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L’art brut en revues
Decharme dans la Gazette, Danchin dans l’Œuf, Duchein dans la CF. Dech-Danch-Duch, si vous avez besoin d’un moyen mnémotechnique. Le papier se défend bien!
La Gazette Drouot cette semaine rencontre Bruno Decharme pour un entretien sur L’Art brut américain avec le très professionnel concours de Stéphanie Pioda.
L’Œuf sauvage de Claude Roffat confirme sa nouvelle ponte. Il renoue avec la tradition des grandes couvertures de sa jeunesse dans les années 90 du 20e siècle. Spectaculaire Marcel Storr en vitrine. Le morceau de bravoure de ce n°11 : une contribution de Laurent Danchin. La première dans ce support, il faut le remarquer.
Sous estampille de Paul Duhem, la revue Création Franche est de nouveau de sortie. On y explore avec Paul Duchein, autre collectionneur, Les Cartographies martiennes de Labelle.
Ce n° 37 contient aussi un article de Bernard Chevassu sur La Maison arc-en-ciel de Christian Guillaud. Six ans déjà que mon blogounet vous avait signalé cet « habitant-paysagiste » d’une localité voisine du bled du Facteur Cheval (D’Hauterives à Lens-Lestang). A l’époque le créateur ignorait ce qu’il faisait, alors qu’il affiche aujourd’hui «ART BRUT» sur une pancarte. (via La précarité du sage)
Ce qui en dit long sur la marche malencontreuse des choses.
L’Œuf sauvage n° 11 donne aussi la parole à Jano Pesset. Celui-ci présente l’œuvre de Jean de Ritou qu’il fit entrer jadis à la Fabuloserie.
Derrière ce surnom qu’on ignorait, il s’agit de Jean Bordes, créateur apparu en janvier 1991 dans le n°2 de cette bonne vieille Création Franche.
Lire l’interview du fondateur d’abcd dans la Gazette du 1er février 2013 est obligatoire pour tout Animulien qui se respecte.
Elle met un coup de projo sur Voodoo Child, l’actuelle expo abécédienne à Montreuil-sous-bois, «la deuxième ville du Mali» comme l’appellent les medias ces temps-ci.
Au programme : John Bunnion Murray dont Jésus tenait le stylo
et Marie Tillman Smith, «une dame très tonique, plus revendicative» qui peignait «de grands messages à Dieu» sur des tôles ondulées.
L’un en Géorgie, l’autre au Mississipi ont connu la période ségrégationniste : «C’était un post-esclavagisme». Pour Bruno Decharme, ils «rejoignent ce que nous qualifions ici d’art brut». Noter à ce sujet les méritoires efforts de BD pour renouveler la définition de l’art brut : «Il est du domaine de ce qui nous échappe et s’exprime sous une forme automatique».
Toute aussi claire mais plus sujette à discussion, la réponse de BD à la question : «Y a-t-il une raison à un tel engouement pour l’art d’outre Atlantique?». Très franchement, il reconnaît que «c’est presque une question de marché». En bref : le marché s’est développé aux Etats-Unis vers 1985, «mais très peu en Europe».
Mais est-il écrit quelque part que l’art brut ne doive dépendre que du marché dominant? Faut-il ne s’en remettre qu’aux galeries qui récupèrent «des fonds» constitués de milliers d’œuvres, à condition qu’elles soient exploitables? Faut-il cesser de s’intéresser à ces créations encombrantes, trop fragiles, anonymes, orphelines, solitaires, ingérables, qui constituent, en dépit des apparences, le véritable peuple caché de l’art brut? Questions que je me pose et qu’abcd, me semble-t-il, se posait davantage à ses débuts vers l’an 2000.
Bon là-dessus, je vais me préparer un double chocolat viennois parce que se turlupiner ça creuse
01.02.2013 | Lien permanent
A Drouot, la grenouille fait un tabac
Ça grenouille à Drouot! Ça grenouille dans le bon sens, entendons nous bien! Comment ne pas tomber raide dingue de cette tabatière en buis sculpté aux yeux de corne et d’ivoire?
