06.09.2008
Ovartaci : Brut et Danois
Ovartaci, super créateur d’art brut Danois, comptait Asger Jorn parmi ses inconditionnels. Son œuvre n’en demeure pas moins méconnue. Aussi devant son nom, aperçu dans le dernier numéro de Raw Vision (64, autumn 2008, p. 69), j’ai poussé un «glop-glop» de plaisir.
La lecture de la brève de John Maizels, relative au bouquin de Johannes Nielsen : Ovartaci, Pictures, Thoughts and Visions of an artist, m’a rappelé mes vacances 2003 au Danemark où j’étais grimpé pour mettre mon daddy à l’abri de la canicule.
Je vous ferai une autre fois le récit de mes rencontres brutes dans la lumineuse fraîcheur du Jutland, sachez seulement qu’à Århus, en excursionnant au musée de l’hopital psy, j’ai eu le choc de ma vie (enfin, l’un des chocs) en rencontrant les insidieuses, longilignes, félines, inquiétantes et sexuelles créatures d’un peintre, sculpteur schizophrène qui demeura là 56 ans, chouchouté par une équipe soignante qui admirait son travail artistique.
A l’époque de ma visite, la version en anglais du livre de Nielsen, le psychiatre d’Ovartaci, n’existait pas. L’auteur m’avait gentiment dédicacé la version originale mais j’avais dû me contenter, par ignorance danistique, d’en lire le titre : Ovartaci, En kunstners billeder tanker og visioner.
Dommage pour vous ! J’aurais pu vous en parler plus tôt. Il est vrai que je vous cause d’un temps où votre petite âme errante n’existait pas ! Imaginez le monde sans Animula Vagula… Fermons la parenthèse.
J’aurais pu vous dire le frisson fantastique que c’était de découvrir ces peintures et ces sculptures terribles et ce non moins étrange mobilier peint où dominent les thèmes ésotériques à base de métamorphoses femme-animal.
J’aurais pu vous parler de ces foules tout en flammes où crépite le feu ardent de la psychose, de ces cauchemardesques et fascinantes scènes en abîme, peuplées d’entités femelles à la taille de guêpe, aux ailes de libellule et aux yeux égyptien-reptilien.
On vit plus d’une vie avec Ovartaci. Lui-même voyageait sans arrêt au gré des réincarnations dont il se souvenait. Dans cette vie, il s’appelait Louis Marcussen de son vrai nom, avait vécu en Argentine, était calé en bouddhisme. Longtemps yogi, son désir de maîtrise sur son corps l’avait sans doute conduit à une automutilation qu’il évoque dans un chapitre du livre de Nielsen, en commentant l’un de ses tableaux : Naked bathing girls.
Son esprit toujours occupé de migration d’un sexe dans l’autre, Ovartaci parle volontiers de lui-même comme d’une petite fille. Il se décrit aussi comme un «virul», le représentant d’un 3e sexe.
Sa façon de tout ovartaciser séduisit Jean Dubuffet qui s’intéressa à son cas grâce à son copain Asger Jorn.
Asger Jorn et Jean Dubuffet en 1961
Photo : Musée de Silkeborg
Ce grand artiste Cobra-Situ, fit cadeau de deux pièces d’Ovartaci à la Collection de l’Art Brut de Lausanne.
A ma connaissance, on ne les y montre pas. Est-ce parce qu’en 1979 Ovartaci participa à l’Exposition Outsidere au trop fameux centre d’art contemporain de Louisiana ?
Si c’était le cas, le temps ne serait-il pas venu de rectifier le tir ?
21:39 Publié dans Gazettes, In memoriam, Vagabondages | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ovartaci, art brut, asger jorn, jean dubuffet | | Imprimer | | |
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