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Идеальный дворец Почтальона Шеваля
Quel dommage que je comprenne pas le russe! Je suis même infoutue de vous traduire le titre du film ni de savoir qui qui l'a fait. Mais voilà que Cheval nous parle en cette langue et ça se laisse regarder. Tout de même si quelqu'un peut décoder, qu'il n'hésite pas...
15.02.2010 | Lien permanent | Commentaires (5)
Art enfantin pour Saint-Valentin
Saint-Valentin tombant cette année un dimanche, mon chéri-que-j'ai m'a offert avec un peu d'avance une théière à la brocante des Journées d'amitié de l'église Saint-Pierre de Neuilly.
Bon, ça ne l'a pas ruiné et puis j'en ai déjà 36 mais pas des comme ça. Je veux dire illustrée par un enfant. Les chineuses autour de moi, les bras chargés de petites cuillères en argent me regardaient avec pitié. Les dames de la paroisse, en parfaites chrétiennes, ont essayé de me consoler : «c'est un débutant qui a fait ça». On voyait bien qu'elles me plaignaient un peu mais qu'elles m'étaient reconnaissantes de les débarrasser d'un rossignol.
Je suis partie dans la neige, fière comme d'Artabanne, néanmoins. Je préfère 1000 fois ces petites productions maladroites à toutes les chichiteries d'antiquités pour lesquelles les dadames (même bien pensantes) se tirent la bourre. Elles sont parfois pas loin de l'art populaire (les œuvres enfantines, pas les Neuilléennes). Elles font penser à l'art brut même si, bien entendu, ce n'en sont pas. Faudra un jour qu'on parle sérieusement de l'art enfantin, vous et moi. Je me documente sur la question (avis à toutes les copieuses qui me sucent la roue).
A la vente des paroissiennes de Neuilly, je vous recommande les petits gâteaux-maison et la librairie éphémère. Avec le nez qui me caractérise, je me suis dégoté et payé avec ma thune une petite brochure de rien du tout, préfacée par le surréaliste Pierre (pas le saint), José de son prénom. C'est un catalogue de la galerie Le Ranelagh. Normal, le 16e, ça fonctionne bien avec Neuilly. Une galerie qui mériterait qu'on se penche sur son passé mais là j'ai pas le temps.
L'expo présentée, c'est là que je reviens à mes moutons, s'intitule : Dessins, peintures des enfants de Peyrelevade et Millevaches. Hallucinant comme les choses s'enchaînent, non? C'est à vous faire croire à la providence ou au hasard objectif. Il y a là-dedans des repros qui se laissent regarder comme cette drôle de fleur enceinte d'un cocon.
Pour les nuls et les nulles (comme moi) je vous dirai que la notice wiki nous apprend que Peyrelevade (Peira levada en occitan) est un gentil bled limousin sur le plateau des Millevaches en Corrèze.
Exceptionnellement le catalogue de José Pierre n'oublie pas de nous donner les noms des petits dessinateurs auteurs de ces images réalisées durant l'année scolaire 1966-67. Un bon point pour lui qu'apprécieront les amateurs de réseaux sociaux. Ohé, les Copains d'avant, retrouvez les Marguerite, Yveline, Serge, Marie-Ange, Marcel (classe des moyens) ou les Régine, Marie-Noëlle, Philippe, François, Georges (classe des petits).
Je lâche pas la rampe sans vous dire qu'à Aix-en-Provence se tient en ce moment et jusqu'au 4 avril 2010, à la galerie d'art du conseil général des Bouches-du-Rhône, l'expo L'Enfance de l'art dont je ne sais pas grand chose mais j'aimerais bien. Alors s'il y a des Animuliens aixois dans l'assistance qu'ils se lèvent!
13.02.2010 | Lien permanent | Commentaires (7)
Zéro art brut au Schizomètre carré
Schizomètres : une idée rigolote qui ne méritait pas qu'on s'acharne sur elle au point d'en faire une expo force 10 sur l'échelle du parisianisme, telle m'est apparue la nouvelle présentation de la Maison rouge consacrée à l'œuvre d'un certain Marco, qualifiée «d'art brut» dans le livret distribué à chaque visiteur avec son billet.
