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Guo Fengyi, de Xi'an à Lausanne

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Des chinoiseries brutes ? Et bien voui, ça existe. Je vous parlais du rouge récemment et des chambres où il éclate. Voilà-t-il pas qu’en lisant l’article de Luc Debraine publié dans Le Temps.ch, j’apprends que Guo Fengyi, une dame chinoise de 66 ans, se glisse dans des habits rouges pour «entrer dans la transe de ses dessins». L’Orient est rouge, on nous l’avait déjà dit, mais Vues de l’esprit (c’est le titre de l’article de Debraine) fait bien de nous le rappeler.

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guo fengyi autoportrait.jpgIl nous rappelle aussi que Guo Fengyi qui transcrit ses visions sur du papier de riz, «se lance sans idée préconçue sur des feuilles en rouleaux, qu’elle couvre de ses visages sereins, de bouddhas, d’impératrices, de motifs entrelacés et de symétries répétitives».

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Il paraît qu’elle n’a jamais de vision d’ensemble sur les rouleaux où elle travaille. On aimerait bien voir ça. Malheureusement l’article est illustré d’une repro mini-rikiki. Donc je suis allée en emprunter sur l’espace Longue marche.

Sept des œuvres de ce créateur, qui n’a rien d’une artiste au sens banal du terme puisqu’elle prétend ne pas être l’auteur de ses dessins, sont entrés par don dans la Collection de l’art brut de Lausanne.

Ils mélangeront bientôt leurs fluides avec ceux de Lesage, Lonné, Crépin, Madge Gill et les autres médiumniques de la maison bien que, comme le fait finement remarquer Luc D., ils participent sans doute plus de «l‘agir sans l’agir» taoïste.

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Lucienne Peiry, en charge de la Collection lausannoise, a sans doute lu Lao tseu. Elle sait que «Le tao donne naissance à l’Un, le Un au Deux, le Deux au Trois, le Trois aux dix mille êtres», elle poursuit une politique muséale qui vise toujours plus à souligner l’universalité de l’art brut.

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Moi, ça me kiffe. J’ai noté avec satisfaction, dans 24 heures (actualités vaudoises), l’acquisition récente par ses soins d’une centaine de dessins du Sicilien Giovanni Bosco dont je vous répète depuis des lustres qu’il est un timonier très remarquable à la barre de son «galion espagnol» voguant sur l’océan de l’art brut.

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Villeneuve d’Ascq : de MAM en LaM

martine kiffe mon blog.jpgPauvre Martine! Avec tous les soucis que lui cause la téléévangéliste de son parti, voilà qu’il faut maintenant qu’elle s’occupe d’un MAM qui devient LaM! Depuis qu’il est fermé, on finissait par oublier le MAM (Musée d’Art Moderne de Villeneuve d’Ascq). Le voilà qui sort la tête dans la presse régionale, à la façon du monstre dans son Loch Ness.

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cerises.jpgUn article de Nord Eclair du 13 décembre 2008 fait la lumière sur l’avancement du chantier. C’est pas fini ! D’abord prévu début 2008, espéré pour le printemps 2009, le bébé ne devrait pas voir le jour avant les cerises de 2010.

Si, d’ici là, la naissance n’est pas contrecarrée par de nouvelles études et travaux supplémentaires, coûteux par définition.

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Les arguments invoqués pour expliquer ce retard m’ont semblé, je dois dire, excellents. On frémit à l’idée qu’on ait pu jadis passer à côté de placards amiantés, lors de nos visites dans le bâtiment historique construit en 1983 par Roland Simounet. Heureusement qu’on a fini par s’en apercevoir en ôtant les anciennes cimaises!

Le public n’imagine pas tout ce qu’on fait pour lui. Il va, il vient, il cause dans son téléphone portable, il se laisse vivre, le public.

