Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

19.12.2012

Sur la route de Plouhinec

Bientôt Noël et à Noël on illumine. Dans son micro-jardin de Riantec, Marie-Louise allume son lampadaire aux gargouilles. «Allume» ou «allumait» : on est toujours dans le Morbihan et encore en 1996.

14.jpg

Les vieilles photos me disent que sur la route de Plouhinec, avant le croisement avec la rue de la Fontaine, protégé par une clôture dont les piliers étaient ornés de tortues renversées, il était un triangle fleuri où évoluaient de petites créatures de ciment peint. Une dame et son chien (premier sujet réalisé dans les années soixante)

27.jpg

une laitière et son pot au lait, un meunier, le pêcheur à la ligne, l’incontournable sirène,

sirène.jpg

un cavalier, un chasseur.

04.jpg

Et puis des animaux, bien sûr. Les créateurs ruraux, du genre de cette petite dame frêle, originaire de l’île de Kerner, aiment les animaux.

19.jpg

«100 % gauchère», obstinée bien que «ça ne soit pas un travail de femme», Marie-Louise avait petit à petit façonné le cheval pommelé, une chèvre, un daim, le fennec en souvenir de celui que son fils avait ramené vivant du Sahara.

fennec.jpg

Le paon, dernier en date, qu’elle avait réalisé «avant la mort de sa mère» (c’est ainsi qu’elle datait) neuf ans auparavant. Puis sa vue avait baissé. Marie-Louise, qui ne s’appelait pas Marie-Louise mais qui n’aimait pas son prénom proustien d’Albertine, avait «presque honte» de dire que c’était elle qui avait ainsi agrémenté son environnement. Mais, que voulez-vous? Elle était «douée pour ça».

riantec paon.jpg

Et cette Bretonne douce, fragile, «maladive» selon son propre aveu, faisait ce qui lui plaisait. Même si son entourage s’inquiétait quand elle en faisait trop. Une bonne raison à cela : quand elle était préoccupée par un sujet à réaliser, elle ne pouvait pas dormir, «tout était programmé» dans son cerveau.

15.jpg

Ce programme ne l’entraînait cependant pas à de grandes choses. Marie-Louise bornait son inspiration aux dimensions de ses statues. Sans doute se croyait-elle géante auprès de ces Liliputiens.

meunier.jpg

Le vent lui était commode prétexte à modestie. «On est très éventé ici» disait-elle. Plus hauts, ces personnages auraient dûs être arrimés. La brume parallèlement «empoisonnait» ses hortensias. Des rigueurs de la nature, elle déduisait sans peine une esthétique : «Je les trouve plus jolis à même le sol».

m louise ombrelle.jpg

Timide dans ses sabots (à 80 ans elle avait «refusé» FR3), Marie-Louise était contente tout de même «qu’on s’intéresse». Vite pour la photo, elle était allé chercher le parasol qui manquait à une élégante assise sur son banc.

dame ombrelle.jpg

09.12.2012

Mon salut au Mont-Salut

C’est plus fort que moi, faut que je cède à la pub ! Alors quand j’ai vu qu’un «service Digital Solutions» me proposait pour un «prix spécial Noël» de redécouvrir mes souvenirs en les transférant sur DVD, j’ai fouillassoné dans le tas de diapos et autres vieilles pelloches en déshérence chez mon daddy. Non pour le plaisir de me voir avec quelques années et kilos en moins dans des fringues pas possibles mais dans le but de me lancer rétrospectivement à la poursuite du diamant vert de l’art sans entraves.

diapos.jpg

D’un mois de mars breton, gla-gla à souhait et bruineux à cœur, j’ai retrouvé des images qui ont déjà l’âge d’une teenageuse d’aujourd’hui. En clair : elles datent de 1996 et ont été récoltées près d’Auray dans le Morbihan.

ste anne ex votos.jpg

On m’avait traînée dans ces parages pour voir -culture oblige- la basilique de Sainte-Anne. Je m’étais intéressée surtout au Trésor d’objets offerts en remerciement à la sainte.

A cause des épingles à nourrice rouillées, avalées puis regurgitées sans dommage par des bébés de la fin du 19e siècle. Sur la route du retour, un petit bar dans une petite commune avait attiré notre attention par sa population de géants avoisinants.

63.jpg

Les créatures de souches assemblées là par vissage et clouage étaient plus exubérantes que leur créateur qui finit par se manifester quand il comprit qu’on s’éternisait devant. Plutôt du genre taiseux, l’artiste! Menuisier de formation, natif du lieu, André Morvan possédait l’art de disparaître sans qu’on s’en aperçoive.

André Morvan

Quand il fut question de portrait, il s’éclipsa pour changer de chandail et se munir d’une casquette. A nos questions, il répondit brièvement, en gars qui n’a rien demandé.

André Morvan

Le tapis roulant de la route à 3 voies devant sa porte lui convenait bien. Généralement, les touristes n’avaient que le temps d’apercevoir ses musiciens, ses danseuses, ses animaux d’une rusticité préhistorique. Pas celui de s’arrêter pour leur parler.

vue générale.jpg

«On lui demande de les acheter ou de les prêter pour un théâtre», nous lâcha Morvan du bout des lèvres en parlant de ses statues qu’il n’appelait pas «des statues». «Mais il ne les laisserait pas partir» ajouta-t-il, au cas où nous aurions eu besoin d’un avertissement.

André morvan n&b.jpg

Il a tenu parole puisqu’il s’en occupe encore aujourd’hui comme un reportage récent sur le blogue de Jean-Michel Chesné nous l’a montré. Pas plus loquace sur ses techniques que sur le reste, André Morvan consentit tout de même à nous apprendre qu’il usait d’huile brûlée pour la conservation de ses sujets en bois exposés à tous les caprices du ciel.

André Morvan

Quand il nous quitta subitement, la lumière baissa. On s’acharna cependant à mitrailler le site de nos kodaks. Déjà le crépuscule venait qui révélait le côté fantastique de celui-ci.

André Morvan