L'idée consiste à mettre en relation les numéros de code de deux publications qui n'ont rien à voir ensemble. Le catalogue d'un magasin de surgelés fameux qui fit partie d'une enseigne d'hypermarchés plus fameuse encore (vous voyez ce que je veux dire) et le DSM-IV (moins fastoche à deviner).
Le DSM c'est le Diagnostic and Statistical Manual of Mental disorders, un manuel statistique US utilisé pour étiqueter les troubles mentaux dans les milieux psychiatriques.
Je sais pas si c'est vrai n'ayant jamais été ravagée de la touffe mais Marco Decorpeliada, l'auteur de la toise-étalon et des mètres dépliants supports des équivalences incongrues présentés dans l'expo, si.
Il conduit chacun à en prendre pour son grade suivant les symptômes qu'il s'attribue. Le parano = pommes rissolées (n°de code 60.0), la vaginiste (code 52.5) c'est kif-kif le sauté de veau, le transvestiste fétichiste vaut pour les poireaux émincés à la crème (65.1), l'énurésique = la pizza etc.
«Regard mental léger» langue-fourche-t-il en effet et cet éclair de lucidité colle au poil pour cette expo qui hésite entre le zist de la supercherie et le zest de la fluxuserie. Je n'ai pas croisé d'énurésique fétichiste ou de vaginiste tranvestiste dans l'expo Schizomètres. Tout au plus, sur le chemin, de gentils gothiques qui laissaient leur marque partout.
J'ai rencontré plutôt des gens bien qui gloussaient poliment en faisant sembler de trouver ça intelligent. Et ça l'est! Trop sans doute. Avec Decorpeliada, on nous refait le coup de Bourbaki. Ce nom à la gomme, censé désigner un familier des H.P., auteur d'un journal et de fiches de survie, a été bricolé à partir des noms de membres de l'Ecole lacanienne de psychanalyse : Laurent Cornaz, Dominique de Liège, Yan Pélissier, Jacques Adams et d'un pataphysicien notoire : Marcel Benabou, membre de l'Oulipo.
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Nous y voilà, cette expo pêche par où le bât pataphysicien blesse généralement. Elle commence par une franche rigolade et c'est dommage qu'elle ne s'en tienne pas là. On se lasse vite de cet esprit de sérieux porté dans la dérision à un point systématique. Les tableaux, les diagrammes obsessionnels, c'est vite relou. Le squelette de la fin (allusion à un voyage au Mexique du Marco) c'est un peu mince.
Rien de spontané, rien de fortement inventif dans ces artefacts complaisamment redondants. Tout le monde n'est pas Georges Perec; il manque du grain à moudre dans cet exercice formaliste qui se pare des oripeaux de l'art brut parce que celui-ci est aujourd'hui plus médiatiquement porteur que la pataphysique.
21.02.2010 | Lien permanent | Commentaires (4)
Louis Soutter fait son Marché
Louis Soutter, je vous ferais pas l'injure de vous dire qui c'est. Depuis que son cousin a fait entrer cet «inconnu de la soixantaine» dans le labyrinthe du Minotaure en octobre 1936, ce serait bien le diable si vous n'aviez pas croisé l'un des milliers de feuillets qui ont été publiés sur son compte. Michel Thévoz lui a consacré plusieurs bouquins. Et aujourd'hui, il est même wikipexpédié, c'est dire! Louis Soutter, si je vous en parle, ce n'est pas que c'est ma dernière lubie. Louis Soutter fait son Marché comme Lady Gaga fait bientôt son Palais Omnisports de Paris-Bercy. Je mélange tout, d'accord mais ce que je veux dire c'est que Louis Soutter fait son come-back à la Galerie du Marché à Lausanne le jeudi 25 février 2010 (vernissage) et que c'est un événement qui mérite bien que je vous fasse un peu de teasing.
Pensez un peu : une cinquantaine de dessins de Soutter, pour la plupart montrés pour la première fois, ça mérite peut-être que l'on se bouge, non? Allez-y donc jusqu'au 24 avril 2010, après quoi ce sera plié. Attention : c'est pas tous les jours mais vous vous arrangerez. Le plus tôt sera le mieux pour vous plonger dans cet ensemble représentatif d'une œuvre conçue à l'ombre d'un asile du Jura vaudois.