Elle est reproduite sur un élégant leporello que j’ai trouvé dans ma bouato lettres avec un petit message de mes voisins m’avertissant «qu’on leur a livré le piano» et qu’ils comptent bien s’en servir toute la journée. En ligne directe de l’étude Chayette et Cheval, le dépliant dont je vous cause annonce, à grand renfort de papier glacé, la vente (vendredi 17 octobre 2014) de deux collections tout ce qu’il y a de choucardes dans l’univers impitoyable de la salle des ventes. Machines à vapeur et tabatières.
J’ai le plus grand respect pour la première partie du programme mais c’est surtout la seconde qui m’intéresse. Non seulement parce c’est Martine Houze l’expert, une pasionaria de l’art populaire extrêment affûtée question curiosité. Mais aussi parce que la frontière entre la sculpture anonyme des embellisseurs du quotidien et l’art brut proprement dit m’a toujours paru poreuse.
Yaka voir ce mignon petit bourgeois en corozo (ivoire végétal)
cette secouette ornée d’outils de jardinier et de têtes humaines
ce drôle de singe à zizi articulé pour comprendre. Je kiffe aussi très fort le dragon en noix de coco
Toutes formes parfaites qui appellent la caresse de l’œil. Feuilletez le catalogue et dîtes-moi si je me trompe. Pour finir sur une note rigolote, vous aurez remarqué comme moi que Cheval est un nom prédestiné et que pour des tabatières, rien de mieux que des commissaires priseurs.
14.10.2014 | Lien permanent | Commentaires (2)
Poupées Show sur la RD 7
Maison de poupées version Gardanne. J'sais pas trop si les lecteurs d'Ibsen apprécieront.
Par une chaleur calhorrifique, j'ai obligé mon chéri à me conduire là sur la RD 7 en direction de Luynes et sur la foi d'une brève dans la Provence insolite et secrète de Jean-Pierre Cassely.
Ai bravé pour lui (et surtout pour vous) les risques du trafic intense à cet endroit pour vous ramener quelques photos de ce conglomérat de bébelles et de nounours noircis dans leur jus qui montent inexorablement à l'assaut d'une maison fâcheusement située en bord de route.
Quant au macho de service qui m'a crié au passage des insanités concernant mon amour de petit chapeau, qu'il sache bien que je l'animoule à pied, à cheval et en voiture, lui et son bolide.
23.08.2009 | Lien permanent | Commentaires (1)
Les nuages d’Andrea Mantegna
Le Louvre, c’est pas votre truc. Mantegna, vous n’en avez rien à battre, je sais bien. Vous, c’est l’art brut, rien que l’art brut pur et dur. Pas la Renaissance ou la Pré-Renaissance. C’est pas demain la veille qu’on vous verra bronzer sous les 666 vitres de la pyramide de leoh Ming Peï.
Pourtant, cette fois, vous pourriez faire une exception. Ne serait-ce que pour les nuages, les merveilleux nuages où Andrea Mantegna dissimule des trucs.
Des visages, dans un tableau commandé par Isabelle d’Este pour son petit studiolo.
Un cavalier sur son cheval dans le Saint-Sébastien du Kunsthistorisches Museum de Vienne.
Car on dira ce qu’on voudra, mais un peintre, même officiel comme l’était ce virtuose de la contre-plongée du Quatrocentto, lorsqu’il est capable de nous ouvrir ainsi des lucarnes sur l’inconscient, et bien ce n’est pas un blaireau.
30.09.2008 | Lien permanent | Commentaires (2)
Excentriques, entrez dans le Dansel
Grand ménage aujourd’hui. Enterré sous une pile de coussins je retrouve Les Excentriques de Michel Dansel acheté au printemps dernier. Le genre de bouquin qu’on se promet de dévorer et puis… les yeux plus gros que le ventre! Je me souviens quand il est arrivé dans mon sweet home, je m’étais promis de consommer de A jusqu’à Z ses 830 pages. Quelques notices avalées en diagonale après, je me suis laissée emporter par d’autres aventures. La vie quoi! En fait c’est un ouvrage de référence qu’il faut attaquer par petits morceaux, un soir une notice, un soir une autre pour se distraire avant de s’endormir.
