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03.09.2011

Art Brut and Then Some chez Cavin-Morris

Hey honey, take a walk on the non-mainstream side!

Irène qui venait des Caraïbes est un souvenir. Le calme est revenu à New York après la tempête mais le cerveau de Randall Morris bouillonne toujours. Le 10 septembre 2011, la nouvelle exposition de la Cavin-Morris Gallery ouvre ses portes et son titre dit bien ce qu’il veut dire : Art brut and then some. Axée aussi bien sur des œuvres asiatiques, américaines qu’européennes, elle réunira, jusqu’au 15 octobre 2011, une sélection d’œuvres de créateurs défendus par la Galerie.

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Cela va des constructions guérisseuses d’Emery Blagdon aux dessins médiumniques d’Helen Butler Wells et aux cartes météorologico-psychiques de Zdenek Kosek, en passant par les dessins acérés et obsessionnels de Chris Hipkiss.

Chris Hipkiss

L’expo C-V de ce début d’automne mêle aussi des créateurs bruts japonais qui travaillent l’argile comme Kazumi Kamae

Kazumi Kamae

et d’autres «some» américains comme Mort Golub que je connais trop peu pour pouvoir me prononcer à propos de leur genre de beauté. Je n’ai pas eu le temps non plus d’explorer les relations entre les images de Pushpa Kumari et les sculptures emperlées, cousues et peintes de Sandra Sheeny.

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Branchez-vous sur le site de la Galerie et cliquez sur «self-taughts artists» dans «contemporary». Cela vaut le coup. Ce qui mérite aussi le détour ce sont les théories de Randall Morris, toujours ardent à définir le domaine auquel nous nous intéressons, lui et nous. C’est plaisant de constater que le mot «art brut» fait maintenant partie du vocabulaire américain. Le temps est révolu où on nous disait que les amateurs d’artistes autodidactes des U.S.A seraient incapables de digérer ce terme, soit-disant trop français. N’en déplaise aux pessimistes, nos amis d’outre-Atlantique s’emparent de la notion forgée par Jean Dubuffet et c’est tant mieux. Les voilà mêmes qui enrichissent son contenu et c’est encore tant mieux.

Lisons Randall Morris. En matière d’œuvres, il insiste sur le critère de la qualité. On ne peut qu’applaudir. En matière de définition, il en cherche une qui soit vraiment convaincante. Démarche légitime mais qui pêche peut-être un peu par positivisme. En raison de la riche diversité qui caractérise l’art brut, on ne peut que s’accommoder d’un certain flou. A chaque nouvelle découverte, l’art brut remet en cause ses fondements. Aucune tranquillité intellectuelle à attendre avec lui. Il y a toujours une part non dominée qui vient vous pourrir le raisonnement. Faut-il vous faire un dessin?

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Randall Morris envisage le domaine de l’art brut et celui du mainstream sous la forme de 2 cercles qui se chevauchent. Selon lui, il y a des endroits qui ne se rencontrent jamais et d’autres qui se mélangent et deviennent presque indiscernables. Ouais! Sauf qu’à mon avis, il ne s’agit pas de deux cercles mais de deux grosses bê-bêtes protéiformes et gonflables comme une baudruche de Jeff Koons. Non seulement, elles n’arrêtent pas de glisser l’une sur l’autre, latéralement et de haut en bas mais encore elles n’en finissent pas de gonfler et de dégonfler par endroits comme des pastas dans l’eau bouillante. Avec l’art brut, les scientifiques ont du souci à se faire. Le microbe n’est jamais stable sous le microscope.

Bon, j’arrête parce que c’est moi qui risque d’avoir un hurricane sous la boîte cranienne.

Microbe

Randall Morris écrit :

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09.10.2010

Weltenwandler : L’art des outsiders à Francfort

schirn kunsthalle.jpgRestons en Europe. Si d’aventure vos petits pieds mignons vous entraînaient maintenant vers l’Allemagne, je vous conseillerais de vous arrêter dans la bonne ville de Frankfurt. Non pas pour les saucisses (je vous sens portés à rire après toutes ces histoires de quenelles) mais pour l’expo de la Schirn.

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La Schirn c’est en accéléré la Schirn Kunsthalle. Beaucoup de personnes aiment la Schirn sur Facebooket les expos de cette grande maison se font remarquer vachement beaucoup sur le plan germanique et international.

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L’exposition Weltenwandler (World Transformers) de la Schirn m’a tout l’air d’être une expo d’art brut pur jus car il faudrait pas croire qu’il n’y en a plus. Elle durera jusqu’au 9 janvier 2011 et son sous-titrage Die Kunst der Outsider (The Art of the Outsiders) est sans équivoque.

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On ne signale aucun caillou dans ses lentilles (les lentilles vont bien avec la saucisse). Aucun conceptuel rasoir répétant mornement le même motif dénué de sens parmi les «artistes extraordinaires au sens littéral du terme» qu’elle rassemble.

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Rien que des vedettes de l’art brut comme Aloïse, Wölfli, Emery Blagdon 

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Oskar Voll(remarquable pensionnaire de la Collection Prinzhorn)

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Birgit Ziegert (de l’Atelier Goldstein)

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Karl Junker

 Karl junker.jpg George Widener, Henry Darger et Judith Scott (encore). D’autres aussi qui marchent avec. Consultez la liste sur e-flux. Rien que du bonheur! Et le topo en anglais qui cite Michel Foucault et Gilles Deleuze, sans avoir peur d’en déduire quelques évidences fondamentales : «the madman transgresses the boundaries of the bourgeois order» (il ne s’agit pas de Louise Bourgeois!).

