08.01.2012
Art brut : le Monde des bons apôtres
Timberlake a une fiancée. C’est la presse people qui le serine. Pas Le Monde.
Le Monde, depuis 1968, est un journal sérieux. Il se consacre aux sujets qui en valent la peine.
C’est pourquoi il est en passe de devenir l’organe officiel de l’art brut.
Je plaisante bien sûr mais le fait est que depuis que la boîte de Pandore lui a été ouverte par la voie de l’innocence (voir ma récente note intitulée Canardage et canotage), Le Monde s’adapte, Le Monde s’art-brutise. Le Monde s’engage, sous la plume de Patrick Martinat, pour le sauvetage des environnements d’art brut «en voie de disparition, voire déjà disparus».
Y compris ceux qui ne sont pas encore édifiés comme le tonitruant Colossal de Danielle Jacqui.
L’article de Patrick Martinat est paru dans l’édition en ligne du 7 janvier 2012. Il est écrit dans la foulée de ceux de Christophe Donner :-) et de Philippe Dagen :-( dont j’ai parlé dans mes posts précédents, le 29 déc. 2011 et le 1er janvier 2012.
C’est dire que Patrick Martinat a dû parer au plus pressé. Il a donc eu recours -faute de pouvoir se ménager les services de Jean Dubuffet, André Breton ou Claude Lévi-Strauss- au «critique Laurent Danchin» qui n’est pas homme à laisser sa part aux nouveaux spécialistes de la solubilité : Phil Dagen and Chris Boltanski pour ne pas les nommer.
Laurent Danchin possède d’impressionnants états de service et Patrick Martinat nous rappelle qu’il n’hésite pas à en faire état. Il se considère depuis 40 ans comme «le défenseur des créateurs oubliés». Exemple : «Après la mort de Chomo, nous avons réussi à mettre ses œuvres à l’abri (…)» dit-il. Un «nous» de majesté sans doute? Rappelons pour mémoire que Laurent Danchin fut l’expert de la vente publique des œuvres de Chomo.
Une façon comme une autre de les préserver sans doute? Les Animuliens apprécieront. Grâce à cet expert, «les anecdotes font cortège» nous dit avec soulagement Patrick Martinat. Et les légendes aussi sans doute.
Celle qui romantise la fin de Marcel Landreau notamment : «A la fin de sa vie, il a dû se résoudre à vendre sa maison, son œuvre, à un acquéreur qui avait promis d’entretenir le lieu… Et qui a tout démoli au bulldozer (…).
Si Patrick Martinat avait eu le temps d’aller sur Gougueule pour vérifier cette information fausse, il serait tombé sur mon blogounet où il aurait pu constater que Marcel Landreau avait pris soin d’emporter dans sa retraite un nombre non négligeable de ses sculptures en cailloux qui ont été retrouvées récemment, non par un grand spécialiste de l’art brut mais par un antiquaire talentueux : Freddy Tavard.
12:57 Publié dans art brut, De vous zamoi, Ecrits, Gazettes, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : art brut, journal le monde, patrick martinat, christophe donner, philippe dagen, laurent danchin, chomo, marcel landreau, le caillouteux, freddy tavard, danielle jacqui | | Imprimer | | |
Commentaires
" Eh bien moi j'aime bien que votre blogounet nous fasse part de vos incroyables découvertes, en revanche l'article d'aujourd'hui est un peu déroutant ...
Malveillance et bassesse seraient- elles devenues les deux mamelles d'Animula Vagula ?
J'ai hésité entre le silence et bien sûr le désir de répondre est le plus fort .
C'est moi qui ai contacté Patrick Martinat à la suite de l'article sur Jean Linard, c'est moi qui lui ai suggéré de contacter Laurent Danchin, Michel Leroux et Jean-Michel Chesné, c'est moi qui lui ai parlé de la maison de Bodan Litnianski, de Reynaud, de Smilovski et qui ai évoqué les impensables difficultés de Danielle Jacqui, de Florence Marie et de Pierre Shasmoukine ...