Il y a aussi les 37 cas d’excentriques anonymes, des considérations savantes sur la marge et les classifications et une anthologie de textes choisis pour illustrer la galerie de portraits. La densité des textes sur deux colonnes commandait la Collection Bouquins de chez Robert Laffont.
Elle a l’avantage de stocker beaucoup mais ses volumes sont un peu mous à la main. N’était mon addiction aux versions papier, je kifferais bien Les Excentriques sur tablette si ça existait. Idéal pour lire au lit en évitant de réveiller son chéri qui pionce déjà! La catégorie des excentriques est large. Ce n’est que par moments qu’elle recoupe notre dada brutoïde.
Mais ces moments ont nom Jean-Pierre Brisset, Fulmen Cotton, Berbiguier de Carpentras, Ferdinand Cheval, Chomo, Henry Darger, Paulin Gagne, Raymond Isidore, Raymond Roussel. Une copieuse bibliographie ouvre des boulevards aux petits pisteurs de la curiosité. Entrez dans le Dansel!
30.09.2012 | Lien permanent
Imposteurs et farfelus à la BM de Cadenet
«En vacances on lit» me dit ma télé. Et votre petite âme errante d’applaudir à grand bruit! Alors mon odyssée luberonesque ne serait pas complète si je ne décernais pas mon prix spécial du jury à la Bibliothèque Municipale de Cadenet, la ville du petit Tambour d’Arcole.
Merci à celle-ci pour sa clim, pour ses micros où je peux surfer sur les belles choses de la région, pour ses chaises bleues et jaunes et pour la qualité de son accueil. Non seulement le bibliothécaire a l’air d’aimer son métier mais il a lu ses livres. Et ça fait plaisir de voir les usagers de l’endroit qui viennent avec confiance lui demander des tuyaux.
En plus il connaît Asphyxiante culture! Aussi ça ne m’a pas étonné que dans les choix que ce pro du bouquin collectif propose sur ses tables de consultation, se soient trouvées deux choses dignes d’intéresser la monomaniaque que je suis. Deux ouvrages qui avaient échappé –caramba– à la vigilance de mon blogounet d’amour et qui méritent pourtant d’être signalés.
D’abord Les Plus grands farfelus français d’Hubert Delobette (2008) parce, dans sa galerie de 25 portraits, tous plus ou moins ébouriffants, il range Ferdinand Cheval et Chomo (qui n’aurait sans doute pas aimé être traité de «farfelu»).
Ensuite Le Collectionneur d’impostures (2010) de Frédéric Rouvillois parce que je ne me lasse pas de lire l’histoire des 27.345 faux autographes littéraires et historiques fabriqués par Vrain-Lucas à l’usage d’un trop crédule savant de son temps.
L’ouvrage qui se source visiblement à l’inénarrable Encyclopédie des farces et attrapes et des mystifications de François Caradec (1964) a le mérite d’être beaucoup plus léger pour lire au bord de la piscine (et oui, j’ai une piscine dans mon gîte rural) bien qu’il contienne environ 65 récits passionnants.
17.07.2012 | Lien permanent
CHOMO. Dix ans après.
Débarquement spirituel de CHOMO sur la planète Saint-Pierre le mardi 15 septembre 2009.
!!! ATANSION !!!
Ça va saigner à la Halle. CHOMO revient avec des images de lumière dans les poches de son chandail. CHOMO en avait marre de manger des étoiles. CHOMO détonne. CHOMO crépite.
LÉ VIOLANSE du vernissage commenceront à 18 h 30 rue Ronsard dans le 18e arrondissement de Paris.
Montez de la station Anvers si vous venez par le métro ou descendez par le funiculaire si vous abordez les choses du côté de la Butte Montmartre. Venez à cheval si vous êtes un mousquetaire (ou une moustiquaire). Laissez les bourrins dehors. Les chapeaux à plumes au vestiaire. Plus besoin de taper sur le gong avec la garde de l'épée, montrez votre invit à l'entrée.
Quelque chose me dit que vous allez vous sentir comme des chatons dans les mains du Cardinal.
!!! ATANSION !!!
