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21.11.2006

Visitez l’atelier d’Adriano e Michele

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Vous allez dire que je souffre de manie ambulatoire. C’est vrai qu’à force de godailler de droite et de gauche sur la toile, j’ai la tête qui tourne comme si j’avais bu une demi douzaine de bières à la tequila.

Le résultat cependant en vaut la peine. On se fait de nouveaux amis. Aujourd’hui,  Adriano et Michele m’ont invitée (moi et tous mes petits Animuliens) dans leur atelier situé près de Milan.

Dans le prolongement de mes récentes notes à propos de Jules Leclercq et de Katharina Detzel, je cherchais frénétiquement des sites offrant aussi des comparaisons entre art brut et arts homologués dans le champ culturel, spécialement si ces derniers avaient l’air d’avoir servi de tremplin au premier.

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medium_autoportrait_Durer.jpgEt fatalement, je suis tombée sur les très déconcertants et admirables travaux de Curzio Di Giovanni qui dessine des portraits un peu comme Richard Greaves (dé)construit des maisons. Allez donc dans la section Collection du site de l’Atelier di pittura Adriano e Michele pour vous rendre compte. Si vous êtes des petits francaouis pure laine, soyez sans crainte : ce site transalpin nous fait l’honneur d’être rédigé dans la langue de Molière.

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Les œuvres de Curzio Di Giovanni, qui fréquente l’Atelier depuis 2001, sont juxtaposées aux autoportraits de Dürer et de Cézanne ainsi qu’à la Schiava turca (l’esclave turque) du Parmigianino ayant servis d’amorces plutôt que de «modèles» à proprement parler.

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On pourrait écrire une thèse, mais rassurez-vous je vous l’épargnerai, sur les opérations de transmutations qui ont conduit des unes aux autres.

L’Atelier di pittura A e M a été créé «pour le défi d’installer une expérience artistique dans un lieu habité par le malaise psychique». C’est le Centre Fatebenefratelli de San Colombana al Lambo qui l’abrite depuis 1996. Il dispose d’un espace expo créé en 2003 pour valoriser et conserver les œuvres les plus significatives.

Mais l’historienne d’art Tereza Maranzano (elle participe à la réalisation du prochain Cahier de l'Art brut avec un article sur Di Giovanni) et l’éducatrice Gabriella Vicenti qui s’occupent de l’Atelier vous expliqueront très bien ça elles-même quand vous leur rendrez visite.

17:20 Publié dans Ailleurs, Expos, Images | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : curzio di giovanni, art brut | |  Imprimer | | Pin it! |

Commentaires

Un petit tout en retour de Martian Shaker. Ce site est passionnant et je m'arrête avec délices sur ces portraits, de toute beauté.
Je me permettrai de faire figurer ce blog en lien permanent. Bravo.
A bientôt

Écrit par : martian-shaker | 08.12.2006

J'ai comme l'impression que ces jeux de confrontation entre art consacré et créateurs autodidactes vivant "un malaise psychique" semblent devenir (ou être devenus, depuis quand cela dure-t-il?) une sorte de passage obligé, comme un poncif en formation au sein des ateliers de peinture des hôpitaux... Ces travaux font penser à l'atelier du home de la Pommeraie animé par Bruno Gérard en Belgique du côté de Tournai je crois... Vous connaissez sûrement déjà les oeuvres d'Alexis Lippstreu qui se livre depuis déjà un bon bout de temps à des réinterprétations d'oeuvres muséales?
BM.

Écrit par : Bruno Montpied | 08.12.2006

La dernière remarque de B Montpied me paraît très juste: certains animateurs d'atelier (qui ne sont pas "formés" et c'est souvent le cas) ont tendance à emmener leurs troupes dans les musées et à faire des séances d'atelier "à partir" de ce qui a été vu - ou à organiser des séances de diapos ou de plongées dans des livres d'art. Histoire de "ne pas partir de rien", ce qui doit les angoisser car ils ne savent pas quoi en faire...
Ce "mouvement" date de quelques années seulement. Il y a eu une "mauvaise rencontre" entre le développement des ateliers dans les institutions et l'introduction de la "Culture à l'hôpital" avec confusion des genres. L'administration ayant "naturellement" confié la Culture aux animateurs d'atelier qui leur semblait tout désignés pour cela .
Ceci étant, cela n'enlève rien à l'intérêt des documents que vous avez montrés et qui mériteraient en effet une thèse sur les transmutations opérées. Dans d'autres cas cela donne des résultats ....moins probants!

