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31.05.2006

Addio Santoro !

Une pensée animulienne ce soir pour Courtelary qui vient de perdre un de ses enfants, le «sublime rebelle» Eugenio Santoro, comme l’appelle le Journal du Jura. Pour ceux qui ne seraient pas encore abonnés à ce canard, rappelons que Courtelary est une commune du canton de Berne en Suisse, situé à 14 km (à vol de canard) de la ville de Bienne. Aux dernières nouvelles elle abriterait une fabrique de chocolat (comme c’est original !) où Eugenio Santoro aurait travaillé. Comme son nom l’indique, Santoro était d’origine italienne et établi en Suisse en 1964. Depuis sa naissance dans le Mezzogiorno en 1920 il avait eu déjà le temps de goûter à la misère, à la guerre en Albanie, aux camps de prisonniers en Allemagne.

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Ce menuisier d’allure chétive aimait bien s’attaquer à des sculptures assez balèzes qu’il tirait des troncs des arbres fruitiers de son jardin. Il les chouchoutait, les couvrait de couleurs, accentuait leur petit air penché, la distorsion de leur allure qui les éloignent de toute grâce intempestive.

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Photo Mario del Curto, 1991

La Collection de l’art brut ne s’y est pas trompée qui lui a consacré une exposition fin 2004/début 2005. En ces temps barbares Animula Vagula The blogue n’existait pas encore. Il faut donc chercher dans votre fouillis pour retrouver le dépliant édité à cette occasion par la Maison mère. Carton auquel j’emprunte plusieurs de mes images.

01:05 Publié dans Gazettes, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Eugenio Santoro, art brut | |  Imprimer | | Pin it! |

10.02.2006

Charlotte Salomon, Vie ? ou Théâtre ?

Je suis comme vous, mister Curieux. Aux «nanards» folklo-outsaïdeuriens je préfère des productions sans réel rapport avec l’art brut mais qui nous invitent à nous interroger à son propos ou à propos de ses limites.

Peut-être parce qu’elles se situent elles-mêmes dans ces territoires mouvants (presque des limbes) qui n’appartiennent ni tout-à-fait à l’art «culturel» ni tout-à fait à l’art des autodidactes.

Dans cet esprit, je voudrais m’approcher avec respect (et inciter nos fidèles amis muliens à faire de même) de l’exposition Charlotte Salomon, Vie ? ou Théâtre ? (Leben ? oder Theater ?).

Elle vient de commencer dans le Marais, à l’Hôtel Saint-Aignan abritant le Musée d’art et d’histoire du Judaïsme.

Leben ? oder Theater ? ce n’est pas seulement une œuvre d’art inclassable composée de centaines de gouaches où les meilleures influences du début du XXe siècle (l’expressionnisme allemand, le primitivisme de Die Brücke, la typo de la Secession viennoise) se combinent à une candeur intacte, presque philosophique.

C’est aussi, sous une forme narrative utilisant des pseudos, une sorte de journal intime écrit directement sur les peintures ou sur des calques s’y superposant. Les 1325 pages constituant le manuscrit sont conservées au Musée historique juif d'Amsterdam. Les mémoires d’une jeune femme allemande, interdite d’études, chassée de son pays par les persécutions contre les Juifs.

L’histoire de sa famille, marquée dès avant la naissance de Charlotte en 1917 par une épidémie de suicides féminins (sa tante dont elle héritera son prénom, sa mère, sa grand-mère) à laquelle elle n’échappera elle-même que pour être assassinée (et l’enfant qu’elle portait) dès son arrivée à Auschwitz en 1943.

L’histoire de son amour aussi pour un homme complexe qui se partage entre Charlotte Salomon (Kann dans le récit) et sa belle-mère cantatrice.

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La mise en scène d’une vie bouleversée sous la forme d’une pièce de théâtre chantée (Singspiel) selon un rituel qu’elle a elle-même décrit : «La personne est assise au bord de la mer. Elle peint. Soudain une mélodie lui vient à l’esprit. Alors qu’elle commence à la fredonner, elle remarque que la mélodie va exactement avec ce qu’elle veut coucher sur le papier».

La mer était celle des environs de Nice où Charlotte était réfugiée et où elle fut vraisemblablement dénoncée. Parfois, son pinceau semble s’affoler presque bégayer, des éléments (corps allongés, bustes) se répètent en glissant vers l’abstrait. Elle, qui a peut-être connu l’expo Entartete Kunst, ne paraît alors jamais si proche de l’art brut.

C’est peut-être parce que dans cet art prétendu «dégénéré» où les Hitlériens réunissaient les grands artistes contemporains et les meilleurs créateurs de la Collection Prinzhorn, Charlotte Salomon avait sa place. Une place secrète sans doute, une place de trait d’union.

