05.12.2006
Art brut, art culturel : des relations contre-nature ?
Ce que ça vole haut, ces temps-ci, je vous dis pas ! Un récent et sagace commentaire de S.H. à propos de mon post du 6 brumaire 2006 : Jules (Leclercq) et Diego (Velasquez) s’interroge sur la nécessité de peser l’un et l’autre sur la même balance. Faudrait pas la pousser beaucoup pour que votre petite âme errante trouve comme lui «saugrenue» cette insistance du dossier d'aide de l’expo de Lille à trouver des origines velasquézoises à la tapisserie de l’homme du commun d’Armentières.
Pour tordues qu’elles soient, les relations entre l’art brut et l’art culturel n’existeraient-elles cependant pas ?
On peut en douter depuis que Wölfli a fait une pub à la soupe Campbell, depuis qu’Aloïse a fourré des papiers de chocolat et collé des images de Vierge à l'enfant dans ses œuvres.
Il est certes plus confortable de nier ces relations contre-nature en se crispant sur une position dubuffetienne pure et dure que de chercher à les élucider. Mais c’est fermer les yeux sur les gueules pleines de crocs d’Auguste Forestier où il est difficile de ne pas entendre l’écho de la Bête du Gévaudan qui continuait à gronder du côté de l’asile de Saint-Alban.
De telles rencontres du 3e type existent bien. La théorie du fossé infranchissable entre art brut et art cul est bien gentille mais elle est un peu ravageuse dans le genre manichéenne.
Il reste à penser la distance qui existe entre l’autoportrait de Dürer et le dessin de Curzio di Giovanni (voir ma note du 21 novembre : Visitez l’atelier d’Adriano e Michele), il reste à élucider les processus de transformation qui métamorphosent l’un en l’autre et c’est ça qu’est passionnant, mes p’tits Animuliens, pas de savoir si l’art brut est né en Suisse ou en Lozère.
Ceci dit, quitus à Mr S.H. : cela devient en effet furieusement tendance de comparer les images brutes et les images cultu au petit bonheur la chance.
J’ai peur que l’exposition 20 œuvres dans 20 musées (1er déc. 2006-30 janv. 2007) de nos amis d’Art en marge ne cède un tantinet à cette mode.
20:30 Publié dans De vous zamoi, Expos, Images | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : art brut, Jules leclercq, Auguste Forestier, Adolf Wölfli, Aloïse Corbaz, Art en marge | | Imprimer | | |
Commentaires
Chère Ani, le choix de Carine Fol peut paraître un peu forcé, mais après 20 ans d'activité d'"Art en Marge" je pense qu'on peut se permettre de forcer un peu la main dans cette direction d'ouverture et de dialogues entre des oeuvres de différentes origines... Quant à moi, je plane depuis cet après midi grace à l'expo la plus poetique que j'aurais vu dans cette saison: des gravures de Kiki Smith à la Galerie Cortese de Milan. Comme il y a très peu d'artistes "pas brut" qui me touchent autant, j'aime la signaler ici.
Ne sachant pas vous envoyer des images par le biaie de ce blogue, je vous invite à la découverte de son oeuvre sur le beau site du moma: www.moma.org/exhibitions/2003/kikismith
Bonne nuit,
Teresa
Écrit par : Teresa | 05.12.2006
à force de vouloir être "anti" on risque de se priver de beaucoup de délectations artistiques-visuelles-émotionelles
20+20 ne cède pas à une mode mais bien à une farouche envie de partager notre amour pour cet art en marge avec un large public
les dialogues-confrontations sont d'autant plus riches qu'ils ne sont pas seulement de l'ordre de la comparaison mais bien du questionnement
difficile de s'en rendre compte à distance et par ordinateur interposé car l'art reste une expérience visuelle et émotionelle
après vingt ans d'existence, de recherche et de diffusion notre centre se permet une escapade dans les musées et cela ne s'arrêtera pas là ... vous aurez encore de quoi vous occuper !
Écrit par : carine fol | 27.12.2006
Il est trés réducteur de penser que l'exposition 20+20 n'a d'autre objectif que de comparer les images brutes et les images cultu! au petit bonheur la chance, en plus! Cela manquerait singulièrement d'intérêt.
Il suffit de parcourir les salles, de visiter ces musées pour s'appercevoir qu'il ne s'agit pas de comparer mais d'ouvrir le dialogue, de proposer des rencontres entre des oeuvres qui sans la détermination de madame Carine Fol ne se seraient jamais produites.
Cette exposition ouvre les portes (notamment muséales, ce qui n'est pas un petit exploit) et va à la rencontre d'un public qui découvre avec bonheur, étonnement, questionnement.. d'autres univers artistiques.
Pour en savoir plus, sur ce projet et tous les autres, n'hésitez pas à parcourir le site d'Art en Marge: www.artenmarge.be
Meilleurs voeux à tous
Bruno
Écrit par : Bruno Gérard | 31.12.2006
@Bruno Gérard
Merci de vos voeux et de vos conseils. Réciproque à vous. 4 précautions valant mieux qu'une, vous avez bien fait de rappeler l'adresse du site d'Art en Marge. Elle ne figure en effet que dans mes Animulinks (1), dans ma note "artbrut, art cul: des relations contre-nature?", si vous cliquez sur le segment en bleu clair souligné "20 oeuvres dans 20 musées" (2), dans les Tags à la fin de la note pourvu que vous cliquiez sur "art en Marge" (3).
Écrit par : Ani | 31.12.2006
Les commentaires sont fermés.