Écrit par : Béatrice Steiner | 08.12.2006

Pendant des longues années, Curzio Di Giovanni a dessiné spontanement, sur des feuilles de papiers qui parsemait partout, deux sortes de figures stéréotypés: un portrait et un paysage. Cela jusqu'au jour où on lui a montré à l'Atelier des illustrations différentes et on lui a proposé de les représenter, ce qui a produit un declic et l'a amené par la suite à oublier ses stéreotypies. Les modéles de départ, qu'il élabore avec son personnel style graphique, sont puisés dans l'Atelier autant dans les livres d'histoire de l'art que dans toute sorte de magazines d'aujourdh'ui. Aux yeux de cet auteur, comme de Alexis Lippstreu, il s'agit tout simplement d'images avec lesquelles il se confronte avec un jugements esthétiques qui lui est propre. Le détournement d'image d'après le modèle reste un jeu passionnant plus pour nous, observateur avisés, que pour les auteurs en question. Cela dit, je ne comprends pas cette démonisation de l'art: les musées comme les livres illustrés se sont des lieux où on peut baigner dans la beauté des images, avec toute la liberté d'en tirer ce qu'on veut par la suite: ce que tous les auteurs d'art brut, comme tous les artistes en general, on toujours fait. Où est le problème? Et si ce n'est pas dans les livres et dans les musées, on n'est pas confrontés à longueur de journée par toute sorte d'images ? Ces hierarchies sont les nôtres, le vôtres, non pas celles des artistes.

Écrit par : Teresa | 11.12.2006

@Teresa
Vous avez raison, il est possible que, pour un auteur d'art brut, une publicité pour la soupe soit égale à la Joconde. Eux comme nous baignent dans les images mais quand ils s'en servent, ils n'en font pas le même usage. Leur propos n'est pas de s'inscrire dans un système de références admises par la culture de leur temps. Ni même de chercher volontairement à subvertir ce système en affublant Mona Lisa de moustaches. Ils obéissent à un impératif catégorique. Ils oeuvrent sous la dictée d'une logique interne, implacable et inouïe qui n'a rien à voir avec les pensées collectives. C'est pourquoi je ne vous chipoterai que sur un mot, celui de "liberté". Dans les cas les plus purs, les créateurs d'art brut n'en ont aucune. C'est ce qui les distingue des "artistes". Tant mieux si grâce à votre action M. Curzio Di Giovanni a pu oublier ses stéréotypies mais ce qui me frappe c'est que son style ait gardé son originalité sidérante devant les "illustrations différentes" que votre atelier lui a offert. Sans doute parce que vous avez su ne pas lui infliger de superflus apprentissages ou lui suggérer de réductrices conduites d'imitation.
Bon, j'en vois qui dorment et moi-même j'ai eu une une dure journée ayant été coincée dans l'ascenseur du métro avec 50 autres victimes et 2 litres d'oxygène. Alors assez de philosophie et à la soupe! Ce soir : de la Chorba.

Écrit par : Animula | 11.12.2006

Merci, chère ani, de me ramener à la légerté qui me fait parfois défaut.

Écrit par : Teresa | 12.12.2006

Les auteurs d'art brut n'avaient aucune liberté, dites-vous Animula? Les anciens auteurs avaient au moins une liberté, celle de n'avoir aucun animateur d'atelier pour leur donner des conseils.
Ce qui nous intéresse dans ce que l'on croit pouvoir isoler sous le terme d'art brut, c'est de savoir si oui ou non existe une création surgissant de nulle part, ou plus exactement d'une pure imagination, d'une pure électricité gestuelle. Lorsqu'il y a un animateur entre le créateur et sa production, on ne sait plus d'où vient la création.
Cela dit, je ne crois pas que cela existe, la pure imagination, et je serais d'accord avec Teresa pour dire qu'il est idiot de "démoniser" les dialogues avec la culture qui nous traverse sans arrêt, même lorsqu'on est autiste, je parie...(ceci dit pour répondre à un texte que j'ai lu récemment sur le site web de l'Aracine). Mais tout amateur de création se passionnera pour l'idée d'une création des plus pures, c'est un rêve qui fait tout son honneur. Ce qui caractérise l'art dit brut, c'est qu'il y a eu de la liberté à un moment, au moment de la création justement, peut-être s'y est-il retrouvé, dans cet acte de création, tout ce qui pouvait rester de liberté possible chez le créateur aliéné (à tous les sens du terme, je ne pense pas qu'aux pensionnaires des hôpitaux psychiatriques). En proposant des images aux créateurs fréquentant les ateliers, on ne leur impose rien, j'en suis sûr, mais on les influence, on leur dit quelque chose qui détourne leur attention, avec laquelle ils se mettent à composer. Qu'auraient-ils fait si personne ne s'était occupé d'eux?
BM.

Écrit par : Bruno Montpied | 13.12.2006

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