A l'heure où certains cherchent des solutions qui valent certes ce qu'elles valent (une pétition pour sauver la Cathédrale de Jean Linard ...), d'autres se livrent avec jubilation et aisance à des exercices de style ...
A l'heure où les oeuvres de Marcel Storr créent l'émotion et font parler Télérama et Le Monde ne devrions- nous pas TOUS nous réjouir ! Ce serait je pense plus sain, plus glorieux et plus lumineux. Il y a des combats plus nobles que d'autres et je ne suis pas sûre que le vôtre soit de ceux que l'on peut retenir .
Bien à vous
Sophie Lepetit
" Les Grigris de Sophie"
Écrit par : sophie | 09.01.2012
Sophie l'a si bien dit ?
Jean Luc
Grand BAZ'ART à Bézu
Écrit par : Jean Luc | 09.01.2012
@ Sophie, visiblement d'après vos recents propos sur votre page Facebook, vous n'acceptez guère les polémiques, alors pourquoi la porter chez les autres ?
@ Jean Luc, je ne savais pas que vous étiez devenu un défenseur et sauveur des environnements ! La mode sans doute
Écrit par : Pierre Nollier | 09.01.2012
C’EST INCROYABLE !!!
A chaque fois que quelqu’un de notre petit/petit/petit réseau d’amateurs d’Art Brut/Singulier/etc …prend une initiative - en l’occurrence, ici, Sophie Lepetit qui a contacté le journaliste du Monde Patrick Martinat - hé bien elle s’en prend plein la tronche !!! C’EST INCROYABLE !!!
Au-delà de la sauvegarde de l’environnement de Jean Linard, l’article de Patrick Martinat a (à mes yeux) le mérite de poser la question de la sauvegarde de tous ces environnements actuellement en perdition.
Michel l’égaré … (Leroux)
Écrit par : Leroux | 09.01.2012
@ Jean Luc
Sympa à vous votre intervention chevaleresque en faveur de Sophie mais elle n'est pas en cause.
Ma note visait surtout à inviter les "spécialistes"et les journalistes à vérifier leurs infos quand ils traitent des créateurs de l'art brut.
Ceux-ci méritent bien les précautions qu'on accorde aux ténors de l'art contemporain, non?
De ce point de vue je ne mettrais pas dans le même sac "Le Monde" et "Télérama" dont les papiers sur le sujet ne propagent pas des inexactitudes.
La consécration par la presse n'est rien si elle aboutit à alimenter des légendes.
Le rappeler c'est ma façon à moi de sauvegarder ce qui peut l'être. Une façon appuyée sur des faits têtus.
Que ça plaise ou non aux raconteurs de belles histoires pour public captif, l'oeuvre capitale de Marcel Landreau n'a pas été entièrement éradiquée.
Les signes d'énervement n'y changeront rien.
Pour ma part je ne crédite Mme Lepetit d'aucune mauvaise intention et il ne me serait pas venu à l'idée de parler de "tronche" à son propos comme le fait Michel Leroux.
Le contrôle de son vocabulaire quand on est en colère est une chose indispensable au respect mutuel.
Débattons sans céder aux facilités stériles de l'insulte. Les Américains le font bien. Il y a tous les jours aux USA des échanges passionnés sur les questions de l'outsider art qui ne dégénèrent pas.
Quant à mes mamelles (de Tirésias bien sûr), elles m'ont fait bien rire, vous pouvez le dire à Sophie.
J'avais déjà les mêmes le 21 décembre 2009 quand j'ai donné un coup de projo au "Grigris" débutant.
Elle n'avait pas protesté alors.
