30.05.2010
Sauven la muraio dis óufrèndo
En Avignon, les murs de prison peuvent être aimables. Celui de l'enceinte de l'ancienne taule de la ville suscite un murmure qui fait tache d'huile sur le net et même un peu partout, y compris au-delà de la région PACA.
C'est vrai quoi, y'a qu'a pas toucher à la mémoire collective! Pas toucher à la culture populaire spontanée qui est, à notre cœur, comme une province et beaucoup davantage.
Depuis 1994, les trous dans les parpaings qui masquent une ancienne entrée ont été convertis en niches votives où les familles des prisonniers ont déposé nounours, cannettes, cartes à jouer, DVD, sopalin à bisous, messages d'amour, poussins coincés, petites peintures et plein d'autres objets d'art modeste.
La prison a eu beau déménager en 2003, le manège créatif a continué, preuve qu'il répond à un besoin profond. De mur d'offrandes symboliques aux incarcérés, ce mur situé sur la voie publique près du rempart classé, est devenu support d'ex-votos modernes où l'on se fait des cheveux pour son bac.
Peu importe que, selon la légende urbaine, un plasticien ait revendiqué l'idée de départ, le fait est que tout un chacun s'en est emparé et tout-un-chacun à l'ouvrage c'est toujours hyper-émouvant.
Là ce qui est bluffant, c'est que l'œuvre reste la même tout en changeant toujours. Au gré des saisons et des intempéries, des objets se détériorent mais il se trouve toujours des gens pour les remplacer.
Inutile de dire aussi que cette œuvre d'art (car c'en est une qui vaut largement celle des musées d'art contemporain) est un puissant stimulant pour les photographes et même pour les simples touristes du monde entier qui peuvent emporter une image insolite purement avignonnaise dans leur petit kodack.
C'est pas toujours évident pour une municipalité, déjà en charge de prestigieux témoignages du passé, de faire entrer l'art populaire dans son champ de vision. Souhaitons que celle d'Avignon sera sensible à ce patrimoine de mémoire et qu'elle saura défendre pour ses citadins du futur cet espace de liberté expressive et affective de ses citoyens d'aujourd'hui. Une pétition circule qui vise à l'y inviter.
Sauven la muraio dis oufrèndo!
La plupart des photos sont empruntées à la galerie de marq.tardy
18:23 Publié dans De vous zamoi, Glanures, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : art populaire, avignon, le mur des offrandes, la muraio dis oufrèndo, ex-votos, prison sainte-anne | | Imprimer | | |
19.05.2010
Camille Renault inédit à la BnF
Je reviens de la BnF avec du nouveau sur Camille Renault. C'est pas tous les jours que ça arrive, l'environnement de ce fameux créateur d'art brut ayant été ratiboisé. Il ne reste que des miettes par ci par là, à Lausanne, du côté de L'Aracine, dans la Collection abcd. Camille Renault, maintenant il a sa notice Wiki donc je me fatigue pas pour vous dire qui c'est.
Il refait timidement surface à l'occasion d'une exposition à la Galerie des donateurs qui se prolongera jusqu'au 20 juin 2010. Son titre : La Collection Alain et Jacqueline Trutat (livres et manuscrits). Les fans de notre Johnny Hallyday national pourront y voir une photo du rockeur bébé. Le père de celui-ci, un certain Léon Smet, comédien belge évoluant dans les cercles surréalistes (il a tourné un Fantômas en 1937 avec Ernst Moerman) fut en effet le premier mari de Jacqueline. Le père de Johnny est mort en 1989 et son parrain qui n'était autre que Alain Trutat, le deuxième époux de Jacqueline, disparut en 2006. Alain Trutat, pour aller vite est un homme de radio, l'un des fondateurs de France Culture et le papa de l'ACR (Atelier de Création Radiophonique). Lui et Jacqueline se sont trouvé mêlés à la vie de Paul Eluard après la mort de Nusch (28 novembre 1946).
C'est eux qui dissuadèrent le poète de se flinguer et qui firent des pieds et des mains pour lui remonter le moral après la disparition subite de son amour.
