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30.08.2013
Folk art américain à Lyon comme à New York
On nous annonce pour bientôt (fin septembre – début octobre 2013), dans le cadre de la Biennale HLN, une exposition lyonnaise consacrée à l’American Folk Art doublée d’un numéro de Gazo. C’est le moment de faire le plein de super avant l’étape.
Même s’il faut pour cela faire un détour par New York. Jusqu’au 22 septembre 2013, l’American Folk Art Museum de la Grosse Pomme expose quant à lui le considérable Bill Traylor.
Bonne façon de commémorer le cinquantenaire du discours historique de Martin Luther King «I have a dream») du 28 août 1963.
C’est dans la ville de Montgomery en Alabama (qui sera en 1965 un des principaux théâtre des luttes pour les Droits civiques) que Bill Traylor termina sa vie en 1947.
On insiste généralement beaucoup sur le début de son existence car, né esclave en 1854, il fut affranchi après la Guerre de Sécession et il demeura ouvrier agricole sur la plantation de coton de sa jeunesse. Mais ce sont ses dernières années qui sont vraiment remarquables bien que marquées par la pauvreté, l’infirmité et la vieillesse. C’est que ce furent aussi d’intenses années de création au cours desquelles il réalisa, sur ses genoux et accroupi dans la rue, environ 1500 dessins extraordinaires.
L’expo de l’AFAM est constituée à partir de deux collections. Celle du High Museum of Art et celle du Montgomery Museum of Fine Arts. Environ 63 dessins et peintures.
A ces deux volets s’en ajoute, semble-t-il un troisième intitulé : Traylor in motion : wonders from New York Collections dont les commissaires sont Stacy C. Hollander et le Dr Valérie Rousseau. Pourquoi «en mouvement» (in motion)? J’avoue ne pas avoir très bien compris à la lecture du site du musée mais vous êtes sûrement plus forts en anglais que moi.
Dommage quand même que le Dr Rousseau qui a fait ses études à Montréal et à Paris n’ait pas songé à insérer quelque part un petit texte en français pour le public suisse, français, belge, québécois etc. qui s’intéresse aussi à Bill Traylor, figurez-vous.
23:24 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos, Images | Lien permanent | Commentaires (1) | | Imprimer | | |
22.08.2013
Raw Vision et Membracides font la rentrée à Paris
Tout a l’air assoupi mais y’a de l’expo dans les tuyaux. Pendant que vous marinez les pieds dans l’eau, on s’active à Paris. Votre petite âme errante fait de l’espionnage industriel. Ayant surpris une arrivée de grosses caisses à la Halle Saint-Pierre, elle est allée au cul du camion pour guetter le nouvel arrivage.
Les portes du musée sont trop petites pour lui mais Martine Lusardy, le capitaine du vaisseau amiral de la Butte Montmartre est sur le pont et elle résoud tous les problèmes. Dans sa lorgnette, le vernissage de sa prochaine exposition qui se profile pour la mi-septembre 2013 : Hey 3. Nan…, je plaisante bien sûr!
Ce coup ci c’est Raw Vision qui s’y colle et ça nous promet une cargaison d’art brut en framboise sur vert petit pois. J’ai tellement harcelé Mme Lusardy qu’elle a fini par me donner le carton d’invitation en avant-première. Dédicacé en plus!
Abusant de sa courtoisie, j’ai jeté un œil sur la marchandise en instance d’accrochage. Petit trésor de Shinichi Sawada répandu sur une table…
Et puis, surprise! M.L., se muant en grande prêtresse, a convoqué les masques. Deux grands mannequins couturés que l’on dirait ramenés d’un voyage exotique. Idoles dressées à mordre le ciel.
Tragédiennes drapées de voiles chamarrés. Un travail textile ancien de Danièle Jacqui. Opéra baroque mais non sur-joué, il faut le signaler.
Sans transition, quoique… Save your date itou pour Caroline Sury et ses Membracides. C’est le 31 août 2013, le vernissage. Un samedi. A la Galerie Arts Factory c/o Galerie Lavignes-Bastille, rue de Charenton au 27.
Membracides. Est-ce parce qu’ils sont suceurs de sève ou pour leur aptitude au camouflage que Caroline Sury a choisi ce nom pour baptiser ses papiers découpés?
Eternelle question du mimétisme bien agitée jadis par Roger Caillois. Personnalité de la scène graphique française depuis sa folle jeunesse post-punkeste, Caroline Sury s’attaque au problème avec l’entrain crâne qui la caractérise. Et ce sens du quotidien autobiographique qui ne la quitte jamais.
Caroline Sury n’est pas d’art brut mais elle le mériterait. Elle crie toujours joliment fort mais sans énervement inutile depuis qu’elle a tourné la page éditoriale à laquelle elle a consacré beaucoup d’énergie dans sa vie. Cela ne lui va pas si mal au teint.
