20.12.2006
Le petit livre vert d'Allen S. Weiss
J'en ai soupé de me traîner au boulot chaque jour au lieu de m’animuser à vous pétiller des chroniqueuses élucubrutations.
J’ai beau dormir que 5 h par nuit comme les Japonais dont Lucienne Peiry nous révèle les curieuses mœurs conférencières (accroupis sur tatamis) dans une série d’émissions de Radio-Suisse-Romande, j’ai tendance à oublier des trucs.
C’est ainsi que j’ai laissé passer l’expo-vente Slavko Kopac organisée par Mme Kopac et son fils Laurent dans l’atelier du peintre. Je me serais donné des baffes, pour me réveiller car je dors dans le métro comme une nippone d’automne. Comment voulez-vous après ça que je vous mitonne des petites maximes du genre :
L’art brut n’est ni un parti ni une religion, c’est une cause gagnée d’avance.
Non vraiment, j’ai pas le temps, en plus j’m’en voudrais de vous prendre le chou, mes petites «denrées» (hello René Fallet).
A propos de chou, et dans la droite ligne de ma note précédente, je vous signale le petit livre vert d’Allen S. Weiss, un écrivain né dans le South Bronx de parents ayant fuit la Hongrie du fait des persécutions des gros nazes que l’on sait. Il fréquente l’Aubrac et les restos grands et petits.
Sa passion pour le chou farci de sa maman l’a amené à entrelarder les feuilles de son ouvrage gastronomo-littéraire de considérations sur Antonin Artaud. Nous remémorant la «canne transformée en croix, plantée dans la terre, et habillée d’immenses feuilles de chou» inspirée au poète par la comptine de Roudoudou
Roudoudou n’a pas de femme,
Il en fait une avec sa canne,
Il l’habille en feuilles de chou,
Voici la femme de Roudoudou
Weiss nous cite un passage d’une lettre envoyé par Artaud à la même époque (oct. 1943) à Ferdière qui l’avait branché sur ce sujet : «On apprend dans la tradition occulte que le chou est la forme que prend le néant pour se manifester à la conscience humaine… Il paraîtrait que Satan, le hasard issu de l’inexistant, se serait servi de cette forme pour composer l’organe sexuel féminin…».
Le cabinet de curiosité d’Allen S. Weiss contient aussi : une poupée de Michel Nedjar, des ex-voto en alu, une pierre paysagée chère à Roger Caillois, la photo «du graffiti d’une tête de diable souriant, prise dans l’ancien Barrio Chino de Barcelone».
23:10 Publié dans Ecrits, Ogni pensiero vola, Poésie naturelle, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : antonin artaud, art brut | | Imprimer | | |
Commentaires
Mais quelle drôle de coincidence, chère Ani... Figure toi que hier j'étais chez le coiffeur pour ma coupe semestrielles et pendant que j'attendais sagement mon tour sur un beau fauteil, sirotant ma tisane et réniflant des incenses douces et délicates (c'est beaux un peu de new age et des produits aveda de temps en temps...) je lisais un Vogue quand je suis justement tombé sur le compte rendu du dernier livre de Allen S. Weiss, auteur remarquable que je connais trop peu. Je ne sais pas si le livre qui vient de sortir ici est le même de celui dont tu parle. En Italien, le titre c'est: "Comment préparer la Fénice. Essaie sur l'imaginaire gastronomique". Et il est question de comment mettre dans la cassarole cet animal qui déjà n'existe pas, et qui en plus, selon sa leggende, il prends feu spontanément tous les 500ans... Es-que tu pense que c'est le même livre?
Et puisque tu parle d'ex-voto, je cherche des bons textes sur ce sujet. J'en ai trouvé un pas mal de Georges Didi-Huberman (Ex-voto. Image, organe, temps. Bayard) pas si mal mais un peu mince. Si vous animuliens avez des meilleures sujestions... c'est pour une bonne cause! Merci à l'avance.
