo.

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smilowski jean portrait.jpgPériodiquement, grâce aux bonnes volontés poternistes et au concours d’institutions hospitalières nordistes, Smilo ressort de l’ombre. 

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Espèrons que son passage au MER de Béthune favorisera de futures initiatives, sur le plan national cette fois, car cette œuvre abondante (qui a échappé à l’Aracine et par conséquent au LaM) le mérite.

Infiniment Jean (…) sera visible du 18 janvier au 8 juin 2014 et question thune, c’est entrée libre.

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Il était une fois le Shu-Mom

Vous aimez les belles histoires. Les histoires de rois et de pays lointains. Moi aussi.

alain rault ecritures.pngAlors en prélude au Grand écart sur les écrits, le prochain séminaire du CrAB qui aura lieu samedi 1er février à l'INHA, en voici une glanée dans Chefferies bamiléké, Gerard Mace.jpgun beau livre de textes et de photos de Gérard Macé devant paraître «dans les tout premiers jours de février 2014» aux éditions Le Temps qu’il fait.

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Il était une fois un sultan «qui régnait sur le pays Bamoun» dans l’ouest du Cameroun.

 

Ce sultan, non content de se faire construire un palais en dur, «sans plans ni calcul» inventa une écriture en 1896.

 

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Ceci parce que, dans son sommeil, une apparition lui avait commandé de dessiner une main humaine sur un tableau noir. Puis d’effacer ce signe avec de l’eau. Eau qu’il devait boire pour conserver la mémoire de la chose représentée. Ce «rêve d'autodidacte» venait un peu tard.

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L’écriture arabe et l’alphabet latin déjà se propageaient en Afrique. Dès 1924, les autorités françaises interdirent la langue de Njoya (c’était le nom du sultan). Dommage : le sultan Njoya s’était donné du mal.

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Peu secondé par son peuple auquel il demanda de répéter l’expérience de l’eau des mots, il dut «s’y reprendre à plusieurs fois avant d’inventer les signes» de l’écriture Shu-Mom (le vrai nom de l’invention de Njoya). A partir d’une base de pictogrammes associés à des lettres d’un alphabet original.

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Quand, dans la ville de Foumban, on visite le palais de Njoya dont «l’architecture empirique est encore debout» on apprend que cet écrituriste sultan essaya aussi de fonder une religion «dont on ne nous dit à peu près rien».

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Les niches du génie

Du Canard enchaîné (n°4866) cette brève à propos d’un chirurgien esthétique sud-coréen : «il utilisait les os de mâchoire retirés sur ses patients pour réaliser des objets de décoration». Voir aussi Libération.

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Sur gentside.com le 31 janvier 2014, cette apparition mystique révélée par Virginie Guichaoua :«Après être tombée dans l’escalier Paula Asuna voit Jésus-Christ apparaître sur son pied» (De l’hématome au fils de l’homme).

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Et grâce à l’Huffington Post du 29 janvier 2014, ce témoignage sur la créativité enfantine ou comment un jeune visiteur de la Tate modern de Londres se vautre sans vergogne dans l’art minimal à 3 millions de dollars.

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Les experts vous le diront : le génie se niche partout.

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Les civilisations d’Ody Saban

J’apprends avec plaisir par un mail-invitation officiel que la Galerie Claire Corcia qui, depuis plusieurs années déjà (voir mon post du 10 avril 2010 Haude et Ody rêvent d’Eros) travaille d’un cœur vaillant à la promotion de l’œuvre d’Ody Saban, consacre à cette artiste une exposition in-di-vi-du-elle du 4 juin au 19 juillet 2014. Sur le thème odysabanesque des Civilisations de la forêt inondée. Cela s’annonce moite et flexible. Souple comme liane et métamorphique. En dérive sur des fleuves non impassibles. Fort bien.

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Mais pourquoi faut-il alors que Claire Corcia se croit obligée d’en rajouter une louche en dossardisant ainsi la pauvre Ody : «artiste ART BRUT de renommée internationale»? CC serait-elle gagnée par la pompidolisation rampante?