Nusch et Paul Eluard en 1944
Paul Eluard encadré par Jacqueline et Alain Trutat
A force de se balader dans la bibliothèque de Paul Eluard, ils eurent envie de collectionner les beaux livres et les écrits. C'est cette collection que Jacqueline Trutat vient de donner à la grande dame du Quai François Mauriac. Je furetais pendant le vernissage de l'expo (qui présente ici quelques uns des fleurons de la collec du couple), en me demandant si je pourrais pas trouver des traces de ce roi d'Auguste Forestier que Paul Eluard avait juché sur sa cheminée, quand je suis tombée sur Camille Renault. Pour préciser, deux petites photos prises vraisemblablement par Jacqueline lors d'une visite au Jardin des suprises à Attigny un jour de 1951 en compagnie d'Alain et d'Emmanuel Peillet, grand manitou du Collège de Pataphysique et auteur d'une petite monographie sous pseudo sur le Camille.
Deux photos ça vous paraitra pas beaucoup mais, vu qu'elles sont inédites, qu'elles font sans doute partie d'une série existante et que les documents d'époque sur le jardin de Camille Renault sont hyper rares, ça vaut le coup de courir à la BnF pour les voir. Malheureusement, je ne peux pas les reproduire mais croyez-moi pour sur parole si vous voulez faire preuve de positive animulattitude.
23:55 Publié dans De vous zamoi, Expos, In memoriam, Musées autodidactes disparus, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, camille renault, alain et jacqueline trutat, paul eluard, le jardin des surprises, johnny hallyday | | Imprimer | | |
08.05.2010
Art brut et alentours ...
Art brut et alentours .... Vous avez reçu le carton de cette expo qui se tient à la grande petite Galerie Chave jusqu'à la fin juin 2010? Elle a commencé le 27 mars mais Vence c'est pas la porte à côté. Faut trouver du temps pour y aller. Raison pour laquelle je ne l'ai pas vue. C'est dommage.
J'aime bien la Galerie Chave, grande par son histoire et par ses trois étages et petite par son abord toujours modeste de boutique de village.
J'attendais le catalogue pour vous en parler. Le voilà.
C'est un objet qui fleure bon l'épicerie d'enfance dont parle Jean Follain, celle où on emballait les choses, dans la jeunesse folle de mon daddy, avec du gros papier chamois. C'est du papier de ce style qui a servi à réaliser ce catalogue sauf que là c'est plutôt l'encre qui lui a communiqué son parfum, vu qu'il est imprimé «sur des feuilles intercalaires appelées macules, utilisées dans des ateliers de lithographie depuis une centaine d'années pour les tirages de chromolithographies, d'images pieuses, de cartes postales, d'affiches de Carnaval, de tickets de rationnement ... et plus récemment d'estampes originales d'artistes contemporains».
En voilà une idée qu'elle aurait plu à Dubuffet! Cela tombe à pic puisque le catalogue 2010 des Chave la joue discrétement «cinquantenaire» de l'expo historique de la Galerie Les Mages : Alphonse Chave présente l'art brut, qui vit Dubuffet relancer grâce à A.C. sa collection chérie. Aussi ne jetez pas votre catalogue Art brut et alentours à la poubelle, sous prétexte qu'il contient des pages à traces, à plis, à manques marginaux. C'est fait ek-se-près!
Cela l'empêche pas de redonner la lumineuse préface du Jeannot que vous feriez bien de copier 100 fois si vous la connaissez pas par cœur. Au moins les deux premières phrases : «Le parti de l'art brut c'est celui qui s'oppose à celui du savoir, de ce que l'occident nomme (un peu bruyamment) sa culture. C'est le parti de la table rase».
L'expo Chave de mai-juin 2010 montre les œuvres de 36 créateurs autodidactes dont certains (Aloïse, Jacqueline B., Marthe Isely, François Ozenda, Francis Palanc) figuraient déjà dans l'expo de la fin 1959. Mais là, y'en a en a un tas en plus que vous découvrirez en allant vous balader sur le site chavounet ou directement dans le catalogue orné de repros-couleurs collées sur la page-support.
Jean Deldevez
Jacqueline B
Jules Godi
Francis Palanc
Thomas Grégoire
François Ozenda
Je vous donne en prime une page noire qui chapeaute le tout.