Écrit par : Ani | 09.01.2012
Chère Animula,
Je reconnais que le mot ‘tronche’ n’est pas des plus heureux ! (La colère est mauvaise …)
Je reconnais que vous maniez la langue Française de façon plus subtile que moi ! (Décidément, ce mot ‘subtil’ colle aux blogs parlant d’Art Brut …)
Mais je continue de penser que votre note « le Monde des bons apôtres » est pour le moins troublante. L’article du journaliste Patrick Martinat contient certes des lacunes et des imprécisions (par exemple à propos de Marcel Landreau, ou bien à propos des cartes postales anciennes collectées par Jean-Michel Chesné), mais il y a quelques mois encore Patrick Martinat connaissait peu ce sujet des environnements d’Art Populaire qui nous passionne depuis des dizaines d’années. Et s’il lit votre note, je doute fort qu’il renouvelle l’expérience par un autre article…
Je continue également de penser que votre note est subtilement sévère envers Laurent Danchin. Mais c’est une autre histoire …
Devais-je, en lisant votre note, rester le doigt sur la couture, en bon lecteur « captif » ? (Sachez, chère Animula, que je lis pratiquement toutes vos notes, hé oui ! :))
C’est la deuxième fois, seulement, que j’interviens sur votre forum (ce type d’échanges, via un forum, n’est pas mon truc). La première fois, c’était suite à votre note sur une exposition Galerie Impaire. Vous y notiez que le vernissage avait forte odeur de vin rouge … mais pas un mot sur les œuvres exposées … Là, déjà, je n’avais pas su garder le doigt sur la couture.
Je suis sincèrement désolé que notre relation se limite à ces deux petits ‘accrochages’, et j’espère bien, un jour, avoir l’occasion de vous rencontrer et discuter avec vous de façon plus apaisée.
Bien cordialement !
Michel l’égaré …
Écrit par : Leroux | 10.01.2012
@Pierre Nollier, " je ne savais pas que vous étiez devenu un défenseur et sauveur des environnements ! La mode sans doute", dites vous.
... une mode de 27 ans cette année et commencée à Veronne au bras d'une belle Italienne dont le prénom était prédestiné : Sauveuse (traduit en français bien sûr)
... pour le reste, je ne me suis jamais posé en défenseur déclaré des "environnements". Ne m'attribuez donc pas une réputation à laquelle je n'aspire pas, surtout quand elle est batie sur un ton de polémiques ...
Écrit par : Jean Luc | 10.01.2012
@ Sophie : "ne devrions- nous pas TOUS nous réjouir ?"
mais SI bien sûr ! ;-)
Écrit par : Jean Luc | 10.01.2012
On peut dire qu'Ani a mauvais caractère...mais ne devrions-nous pas voir dans son exigence une prise de position salutaire? Exigence qu'elle s'applique à elle-même en tout premier lieu - au vu de toutes les informations nourries qu'elle nous délivre avec une générosité que je n'ai pas souvent rencontrée!
Ne devrions-nous pas l'en remercier avant de lui faire reproche de quelque mouvement d'humeur devant "l'à peu près" dont nous ne saurions nous satisfaire - surtout quand il conduit carrément à l'erreur d'information?
Écrit par : Jeanne | 10.01.2012
Ma chère Ani, on me signale tes commentaires. Tout d'abord merci de me faire un peu de publicité à un moment où j'en ai grand besoin, puisque l'article que tu incrimines finalement n'est pas paru à cause des grèves. Toutefois, comme tes propos à mon égard sont pleins de calomnies malveillantes et de contre-vérités, je dois à tes lecteurs une petite mise au point.
Chomo en premier lieu et le "nous" de majesté : pour sauver l'oeuvre de Chomo et la mettre à l'abri, il a fallu, outre mes efforts bien entendu, la participation active des enfants Chomeaux, la collaboration de Martine Lusardy et de la Halle St Pierre, et surtout celle de Philippe et Aymeric Rouillac, commissaires priseurs à Vendôme, sans qui nous n'aurions jamais su trouver un lieu où entreposer toutes les peintures et sculptures qui risquaient, après l'exposition de Paris, de retourner sans aucune protection dans la forêt. Il s'agit donc bien d'une entreprise collective et je te laisse le privilège de la vanité. Quant à la vente à Cheverny, j'en dirai les circonstances et les raisons le moment venu, mais pas ici.