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Il a tendance à se vautrer dans les vieilles idées, à enfiler les pantoufles des anciennes appellations. Il pense - croyez-vous que c’est bête - que ça va plus vite de dire «musée d’art moderne» parce qu’on l’a toujours dit, plutôt que «musée d’art moderne, contemporain et d’art brut» qui exprime tellement mieux ce que le MAM est en train de devenir. Il est attaché, le public, à de petites choses comme un clocher (mettons : à une ville, fût-ce une Villeneuve). Il aperçoit mal, l’innocent, la nécessité de se «positionner en métropole». De MAM à LaM, la différence est considérable, on en conviendra. Le règne sans partage de l’art moderne, c’est terminé, à Villeneuve d’Ascq, mets-toi bien ça dans le cigare, public rétrograde!

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Maquette de Manuelle Gautrand

Que tu le veuilles ou non, avec la nouvelle «main» qu’on est en train d’ajouter au bâtiment principal, le machin (j’ose plus dire le musée d’art mo…) de Lille Métropole (j’ose plus articuler Villeneuve d’) est en train de virer définitivement au monstre à 3 têtes.

La collection d’art moderne formée autour de la donation Masurel,

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la collection d’art brut formée à partir de l’atterrissage de L’Aracine,

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la collection d’art contemporain.

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En chiffres : 8400 m2, 3300 en surface d’expo dont 850 pour l’Art brut.
Trois têtes sous le même bonnet : telle est «la mue du MAM». Pas facile de trouver quelqu’un pour chapeauter tout ça. Un cabinet de recrutement a voulu chercher ch’capitaine. Il a été remplacé par un «exécutif communautaire». Objectif : choisir pour conservateur en chef «une personnalité incontestable» et que ça saute! Martine Aubry devra choisir entre 3 noms qui lui seront proposés. Avec tout ça, je suis sûre que cette pauvre maire de Lille n’aura pas le loisir de nous expliquer ce que signifie le logo LaM car moi là, j’avoue que j’ai pas bien pigé.

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Un soir de Nuit d’encre à Paris

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1404039750.jpgEt c’est reparti pour un tour. Le cycle infernal des vernissages. Vendredi soir, le 16 mai 2008, c’était celui de la Galerie Nuitdencre 64. Pourquoi 64? Parce que située au 64 de la rue Jean-Pierre Timbaud (11e) pardi. Sortez pas du métro comme moi (gourdasse que je suis) à République. C’est plutôt Parmentier, à peu de chose près dans les parages où la J.-P. T. forme une langue bifide avec la rue des Bornes.

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Nuitd’encre c’est une galerie noire près d’un café tout bleu. Vitrines bras ouverts sur l’expo qui réunit beaucoup de monde. Jacques Trovic, Gilles Manero, Alain Lacoste, Adam Nidzgorski etc. Consultez le reste du programme ici.

16 peintres en tout. C’est peut-être beaucoup. Ces univers différents ayant du mal à coexister ensemble, ça ne sert pas la lisibilité de l’ensemble et ça finit par accuser les points faibles.

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Allez-y fissa pour les 7 Martha Grünenwaldt dont 3 visages évanescents sur des torses gonflés comme des tulipes d’air multicolore. Toujours aussi bluffante, la chère petite mémé. Nous ne l’oublierons jamais.

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Dommage que monsieur Nanni et les autres glaciers-restaurateurs de Sicile m’aient séché tout mon bel osier, je me serais bien fadé un de ses dessins, d’autant qu’il ne sont pas proposés à des prix canon par Nuitdencre.

Tant que vous y êtes -et jusqu’au 30 juin, notez-le dans vos p’tites têtes- vous pourrez vous mettre dans l’œil les dessins de Jean-Paul Henri (c’est Henry, en fait, il y a une erreur sur le carton d’invitation).

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C’est en effet assez coton d’en rencontrer des œuvres de ce «garçon qui éprouvait des difficultés à vivre de la même manière que les autres hommes» comme l’écrit son père André dans un numéro que la pionnière revue Plein Chant a consacré à Jean-Paul Henry, quand vous n’étiez pas encore nés, mes chers Animulectrices et teurs, durant l’hiver 1975-1976 pour être précise.