Toutes les reproductions d'œuvres sont extraites du catalogue - ©Galerie Chave
En ces temps de confusions généralisées où l'on mélange l'art brut avec n'importe quel pastis, le court texte de présentation de M. et P. Chave paraît rafraîchissant dans le genre remise des pendules à l'heure. Vous serez pas plus de 300 happy-few à posséder cet ouvrage parce que son tirage est limité et numéroté. Alors, soyez pas des cavounets et grouillez vous de l'acheter. C'est que 20 € et l'euro baisse.
12:25 Publié dans Expos, Images, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, galerie chave | | Imprimer | | |
06.04.2010
Création Franche : la parole à Joseph Kurhajec
Un bon point pour le n°32 de Création Franche qui vient de sortir, c'est qu'il se contente de consacrer sa couverture à Sanfourche sans se croire obligé de nous infliger un article nécrologique. Quel meilleur hommage en effet que la repro de ce tripède vert sur fond de maisons stylisées aux couleurs cahotiques et premier plan d'émoticônes? Hébétude, ravissement, dépression ... Toute la gamme de sentiments que Jean-Joseph Sanfourche était capable de faire friser dans un regard jaune est là. Du travail de vitrail.
A l'intérieur, le point fort c'est l'entretien de Joseph Kurhajec avec Jean-Michel Chesné. D'abord parce que ça diversifie la matière rédactionnelle et surtout parce que ça éclaire le parcours d'un artiste sensible aux arts bruts, fétichistes et/ou chamaniques. On croise régulièrement ses œuvres sans qu'on ait de quoi les décrypter. Dommage qu'on ait privilégié l'italique pour ses propos, ça les rend pas plus lisibles, surtout serrés comme ils sont dans la marge de fond. L'ital c'est bon pour les citations courtes!
Enfin, on apprend que malgré son nom tchèque, Kurhajec est né en Amérique. Je trouve intéressant qu'il témoigne de l'effet que lui fit la collec de Dubuffet quand elle était là-bas avant 1962. On raconte qu'Alfonso Ossorio avait tendance à la garder sous le coude. La preuve que non ou pas tellement. Comme Hervé Di Rosa, Kurha appartient à la catégorie des artistes-voyageurs. Il ramène des matériaux de l'île de Pâques. Il travaille à Rome, au Mexique etc.
Achetez le canard pour en savoir plus. Le passage où ce monsieur de 72 ans parle de son bras atteint par la polio n'est pas seulement émouvant, il est instructif car on comprend qu'il a eu l'idée de se servir de son «handicap» dans son travail de sculpteur. Les photos qui illustrent l'interview proviennent de la collection de J.-M. Chesné. Elles mériteraient d'être plus grosses, mais bon.
Une pleine page en revanche est accordée à Gabriel Albert dans un autre article.
Trop rikiki aussi les images des objets en cire de Pya Hug. Le maquettiste leur a préféré un tableau plus naïf, moins convaincant. Lire l'article de Jacqueline Roche-Meredith sur cette dame des Grisons.
A signaler aussi parmi les autres contributeurs, Joe Ryczko (sur François Tornel, mosaïste de Cahors). Ami des fanzines, J.R. a rejoint la flotille blogueuse. Il a été immédiatement poignardé par la concurrence. Bienvenue au club, Ryczko Joe, le club des victimes de la «subtilité» triomphante et bon vent dans vos voiles!
Heureusement toutefois que Bruno Montpied est là pour nous ramener à l'art brut. Dans un article bienencontreusement consacré au musée ariègeois des Amoureux d'Angélique, il s'attarde sur la salle contenant les sculptures en bois de Luigi Buffo rescapées de la destruction. Là, bien sûr, on ne saurait lui en vouloir. Surtout Animula qui concocta un p'tit album de derrière ses fagots aux défuntes œuvres de ce créateur.
00:05 Publié dans Gazettes, In memoriam, Parlotes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : création franche, jean-joseph sanfourche, joseph kurhajec, gabriel albert, art brut | | Imprimer | | |
28.02.2010
Cudowny sen Jean’a Smilowskiego
Mon cher Smilowski, je hais février, le plus court des mois et de tous le pire à la fois, parce qu'il fait baisser mes statistiques et que si ça continue, mars étant déjà là, je vais pas avoir le temps de parler de votre expo qui se tient à Villeneuve d'Ascq à La Ferme d'en haut jusqu'au 14. J'aurais tellement voulu la voir seulement, avec le boulot que j'ai au bureau, j'arrive pas à me libérer et je préfère assurer au cas où.