Louis Soutter est un peintre errant qui m'a toujours impressionné par son air déprimé sous son chapeau à bords roulés, par sa façon de flotter dans des costumes invraisemblablement bourgeois des années 30, lui qui peignait si bien avec les doigts. Si vous ne me croyez pas, visionnez donc ce petit film.
Ah, j'oubliais, le cousin c'était le Corbusier. Et de Soutter, qu'on ne peut confondre avec un créateur d'art brut bien qu'il ait accès aux mêmes territoires de pensée, Corbu disait : «Il a appris à regarder en dedans. Par lui, nous pouvons regarder dedans un homme. Un homme racé, cultivé, ayant passé par tous les luxes de l'argent et d'une vie intelligente. Et qui aujourd'hui, remontant du réfectoire triste, couvre chaque jour, à soixante-cinq ans, un papier blanc de ces âpres, fortes et admirables compositions».
«Appris», «en dedans», «âpres, fortes, admirables» : écoutez voir, tous les mots comptent. Et leur cocktail vous procurera une impression inoubliable quand vous arriverez par les escaliers du Marché devant les œuvres souterriennes.
17.02.2010 | Lien permanent | Commentaires (2)
Ancienne collection Jacovsky sur catalogue
La collec de Jakovsky, nom d'une pipe, c'était kékchose! Il collectionnait pas seulement les pipes, l'Anatole, et les toiles naïves à en bourrer tous ses appartements. Il s'entourait de beaucoup de livres dont on voit passer certains de ci de là au fil des catalogues.
Après-demain, mercredi, le 24 de février, un joli choix de ceux-ci (et d'autres documents jakovskyens) défileront chez Pierre Cardin, Rémy Le Fur et associés, sous l'enseigne d'AuctionArt, dans une vente publique à Drouot-Richelieu.
Les repros ont de quoi mettre l'eau à la bouche. Je flashe pour mon compte sur un recueil de poèmes mi figue espagnole, mi raisin français, enluminé tout autour de la typo par Miguel Hernandez, un des géants de l'art brut du début. Coplas de la peine et de l'amour que ça s'appelle. La déco de M.H. n'est pas sans faire penser -c'est drôle- à des illustrations de Joan Miró.
Je louche aussi sur le super manuscrit d'André Breton, signé et fort raturé (indice d'un premier jet), relatif à Joseph Crépin. Et naturellement sur une photo représentant ce peintre, prise vers 1950 par Anatole Jakovsky.
Claude Oterello, le monsieur qui expertise, peut pas tout décortiquer, tellement certains lots de la vente sont copieux. Dans l'un d'eux, il y a une photo de Jean Dubuffet avec des cheveux.
On y trouve aussi des lettres de celui-ci dont une de 1964 où il informe Jaco que les œuvres de Camille Renault lui paraissent «relever davantage de l'art naïf que de l'art brut». saignant, non? Autre chose qui mérite l'achat de ce numéro 179 du catalogue, une liste dactylographiée donnant la liste des «ouvrages concernant les écrits des aliénés et que possède Paul Eluard» avec l'indication précieuse : «vendredi 18 mai 1945». Nettement avant le fameux voyage en Suisse de juillet 1945 qui passe trop souvent pour le début des recherches de Dubuffet en matière d'art brut. Dans le même ensemble, une lettre préconisant de demander à Nush Eluard d'écrire «au médecin-chef pour qu'il envoie une note sur le sculpteur en question». Il y a gros à parier qu'il s'agit bien sûr d'Auguste Forestier.
Pour terminer, je vous dirai que j'ai aimé le café que Maître le Fur offre courtoisement aux visiteurs et visiteuses de l'expo préalable à la vente. Et le slogan de la bande annonce imprimée du n°163 (Prospectus aux amateurs de tout genre de Dubuffet) soigneusement conservée par Jakovsky, il est pas mal non plus :
....Contre le roi, pour la bergère....
23.02.2010 | Lien permanent
Art Paris invite au Grand Pal.
