10.09.2008
Ovartaci : poète aussi
Des fois que l’accélérateur de particules nous fasse un trou noir dans la nuit, je m’empresse d’ajouter un petit bonus à ma note sur Ovartaci en vous présentant ses «Poems to the future» publiés par la Fondation O (Ovartaci Fonden) sous le titre Ovartaci’s secrets. Car Ovartaci était aussi poète. Un échantillon :
Come !
See
This World
In twilight
And incoherent as the night
In the beginning.
Where the mad and the wise women
Are outside time.
Johannes Nielsen, qui préface le recueil publié en 2006, ignore quand Ovartaci a écrit ses poèmes. Dans les années 40 ou 50 du siècle dernier, probablement. Et en espagnol, langue qu’O, qui avait séjourné en Argentine, pratiquait. Malheureusement Nielsen ne nous donne pas la version originale.
Pourquoi «secrets» ?
Parce que ces poèmes ont été retrouvés par hasard, 14 ans après la mort de leur auteur, dans la caboche ovoïde de l’une de ses sculptures pendant une restauration.
A ce que j’ai compris – mais le texte de Nielsen n’est pas des plus clairs – une autre créature d’Ovartaci, camouflée en paysanne sous une robe-kimono, abritait aussi à la place de son cerveau, un joli petit mécanisme avec courroies, rouages et mots magiques sur bristol.
Encore une citation avant l’irruption de l’anti-matière (?)
Women of perspicacity
See
That the world
Is merely a place
For experiences
And denial .
They are granted
Nothing more.
Everything in the world will end
In emptiness and facade.
23:55 Publié dans Poésie naturelle | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : ovartaci, art brut | | Imprimer | | |
06.09.2008
Ovartaci : Brut et Danois
Ovartaci, super créateur d’art brut Danois, comptait Asger Jorn parmi ses inconditionnels. Son œuvre n’en demeure pas moins méconnue. Aussi devant son nom, aperçu dans le dernier numéro de Raw Vision (64, autumn 2008, p. 69), j’ai poussé un «glop-glop» de plaisir.
La lecture de la brève de John Maizels, relative au bouquin de Johannes Nielsen : Ovartaci, Pictures, Thoughts and Visions of an artist, m’a rappelé mes vacances 2003 au Danemark où j’étais grimpé pour mettre mon daddy à l’abri de la canicule.
Je vous ferai une autre fois le récit de mes rencontres brutes dans la lumineuse fraîcheur du Jutland, sachez seulement qu’à Århus, en excursionnant au musée de l’hopital psy, j’ai eu le choc de ma vie (enfin, l’un des chocs) en rencontrant les insidieuses, longilignes, félines, inquiétantes et sexuelles créatures d’un peintre, sculpteur schizophrène qui demeura là 56 ans, chouchouté par une équipe soignante qui admirait son travail artistique.
A l’époque de ma visite, la version en anglais du livre de Nielsen, le psychiatre d’Ovartaci, n’existait pas. L’auteur m’avait gentiment dédicacé la version originale mais j’avais dû me contenter, par ignorance danistique, d’en lire le titre : Ovartaci, En kunstners billeder tanker og visioner.
Dommage pour vous ! J’aurais pu vous en parler plus tôt. Il est vrai que je vous cause d’un temps où votre petite âme errante n’existait pas ! Imaginez le monde sans Animula Vagula… Fermons la parenthèse.
J’aurais pu vous dire le frisson fantastique que c’était de découvrir ces peintures et ces sculptures terribles et ce non moins étrange mobilier peint où dominent les thèmes ésotériques à base de métamorphoses femme-animal.
J’aurais pu vous parler de ces foules tout en flammes où crépite le feu ardent de la psychose, de ces cauchemardesques et fascinantes scènes en abîme, peuplées d’entités femelles à la taille de guêpe, aux ailes de libellule et aux yeux égyptien-reptilien.
On vit plus d’une vie avec Ovartaci. Lui-même voyageait sans arrêt au gré des réincarnations dont il se souvenait. Dans cette vie, il s’appelait Louis Marcussen de son vrai nom, avait vécu en Argentine, était calé en bouddhisme. Longtemps yogi, son désir de maîtrise sur son corps l’avait sans doute conduit à une automutilation qu’il évoque dans un chapitre du livre de Nielsen, en commentant l’un de ses tableaux : Naked bathing girls.
Son esprit toujours occupé de migration d’un sexe dans l’autre, Ovartaci parle volontiers de lui-même comme d’une petite fille. Il se décrit aussi comme un «virul», le représentant d’un 3e sexe.
Sa façon de tout ovartaciser séduisit Jean Dubuffet qui s’intéressa à son cas grâce à son copain Asger Jorn.
Asger Jorn et Jean Dubuffet en 1961
Photo : Musée de Silkeborg
Ce grand artiste Cobra-Situ, fit cadeau de deux pièces d’Ovartaci à la Collection de l’Art Brut de Lausanne.
A ma connaissance, on ne les y montre pas. Est-ce parce qu’en 1979 Ovartaci participa à l’Exposition Outsidere au trop fameux centre d’art contemporain de Louisiana ?
Si c’était le cas, le temps ne serait-il pas venu de rectifier le tir ?
21:39 Publié dans Gazettes, In memoriam, Vagabondages | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ovartaci, art brut, asger jorn, jean dubuffet | | Imprimer | | |