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J’emprunte à ce numéro historique de Plein Chant, publié à un moment (faut le souligner) où ce genre de travaux artistiques n’étaient guère sur le devant de la scène, quelques images.

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1622402524.jpgEt puis je sors de cette note comme je suis sortie de Nuitdencre sous la pluie chaude pour aller me réfugier dans un équitable commerce voisin (Thé-Troc, 52 rue J.-P. Timbaud) où, par esprit de contradiction, je me suis consolée avec le café du Chiapas.
Ah, j’oubliais, vous trouverez Grünenwaldt et Henry sur le site de la Collection Frédéric Lux (Self taught/Art outsider) aussi.            

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« L’art brut … enfant gâté de la saison »

Difficile d’en savoir plus sur le peintre Pierre Giraud dont je vous ai parlé le 15 mars dernier dans ma note : Un enchanteur limousin ecdf6f8decc7db16eeda8a2bb2a3b838.jpgOn croirait le furet, le furet de la chanson : «Il est passé par ici, il repassera pas là».

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Par ici, cette fois c’est Sotheby’s of Paris et en vous remuant fissa vous aurez peut-être la chance d’apercevoir ou même d’acheter le joli petit lot 160 de la vente de livre et de manuscrits de demain jeudi 29 novembre 2007 en la Galerie Charpentier, rue du Faubourg St-Honoré, au 76. C’est une double page d’écolier à l’encre violette, une lettre de Chaissac Gaston, pas datée mais adressée, devinez à qui, à Pierre Giraud badame ! «enchanteur en cave à Limoges». Reportez-vous au catalogue de la vente pour looker les deux dessins du Gastounet qui agrémentent la missive : un escargot, un serpent, du genre allusif.

3ef8d1a996bd1e6a8617922dad0513df.jpgSotheby’s leur a préféré un Petit Prince de l’aviateur (St-Ex), plus commercial, pour la première de couv.
Je vous reproduis quand même cet enrhumé chronique et son cache-nez, rien que pour que vous n’ayez pas trop à chercher le dit-catalogue.

Celui ou celle qui a rédigé la notice de la lettre est bien sympa. Il nous en recopie un beau morceau et en plus, avec une loupe, on arrive à en lire plus sur la reproduction. Je choisis là-dedans ce morceau de grand frère où Chaissac a l’air d’engueuler Pierre Giraud : «On ne peut atteindre à la maîtrise sans avoir été apprentis et compagnon. Je vous vois en bonne voie pour devenir un jour un vieux Monsieur démodé et ridicule et je prends mon courage à deux mains pour vous crier casse-cou».

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Auparavant, il mettait P.G. en garde contre certaines facilités attachées à de commodes prétextes : «L’art brut tout enfant gâté de la saison qu’il est ne saurait indéfiniment emplir votre vie et faire résonner votre renommée et vous aurez beau garnir de moignons vos toiles c’est pas ça qui vous fera mériter de la patrie».

Je n’ai pas trouvé trace de cette lettre dans le volume Hippobosque au bocage mais vous pensez bien que je n’ai pas pu fouiller dans toute la correspondance publiée de Gaston Chaissac. Peut-être quelqu’un saura ? Chaissac quitte son poteau Giraud en lui « laissant deviner si tout cela est une boutade ou pas une boutade ». Pour ma part, j’emprunte ma conclusion à un dessin de Pierre Giraud.

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28.11.2007 | Lien permanent

Achilles Rizzoli à l'Intuit de Chicago

Today, vo’t p’tite Âme eRrante va vous parler d’Achille. Pas le grand Myrmidon chouchou d’Offenbach, encore que mon Achille à moi ait l’air d’avoir aussi le pied léger dans sa bottine de 1918. Non, c’est d’Achilles Rizzoli (1896-1981) dont j’vous cause. Le prodigieux dessinateur d’une skyline perso, sortie de sa tête de Tintin italien échoué en Californie, avec un col de chemise à la Eric Von Stroheim.