Art Paris, c'est spécial! On entre au Grand Pal et on craque direct pour le sac rose-vernis-à-ongles de Beaux-Arts Magazine.
A l'intérieur le numéro avec la couv de Virginie Barré, Jean in Paris. On le lira plus tard. Mais on le feuillette tout en marchant vers le stand A1 où la Galerie Obsis montre Pierre Clementi avec une souris sur la tête et des photos de la Nouvelle Vague.
Page 61, un squelette d'or trempant dans une lessiveuse. Beaucoup de têtes de mort en effet sur la Foire. On fait dans la vanité en ce moment. Pages 62 à 67 (sautez si ça vous agace) Bozarts-Mag nous parle des prix. Dans sa sélection : 3 références sur 26 pour le genre de beautés qui m'intéressent. Comptez 7000€ pour l'œuvre d'un peintre d'Essaouira : Ali Maimoune présenté par la galerie Damgaard (Maroc).
Si vous mettez 53.000 de mieux, vous pouvez emporter à la Galerie Ritsch-Fisch un paquet de personnages ficelés sur un banc, c'est de Francis Marshall et de sa grande période (1974).
L'affaire du siècle c'est le dessin au crayon de couleur de Josef Hofer. Pour pas plus cher qu'une photo on peut attraper ce personnage ductile au graphisme si désarticulé que c'en est éblouissant comme une musique discordante.
On retrouve ses petits camarades, écrasés par le cadre jaune-orange que leur dessinateur aime à employer, toujours à la limite de sauter par la fenêtre en montrant leur zizi, au stand B6. Christian Berst y a invité Arnulf Reiner qui continue à crayonner des repros d'œuvres d'art brut dont une d'Hofer. Bon, si ça l'amuse!
Pour la partie dévolue à son espace proprement dit, C.B. a opté pour un accrochage clair, bâti autour d'un grand François Burland, ménageant des plages de respiration pour les visiteurs et organisant des confrontations entre le noir et la couleur, Hofer et Plny, les «fétiches vaudou» de Nedjar et les créatures lisses de Nek Chand.
En comparaison, la Galerie Ritsch-Fisch a cherché la lisibilité dans la densité. Son «guest» est le collectionneur Antoine de Galbert qui sort pour l'occasion quelques unes de ses munitions : un très ancien dessin de Crépin,
un Aloïse dans des tons bruns, enceint d'une image en couleur,
un Judith Scott comme un cétacé échoué sur la plage.
J'ai été bluffée par le Piège à œufs, un assemblage de bois et de plâtre d'A.C.M. pas du tout dans la manière de ses machines. On dirait le travail d'un termite parce qu'il y a de l'ermite dans cet insecte.
Et puis c'est tout? Non. Au hasard de mes tours et détours j'ai vu la plateforme Afriques et son mur avec 16 X 5 dessins de Frédéric Bruly Bouabré, artiste exposé en ce moment à la Collection de l'art brut de Lausanne.
Je suis tombée surtout sur un dessin de 1929 de Lubaki, précurseur de la peinture contemporaine congolaise, qui m'a laissé rêveuse.
J'emprunte à un collectionneur de paperasses -Monsieur Lanoux pour ne pas le nommer- un document ancien sur ce créateur dont on a si peu l'occasion de rencontrer les œuvres.
Et c'est ainsi qu'Animula est grande!
20.03.2010 | Lien permanent | Commentaires (3)
Que cent lieux s’épanouissent
Les guides c'est bien gentil mais ça se périme vite ou alors ça concerne jamais la région où on va. Aussi faut-il saluer l'initiative de la revue Artension qui dans son numéro d'avril 2010 a eu la bonne idée de publier un cahier (malheureusement inamovible mais on peut se le découper pour voyager plus léger) présentant brièvement 100 lieux insolites en France.
J'insite sur «brièvement» parce que ce canard a eu le bon goût de ne pas nous accabler d'un tas de blablas qui prétendent nous prendre par la main pour organiser nos petites excursions. Une photo, l'adresse, éventuellement téléphone et adresse électronique, courte présentation maquettée sans chichis mais avec le souci de la lisibilité. Tout ce qu'on aime.
