21.10.2012
Encore 3 jours pour les Ephémères de Zloty
J’ai reçu le carton trop tard. Zut, zut et rezlut! Je t’en ficherais du J+2 de la «lettre verte»!
J’ai donc loupé le vernissage en présence de l’artiste le 13 octobre à la Galerie Mathgoth. Et puis, j’avoue, j’ai pas fait gaffe que l’exposition se terminait si tôt.
Je croyais avoir un mois devant moi et en fait j’ai plus que jusqu’au jeudi 25 octobre 2012 pour rencontrer les Ephémères de Gérard Zlotykamien. Donc ça urge si on veut renouer le contact avec ce précurseur français de l’art urbain qui cultive sa solitude et s’accommode généralement fort bien d’un décalage avec le marché.
C’est plus souvent sur les murs de notre village mondial que dans les hauts lieux des mondanités ordinaires que l’on croise les silhouettes flageolantes, évanescentes et émouvantes sans pathétique, de Zloty. Elles s’originent des «fantômes» irradiés d’Hiroshima, l’artiste ayant commencé ses bombages dès les années soixante du meurtrier vingtième siècle.
Sa fascination pour les villes mortes et pour les lieux improbables lui a fait choisir le trou des halles à Paris, les quartiers en ruines de Leipzig, le Berlin de la chute du mur, le sol des townships de l’Afrique du sud pour mettre en situation ses «habitants anonymes».
Gérard Zlotykamien, à ce sujet, se souvient d’une parole de Claude Wiart (1929-2004), psychiatre dont l’activité au service de «l’art des fous» reste influente aujourd’hui : «on écrit toujours pour quelqu’un qu’on ne connaît pas». Cette remarque, dit Zlotykamien «s’applique aussi à l’art des rues». Selon lui, «on peint toujours pour quelqu’un qu’on ne connaît pas» (c’est à dire : pas pour une clientèle, si on me permet ce grain de sel animulien). «Le double anonymat fait la force de cet art».
A priori Gérard Zlotykamien n’avait cependant rien pour être ma tasse de thé. La notice Wikipédia nous le classe dans la même petite cuiller que Daniel Buren. De quoi passer sans le voir. Mais il faut prendre Wiki avec des pincettes. Fort heureusement mon attention sur Zloty avait été attirée par un ouvrage paru à L’Escampette en 2002 : Zlotykamien, un artiste secret sur la place publique.
Comme il est de Michel Ellenberger, un auteur dont j’ai déjà signalé la plaquette bleue sur Raymond Isidore (voir mon post du 19 août 2012 : Maison Picassiette, y’a pas photo!), je me suis dit qu’il y avait peut-être anguille sous roche. Et j’ai bien fait. Certes, le travail de Zloty ne saurait être enrôlé dans une catégorie telle que l’art brut.
Ne serait-ce que parce que ses techniques de repérage de sites (usines désaffectées, abattoirs abandonnés) et ses essais préalables en atelier supposent une préparation mentale qui n’est pas prépondérante chez les créateurs d’art brut à l’exercice.
Mais par sa lutte avec le matériau qui lui sert de support, par sa préférence pour l’in-situ, par son action nécessairement foudroyante, l’art de Zloty, peut-être parce qu’il se source à l’histoire des déracinés, des persécutés, des victimes, regarde du même côté que l’art brut.
Aujourd’hui où la mode est de nous rebattre les oreilles avec des confusions aberrantes (et soi-disant indispensables) entre l’art brut et la chimère de «l’art contemporain», les Ephémères de Zlotykamien glissent dans la pantoufle de verre de nos convictions trop établies le petit caillou d’une rare mais possible connexion.
Qu’ils en soient remerciés!
21:21 Publié dans De vous zamoi, Expos | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : gérard zlotykamien, galerie mathgoth, michel ellenberger | | Imprimer | | |