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Son œuvre est mal connue en Europe. C’est en 1997 qu’elle a été révélée aux Etats-Unis. Aujourd’hui et jusqu’au 5 janvier 2007, The Center for Intuitive and Outsider Art (Intuit) de Chicago consacre une expo d’envergure à cet Architect of Magnificent Visions, à ce maître utopiste, petit bureaucrate le jour et bâtisseur d’une réalité alternative la nuit.

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Un seul de ses dessins pouvait lui prendre des mois!

Et souvent ses gratte-ciel méticuleux sont aussi grands que lui. C’est que, dans son esprit, ils pourraient lotir le paradis. En bref, les immeubles de Rizzoli constituent des portraits de gens de sa connaissance. C’est des personnifications architecturales.

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Ils symbolisent une métamorphose de ces personnes après leur mort. D’autres convertissent en monuments des abstractions : travail, vie, bonheur, culture et paix. Je vous passe les détails mais Rizzo avait tout un tas d’idées grandioses. Il croyait que ses visions étaient la base d’une suite de la Bible. La renaissance de Frisco après le tremblement de terre de 1906 l’avait marqué.

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Célibataire vivant près de sa mère, écrivain incompris témoignant de la souffrance psychique accompagnant ses créations, Achilles Rizzoli s’oriente dans une forêt d’allégories, de jeux de mots, de métaphores qui nous laissent babas (pas cool). 1936 reste pour lui une année charnière. 21 ans après la disparition de son père, on lui confirme que celui-ci s’est suicidé : ses restes ont été identifiés.

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L’année suivante sa mère meurt à 63 ans. Son premier dessin, une carte d’anniversaire était à la gloire de mother. Ensuite et jusqu’à une attaque qui le léguminise en 1977, Rizzoli perfectionne ce monde proliférant dont il est le Prince et le Grand Architecte, à coups de dessins combinant ingénieusement les emprunts. A l’Art-Déco, au gothique revival and so on.

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11.10.2007 | Lien permanent

«Les alentours de l’art brut» chez Serpentine

J’ai eu du mal à trouver la galerie Serpentine. Il faut dire qu’elle s’enfonce dans le sous-sol parisien sans crier gare. Imaginez une large voie en tire-bouchon, glissante comme une honnête rampe de parking qu’elle est. Ce côté Guggenheim du pauvre, à deux pas de la gare Montparnasse, a de quoi amuser. Surtout avec ses machines à sous automatiques dans l’entrée du 155 bis, en haut de la surpeuplée rue de Rennes. S’il faut payer pour récupérer sa bagnole, l’entrée de l’expo est gratuite.
C’est monsieur Montpied (ex-aequo avec monsieur Pariscope) qui m’a signalé, fin janvier dernier, cette rétrospective Jacques Soisson (1969-1993). Sa description des lieux vous dira, mieux que votre petite âme errante, l’originalité de ces lieux momentanément voués aux Alentours de l’art brut : «
Couloir lumineux, serpentin (d’où le nom), peint en blanc pour les murs, et vert pistache pour le sol où l’on imaginerait bien des moutards se lancer dans des courses de caisses à savon
Les œuvres sont accrochées de telle manière qu’on puisse voir les unes à la descente et les autres à la montée. Sans que cela soit trop dur à avaler ni cause de régurgitation, le spectacle à vrai dire ne provoque ni surprise ni émotion chez le visiteur.
«
Les peintures de Jacques Soisson ne me paraissent pas relever d’un quelconque art brut mais plutôt d’une solide culture ancrée dans une observation serrée de ses contemporains en art» poursuit Bruno Montpied. On ne peut guère lui donner tort quand il écrit que «l’on assiste en quelques mètres de parcours de l’exposition à des citations éclatées de divers artistes admirés par l’auteur, Dubuffet, Léger, Miro, etc., tous plus ou moins démarqués ou déconstruits dans une facture sage et presque décorative». Le plus marrant c’est que cette expo reprend le titre d’un article de Jacques Soisson paru il y a des éternités (1973) dans le gros pavé consacré par L’Herne à Dubuffet. C’est encore Montpied qui met le doigt dessus. Il lui semblait se souvenir que Soisson était de la visite que Françoise Dolto avait faite à la Collection de l’art brut, rue de Sèvres, en 1970. Teigneuse comme je suis, j’ai fait 3 bibliothèques pour vérifier.
Et ben, c’est vrai.


