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17.07.2014

Au musée de Binic

chapeau.jpgMalgré le retour triomphal du soleil sur la Bretagne, je voudrais soulever mon chapeau de paille pour le vaillant Musée de Binic. D’abord parce qu’on ne peut pas faire que ça de sucer des glaces sur le port ou de rôtir en itsi bitsi petit biniki sur les plages.

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vélo.jpgEt puis quand on a bien fait le tour du Grain de beauté des Côtes d’Armor (le surnom de Binic) on a plaisir à poser son vélo pour se cultiver un peu, tout en se distrayant aussi en satisfaisant sa curiosité.

Le Musée de Binic vous ne pouvez pas le manquer. C’est à 50 m après cette sirène que vous venez de croiser dans le jardin d’une belle maison blanche à décor bleu-vert.

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Tous les Parisiens (et même les autres vacanciers septentrionaux) un peu nostalgiques de la disparition du Musée National des Arts et Traditions Populaires, avalé depuis peu et digéré par le Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée à Marseille (à prononcer d’un coup de glotte : MUCEM) ont intérêt à se précipiter comme moi au Musée de Binic. Et les Binicais aussi. Sans parler des Bretons de tous horizons. En souvenir de la tradition morutière («Binic was the first French harbor to be involved in cod fishing») et pour faire monter la fréquentation.

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Car le musée de Binic le mérite, ne serait-ce que parce qu’il n’est guère avare d’objets : plus de 1000 relevant des «traditions populaires» : coiffes, costumes, broderies, outils, matériels agricoles, équipement scolaires. «Et pas d’art?» me direz-vous. Que si! Même si rien n’y est enregistré comme tel. En flânant dans les collections, souvent présentées en ensembles d’activités dans la tradition de Georges Henri Rivière, on fait des découvertes qui nous ramènent à la création et à l’invention populaires si voisines de l’art brut. Elles méritent le détour!
Qu’elles témoignent de cette délicate sensibilité naïve comme dans le décor de cet exceptionnel travail d’un soldat de la guerre de 1914-1918.

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Ou d’une ingéniosité artisanale naturelle comme cette roue à carillon.

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Ou encore d’une étonnante capacité d’abstraction comme ce métier à tisser.

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Le Musée des Traditions Populaires de Binic conserve et expose des pièces significatives de ce patrimoine familial que des donateurs, conscients de son rôle, lui apportent. Il est animé par des bénévoles qui respectent la liberté du visiteur. Pas de visites guidées à craindre si on n’aime pas ça.

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Durement éprouvé en 2010 par l’inondation de l’Ic, la rivière qui a donné à Binic une partie de son nom, il s’est, avec le soutien de la municipalité, relevé. En juillet et août, c’est tous les jours que vous pouvez y passer dans l’après-midi. Et jouer au petit jeu qui consiste à trouver son objet d’élection.

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Le mien c’est cette colonne de vertèbres de requin. Une canne de capitaine paraît-il. Grand classique des objets cap-horniers.

17:59 Publié dans Expos, Jadis et naguère | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : arts et traditions populaires, binic, bretagne, sirène | |  Imprimer | | Pin it! |

09.07.2014

Pierre Darcel poursuit son rêve

Radio Bonheur de l’atelier s’échappe. Une voix chante : «mon cœur est en émoi».

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Quand on arrive sur le territoire de Mon rêve, Pierre Darcel, le maître et l’artisan des lieux, baigne dans l’accordéon.

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Comme il y a 5 ans. Lors de ma première visite qui vous a fait connaître ce créateur au cœur pur et aux mains d’or. Le volume de la radio est assez fort. Pierre n’a plus l’ouïe très fine. Peut-être aussi qu’en l’isolant du monde, la musique facilite sa concentration.

Pas au point de ne pas remarquer les visiteurs. Quand on franchit sa porte, un détecteur de mouvements l’avertit de son chant d’oiseau modulé en ultra-trilles. Du coin de l’œil, Pierre Darcel nous reconnaît. Il sait qu’on est du genre patient. Il continue donc placidement son travail.