Le problème, ma chère Ani, quand on dispose de l’information en bout de course et pas à sa source, à l’origine, c'est qu’on est amené à formuler des suppositions hâtives, comme tu le fais ici. Pour Landreau, c'est la même chose. Mais là tu m'obliges à ressortir mes archives.
Landreau est mort le 5 juin 1992, à Thouars, près de Noirterre, dans les Deux Sèvres, son pays natal. A l'époque, j'avais fait une double enquête, à la mairie de Mantes-la-Ville, après la destruction de son jardin par le nouveau propriétaire, menteur et malhonnête, dont je pourrais te donner le nom, et aussi à Noirterre auprès de la mairie et de la famille. Je pourrais donc te dire où il existe encore quelques autres oeuvres de Landreau, et ailleurs qu'à Lausanne ou à La Fabuloserie, qui en possèdent quelques-unes, ou chez ce monsieur antiquaire, qui est certainement un homme très respectable. Quand il a dû quitter son petit pavillon de Mantes-la-Ville, fin 1989, c'est en tapant à la masse pour desceller les quelques oeuvres qu'il avait dans son garage que Landreau, selon le témoignage de sa femme, s'est "perforé l'estomac", sans doute avec un IPN qui dépassait du mur. Il y avait là, je te le dis en vrac : « Aveugles sans pension », « La famille Debré », « L’idolâtrie », « Exode », « Le Président chez l’habitant », « L’âne et le crapaud », « Une vraie cloche », « Un curé de combat », « Viens, papa, on rentre à la maison », etc. Des fables, du quotidien et des sujets politiques. Tout cela, sans doute, il l’a emporté avec lui. Mais d'après l'employée de mairie, qui connaissait bien Landreau et avait des sanglots en me le racontant, d'avoir vu tout son jardin "par terre", "il ne le supportait pas", et il est mort deux ans et demi après. "S'il n'était pas parti, il ne serait pas mort", me disait sa femme. Tout cela serait une longue histoire à raconter plus en détails. Mais ce n'est pas le lieu ici et cela suffira pour les ‘animuliens’ aujourd'hui.
Laurent Danchin
P. S. 1 : Tu passeras bien le bonjour à M. Lanoux. Je garde précieusement les quelques longues lettres, un peu flatteuses il est vrai, qu'il m'adressait à l'époque où il venait d'entendre sur France Culture mon émission Art Brut & Cie. Petite veinarde, tu n'étais pas née ! C'était en... 1986.
P. S. 2 : J’ai diffusé, en grande quantité, l’adresse de ton ‘blogounet’, que je continue à trouver talentueux, avec le dossier de presse de l’exposition Marcel Storr. Ne me remercie pas. Mais, suis-je bête ?, j’oubliais que tu as réussi la prouesse de parler de mes deux dernières expositions, Chomo – Le débarquement spirituel, et Marcel Storr, bâtisseur visionnaire, sans jamais mentionner mon nom. Là, on dirait qu’il y a comme un blocage. Curieux pour un site généreux en informations. Et dommage : avec un peu plus d’objectivité, les informations circuleraient beaucoup mieux.
Écrit par : Laurent Danchin | 13.01.2012
@ Laurent Danchin
Je t'invite (puisqu'on se tutoie maintenant) ainsi que tous les Animuliens de passage ici à te reporter au commentaire récent d'Aurélien Lortet publié à propos de ma note du 18.10.2009 :"Marcel Landreau, les retrouvailles".
http://animulavagula.hautetfort.com/archive/2009/10/18/marcel-landreau-les-retrouvailles.html#comments
Tu constateras que la re-découverte des oeuvres de Landreau est loin de laisser indifférent un témoin des origines qui les croyait, lui aussi, disparues pour toujours.
Écrit par : Ani | 08.05.2014
Les commentaires sont fermés.