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Ste Foy-la-Grande : réveil des créatures de la nuit

venus calavera.jpgPour le 1er novembre, je vous avais préparé un joli petit calavera mais voilà que les créatures de la nuit de Franc Barret pointent leur terrible museau dans la presse et je préfère vous inviter à regarder l’horizon. L’article de Jean-Claude Faure du 31 octobre 2009 dans Sud Ouest (actualités de Sainte-Foy-la-Grande) nous fait miroiter l’ouverture du nouveau musée Barret pour septembre 2010. Occasion de nous mettre en pleine lumière la Chauve-souris vampire et l’Homme de Cro-Magnon.

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photo J.-C. F. pour Sud Ouest

En compagnie de monsieur Pierre Lamothe (en arrière-plan avec les lunettes), fondateur du Musée du Pays foyen et défenseur de l’histoire locale qui travaille avec son association à la résurrection de l’œuvre de Franc Barret.

FB.jpgLes Animuliens qui auraient un peu oublié qui est Barret peuvent se reporter à ma note du 11 juin 2008 : Souvenirs de Franc Barret et au commentaire de monsieur Philippe Lafaye.

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01.11.2009 | Lien permanent

Prague 2013 : Jan Křížek sort de l’oubli

C’est une chose qu’on ignore parfois mais la Tchèquie existe et à Prague un Institut français où il se passe des choses. Tiens, le 6 mai dernier : on y présentait l’importante monographie d’Anna Pravdová sur Jan Křížek. Anna Pravdová, conservatrice à la Galerie Nationale de son pays, a des liens avec le nôtre et parle le français. Ce qui nous vaudra peut-être dans l’avenir des éclaircissements supplémentaires sur son travail.
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Entretien d'Anna Pravdová avec Anna Kubišta

sur Radio Prague (1) et (2)

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Sa monographie, qu’on dit nourrie et fort illustrée, accompagnera du 31 mai à la fin septembre 2013 une grande exposition Křížek (1919-1985), intitulée Jan Křížek et la scène artistique parisienne des années 1950.

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Dans le Manège du Palais Wallenstein, grosse perle baroque du quartier de Malá Strana.


Occasion pour les Tchèques de se réapproprier l’œuvre de cet artiste qui, après le Coup de Prague en 1948, vécut chez nous. cabane.jpgD’abord à Paris puis au fond de la Corrèze où il se bâtit une maison dans les bois. La notice Wiki sur Křížek est plutôt anorexique. Elle le décrit coincé entre surréalisme et art brut. Il serait surtout du genre inclassable et l’expo de Prague ambitionne de mettre en lumière sa captivante spécificité.

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Qu’on le veuille ou non, il appartient cependant à la légende de l’art brut. Son nom reste attaché à la période pionnière où ce concept découvert par Jean Dubuffet s’affinait progressivement.

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Avec Miguel Hernandez, Juva, Pierre Giraud et le controversé Robert Véreux, Jan Křížek eut les honneurs de l’une des 5 brochures historiques que René Drouin, galeriste de Dubuffet, édita pendant la période d’activité du Foyer de l’Art brut (15 novembre 1947/été 1948).

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Le texte de Michel Tapié qui figure dans cette plaquette ne cache pas l’origine «culturelle» de la découverte du «cas» Křížek.

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C’est le sculpteur cubiste espagnol Honorio Condoy qui lui signale (ainsi qu’à Henri Pierre Roché par ricochet) les sculptures du jeune tchèque, selon lui «tout à fait dans la même ligne» que les Barbus Müller.