Le charme de Saban c’est de s’approcher de certaines formes d’art : orientalistes, brutes, surréalistes, cloches (jadis) tout en les tenant à distance par sa peinture même qui les avale, qui les digère, qui les régurgite parfois. Au profit de son propre programme, violenteur de syncrétisme.

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Alors pourquoi ce clin d’œil appuyé à la cantonade privée et institutionnelle, si ce n’est que l’on cherche à transformer celle-ci en acheteuse? Je ne connais rien au business mais il me semble que c’est d’abord par la mise en valeur des qualités propres à un peintre qu’on risque de lui gagner un public pécunieux. Et non en l’inscrivant, plus ou moins judicieusement dans ce qui est devenu aussi un phénomène de mode.

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01.06.2014 | Lien permanent

Les marcheurs du Trégor

Le Trégor est un trésor. Cette province bretonne est pleine de clochers qui ressemblent à des poissons-scie. On s’arrête (sans jeu de mots) parce que ça gargouille dans les nuages.

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Le temps de photographier une bande de singes de pierre qui ont l’air d’engueuler les fleurs du parvis.

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On en oublierait presque ce drôle de paroissien qui s’achemine vers l’église sur ses longues jambes bleu-ciel.

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N’était son air  farouche, on lui demanderait bien qui a fait son gilet rouge et son chapeau noir traditionnel réalisé avec une ardoise plate et un pot en plastique.

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C’est le jardinier de la commune, l’auteur de cette sculpture si judicieusement mise en scène.

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Je tiens l’information d’une de ses concitoyennes qui promène son chien. «Mais c’est surtout un bon jardinier!» croit-elle bon d’ajouter. Cette remarque un tantinet restrictive suffit à me lancer dans une enquête de terrain, au grand dam de mon chéri qui préférerait aller boire une petite bière Philomenn bien fraîche.

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Que l’art rustique et coloré du jardinier-sculpteur interloque ses contemporains me confirme dans l’idée de son talent natif.

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En cherchant bien, j’ai découvert sur un rond-point à la sortie du bourg, une autre pièce du même type.

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Même sens du mouvement. Même habileté à tirer parti de la forme naturelle d’une branche.

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Même physionomie presque timide due à un traitement savoureusement « primitif » de la gouge.

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Aux dernières nouvelles le créateur de ces « marcheurs » aurait œuvré aussi à l’école. Si j’en apprends davantage, je vous tiens au courant.

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20.06.2014 | Lien permanent

Josefa Tolrà : un fluide vital

C’est toujours au moment de partir qu’on trouve une raison de rester. J’avais déjà un pied dans ma VW de location quand Pascal Hecquer, le libraire de la Halle Saint-Pierre a mis entre mes mains un livre (ou un catalogue ?) sur Josefa.

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Mon petit cœur a fait boum boum devant la ligne serpentine des dessins que j’ai aperçus du coin de l’œil. Mais dehors mon chéri s’impatientait de tailler la route du grand ouest. Je me suis dit que ce serait bien le diable si je ne retrouvais pas les œuvres de cette créatrice médiumnique sur le Net. Aussi à peine mes valises posées dans mon gîte rural sous le vent, à peine mon wifi installé, je me suis offert une dérive virtuelle à la recherche de Josefa Tolrà.

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Et je suis allée de bonnes surprises en émerveillement. Un bienfaiteur de l’humanité brute du nom de Farinagaleta a eu la bonne idée de poster sur Youtube une vidéo. Elle nous balade, au son d’une envoûtante musique soufi (?), dans une exposition de dessins de celle que ses contemporains appelaient volontiers Pepeta Cabrils.

Car la merveilleuse Josefa, dont l’activité artistique couvre les années 1942-1959, habitait Cabrils. Vous savez : une localité située au dessus de Barcelone après Badalona et son camping où vous échouâtes une nuit, faute de place dans les hôtels de la capitale catalane.