Jean Smilovski, ça fait un moment que je marche sur vos traces. J'aurais voulu vous connaître quand vous habitiez dans votre cabane du Vieux-Lille, près des fortifs de Vauban, une zone où les jardins ouvriers tournaient à la jungle. Vous l'aviez transformée en «ranch» personnel où vous abritiez vos souvenirs franco-polonais d'ouvrier malmené par l'histoire et par le travail ainsi que vos peintures, vos meubles et coffres décorés, vos jouets et vos pantins militaires.
J'aurais voulu voir in situ votre fresque sur Sitting Bull et partager votre fascination pour les Indiens d'Amérique. J'aurais aimé vous rencontrer, circulant à bicyclette, les jours où ça allait bien, vêtu de vagues uniformes de la guerre qui vous avait fait souffrir.
J'aurais adoré vous entendre chanter Ramona cette valse-symbole de la femme inaccessible à laquelle vous aviez voué un culte qui voisinait sans problème avec votre dévotion pour Sainte-Thérèse de l'Enfant-Jésus et Sainte Rita.
Cette exposition actuelle, qui reconstitue l'intérieur de votre chez vous, succède à l'expo-parcours qui s'est tenu dans le Vieux-Lille en octobre 2009. Elle est organisée avec le concours de La Poterne, une association qui veille sans relâche depuis plus de 20 ans sur votre œuvre dont elle a sauvé l'essentiel. Je possède dans mon fouillis une jolie pochette de cartes postales éditées par cette asso.
Et un classeur où j'ai glissé divers souvenirs des passages que vous avez fait sur cette terre depuis votre disparition en 1989. Je crois bien avoir loupé Art et bricolage, l'expo de L'Aracine qui vous faisait prendre l'air pour la première fois avec André Robillard. Mais je possède l'invitation de l'expo à la Bibliothèque annexe du Vieux-Lille qui reproduisait deux pages d'un de vos somptueux livres uniques.
Et encore :
le catalogue de l'expo de la collection Bert Berglund où figurait une de vos œuvres,
un article paru sur vous dans Polonika (n°2), un canard franco-polonais disparu.
Tout cela c'était en 1993. Plus récemment, j'ai mis dans du coton le carton de votre rétrospective de 2002 au Musée d'Art Moderne Lille Métropole. Pour le régal de nos Animuliens, permettez-moi de montrer encore votre portrait photo par François Dumas pour le carton de votre apparition à la Médiathèque Marguerite Yourcenar en 1997.
Et plus émouvant encore - car de votre vivant - le tract d'une asso (avec un dessin de vous) qui, en 1986, réagissait contre la rénovation urbaine qui devait emporter votre univers.
20:20 Publié dans De vous zamoi, Expos, In memoriam, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art brut, jean smilowski | | Imprimer | | |
24.02.2010
Vie et œuvre de Charles Lanert
Charles Lanert : pour quelqu'un dont on ne savait rien, ce créateur dont 2 œuvres vibrionnaires figurent sur le site (dévolu à l'art brut) de la Collection abcd nous réserve aujourd'hui des surprises. Enfin, quand je dis «aujourd'hui» ... c'est depuis le printemps 2009 qu'un site internet a été ouvert à son propos mais comme on me dit jamais rien c'est seulement maintenant, tonnerre de Brest, que je m'en rends compte. Je m'abstiens de jurer, d'une part parce que mon daddy n'aime pas ça, d'autre part parce que Jacques Benoist, l'auteur du site Charles Lanert, sa vie, son œuvre, est un curé et un historien de la construction du Sacré-Cœur de Montmartre (une belle mocheté soit-dit en passant).