11:59 Publié dans art brut, De vous zamoi, Expos, Glanures, Images, Miscellanées | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : halle saint pierre, raw vision, martine lusardy, shinichi sawada, danielle jacqui, caroline sury, membracides, papiers découpés, galerie arts factory | | Imprimer | | |
18.08.2013
Chaissac et Dubuffet vont à la poste
Le plus simple c’est de sortir à Montparnasse et de traverser le centre commercial. C’est frais et on est à l’ombre. Idéal avant d’affronter le cagna du boulevard de Vaugirard. Résistez à la tentation des montagnes de fringues dans les vitrines. La rentrée est encore loin et tout à l’heure, vous aurez envie du catalogue de l’expo Chaissac-Dubuffet (25 € seulement) au Musée de la Poste.
Pour Angels, Demons and Savages, c’est plus coton. Là, je suis comme tout le monde : une vraie touriste. Mais ce que je sais c’est qu’au Parish Art Museum de Water Mill c’est encore le nom de Dubuffet qui claque.
Water Mill c’est le premier moulin de New York et c’est au bout de Long Island. Pourquoi je vous en cause ? Parce que le PAM de WM a l’idée de confronter jusqu’au 27 octobre 2013 un monstre sacré américain, Jackson Pollock avec notre Dub national par le truchement du grand passeur Alfonso Ossorio.
Un nom de bandit mexicain dans un western? Peut-être. Mais c’est ce peintre et collectionneur plein aux as qui abrita -vous vous en souvenez- la collection d’art brut de Jean Dubuffet quand celui-ci, suite à un coup de blues, décida de mettre au dodo sa première Compagnie et d’exiler ses joujoux à Long Island chez Osso, justement.
Je sais pas s’il y a des enquêtes de satisfaction à Water Mill mais au Musée de la Poste Entre plume et pinceau, on se décarcasse un max. Accueil aimable, parcours clair, photos tolérées (no flash svp), clim. On resterait des heures.
Je m’attendais : 1) à quelque chose de convenu, 2) à du déjà vu, 3) à des prises de tête pour cause de correspondances interminables à lire, 4) à des p’tits jeux sur qui a copié l’autre. Et bien pas du tout.
Si vous ne connaissez rien à la chose, c’est une belle introduction à l’œuvre de deux peintres parfaitement indépendants et pourtant liés par un instinct de stimulation réciproque et une profonde estime.
Si vous êtes un vieux de la vieille comme votre petite âme errante, c’est l’occasion d’une bonne révision de vacances.
On revoit des œuvres qu’on connaissait déjà mais c’est comme on retrouve de vieux amis dans un éclairage nouveau (heu… pas trop violent l’éclairage), magnifié par le temps.
Grand mérite de l’accrochage : on passe souplement par le simple jeu des formes de l’univers de l’un à l’univers de l’autre.
Si on n’a pas craint la confrontation par ci par là c’est plutôt par petits ensembles d’œuvres (dessins, peintures, sculptures) que les deux compères sont fraternellement mis côte à côte.
Les deux y gagnent avec la révélation de deux voies de concentration différentes. L’exposition fait aussi une large part aux documents rares et ce n’est pas pour moi un de ses plus petits mérites.
13:38 Publié dans art brut, Expos, Images, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (4) | | Imprimer | | |
12.08.2013
Raoul Lehuard : un précurseur sur la sellette
Ouvrons le catalogue de l’exposition Charles Ratton, l’invention des arts primitifs. Même si celle-ci n’est pas encore très fréquentée, je suis sûre que ce sera un ouvrage de référence.
On y apprend beaucoup de choses. Y compris des choses que l’on savait déjà car il a été précédé en 1986 par un texte de l’ethnographe Raoul Lehuard : Charles Ratton et l’aventure de l’art nègre. Publié juste après la mort de Ratton mais conçu bien avant, cet article biographique constitue à lui seul le n°60 de la revue Arts d’Afrique Noire disparue en 2004.
Introuvable aujourd’hui, ce numéro est fort recherché par les collectionneurs d’art africain. C’était jusqu’à présent la seule source d’informations sur ce sphinx de Ratton. Est-ce une raison pour le dévaloriser maintenant comme le catalogue du Musée du Quai Branly n’hésite pas à le faire?
L’un des commissaires de l’expo Charles Ratton (Philippe Dagen pour ne pas le nommer) ne rate en tous cas pas une occasion de «flinguer» le travail de Raoul Lehuard. Comme s’il s’agissait d’écarter la concurrence! Une méthode plus fair play aurait été possible. Il suffisait de situer l’article de Lehuard dans son contexte historique. D’admettre qu’il constituait la première pierre d’un édifice dont on posait le toit 27 ans après.