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Le destin de Křížek montre ensuite que Condoy, Tapié et Roché ne se trompaient pas tout à fait sur la nature «brute» du talent du sculpteur. Deux faits sont là pour en témoigner. Un épisode iconoclaste au cours duquel Křížek détruit certaines de ses sculptures sous prétexte qu’il n’a pas les moyens de les transporter à la campagne. Une phrase révélatrice qu’il prononce quand il renonce à la création sculpturale (1962) pour devenir apiculteur : «enfin je suis guéri, je peux arrêter mon travail artistique».

art brut,surréalisme,jan krisek,anna pravdová,radio prague,rené drouin,michel tapiéJan Křížek à Gordes, été 1955

Photo tirée de la monographie d'Anna Pravdová

L’histoire retient que Dubuffet ôtera très vite les rênes de l’art brut des mains de Michel Tapié. Ce dernier, dans une note additionnelle à son texte de la plaquette Drouin, a conscience du problème posé par Křížek : «Tant pis pour ceux qui penseront que je brouille les cartes. Souvent trop des mêmes qui -avec raison- protestent contre les brimades, voire les honteux internements arbitraires des champions du verbe et de la vision ne voudraient, sans quoi ils ne marchent pas, voir en l’Art Brut qu’un asile ou une cage à singes (…)».

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19.05.2013 | Lien permanent

Ostie d’câlisse de tabarnak d’art brut

Pauvre Belgique! Animula te laisse tomber. Pourtant avec tous ces maudits Français qui ont colonisé Bruxelles, j’aurais dû signaler, chez Art & Marges, l’exposition d’art brut polonais intitulée -Dieu sait pourquoi- Une hostie dans une bouteille/Een hostie in een fles. «Art brut», je risque le mot bien qu’il soit tricard dans le matériel promotionnel de l’expo de la rue Haute organisée avec la collaboration d’un tas de chouettes partenaires de Pologne (galeries, musées et hostos psy).

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On ne répugne pas en revanche du côté d’A&M à l’usage du mot «artiste». Ce qui nous donne un sous-titre aussi vague que le titre est obscur : Artistes polonais/Poolse kunstenaars. In english : Polish artists. On peut rien rêver de plus général? Dacodac comme dirait Alex dans Orange mécanique.

Aux dernières nouvelles, Dieu contacté m’a tout de même fait savoir que l’hostie et la bouteille provenaient d’une phrase de Maria Wnęk, l’une des personnalités présentes dans l’expo polono-bruxelloise. Sauf que la phrase est amputée de son début : «Du lait au lait»!

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L’hostie, on comprend : ça plait aux cathos. Et la bouteille vous a un petit air si «art populaire» qu’on crache pas dessus. Mais les deux ensemble, c’est moins évident question communication. Heureusement que le public n’est pas obligé d’apprendre ce titre par cœur! S’il se souvient du contenu, ce sera déjà très bien. Car ce contenu le mérite puisqu’il conjugue des talents profondément variés sur l’échelle de la brutitude : Marian Henel

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Adam Dembiński

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Justyna Matysiak

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N’oublions donc pas qu’il ne reste que peu de jours pour se précipiter à l’exposition d’art brut polonais de Bruxelles/Brussel. Cela fait déjà un moment que des Animuliens vigilants me suggeraient d’y faire un détour.

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Mais le temps tout pourrave… Mais le Père Cepteur qui a ratissé toute ma thune… Mais un certain désenchantement aussi dont je retrouve l’écho dans un article de Danièle Gillemon dans Le Soir m’ont détournée de ce «voyage vers les univers» d’une vingtaine de créateurs parmi lesquels le grand Edmund Monsiel.

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Créateurs bruts ou brutoïdes dont on n’a pas souvent l’occasion de voir les œuvres. Et qui nous changent des «vedettes américaines» (certes incontestables) : Traylor, Ramirez, Darger, et maintenant Deeds dont le marché dominant de l’art brut nous impose la ronde -à force monotone- de New York à Lausanne City en passant par les salles de vente du huitième arrondissement de Paris.