17.06.2009

L’art brut c’est du luxe

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N O Sii A M I E S iiL E S iiB Ê T E S

Ecolo, écolo, écolo et brut à la fois. Avec le vent en poupe de papy Dany, elle nous pendait au nez comme un sifflet de 2 ronds la collusion. La collusion art brut et ceinture serrée. Notre libéralisme vénéré s'étant mis en tête de nous faire oublier ses frasques financières, la marée verte nous est tombée du ciel d'Arthus-Bertrand.

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Et elle envahit tout, nous invitant à moins circuler, à moins éternuer, à moins dépenser.

L'art brut lui-même est sommé de rentrer les fesses et de s'adapter à la crise.
Sur Ladépêche.fr, une note sur Saint-Céré et sa région, intitulée Louis De Verdal ou le mystère de l'art brut nous apprend que ce sculpteur possède l'art «de faire quelque chose de rien».
Jusque là rien d'extraordinaire. Beaucoup d'artistes font ça. Mais là où votre petite âme errante tique c'est quand le journaliste lotois anonyme enchaîne avec bravitude : «son art est brut, d'une singulière création, à base de récupération des rebus (sic), annonciateur de temps économes».

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Econome est beau, économe est grand, économe est héroïque. Hélas, il ne cadre guère avec le sujet que vous prétendez aborder, cher confrère (ou consoeur) ladépêcheur. D'abord parce que monsieur de Verdal, qui est sans doute un plasticien autodidacte très respectable, m'a tout l'air de n'avoir que peu à voir avec l'art brut véritable. On peut, pour se faire une idée, louer une ses œuvres pour 50 € par mois ici.

Mais surtout parce que si l'art brut fait effectivement feu de tout bois, il n'en vise pas moins à la dépense la plus extravagante, au gaspillage inconsidéré des énergies créatrices et mentales, à la débauche d'inventions.
En témoignent les œuvres de :

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Giovanni Battista Podesta

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Emery Blagdon

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Arthur Bispo do Rosario

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Pierre Avezard

pour ne chiper que quelques exemples parmi une tripotée d'autres. On est loin du recyclage publicitaire, genre : «mon papa achète le soleil mais c'est pour le revendre». Ces créateurs d'art brut sont sans vergogne. Plutôt que des ordures, ils prendraient aussi bien du marbre et de l'or s'ils en avaient sous la main.


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Avec l'art brut, on nage dans le pur luxe,

celui du temps dépensé sans compter

à ne rien faire d'autre que de vivre.

29.10.2007

Sublime Spaces et Visionary Worlds

La mondialisation est une belle chose.

Imprimé à Singapour, publié à l’occasion d’une méga expo à Sheboygan dans le Wisconsin, un gros bouquin vient de tomber dans ma  bibliothèque pantruchienne  en provenance de New York, porté par les bras fragiles de ma copine Lucette.

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Harcelez d’urgence votre libraire pour qu’il vous fasse venir fissa les 427 pages de ce Sublime Spaces et Visionary Worlds car, croyez-en votre petite âme errante, c’est pas de la daube ! Coédité par la Princeton Architectural Press (NYC) et par le Joan Michael Kohler Arts Center de Sheboygan, Sublimes spaces… a pour principal auteur Leslie Umberger, conservateur du JMKAC. Rien que son sous-titre est matière à gamberge : Built environments of vernacular artists. Je garde pour la soif cette notion de «vernaculaire» qu’on applique chez nous à la langue. Non le jargon des grosses têtes en col blanc mais la tchache en basquettes de tous les jours.
Cela fait déjà 35 piges que le JMKAC s’esquinte le tempérament à la préservation des environnements d’art issus de la création autodidacte. C’est dire s’il a de l’expérience. 22 de ces environnements sont présentés dans ce livre avec une icono impressionnante qui mêle repro de documents anciens et clichés en couleurs de qualité. Certains toujours intacts et d’autres qui ont été démantelés.

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Impossible de les énumérer mais sachez que vous trouverez Eugene Von Bruenchenhein (1910-1983) et ses photos de Marie que vous connaissez peut-être déjà,

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Tom Every qui fait la couverture et des vedettes comme Sam (j’ai toujours cru que c’était Simon) Rodia.

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Pour ma part, je me focaliserai sur le cas de Emery Blagdon (1907-1986) que j’ai eu la chance de rencontrer quand son œuvre a été montrée à la 4e Biennale de Lyon en 1997. 70182b6c7b82845665ad85e212ecc7af.jpgNé dans un petit bled du Nebraska, après des années de vagabondage et de recherche de l’or californien, Blagdon s’installe sur la ferme paternelle.

Tate Archive - Photo M. Kinley

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Tate Archive - Photo B. Adilon

 

A la fin des années 50, il commence à monter un  dispositif, à base de fils de fer et de feuilles d’alu, pour canaliser les courants électriques de la terre et les employer pour guérir cancer (sa mère est morte de ça) et autres maladies.

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Après sa mort, son domaine est vendu aux enchères.

Par chance les 400 pièces qui composaient sa machine guérisseuse (Healing Machine) sont sauvées et préservées aujourd’hui dans la Collec de l’Art Center.
 

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Quand on voit combien chez nous il est difficile d’obtenir la préservation d’environnements d’art brut ou populaires majeurs, comme le Jardin de Gabriel Albert à Nantillé, on regretterait presque, sacrebleu, de ne pas être Américains.