Au lieu de ça, toutes les ficelles pour reléguer dans l’oubli un ouvrage précurseur ont été utilisées ici. On chipote sur l’orthographe d’un nom, on exploite certaines formules ambigües, on reproche à un homme, qui ne disposait ni du recul nécessaire, ni de la logistique d’une entreprise muséale, de n’avoir pas assez fouillé dans les archives de la Galerie Ratton. On conteste ses sources orales même quand son informateur est Charles Ratton lui-même : «Erreurs de mémoire d’un homme âgé (…)», p.17
Raoul Lehuard
Tout cela manque volontairement de bienveillance, c’est à dire de mesure, à l’égard d’un chercheur qui prenait le risque d’essuyer les plâtres. Il était sans doute nécessaire de rectifier certaines erreurs ou approximations de Raoul Lehuard. Il n’était pas indispensable de le traiter en rival à discréditer en prétendant «repartir de rien» (p.12)
Mieux inspiré nous paraît le catalogue du MQB quand il met en exergue ce fait fondamental : l’obsession de Charles Ratton pour le secret. Le «personnage» était «parfois plus fermé qu’une huître» remarquait déjà en 2007 Raoul Lehuard dans un autre de ses ouvrages, L’Empreinte noire (p.35)
C’est ce secret qui engendre les divergences d’interprétation actuelles car il excède celui dont un marchand d’art ordinaire entoure ses activités prospectives. «La règle impérative (…) est de ne jamais confier à ses clients la provenance des objets (…)» disait Ratton.
Force est de constater qu’il continue dans la tombe à appliquer ce principe. Ceux qui comptaient sur le catalogue du MBQ pour connaître enfin l’origine des fameux Barbus Müller, vedettes du premier fascicule de L’art brut en 1947, en seront pour leurs frais (35 €).
L’ombre de Charles Ratton qui plane derrière ces Barbus (dont beaucoup, sinon tous, lui appartinrent) reste muette à leur sujet.
15:39 Publié dans art brut, Ecrits, Expos, Gazettes, Lectures | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : charles ratton, raoul lehuard, philippe dagen, barbus müller, musée du quai branly | | Imprimer | | |
11.08.2013
Quai Branly, ne ratez pas Ratton
Ne visitez pas l’Exposition Coloniale disaient les surréalistes en 1931.
Visitez plutôt en 2013 l’exposition Charles Ratton, L'invention des arts primitifs, au Musée du Quai Branly.
C’est l’occasion de découvrir la vie et la carrière d’un grand acteur du marché de l’Art Nègre qui est aussi une éminence grise de l’art brut.
Petit rondouillard à lunettes, toujours bien sapé, Charles Ratton mouilla toute sa vie sa chemise pour gagner sa thune en rêvant de faire entrer ses chers arts primitifs au Louvre. Ce marchand de chez marchand possèdait l’art d’accrocher son wagon aux locomotives médiatiques.
En 1931, sous prétexte que «ça aiderait», il persuade Paul Eluard d’organiser la vente publique de sa collection (et de la collec André Breton), pendant cette fameuse Expo Colo sur laquelle les surréalistes gerbaient pourtant avec quelques raisons.
Ceux-ci feront toujours confiance à Ratton même quand des rumeurs courront à son propos parce qu’il avait continué son business avec ardeur pendant l’Occupation.
A ses copains de la Brasserie Cyrano, Charles Ratton, en 1936, passe les clés de sa galerie pour une mémorable Exposition surréaliste d’objets où Breton se livre à une nomenclature subtile : «objets naturels, interprétés, incorporés, trouvés etc.».
Des «objets perturbés» par l’éruption d’un volcan en 1902 sont visibles dans l’expo du MQB.
Quantité d’expos et de ventes publiques sont encore à l’actif de Charles Ratton. Bien que tout ça soit hors de mon sujet, j’avoue mon faible pour La Mode au Congo de 1937 à cause de ces petits bibis.
Chacune de ces initiatives rattoniennes a donné lieu à des affiches, catalogues et flyers dont beaucoup sont rassemblés dans l’expo du Quai Branly à côtés des pièces provenant de la Collection et du Bureau (reconstitué) de Charles Ratton.
Pièces d’exception autour desquelles «on ne peut pas tourner» comme dit un râleur dans le Livre d’or. La plupart de ces œuvres d’art et de ces passionnants documents sont reproduits dans le catalogue de l’expo qu’il vaut mieux feuilleter avant la visite pour mieux déguster celle-ci.
La plupart sauf … quatre compactes et «grandiloquentes compositions» d’Hodinos (comme dit Jean Dubuffet auquel Charles Ratton les avait montrées)
et une «broderie» d’un «fou», dessin de fils blancs sur tissu noir dont on retrouve la trace dans le bouquin de Marcel Réja, L’Art chez les Fous(1907).
Mais ceci est une autre histoire que je continuerai la prochaine fois.
18:36 Publié dans art brut, Ecrits, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, arts primitifs, art nègre, charles ratton, jean dubuffet, andré breton, paul eluard, emile josome hodinos, exposition coloniale 1931, musée du quai branly | | Imprimer | | |