A noter que j’emprunte mes images ci-dessus (hors vernissage) ainsi que celles des œuvres de Przemyslaw Kiebzak

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et Ksawery Zarębski

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à des sources extérieures à l’exposition bruxelloise car le leporello d’Art & Marges et son site Internet sont plutôt chiches en reproductions. Raison de plus pour avaler l’hostie et la bouteille en live si c’est dans vos moyens. Vous l’avez compris : c’est pas du petit lait.

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20.05.2013 | Lien permanent

De l’art brut parmi les cœurs brisés

Cela devient coton de trouver de l’art brut. Je veux dire du vrai de vrai. De l’art brut qui ignore comment il s’appelle. De l’art brut sauvage, anonyme, ignoré. En marge de cet art brut officiel, répertorié, pré-digéré qu’une synergie internationale de collectors, curators, filmmakers, galerists, art-critics, teachers, art lovers et même bloggers s’emploie à nous faire rentrer dans la boîte avec un ruban par dessus le marché.

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Certes, cette Académie est loin d’être mal intentionnée. Elle me fait même penser à cette Ecole du chat libre qui stérilise les vilains matous plutôt que de les euthanasier. Mais cette Académie de l’art brut a beau faire pour épargner à celui-ci les rigueurs de la liberté, elle ne peut parvenir à ce que, dans les jungles policées où se déroulent nos mornes existences, nous ne croisions parfois un petit fauve encore errant, sans puce électronique.

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C’est ce qui m’est arrivé cet après-midi au Centquatre et j’en ai eu la chair de poule. J’étais entrée dans ce temple du hip hop, attirée par une exposition du Musée des Cœurs brisés de Zagreb prolongée jusqu’au 6 février 2013.

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Il faisait une chaleur à crever dans la noirceur des vastes salles en sous-sol où sur de blancs piédestaux étaient présentés, comme s’il s’agissait de la Vénus de Milo, des objets écrasants de dérisoire : brosse à dents, plaque d’immatriculation, paire de Converse, frisbee, gants, sex-toy, battoir à œuf etc. L’impression d’un vaste foutage de gueule.

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«Encore une expo où il y a plus à lire qu’à voir», me dis-je. C’était de ma faute. L’idée m’avait paru bonne : ce dépôt de souvenirs d’amours défuntes.

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Mais, mis à part devant la carte postale assortie d’un court témoignage d’une vieille dame arménienne évoquant l’issue tragique d’une demande en mariage contrarié, je ne me sentis guère atteinte par l’émotion.

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Les objets étaient banals à pleurer et la plupart du temps on se fichait des commentaires qui les accompagnaient. Soit qu’on ait la flemme d’en prendre connaissance. Soit que leur contenu ne dépassait pas celui des histoires tombées des téléphones portables dans le métro.

Et puis je suis entrée dans l’avant-dernière section et je n’ai plus eu d’yeux que pour elle.

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Cette broderie déjantée à la véhémence baroque luttant avec l’effacement des souvenirs comme les personnages du film de Michel Gondry : Eternal sunshine (…).

Ecorchée et lyrique. Filandreuse, couturée, perforée, sanglante.

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Superbe de souffrance à vif non de mélancolie caressée. Impressionnant codex dont les pages de grosse toile fripée et cousue pourraient provenir d’un drap d’hôpital.

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Waaaah! Du texte évocateur qui l’accompagne, on déduit une histoire d’amour, la folie qui s’insinue, l’errance dans Delhi, la danse avec Shiva.

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Et ce mort que l’on supplie de venir hanter les rêves comme dans The Scientist la ballade sirupeuse de Chris Martin du groupe Coldplay. Références bien culturelles mais quel auteur d’art brut aujourd’hui n’en a pas?

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L’essentiel étant qu’en matière de solutions plastiques, l’auteur de cette broderie extraordinaire s’avance en solitaire, tous vaisseaux brûlés.P1060108.JPG

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