Écrit par : Teresa | 21.12.2006
le chou canne est une réalité, voir :
http://www.patauge.org/articles/autresArticles2.php?id=9
dont illustration
j'ai vu d'ailleurs non pas la plante, mais une canne réalisée à partir de cette sorte de chou que nous a montrée la présidente de l'association Monviette Nature, personne dans l'assistance ce jour-là n'a deviné que cette canne provenait d'un chou
cordialement
PH
PS on voit de très beaux ex-voto maquette de bateau à Notre-Dame de Grâce à Honfleur
Écrit par : pascale herman | 21.12.2006
Allen S. Weiss est, je suppose, car on ne le connaît pas très bien de ce côté-ci de l'Atlantique, ce critique d'art américain (je l'ai longtemps cru Australien) qui fut le premier -à ma connaissance- à révéler en Europe l'existence de la collection d'art asilaire du docteur Benjamin Rush aux USA en 1800 et quelques. Ce que j'avais signalé dans une note de lecture d'Artension (2ème série, n°6, oct 1988), rendant compte du recueil "L'Art brut et après" édité par Gérard Preszow chez Art en Marge en juin 1988 où était inséré l'article de Weiss). Cette information m'avait à l'époque passablement sidéré, un médecin américain avait donc conservé les oeuvres de ses patients bien avant les Dr.Morgenthaler, Marie, Prinzhorn et consorts, presque un siècle avant. Cela faisait reculer l'âge de l'art brut d'autant.
Cette information, qui me paraît personnellement capitale quant à l'histoire de l'art brut, a bien entendu été reprise d'ouvrage en ouvrage, quoique sans grand développement supplémentaire, par exemple dans le catalogue "Art brut" de l'exposition consacrée à la mise en dépôt de la collection de l'Aracine au musée d'art moderne de Villeneuve-d'Ascq en 1997. En cherchant bien, on la verrait passer de main en main, de compil en compil, et jusqu'à la dernière en date, de M.Danchin qui bien sûr -le manque de place dans ce genre de collection, "Découvertes Gallimard", étant bien connu- était tout à fait excusé de ne pas citer l'origine de l'information (la mention de Rush est p.98). C'est le principe des compils, on réutilise le travail de tout le monde qui a déjà été compilé ailleurs, ce qui dispense de faire des citations, surtout qu'en plus on manque de place. Bon, mais alors qu'on ne vienne pas nous dire que LD "cite tout le monde".
Il me semble tout de même que sur certaines informations aussi importantes, il serait pour le moins honnête de citer l'origine de l'information. Pour les lecteurs, les amateurs, cela redonnerait un autre éclairage au nom de ce monsieur Allen S. Weiss dont, personnellement, les allusions aux choux sur votre blog, même s'il m'arrive d'en être moi aussi fort friand (d'où sans doute les "maux" de ventre que redoute tant M.Zydus de la Courneuve), ne suffisent pas à éclairer toute l'importance...
Bruno Montpied.
Écrit par : Bruno Montpied | 22.12.2006
@Pascale Herman
Puisque vous évoquez Honfleur et ses ex-voto, vous souvenez-vous du monsieur qui, dans une ruelle derrière l'Eglise Saint-Etienne (abritant le Musée de la Marine), fabriquait des petits bateaux qui se différenciaient fort, par leur savoureuse rusticité, avec les objets qui se vendent dans les boutiques de souvenirs? C'était il y a 15 ans sinon +. Il habitait un rez de chaussée et vendait (discrétement car il était craintif) pour quelques francs ses charmantes oeuvrettes qu'il installait soigneusement sur le bord de sa fenêtre.
Écrit par : ani | 25.12.2006
non malheureusement je ne me souviens pas de ce monsieur et pourtant cela fait longtemps que j'y vais ; je regrette de ne pas l'avoir rencontré. A honfleur je recommande le musée Eric Satie que j'ai visité en février dernier ; vu sa taille, il vaut mieux éviter l'affluence d'été ; ils ont su créer un lieu qui semble tout à fait en accord avec ce que j'ai pu lire à son sujet et écouter dans sa musique.
Écrit par : pascale herman | 25.12.2006
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