Ne remettez pas à plus tard le visionnage de ce film. Zappez plutôt votre boulot. Oubliez d’aller chercher vos enfants à l’école. Il vous en dira plus que je ne saurais vous dire sur la fluidité, l’électricité, le charbonneux lacis des entrelacs, les écailles veloutées des parures de Josefa Tolrà (1880-1959).

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bordados-josefa-tolra.jpgLes figures mystérieuses de cette autodidacte qui commença à dessiner à 60 ans après la perte de deux de ses enfants, intéressèrent en leur temps le poète Joan Brossa, le psychiatre Joan Obiols et le peintre Antoni Tapiès.

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Sa production comprend aussi des châles brodés de toute beauté

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des peintures,

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des poèmes et des livres

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Josefa, qui se croyait médiatrice d’un monde spirituel, mélange les scènes imaginaires, les souvenirs populaires, les visions sacrées et cosmiques.

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Après des années de silence, certaines de ses œuvres, préservées par sa fille parce que «données» à sa mère par des «anges de lumière», sont réapparues récemment aux yeux du public.

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Lors d’une exposition à Mataro qui présentait des pièces venues du fonds du Musée Reina Sofia de Madrid et de celui du MACBA (Musée d’Art Contemporain de Barcelone).

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Le premier d’entre vous qui me dira, devant les créations de Josefa Tolra qu’il y retrouve un petit air de Madge Gill ou (parfois) la structure filamenteuse des encres de Laure Pigeon et bien… je ne lui donnerai pas tort.

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Le surréalisme à la petite semaine

mon oeil.jpgSurréaliste mon œil!

Voilà que je me suis dis en en jetant un (d’œil) sur le communiqué de presse m’informant un peu tard de la participation du Musée de la Création Franche à la Semaine surréaliste organisée par le Théâtre de la Rencontre à Bordeaux.

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Non que je trouve illicite qu’on veuille gratouiller aujourd’hui encore les liens entre surréalisme et art brut mais j’ai sursauté, je l’avoue, en apprenant que dans l’exposition éphémère (du 7 au 12 avril 2014) montée pour l’occasion au Musée de Bègles on notait la présence de Simone Le Carré Galimard parmi des épigones ô combien tardifs du mouvement dirigé par André Breton. Certes SLCG a la réputation d’avoir réalisé des reliquaires (qu’elle appelait plutôt des boîtes) mais s’il suffisait de fabriquer des reliquaires pour être surréaliste alors les carmélites le seraient et réciproquement.

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J’ai déjà eu l’occasion de vous toucher deux mots par ci par là à propos de l’œuvre et de la personnalité de cette artiste dont la floraison tardive s’épanouit en bouquet final dans les années 90. Ses assemblages où dominent les plastiques colorés, ses collages à fragmentation d’images de jolis corps féminins nus et parcellisés, ses masques et pantins d’un primitivisme moderne mariant ingénuité et dextérité sont visibles en grand nombre à la Fabuloserie.

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Plutôt que la rue Fontaine ou la brasserie Cyrano, c’est l’atelier de Germaine Richier dont elle fut la massière,

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c’est La Palette, rue de Seine que Simone Le Carré fréquenta.

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Pas plus que de Montaigne et la Boëtie, elle ne fut l’amie de Dali, de Miro, de Ernst ou de Man Ray. Simone fut la confidente de Yolande Fièvre, dans un rapport de proximité avec Jean Paulhan, par ricochet.

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Les peintres Jean Criton

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et Dominique d’Acher

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qui exposèrent avec Bernard Réquichot

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lui furent par ailleurs chers. Ce n’est pas là le premier cercle de famille du surréalisme! Aussi n’est-il pas surprenant que ce fût en se détournant de celui-ci que Simone Le Carré accédât à ce qui fit sa spécificité.

tranche lautréamont recto.jpgAbandonnant les dessins à la plume et les compositions qu’elle projetait pour une illustration des Chants de Maldoror,

 

dessin SLCG.jpgSimone se lança témérairement dans sa voie de corrosion et de conglomération, sa voie de colle irrespirable et de matières fondues, de papiers froissés et de colifichets rescapés de la décharge.