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La chance me sourit puisque le voilà qui s’attaque à un sujet grand comme un homme. Grand comme le chasseur (Pierre prononce presque «casseur») qu’il vient de terminer et qui sera bientôt installé dehors avec ses deux chiens d’arrêt.

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A l’extérieur un vrai chien veille tranquillement au grain. Cette mini-meute porte les couleurs de Pierre Darcel : blanc et roux pour les statues, noir et blanc pour l’animal vivant.

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Laissons Darcel œuvrer tranquille. Il n’est pas 6 heures du soir, signe de la fin de sa journée laborieuse car cet «artiste» a conservé les habitudes de l’ouvrier et du paysan qu’il fut.

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En attendant je me régale à photographier les nouvelles pièces que cet animalier, de plus en plus sûr de lui, a parsemé sur son parterre : zèbre, girafe, sanglier, chèvre, vache et cochon (c’est bien le moins, lui qui se consacrait jadis à l’élevage de cette succulente bestiole).

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Rien d’une ménagerie fermée cependant. Chaque sujet étant mis en scène avec un souci évident de l’espace, l’ensemble dégage une impression de liberté.

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«Un jour ça va être plein!» ne puis-je m’empêcher de dire à Pierre et Yvette Darcel avant de repartir. M’est avis qu’ils ont leur idée sur la question… Ce n’est pas pour demain car les sujets décorés en coquillages sont long à faire.

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«Au revoir Pierre, meilleure santé Yvette, vous qui avez été patraque ce printemps!». Bonne continuation dans tous les sens du terme.

07.07.2014

À Rothéneuf. Retrouver l’éternité.

Un ticket pour l’éternité. L’éternité à Rothéneuf. Une éternité humaine va sans dire. Quelques années sur la terre. Quelques minutes sur le site de l’abbé Fouré. A mesurer notre usure. Vertigineuse car tout ici, sous la lumière froide et les piqûres des embruns, évoque la dissolution dans le gouffre d’une création qui n’est autre que le gouffre de la nature.

P1080203.JPGVingt ans sont tombés sur les frêles épaules de votre petite âme errante depuis sa dernière visite aux rochers sculptés et déjà le ciel lui pèse. La voici moins encline à sauter comme une chèvre jusqu’à la mer toujours verte.

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Heureusement que son daddy ne l’a pas accompagnée. Elle n’aurait pas aimé qu’il s’aventure sur la langue noire et humide qui vient lécher les vagues.

Comme de courageux touristes le font.

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Avec la précaution nécessaire toutefois.

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Mais «trève de nostalgie» comme dit le chéri que j’ai. «Les Rochers sculptés se meurent d’accord mais on va pas en faire une montagne». C’est la grandeur du truc d’évoluer dans ce sens. D’ailleurs ils ne meurent pas. Progressivement ils s’effacent. Usés de trop de vent, usés de trop de pluie.

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Lessivés de trop de commentaires aussi car les supporters de Fouré ne font pas toujours dans la dentelle. A leurs ovations parfois pesantes je m’en voudrais d’ajouter. Il n’est pas nécessaire, j’en suis sûr, d’enfoncer un clou dans vos mémoires.

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Je me contenterai donc de célébrer aujourd’hui la poésie capillaire de ces sculptures complices des lichens et de la végétation.

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Les plantes poussent drues comme barbes et cheveux autour des têtes de l’abbé  comme elles poussent gaillardemment dans un jardin monastique voisin du site.

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 Non loin de là s’est édifié récemment un restaurant qui a l’air fait de bois de grève.

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L’architecte a prolongé là une note japonisante dont l’étrangeté se marie étrangement bien avec la présence d’un pin maritime que «l’ermite» a peut-être connu.

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Cela m’a fait penser aussi sec (si on peut dire avec la flotte qui me dégoulinait dans le décolleté) à Chanson d’Ar-Mor, cet admirable film expressionniste en langue bretonne de Jean Epstein.

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En 1934 déjà, celui-ci avait su associer et confronter, par la musique et par la prise de vue, un âpre fond local fait de labeurs, de danses, de chansons, de magie et de traditions (celui là même où baigna l’abbé Fouré) avec une modernité rythmée par la vitesse, le luxe et des rapports humains basés sur l’argent et la position sociale.

jean epstein 1.jpgCeci dit pour vous signaler au cas où que la Cinémathèque française vient de sortir un coffret de 14 films de ce cinéaste trop méconnu, parmi lesquels plusieurs opus bretons.