Aussi faut-il pas s'étonner si le père Benoist tire (sans exagération cependant) la couverture du côté de la religion. Il y a d'ailleurs quelque droit. Apparemment, la vie de Lanert, natif de la Drôme (et non de Suisse comme on l'a écrit) a croisé plusieurs fois les enfants du bon dieu. Jusqu'à sa mort dans une maison de retraite des Petites Sœurs des Pauvres en 1995. Une partie des 200 œuvres de Charles Lanert dont Jacques Benoist a hérité relève d'ailleurs d'un art sacré franchement cul cul-la-sacristie.
D'autres semblent le résultat de recherches dans le domaine abstrait (clins d'œil à Klee, à Kupka) ou dans le paysagisme maritime. Peu, finalement appartiennent à ce style «radiographique» à base d'entrelas grouillants qui l'ont fait classer (peut-être un peu rapidement ?) dans l'art brut.
Allez donc ici (cliquer dans le visuel)
une bande d'images déroulantes vous en dira plus.
00:34 Publié dans Blogosphère, Images, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, charles lanert | | Imprimer | | |
31.01.2010
Raw-viser Milly !
Me too, I forget things sometimes! For example, I forgot to point out one little sentence in the article on CHOMO I mentioned yesterday. "This is the first retrospective ever of his work" JM wrote about the current exhibition at the Halle Saint-Pierre.
JM should read the blog Animula Vagula, it would be better informed. He would have seen that one of my readers (CHOMO after ten years) had already recalled the existence of exhibition to Milly-la-Forêt in 1991. "Sometimes it's necessary to remember things!" said the reader who signs Herblot.
If JM had opened the catalog of the Halle Saint-Pierre, he would read (page 24): "This year's Jubilee CHOMO exhibit exceptional organized entirely by Josette Rispal which takes place during the Gulf War in various places of the city of Milly-la-Forêt from 19 January to 3 February 1991".
Tradoche pour le confort (ohé, les francophones!) :
Moi aussi, j'oublie des choses parfois! Par exemple, j'ai oublié de vous signaler une petite phrase dans l'article sur CHOMO dont je vous parlais hier. «This is the first retrospective ever of his work» (c'est la première rétrospective jamais consacrée à son œuvre) écrit JM à propos de l'actuelle exposition à la Halle Saint-Pierre.
JM devrait lire le blog Animula Vagula, il serait mieux informé. Il aurait vu qu'un de mes lecteurs (CHOMO 10 ans après) avait déjà rappelé l'existence de l'exposition à Milly-la-Forêt en 1991. «Il faut parfois rappeler les choses!» dit ce lecteur qui signe Herblot.
Si JM avait ouvert le catalogue de la Halle Saint-Pierre, il aurait lu (page 24) : «C'est l'année du Jubilé de CHOMO, exposition exceptionnelle, entièrement organisée par Josette Rispal, qui a lieu, au moment de la Guerre du Golfe, dans divers lieux de la ville de Milly-la-Forêt du 19 janvier au 3 février (1991)».
Costume créé par CHOMO pour l’expo de Milly,
porté ici par Alain Niderlinder,
un des plus anciens fidèles de l’artiste
Christ offert par CHOMO à l'église de Milly-La-Forêt
à l'occasion de l'exposition de 1991.
17:08 Publié dans De vous zamoi, Expos, Gazettes, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chomo, alain niderlinder, milly-la-forêt, halle st pierre | | Imprimer | | |
19.01.2010
CHOMO, une œuvre très prisée
En ce début d'année, votre petite âme errante célébre les petits métiers. Non pas ceux d'autrefois : tondeur de caniches,
petite marchande d'allumettes,
rémouleur,
Mais les petits métiers d'aujourd'hui. Car ils existent encore. Et souvent ils sont pénibles («c'est ça qu'est triste»). Parmi ceux-ci, je vous invite à sortir votre kleenex, chers Animuliens qui avez du cœur, pour les commissaires-priseurs. On les voit toujours la poitrine bombée et le marteau à la main, rayonnants de la gloire d'une vacation.
On n'imagine pas ce qu'ils peuvent supporter en coulisses. Une récente Page Culture du journal Le Monde (samedi 26 décembre 2009) nous éclaire sur leur martyre par le truchement de la plume faustrollienne de Ha. B. (pour Harry Bellet). Sous un intertitre qui fait froid dans le dos : Classifier l'inclassable, Ha. B. (H.B. ce n'est plus utilisable depuis Human Bomb) nous décrit l'horreur. Selon les règles de la tragédie classique.
