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30.06.2011
Un été portes ouvertes
Je suis prise à la gorge par l’actualité des villégiatures. Les parties de campagne se succèdent et je n’arrive pas à suivre. Souvent elles ne se ressemblent pas et des fois si.
Dimanche dernier, le 25 de juin 2011, il faisait hyper-beau.
Et j’ai retrouvé, pour une journée portes-ouvertes dans un jardin de Versailles, la fine équipe, constituée par Boistine et Jean-Michel Chesné, que j’avais rencontrée à Malakoff le samedi 14 mai au lieu-dit La Grotte.
Leur partenaire avait changé. Le principe de ces réjouissances c’est de marcher sur 3 pattes. Trois artistes qui montrent leurs boulots, leurs collections, leurs hospitalités, dans un contexte champêtre, intimidant pour personne. Dimanche 25 c’était Chamoro
samedi 14 Catherine Ursin
Je ne sais pas quelle garden-party j’ai préféré. Du côté Versailles, c’est clean et calme. Le jardin de Boistine sent le jasmin et bruisse de rires d’enfants.
Du côté de Malakoff c’est plus touffu.
Le jardin de mosaïques de Chesné monte et descend, tourne et vire. Il se la joue mystérieux mais ludique.
Je ne sais plus si c’est chez l’un ou chez l’autre que je me suis gavée de brioche et de jus d’orange mais ce que je peux dire c’est que je me suis donné du mal pour photographier les œuvres en évitant la foule qui arrive par paquets chez Chesné, en chapelets chez Boistine : «coucou, c’est nous!». Bien entendu, j’ai mes petites préférences. Je vous les dirai pas.
Mais enfin, j’ai été plutôt agréablement bluffée par le côté architecte-singulier de Jean-Michel.
Ses dessins, plus cérébraux, ne me le laissaient pas présumer. Il a un sens pratique de l’environnement spontané qui lui vient peut-être des cartes postales qu’il se plaît à ramasser. Il en a mis quelques unes entre mes mains et ça n’a pas été le plus mauvais moment de la journée.
De Boistine, j’aime certaines trouvailles où elle se montre capable de flirter avec ce qu’elle appelle «la barbarie».
Mais sa pente l’entraîne vers un certain bonheur (why not?) qui la porte vers le registre décoratif. J’espère un jour avoir l’occasion de plancher sur ses bijoux. En attendant, je me suis offert un de ses pendentifs en argent qu’elle balade dans une vitrine de poche parmi les coccinelles.
Plus inquiet, plus tourmenté peut-être, l’état d’esprit qui préside aux travaux de Catherine Ursin! Suspendus dans les arbres de Malakoff, ses calicots sanglants ont de l’allure.
Elle tourne douloureusement autour de thèmes sacrificiels féminins. M’intriguent les réseaux de lignes rouges striant ses installations.
Je les ai retrouvées dans deux gouaches réalisées sur des cartons à boutons du temps de nos grand-mères. Elles marchaient si fort ensemble que je les ai achetées.
Vous allez me dire que je suis folle. Que Chesné, Boistine, Ursin sont des gens cultivés. Cultivés en art brut. Mais l’art brut aujourd’hui n’est-il pas une influence qui s’exerce comme une autre? C’est intéressant de se demander comment ces trois-là sauront (ou ne sauront pas) s’en dépatouiller (ou s’en accommoder).
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24.06.2011
Laduz ou la clef des songes
Avis à la population animulienne avide de plan détente aux trémolos des p’tits oiseaux!
Si vous cherchez un point de chute à la campagne pour le ouikène ou une thébaïde pour une retraite studieuse, afin de rédiger votre mémoire qui n’avance pas sur Paris, allez faire de beaux rêves au Musée de Laduz.
On dit «Ladu» et c’est dans l’Yonne. Vous le savez bien car c’est pas la première fois que je vous cause de cet adorable musée rural des arts populaires. Des arts et pas des «traditions» car la maison n’est pas confite dans le folklore.
Si Raymond et Jacqueline Humbert ont passé plus de 30 ans à rassembler les milliers de témoignages des activités, des rêves et du sens esthétique des gens d’autrefois, c’est pour que ça serve à ceux d’aujourd’hui qui ne sont pas tous des bourriques.