 

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04.07.2014

Le renard de Plouha

Manque que le loup en Bretagne. J’ai freiné pour une belette et j’ai vu le renard.

Un renard naturalisé le long de la D 786 qui effleure la commune de Plouha. Au sein d’une installation de jardin qui a pour thème central la fable de La Fontaine. Avec son corbeau en contreplaqué à la découpe et sa boîte à camembert.

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Les pochettes de CD qui ornent le piédestal de ce scolaire trio composent une sorte de menu musical. L’auteur de cette oeuvrette commande astucieusement de chez lui la sonorisation douce de son parterre. Selon les cas : un p’tit coup de Trenet, de Mariano, de Mireille ou de Jean Sablon. Pour Animula ce fut Joséphine Baker.

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A chacun son coup de cœur. Celui de Lionel, l’auteur de cet ensemble sans prétention qui comprend aussi un mannequin jardinier et un pêcheur de grenouilles n’a pas de préférences.

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Lui, ce qu’il attrappe ce sont des visiteurs et il prend ce qui vient.

02.07.2014

Fauves dans un jardin breton

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Soudain trois tigres blancs dans un coin de mon pare-brise. Des tigres blanc sur une haie. A la sortie d’un bourg comme tous les bourgs. Sur la route qui mène à Tréguier.

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Et tout un peuple de peluches au dessus de la barrière d’hortensias. Qui fait donc ça ? Cette femme rouge là bas ? Non : la présence de ce leurre, qui surveille les curieux que nous sommes, tempère ce que la gentillesse de ces jouets peut avoir de conventionnel.

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Transposés du supermarché  dans ce jardin mi-rural, mi-banlieusard d’un pavillon aux allures bretonnes, ces objets de consommation courante ont l’air artistiquement dépaysés. Impression qu’accentue leur exposition au soleil et à la pluie qui les déréalise.

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Sans qu’on puisse ici parler d’art brut puisque le travail s’est borné à une installation de trouvailles méditées, l’auteur de ce rassemblement peu ordinaire s’est laissé guider par un goût très personnel des volumes et des mélanges.

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C’est au début de notre siècle désœuvré qui vit le triomphe définitif de la mondialisation industrielle galopante sur les vestiges de la civilisation rurale et laborieuse que cette mise en scène dérisoire mais résolue a été entreprise par la propriétaire de ce petit domaine.

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Annick (appelons-là Annick) renouvelle et améliore sans cesse sa création avec l’aide des voisins qui lui proposent de nouvelles peluches quand leurs enfants sont trop grands pour jouer avec. Elles les mêle à des mannequins qu’elle perruque et habille.

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Composant des tableaux où elle représente un orchestre familial

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le cycliste Bernard Hinault

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la marine en goguette, des joueurs de cartes peu cézanniens

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Même les gendarmes jettent en passant un œil favorable à l’installation d’Annick. Famille d’accueil à elle seule depuis que son mari est mort, Annick se réjouit que ses protégées trouvent dans la contemplation et l’usage de son installation un motif d’occupation agréable.

Cela donne naturellement à cette installation un autre sens que celui qui pourrait être le sien si, d’aventure, elle était née dans un autre lieu. Un musée, par exemple. Ou une exposition d’art contemporain. Car rien n’est impossible dans notre monde d’inversion des valeurs.

29.06.2014

A la recherche de l’Héritière perdue

AVIS DE RECHERCHE.

A Trélévern L’Héritière a disparu.

Beaucoup moins connue que la Vénus de Quinipily de Baud (Morbihan) dont elle a été parfois rapprochée

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La Penheres (L’Héritière, en breton) est une imposante statue à la rudesse impressionnante. Dernier domicile connu : le parc de Kergouanton, un manoir discret du côté est de la baie de Perros-Guirec. Seul portrait en circulation : une carte postale 1900 dont la reproduction ne court pas le net.