Où : dans «des bois aujourd'hui désertés».
Quand : «à la fin du mois de novembre».
Comment : «dans le froid et la boue».
Avec un sens parfait de la mesure, Harry s'abstient de nous parler des loups mais on les imagine rôdant dans la Forêt de Fontainebleau puisque c'est là que ça se passe, chez CHOMO plus précisément.
Ha ! Ha ! dirait Alfred Jarry. Qu'est-il arrivé ?
«Catalogage précis, inventaire photographique : 850 numéros pour près de 1000 œuvres et 3600 photos», selon Maître Rouillac, organisateur de l'opération. Un inventaire avait déjà été tenté lors de l'exposition de Milly-la-Forêt en 1991. Les sculptures de CHOMO était rentrées chez l'artiste avec des étiquettes comme les fromages «moulés à la louche» qu'il détestait. Simple travail artisanal.
Celui de Aymeric et Philippe Rouillac, de leurs 10 collaborateurs et de leurs 2 semi-remorques est plus professionnel. Il s'agit de «protéger» l'œuvre de CHOMO qui «n'était jusque là abritée des malandrins que par un grillage à poules» (pour ceux qui parlent pas la langue journalistic : «malandrins» = racaille). Merci pour les poules et merci pour CHOMO!
Les tableaux et les sculptures de son «Merzbau de plein air» (expression de Michel Ragon) ont fait l'objet d'un «enlèvement» pour «sécurisation dans un lieu sec». «Les bâtiments sont toujours là» nous rassure l'auteur de l'article. Leur entretien est possible mais pas leur visite. A quoi sert tout ce tintouin, alors? me direz-vous.
«Parce qu'il manquait un inventaire» au dossier déposé pour un éventuel classement «et que, les œuvres de Chomo n'ayant jamais fait l'objet d'un commerce, elles n'avaient pas de cote». On frémit! Il est évident en effet, qu'un moulin, un lavoir, un pont ont besoin d'avoir été vendus et revendus pour être versés aux Monuments historiques. Pourquoi pas un village d'art préludien?
CHOMO bénéficiera donc du feu des enchères. Pensez d'ores et déjà à un petit week-end à Cheverny (dont Hergé fit Moulinsart) en juin 2010. Seront dispersées au cours de cette garden party annuelle «quelques rares exemplaires» des œuvres chomotiques dans le noble but d' «enfin classifier l'inclassable».
00:33 Publié dans Encans, Gazettes, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chomo, vente publique, village d'art préludien, forêt de fontainebleau | | Imprimer | | |
28.12.2009
Annie Chaissac a son point de vue
Le point de vue d'Ani, on peut pas dire que je vous l'épargne mais celui d'Annie c'est plus rare. Et plus intéressant quand il s'agit d'Annie Chaissac. Aussi faut pas que j'omette de vous signaler l'entretien que celle-ci a accordé au n°3205 d'un magazine hebdomadaire que ça urgeotte drôlement que vous achetiez parce que après-demain tombera déjà le numéro suivant. J'ai beau être très «people», j'en étais restée à «images du monde» mais maintenant c'est «Point de vue» tout court, le nom de ce canard laqué, tout plein de Chouchoux, de Shabanoux, d'Alexandra de Monac et d'ex-chroniqueuse du Monde (coucou Claude Sarraute, elles nous manquent vos dernières pages).
Pour pas que vous vous gouriez, je vous montre la couverture. Oups! pardon, je vous l'ai collée dans le mauvais sens! On dirait un Baselitz. Bon c'est pas grave. L'amour et le débat d'idées, ça implique la tête à l'envers. Vous n'aurez qu'à la remettre à l'endroit comme disait Dagobert.
C'est monsieur Raphaël Morata qui interviouve Annie Chaissac. Ses questions offrent à la fille du peintre (qui ressemble de plus en plus à son père) l'occasion de faire passer dans le gros public quelques vérités toujours bonnes à prendre. Sur les liens entretenus par Gaston Chaissac avec Jean Dubuffet : «En simplifiant un rapport de professionnel à professionnel. Ils ont aimé échanger leur recette de fabrication, mais pas se rencontrer. Sans qu'il y ait eu de brouilles entre eux. Ils étaient francs et honnêtes».