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Elle touche ce faisant, par des moyens qui ne doivent pas tout au hasard, à un onirisme de fond, à un gisement structurel intérieur qui se distinguent du petit gibier de l’automatisme de surface dont se contente trop souvent un surréalisme quasi centenaire épris de métaphores littéraires, d’étrangetés séduisantes et de théâtralité des images.

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05.04.2014 | Lien permanent

Préempter l’art brut

lion rugissant.jpgDans la jungle de nos villes, le lion de l’État n’est jamais mort ce soir.

Non content de rugir des taux de TVA intimidants, il arrive qu’il ôte carrément de la bouche du collectionneur sa pauvre proie capturée en vente publique. catalogue saison 3.jpg

C’est ce qui est arrivé récemment lors de la Saison 3 d’une vacation Beaux-Arts à la Galerie rue Visconti. 

Un de ces effrontés guépards qui courent derrière la moindre feuille volante qui passe, avait réussi à mettre la patte sur les Cinq petits inventeurs de la peinture.

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Sans trop s’essoufler car les guépards, s’ils ont de l’appétit, manquent de thune sur la fin, c’est bien connu. Pour ce modeste papier plié en deux, notre infortuné enchérisseur avait pourtant de la réserve. C’est que ce tract-présentation d’une exposition lilloise de 1951 à la Librairie Marcel Evrard promettait la substantifique moëlle de Paul End (Paul Engrand),

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Photo : Collection de l'art brut

Alcide, Liber, Gasduf (Gaston Duf),

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Photo : Collection de l'art brut

Sylvocq (Sylvain Lecocq),

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Photo : Collection de l'art brut

figures de l’art brut des origines, issus de l’Hosto Psy de Lommelet. De quoi saliver quand on a la fièvre acheteuse! Hélas, le coup de marteau fut suivi d’une claironnante «préemption» et notre guépard dut rentrer à la niche en maugréant.

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Pour ceux qui l’ignorerait encore, la préemption est un droit régalien permettant à une collectivité publique, musée, archives (ou comme ici bibliothèque) d’acquérir en priorité un bien acquis aux enchères par un particulier. Rien à redire à ça puisque c’est la loi. Dura lex sed lex.

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N’empêche qu’il n’est de loi qui ne s’applique avec doigté. Comme le dit Fabien Bouglé dans sa note sur Le Bon usage de la préemption parus dans Les Lois du marché sur le site de La Gazette de l’Hôtel Drouot : «En principe, la préemption, procédure exceptionnelle, n’est possible que pour les biens représentant pour la collectivité un intérêt majeur. (…). Si le bien est plus commun, l’État ou les collectivités publiques réaliseront leur achat comme un acheteur ordinaire, en entrant dans le jeu naturel des enchères».

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Les amoureux de l’art brut seront ravis de constater que les Cinq petits inventeurs qui montèrent le samedi 5 avril 2014 jusqu’à la somme astronomique de 110 € (cent dix malheureux euros, vous avez bien lu !) furent considérés par la Bibliothèque Kandinsky, le préempteur, comme un bien d’un intérêt majeur. Même si le texte de Jean Dubuffet qui y figure est parfaitement accessible dans le tome 1 (pages 509-511) de Prospectus et tous écrits suivants publié à grand nombre par Gallimard.

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La morale de cette histoire, je l’emprunte à cet écrit : «On appelle sain et raisonnable l’homme qui adhère totalement au mythe collectif». Et je la dédie à ceux qui, parmi les marchands d’art, seraient tentés de multiplier les clins d’œil aux institutions pour qu’elles affectent leurs maigres crédits à cet art brut dont elles ne voulaient pas hier et qu’elles vont enterrer aujourd’hui.

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10.04.2014 | Lien permanent

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