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Selon le témoignage d’une autochtone recueilli par votre petite âme errante, l’auteur du cliché a fait son possible pour suggérer des dimensions colossales. En réalité le beau moustachu cravaté qui est censé donner l’échelle n’est pas sur le même plan que La Penheres. Astuce de photographe. L’Héritière n’était sans doute «pas si grande que ça». Environ 1 mètre 72. Comme mon informatrice qui a eu l’occasion de se mesurer à elle. tete detail 4.jpgLe nez « cassé par des gamins » aurait été remplacé par du plâtre. Origine : rien ne prouve que La Penheres témoigne d’un culte ancien. Les visiteurs ont vite fait en Bretagne de voir des déesses celtiques partout.

832845188.jpgIl pourrait tout aussi bien y avoir parfum d’art brut là dessous. Le «Jeu d’un artisan primitif?» comme se le demande le noir Guide de la Bretagne mystérieuse paru chez Tchou au temps de la Révolution Culturelle (1966). 

Depuis, les Côtes du Nord sont devenues d’Armor, le manoir a été vendu et son dernier propriétaire d’origine (aujourd’hui défunt) aurait emporté la statue. Aux dernières nouvelles elle aurait été vue dans les parages de Pleumeur-Bodou, non loin de Saint-Uzec et de son menhir de 7 m de haut dont la christianisation naïve n’est bizarrement pas une catastrophe.

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«Un peu abandonnée, dans une haie» m’avait-on dit et j’avais cru comprendre que c’était sur une voie parallèle au chemin de la corniche qui serpente entre Trébeuden et Trégastel. Mais j’ai eu beau explorer les parages de cette arrière-côte en face de l’Île Grande, je n’ai trouvé nulle trace de la mystérieuse Penheres.

La piste s’arrête là et pour reprendre l’enquête, il me faudrait de nouveaux indices. Aux lecteurs de mon blogounet, je lance donc à la mer cette bouteille : QUID DE LA PENHERES ?

la vénus de quinipily de baud,la penheres de kergouanton,art brut,art populaire,bretagneFormidable ! Yaka demander ! Laurent Jacquy des Beaux Dimanches passait par là et ce dénicheur de rares images m’envoie une autre carte postale où figure en tout petit (mais quand même) la Penheres. La flèche rouge est de lui. Cliquer pour agrandir.

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Bravo à son œil de lynx et bonjour au Facteur Cheval de Bernard Bras (voir le post du 29 juin sur son blogue).

27.06.2014

Les gargouilles de Loc Envel

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Rothéneuf? Non : Loc-Envel. Un village perché à l’orée de la Forêt de la nuit (Koat an noz). Quatre bornes aux sud de Belle-Isle en Terre où veille depuis 1910 une Marianne de grande allure populaire avec son sein en artichaut et la tristesse d’avoir perdu son nez.

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Loc-Envel et son église pur jus breton dédiée à deux saints frangins qui masquent peut-être le souvenir lointain de jumeaux druidiques.

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Ambiance mystère-gagnant à l’intérieur. Grosses dalles au sol : on imagine le bruit des sabots. Petites ouvertures pour les lépreux.

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Jubé très XVIe comme une préface à l’heroic fantasy qui se déploie à l’intérieur sur les poutres du plafond.

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Dragons et petits cochons, personnages grotesques, drôles de gueules plus ou moins sacrées.

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Le tout coloré dans l’ombre. On peut faire de la lumière en mettant une thune dans un bastringue près de l’autel mais il faut se farcir alors un commentaire qui prend la tête du pauvre visiteur.

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Cette espèce de rude magie se prolonge en pierre à l’extérieur. Avec des gargouilles à vous donner la colique. M’est avis que dans les temps, on devait pas trop se promener la nuit autour.

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C’est l’une de ces créatures « sauvages » qui m’a fait penser aux rochers sculptés de l’Abbé Fouré. Tant il est vrai qu’en Bretagne, on a l’impression que, depuis les hommes préhistoriques, les créations rustiques se superposent au travers des siècles, aussi facilement que les feuilles d’un artichaut.