Y'a que les fonds framboise et moutarde choisis pour mettre en valeur certaines notices pour les sites-phares du journal que je kiffe pas des masses mais c'est un détail.
A user sans modération pendant vos pérégrinations mais pas en petits ravageurs des steppes, s.v.p. En prenant soin de goûter à vos découvertes. Ce n'est pas parce qu'il y en a 100 que vous devez toutes vous les faire. L'inconvénient avec les chiffres, c'est qu'ils nous poussent dans notre mauvais génie : celui de la canulante mentalité industrielle.
Ne faites pas comme Animula : prenez le temps de vivre brut et cool.
29.03.2010 | Lien permanent
Corbaz et Hauser en scène à Gugging
Chapeau bas, y'a la Princesse qui passe! La Princesse Aloïse s'entend.
Et si vous portez la casquette à l'envers, remettez là à l'endroit pour Hauser et son cortèges de femmes.
C'est maintenant que ça commence le show au Gugging Museum et il durera jusqu'au 26 septembre 2010, le temps d'un défilé qui confrontera deux cortèges de femmes bien particulières.
D'un côté les luronnes, fortes en cuisses de Johann Hauser
et de l'autre les créatures romantiques d'Aloïse Corbaz.
Bon, il y aurait peut-être à dire sur cette opposition dans le registre plus sexy-tu-meurs... Elles me paraissent également folles de leurs corps, les cantatrices aux seins-fleurs de l'une
et les commères aux poitrines en obus de l'autre.
Mais je peux me tromper.
02.04.2010 | Lien permanent
Toute la Corse dans une poudrière
La poudre d'escampette, moi j'aime ça. Surtout celle de Bastia. La poudre d'escampette, il arrive qu'elle nous conduise dans une ... poudrière.
Celle de Bastia abrite dans son petit bastion enchanté, face à la mer, le village miniature de monsieur Mattei qui est bien plus qu'une attraction touristique.
Une veste en cuir vert protège René Mattei du vent, assez vif en ce vendredi saint de 2010. Pour la visite, j'ai tiré la bobinette rouge et je le regrette pas.
Quand il parle de son œuvre, René Mattei s'exprime en poète : «Ceci est une identité, il ne manque que le parfum du maquis».
On ne peut lui donner tort. Son installation peut peser des tonnes, elle est légère comme l'air qu'on respire dans les hameaux perchés du Nebbio, de la Balagne ou du Cap corse. Cette Haute Corse des bergeries, des fours communaux, des moulins, des églises et des ponts génois, René Mattei la portait en lui.
Il fallait que ça sorte. Tout est donc sorti de ses doigts meurtris par le ciment, depuis 27 ans qu'il a entrepris la construction de cette «ambiance», non pas reconstituée mais «essentialisée» : U Paisolu, comme disent les journalistes.
René Mattei a quelque chose à voir avec les fabricants de crèches.
Quelque chose seulement. Ses réalisations sont plus ambitieuses, même si elles relèvent d'un art populaire plutôt que d'un art brut. On ne le sent pas du genre à reculer devant une tâche impossible.
Quand vous irez le voir, il vous dira, mieux que moi, les efforts consentis pour édifier sa Corse miniature animée (c'est ce terme qu'il préfère).
Il vous dira les pierres qu'il faut tailler pour les ajuster, les acrobaties (heureusement, il n'est pas gros) pour lier les blocs de l'intérieur, poser l'électricité, installer une cheminée qui fonctionne dans le fugone où la cuisine se faisait.
Le résultat est là, émouvant et concentré comme dans une grotte.
Un résumé de campagne corse. Ce n'est pas une mauvaise chose que R.M. manque de place dans le bâtiment vénérable qui lui a été prêté par la municipalité bastiaise (merci madame!). Cela donne de la densité à son travail et ne l'empêche pas de rêver à installer un petit train circulaire.
Sans se plaindre, René évoque son déménagement puisqu'il lui a fallu réparer et adapter la plupart des pièces autrefois exposées dans un vrai village. Il a trop à faire pour renouveler les plantes et s'occuper de la salle des machines au sous-sol. Surtout que le vent marin le trahit -lui l'ancien navigateur- en grippant ses moteurs. Il aurait besoin d'aide mais son œuvre et lui sont si indissociables!