 

09:50 Publié dans Expos, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : charlotte salomon, leben ? oder theater ? | |  Imprimer | | Pin it! |

11.11.2005

Manfred, in memoriam

Si je n’étais pas intimidée par votre prénom proustien et par votre patronyme à rallonge, je vous dirais bien, beau sire de Montreuil, avec la vox populi qui me caractérise : «Marcel, tu me harcèles !». Permettez en effet à votre féale petite âme errante de vous faire repectueusement observer que c’est dès le 25 octobre 2005, dans la note A Nozerand dont vous faites pourtant le commentaire, qu’elle a signalé l’expo Janko Domsic et Zdenek Kosek.
Ceci dit, il faut reconnaître que je suis une mauvaise. Non seulement je me suis fait doubler par Joseph Dumetz à propos du manuscrit Voynich mais je suis complètement passée à côté du documentaire concernant Manfred, cet ermite allemand, medium_site_manfred_1.2.jpgdont le Musée de la mer construit à partir de pierres, de bois flottés et de débris de grèves, a été impitoyablement souillé et détruit par la marée noire vomie par le pétrolier libérien Prestige sur les côtes de Galicie à la fin de 2002.
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Si le reportage de Jean-Michel Vennemani, passé sur France 2 le mois dernier s’intitule L’homme qui est mort de chagrin*, c’est que Manfred, ce Robinson créateur dont le mode de vie original et le costume réduit à un simple maillot de bain n’effarouchaient pas les tolérants habitants du petit port de Camelle où il œuvrait, n’a pas supporté l'anéantissement de son univers.
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*Les photos sont tirées du film
Vous qui semblez rouler pour Bruno Decharme, vous serez fort aise, cher Mavarçavel (comme dirait Arletty dans Fric-Frac) de savoir que le site de son association : www.abcd-artbrut.org a déjà tressé des couronnes à ce modeste héros de l’art brut. En fouillassonnant dans les archives, votre petite curieuse d’Animula a en effet exhumé un petit bout de texte en mémoire de Manfred intitulé Marée noire, datant, excusez du peu, de juin 2003. Je suis sûre que, groupie de Montreuil comme vous l’êtes, il ne vous a pas échappé.

17:00 Publié dans Ailleurs, De vous zamoi, Ecrans, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : manfred man, art brut | |  Imprimer | | Pin it! |

19.09.2005

Caramba! encore raté!

Dans la série « Caramba ! encore raté ! », votre petite âme errante a loupé pour vous la conférence du collectionneur Bruno Decharme à la maison rouge jeudi dernier et la projection aujourd’hui, au cinéma Max Linder, d’Aloïse le film féministe de Liliane de Kermadec dans lequel Delphine Seyrig marienbadise en marmonnant des petits riens que l’on dirait frais pondus par Marguerite Duras.
Entre temps j’ai passé un bon ouik à Bruxelles, où l’on mange du kangourou dans les restos, ce qui fait que dimanche toute la ville sautillait pour la journée sans voitures.

J’en ai profité pour aller au marché aux puces où j’ai chiné pour 2 thunes un vieux bouquin d’Izzo sur La Cuisine exotique, insolite, érotique. Joseph Delteil a raison de dire qu’il y a « la cuisine brute comme il y a l’art brut ». Je suis restée scotchée devant la recette (tchèque) de la soupe au mou de veau : Faire dégorger le mou 3 h dans l’o salée. Le cuire ¼ d’h dans une nouvelle o, le couper en dés, le faire revenir dans le saindoux avec oignon émincé. Ajouter une cuiller à soupe de farine, mélanger. Saler, poivrer + petit peu de vinaigre. Laisser bouillir 5 mn. Servir sur croûtons frits

En passant rue Haute, je suis allé photographier la boîte aux lettres de la galerie Art en marge

Dans la même rue, j’ai redécouvert cette drôle de petite librairie dont la vitrine s’orne de proclamations radicales et d’accumulations d’objets hétéroclites non moins
alléchantes.

Pour finir, dans une ruelle un peu merdique située entre la rue Blaes et la rue Haute, devant chez Mohammed le coiffeur, près d’une limousine qui stationnait là en attendant des mariés, je me suis régalée d’une palissade assez sanglante peinte par des enfants.

Et puis c’est tout.


Ou plutôt non.

Encore un petit snif pour Jacques Lacarrière, l’auteur de Chemin faisant parce que cet infatigable marcheur (1000 km à pied à travers la France) vient de poser définitivement son sac sur le bord de la route de la vie.

23:55 Publié dans In memoriam, Vagabondages | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Jacques Lacarrière, art brut | |  Imprimer | | Pin it! |