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L’impression seulement. Pour revenir à la réalité, je vous invite à noter que le samedi 28 juin 2014, l’Asso Les Amis de l’œuvre de l’Abbé Fouré tiendra son AG annuelle à la Maison de Quartier de Rothéneuf. A 10 heures du mat c’est un peu tôt pour moi parce mon Trégor c’est pas la porte à côté. Mais si vous naviguez dans les parages de la cité malouine, c’est dans vos possibilités.

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Bon maintenant je vous quitte parce que je dois faire mon ragoût de mouton à l’irlandaise. Et les navets, il n’y a pas que dans les films que c’est long à éplucher.

00:18 Publié dans De vous zamoi, Glanures | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : gargouilles et engoulants, loc envel, bretagne, marianne | |  Imprimer | | Pin it! |

25.06.2014

Ma zi koant et son vaisseau de pierre

Il siffle doucement et les fourmis s’abstiennent de grimper aux murs de sa jolie maison (zi koant en breton).

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Eugène Bornet a de ces dons qu’il garde modestement pour lui. Eugène s’auto-guérit en posant la main sur ses vieilles douleurs. Eugène parle aux 200 oiseaux de son jardin : «Pinson, approche, je ne te vois pas…Pinson, chante maintenant!».

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Cela suffirait presque à son bonheur, lui dont les épreuves de la vie n’ont pas entamé la douceur. Mais il y a ce grand vaisseau de pierre qu’il a installé en figure de proue de son jardin sous le regard bienveillant de la mairie de son village situé près de Belle-Isle en Terre.

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Terrien, Eugène Bornet a beau l’être, c’est à la mer qu’il a voué son parterre. Sa défunte épouse était d’Audierne, voyez-vous. Avec les cailloux des champs et des rivières il a donc bâti, à côté de son trois-mâts, l’abri du marin (sa boîte aux lettres)

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un phare miniature

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un rocher-chapelle «comme dans tous les ports»

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Un portail aux mouettes aussi. Les «habitants-paysagistes»  nous ont familiarisé avec ces volatiles en ciment armé.

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Amoureux des fleurs naturelles, Eugène Bornet se montre plus original dans la confection de bouquets minéraux dont il orne son mur d’enceinte. Les règnes végétaux et minéraux se superposent sans peine pour lui.

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Les créatures vivantes aussi, comme ces crapauds qu’il affectionne et qu’il réalise avec un reste de ciment ou dans une pierre grêlée, trouvée telle quelle et à peine retouchée.

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La rigidité de la pierre, il ne viendrait pas à l’idée d’Eugène d’en regretter l’ingratitude. Lui qui a éprouvé dans ses bras les terribles raideurs d’une sévère ankylose qui l’a soustrait à 45 ans à son travail de maçon, il a su faire avec. Et reconquérir par le travail artistique sinon la pleine santé du moins son autonomie.

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Pour éviter la paralysie puisque le chirugien lui avait dit de «faire des bricoles». Ainsi armé de son courage et de sa souriante bonne volonté, Eugène Bornet, avec cet innocent dandysme qui caractérise les bons jardiniers, répond volontiers à la curiosité des visiteurs de passage.

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A ceux qu’il sent vraiment intéressés par son petit domaine et ses créations (car il devine les gens et les choses), il confie : «moi, j’adore la pierre, c’était mon métier!».

20.06.2014

Les marcheurs du Trégor

Le Trégor est un trésor. Cette province bretonne est pleine de clochers qui ressemblent à des poissons-scie. On s’arrête (sans jeu de mots) parce que ça gargouille dans les nuages.

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Le temps de photographier une bande de singes de pierre qui ont l’air d’engueuler les fleurs du parvis.

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On en oublierait presque ce drôle de paroissien qui s’achemine vers l’église sur ses longues jambes bleu-ciel.

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N’était son air  farouche, on lui demanderait bien qui a fait son gilet rouge et son chapeau noir traditionnel réalisé avec une ardoise plate et un pot en plastique.

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C’est le jardinier de la commune, l’auteur de cette sculpture si judicieusement mise en scène.

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Je tiens l’information d’une de ses concitoyennes qui promène son chien. «Mais c’est surtout un bon jardinier!» croit-elle bon d’ajouter. Cette remarque un tantinet restrictive suffit à me lancer dans une enquête de terrain, au grand dam de mon chéri qui préférerait aller boire une petite bière Philomenn bien fraîche.