L'expo CHOMO n'est pas un festival pleurnichard pour vieux nostalgiques du village d'art préludien.
L'église des pauvres - Photo Clovis Prévost
Martine Lusardy nous sert ici sa botte secrète. Son accrochage a du panache et elle s'escrime avec clarté. Elle témoigne de l'actualité, toujours explosive dans sa diversité même, de cette œuvre qu'on ne peut classer ni dans l'art brut, ni dans l'art contemporain.
!!! ATANSION !!!
Pour ceux qui douterait de cet « ailleurs » si particulier, je conseille la lecture de ces quelques lignes de Michel Thévoz à propos de CHOMO: « Bien loin d'être indemne de culture, il en était un adversaire rusé, lucide, vigilant, offensif sur tous les fronts artistique, philosophique, politique, écologique. (...) Chomo (...) était foncièrement allergique à l'orthogonalité, et dans tous les registres, géométrique, mental, politique, esthétique etc. Déviant irréductible mais en toute connaissance de cause. Conscient avant les autres, hyperconscient même, de la régression obscurantiste et du formatage mondialisé que, par une double et crapuleuse dénégation, on appelle néo-libéralisme ».
13.09.2009 | Lien permanent | Commentaires (14)
Cavalleria rusticana
C'est le cavalier brut de L'Isle-sur-la-Sorgue. Je l'avais un peu oublié mais ce soir il trotte dans ma tête. Faut dire que j'ai du mal à me refaire à l'autobus. Je pense encore aux vacances. A cette super brocante du 15 août dans la ville citée plus haut. Par un soleil digne d'un western. Le genre : «je mourrai de soif mais je ne cannerai pas !». J'étais cependant prête à filer me mettre à l'ombre quand soudain -clipi, clop, clipi, clop- il est apparu.
Mon petit Blau Reiter à moi. Enfin «blau», il serait plutôt rouge et vert avec un peu de blanc. Du moins pour ce qu'il en reste de couleurs. L'antiquaire qui avait ce bel objet en extérieur sur son stand a eu l'intelligence de ne pas lui nettoyer la patine. Ce qui accentue le côté brut de la chose.
Admirez la mousse verte sur le front du cheval, le travail des lichens sur le visage du jockey.
Il faisait trop chaud pour demander des explications et puis malheureusement j'ai pas la place pour une telle petite merveille dans mon 3 pièces-kitchenette.
Mais tout dans le style et la facture signe un travail artistique autodidacte et rustique. Mais où peut-il bien courir comme ça?
02.09.2009 | Lien permanent | Commentaires (3)
Luigi Buffo à l'Assiette anglaise
Buffo : «Y a cinq sacs et demi de ciment dosés à deux brouettes et un sac.»
Teulé : «L’ensemble est bien composé. Y a du mouvement. C’est bien, hein !»
Buffo : «Ça fait 500 kilos ou peut-être 600.»
En fouinant un peu partout dans mon fourbi, j’ai retrouvé les modestes images de cet album, prises de mes petites mains, en visitant le site de Luigi Buffo.
07.11.2005 | Lien permanent | Commentaires (1)
Le triomphe d'un choqué
Alors, pour son seul plaisir et celui de quelques uns et unes j’espère, je me suis décarcassée pour dénicher la citation de Jeanne Tripier extraite du premier livre de Gérard Macé et un poème d’Edmund Mach, le type de Gugging édité par Harpo &.
Les voici l’un après l’autre :
« Dis-moi donc quelle est la production de Zèbre antique. – Il est fait du pur destin anatomique. C’est un joli cheval zébré, et qui ressent parfois sa femelle, sans qu’ils soient rapprochés l’un de l’autre. Mais en réalité cet animal est constitué de manière à ressentir ce qui se passe au loin, dans les régions polaires. Il s’habitue mal aux scènes scandaleuses des Terriens » Jeanne Tripier la Planétaire.
dans les usines et travaillent
parfois ils vivent désespérement
des brioches qu’ils mangent eux-mêmes.
Ils sont parfois un peu justes
car les inutiles
prédominent
Par diverses déterminations
ils attendent le devoir,
devoir sur devoir.
13.12.2005 | Lien permanent | Commentaires (1)