En attendant ce serait pas du luxe si son site était mieux signalisé. Les medias locaux l'ont toujours «suivi» et son public est aussi bien continental qu'international. Les Québécois l'apprécient mais monsieur Mattei a faim aussi de reconnaissance insulaire.
Alors, Corses de tous les pays, garez vous au parking de la citadelle et faites un tour dans son village!
Ne serait-ce que de par la nature des matériaux qu'il emploie, René Mattei est un miniaturiste d'exception.
Et si quelqu'un peut me dire pourquoi, dans les Foires Art Paris, on s'extasie toujours sur des Bull géants et jamais sur les miracles de patience et de créativité populaires construits à une échelle de 1 pour 30 par des miniaturistes du bord des remparts ensoleillés, qu'il ne se gêne pas.
05.04.2010 | Lien permanent | Commentaires (4)
Création Franche : la parole à Joseph Kurhajec
Un bon point pour le n°32 de Création Franche qui vient de sortir, c'est qu'il se contente de consacrer sa couverture à Sanfourche sans se croire obligé de nous infliger un article nécrologique. Quel meilleur hommage en effet que la repro de ce tripède vert sur fond de maisons stylisées aux couleurs cahotiques et premier plan d'émoticônes? Hébétude, ravissement, dépression ... Toute la gamme de sentiments que Jean-Joseph Sanfourche était capable de faire friser dans un regard jaune est là. Du travail de vitrail.
A l'intérieur, le point fort c'est l'entretien de Joseph Kurhajec avec Jean-Michel Chesné. D'abord parce que ça diversifie la matière rédactionnelle et surtout parce que ça éclaire le parcours d'un artiste sensible aux arts bruts, fétichistes et/ou chamaniques. On croise régulièrement ses œuvres sans qu'on ait de quoi les décrypter. Dommage qu'on ait privilégié l'italique pour ses propos, ça les rend pas plus lisibles, surtout serrés comme ils sont dans la marge de fond. L'ital c'est bon pour les citations courtes!
Enfin, on apprend que malgré son nom tchèque, Kurhajec est né en Amérique. Je trouve intéressant qu'il témoigne de l'effet que lui fit la collec de Dubuffet quand elle était là-bas avant 1962. On raconte qu'Alfonso Ossorio avait tendance à la garder sous le coude. La preuve que non ou pas tellement. Comme Hervé Di Rosa, Kurha appartient à la catégorie des artistes-voyageurs. Il ramène des matériaux de l'île de Pâques. Il travaille à Rome, au Mexique etc.
Achetez le canard pour en savoir plus. Le passage où ce monsieur de 72 ans parle de son bras atteint par la polio n'est pas seulement émouvant, il est instructif car on comprend qu'il a eu l'idée de se servir de son «handicap» dans son travail de sculpteur. Les photos qui illustrent l'interview proviennent de la collection de J.-M. Chesné. Elles mériteraient d'être plus grosses, mais bon.
Une pleine page en revanche est accordée à Gabriel Albert dans un autre article.
Trop rikiki aussi les images des objets en cire de Pya Hug. Le maquettiste leur a préféré un tableau plus naïf, moins convaincant. Lire l'article de Jacqueline Roche-Meredith sur cette dame des Grisons.
A signaler aussi parmi les autres contributeurs, Joe Ryczko (sur François Tornel, mosaïste de Cahors). Ami des fanzines, J.R. a rejoint la flotille blogueuse. Il a été immédiatement poignardé par la concurrence. Bienvenue au club, Ryczko Joe, le club des victimes de la «subtilité» triomphante et bon vent dans vos voiles!
Heureusement toutefois que Bruno Montpied est là pour nous ramener à l'art brut. Dans un article bienencontreusement consacré au musée ariègeois des Amoureux d'Angélique, il s'attarde sur la salle contenant les sculptures en bois de Luigi Buffo rescapées de la destruction. Là, bien sûr, on ne saurait lui en vouloir. Surtout Animula qui concocta un p'tit album de derrière ses fagots aux défuntes œuvres de ce créateur.
06.04.2010 | Lien permanent