Sur le rapport de Chaissac à l'art brut : «Au commencement, ça l'a amusé, puis très vite toute cette histoire créée par Dubuffet l'a agacé. (...) Il n'était dupe de rien, se méfiait de la virtuosite facile et commerciale. Il cassait tout pour repartir à zéro. L'art brut n'était pour lui qu'un exercice de mise en train. Il s'est très vite positionné comme un chercheur».
23:53 Publié dans Expos, Gazettes, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : gaston chaissac, annie chaissac | | Imprimer | | |
28.11.2009
Keita, Joseph : peintres des rues
Monsieur Keita de Genève c'est mon sujet. Keita c'est comme Joseph, c'est des noms qui glissent très vite des moteurs de recherche. Trop ordinaires, trop passe-partout. Rien qui court les rues comme ça : Joseph, Keita. Et justement, monsieur Keita, ça le connaît la rue. Tombé du Sénégal, passé par la Belgique, il a glissé en Suisse car même à Genève, il y a de la rue. Du moins si j'en crois un article paru le 26 novembre 2009 dans La Tribune de cette ville. A Genève comme à Paris, on ne peut pas voir un monsieur black qui peint dans la rue sans le comparer à Jean-Michel. Basquiat, c'est commode pour le cliché.
Alors puisque monsieur Keita vit depuis deux ans dans la gare de Genève Cornavin, why not ? J'avoue qu'à voir de biais un tableau de Keita posé contre un pilier de béton dans le coin où le peintre s'est aménagé un chevalet-banquette-chambre à coucher, cela m'a pas paru évident. Plus impressionnant me semble son harnachement ventral rapetassé, cette profusion chiffonnière qui s'échappe de sacs en plastique noir autour de lui. Et cette émouvante marque de confort : une basquette-pantoufle qu'on enfile quand on rentre chez soi. La Tribune de Genève nous parle des gris-gris de ce «voyageur immobile». Indifférent au chouchoutage des services sociaux, il lutte contre l'envoûtage.
Monsieur Keita m'a rappelé très fort monsieur Joseph, un encore plus authentique «peintre de la rue» sur lequel j'étais tombée en allant essayer mes nouvelles lunettes glamour chez Anne et Valentin, rue Ste-Croix-de-la-Bretonnerie. Il était là, à même le trottoir, dans ce quartier du Marais qu'il aimait squatter, je l'ai su après.
Peu causant, visiblement alcoolisé mais avec le panache d'un désespoir lucide, vaguement inquiétant parce que déjà lointain. Le genre de S.D.F. au poil rugueux qui avait tout pour faire fouetter une petite bourge du genre de votre petite âme errante.
via L'Atelier
On choisissait comme dans son atelier sans qu'il se montre très encourageant. Jouant assez le jeu cependant pour signer après des explications incompréhensibles.
C'était peu de temps avant sa mort. J'ai compris plus tard qu'il se savait condamné par LA maladie.
J'ai appris par les journaux, notamment par un bel article de Nathalie Six (22 sept. 2003) dans Le Figaro, qu'il se nommait Joseph (Jean Joseph Pacôme semble-t-il) et que des collectionneurs s'intéressaient à lui.
Un avocat connu : Alex Ursulet, un acteur, Stanislas Merhar qui avait joué dans Le Comte de Monte Cristo d'après le livre préféré de Joseph. François Gibault, le Président de la Fondation Dubuffet. Joseph aurait peint un millier de choses avec de grands noms en tête : Van Gogh, Rauchenberg, Jasper Johns, Roy Lichtenstein, Robert Motherwell.
via ROCBO
Je pense à lui souvent mais je constate que son nom se dégougueulise petit à petit. Pourtant il n'est pas possible que cette pure figure de l'errance picturale parisienne soit oubliée. Si quelqu'un qui me lit s'en souvient, cela ferait pas de mal qu'il le dise!
15:57 Publié dans Gazettes, In memoriam, Vagabondages | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : joseph jean pacôme, monsieur keita | | Imprimer | | |