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Que l’art rustique et coloré du jardinier-sculpteur interloque ses contemporains me confirme dans l’idée de son talent natif.

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En cherchant bien, j’ai découvert sur un rond-point à la sortie du bourg, une autre pièce du même type.

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Même sens du mouvement. Même habileté à tirer parti de la forme naturelle d’une branche.

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Même physionomie presque timide due à un traitement savoureusement « primitif » de la gouge.

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Aux dernières nouvelles le créateur de ces « marcheurs » aurait œuvré aussi à l’école. Si j’en apprends davantage, je vous tiens au courant.

22:34 Publié dans art brut, Glanures, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art du bord des routes, bretagne | |  Imprimer | | Pin it! |

24.05.2009

Les coquilles du rêve : Pierre et Yvette Darcel

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Si je vous dis : «Mon rêve», c'est à celui de Pierre et Yvette Darcel que je pense, pas au mien. Au cœur d'une Bretagne, toujours belle et mystérieuse comme une toile de Paul Gauguin, ces deux vaillants septuagénaires se consacrent à la création artistique avec l'entrain et la patience dont ils faisaient naguère preuve pour élever leurs 700 porcs.

Toutes leurs forces vont aujourd'hui à la beauté qu'ils se sont mis spontanément à produire dans leur coin de campagne, déjà super joli au printemps avec la réserve d'or de ses ajoncs.

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«On est pas mal connus », dit madame Darcel. Pas étonnant que les voitures et parfois même un car d'Italiens dont la commune est jumelée avec la leur s'arrêtent pour photographier leur parterre agrémenté de groupes de statues en ciment armé décorées avec des coquillages.
«Y'a Pierre qui fait sa vache !» s'exclame une petite voisine, en gambadant comme une gazelle autour de monsieur Darcel qui, mégot aux lèvres, joue de la truelle sur sa dernière réalisation, en écoutant l'accordéon à la radio.

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«L'été, il travaille dehors, l'hiver à l'intérieur» me glisse Yvette en m'invitant dans l'ancienne porcherie transformée en atelier et en réserve de matières premières. Les coquilles Saint-Jacques viennent de St-Quay-Portrieux. Ils vont aux «moules-frites» récupérer les coquilles. «Beaucoup de bonnes gens leur en donnent»...

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Moi qui fait dans la coquille depuis ma récente balade dans le bassin de Marennes-Oléon, vous pensez si j'ai flipé quand j'ai vu pour la première fois les merveilles d'élégance et d'évocation (rurale, rêveuse et populaire) concoctées par Pierre Darcel. Malgré une épaule qui «ne suit plus».
C'était sur les photos, prises un jour de pluie, que m'avait aimablement fait parvenir une familière de ce petit paradis. Promesse d'enchantements : sur les clichés de Michèle Merlin, mon informatrice, la laine moutonnait sur le dos d'une des premières créatures réalisées par Pierre Darcel.

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Photo : Michèle Merlin

Dame Merlin -on peut le dire- avait eu l'œil. La statue de Bretonne à son lavoir valait 10.

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Photo : Michèle Merlin

Ils étaient vraiment trop les danseurs en costume folklorique!

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Photo : Michèle Merlin

Excitée comme une puce, je profitais du premier week-end pour aller me rendre compte par moi-même.
Maintenant que j'ai vu la fileuse de Pierre Darcel : «ma maman l'hiver, elle filait la laine pour mettre du beurre sur le pain»,

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maintenant que j'ai admiré l'extraordinaire mur décoré qui sert de toile de fond à son «show-room» en plein air,

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je sais comment la lumière est magiquement attirée par les motifs solaires

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et les scènes d'une poésie toute naturelle qu'il y a inscrits.
Axé autour d'une liberté totemique, le jardin de Pierre et Yvette Darcel est encore un «work in progress».

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D'ores et déjà, pourtant, il se hisse au niveau des meilleures réussites du genre : les sites de Fernand Chatelain, Emile Taugourdeau, Gabriel Albert, Lucien Favreau.