La preuve, Jacqueline Humbert vient de prêter des objets de sa collection aux Morceaux exquis, une expo que je vous ai signalée pas plus tard qu’au début du mois de juin, petits veinards que vous êtes. Raymond Humbert n’est plus de ce monde mais sa présence bienfaisante plane toujours sur le beau jardin du musée où il aimait peindre et où les arbres, quand ils poussent de travers, reçoivent le secours de tuteurs et d’attelles comme on le fait au Japon.
Dans une salle à part meublée de stalles du 18e siècle, rescapées de l’autodafé où elles étaient destinées par leur église, une exposition des peintures sur papier de Raymond Humbert est organisée par son épouse du 26 juin au 18 septembre 2011. Le vernissage de cette exposition intitulée Paysages est prévue pour samedi, le 25 juin 2011 à partir de 18 h à Laduz.
Une occasion rêvée de vous offrir une nuit au musée, du moins dans sa chambre d’hôtes. Car, vraiment, je vous assure, ce n’est pas «foutage de gueule» de ma part, on peut maintenant dormir dans cette maison enchanteresse.
Dans une aile adjacente, deux pièces à l’étage, superbement poutrées,
un petit escalier avec une rampe en forme de harpe en fer forgé vous attendent.
Et, jouxtant l’entrée du musée proprement dit,
une petite cuisine avec des carreaux bleus et des confitures.
L’Usage du monde de Nicolas Bouvier sur une table
Un tableau en laine de Marie-Rose Lortet accroché dans la bibliothèque.
Un coffre paysan à décor gravé, des galoches à châtaignes sur une armoire
quelques beaux objets ou ustensiles populaires fixés au mur ou suspendus.
Et un p’tit déj bio au soleil le dimanche matin car il y en aura.
Avouez qu’il y a pire!
00:38 Publié dans De vous zamoi, Expos, Jadis et naguère, Oniric Rubric, Poésie naturelle, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musée de laduz, arts populaires, raymond humbert, jacqueline humbert, marie-rose lortet | | Imprimer | | |
21.06.2011
L’appel du 18 juin à la Fabu
18 juin 2011 : pierre blanche dans les annales de la Fabu.
Non seulement parce que Francis Marshall dédicaçait son recueil de réclamations ou parce que café et chouquettes étaient au rendez-vous des retardataires du matin.
Mais parce que cette journée d’étude et de fun organisée par le CrAB fut tout simplement une sacrée bonne chose à glisser dans l’armoire aux souvenirs.
Ils étaient venus, ils étaient tous là. Même ceux du sud de l’Italie, même ceux de Rives dans l’Isère.
Pourtant le ciel menaçait la tour de Pierre Avezard. J’eus beau exécuter ma danse de conjuration de la pluie, le temps nous la joua jusqu’au bout schtroumpf grognon.
Ce qui divisa l’assistance en deux groupes distincts.
Le camp des enragés optimistes qui s’installent dehors pendant les pauses et celui des gens prudents qui s’abritent sagement dans l’atelier spacieux d’Alain Bourbonnais, le héros du jour.
Heureusement, les projections, les visites, les causeries et les performances réconciliaient tout le monde dans un joyeux brouhaha de chaises remuées et les zims et les zoums de mon kodak numér-hic (votre petite âme errante n’ayant pas craché sur le gentil vin blanc de Bourgogne).
On se refit tout le toutim de la collection avec des ho! et des ha! aux retrouvailles et aux découvertes. Devant les machines de Monchâtre, Roberta Trapani faillit pousser la canzonette.
Catherine Ursin, dans ses jolies pompes bleues, était captivée par les masques de Nedjar.
Fanny Rojat, dans une attitude favorite, jouait les mystérieuses au stand Ratier.
Je mitraillais pour ma part dans le groupe d’Agnès B (comme Bourbonnais) car les photos exceptionnellement étaient permises.
Pas mécontente de revoir le mobilier de Podesta
l’épouvantail du tunnel
la vache de Landreau
Question conférences, j’avoue que je me suis dissipée un peu. C’était rigolo d’essayer de capter Déborah Couette qui planchait à contre-jour sur L’Atelier Jacob. Heureusement, elle agite sa chevelure au fur et à mesure qu’elle progresse dans son sujet!
On s’entassa ensuite dans la beaucoup plus sombre salle de projection pour «Il avait un côté campagne», le laïus de Baptiste Brun sur Alain Bourbonnais et le petit monde de l’art des année soixante.
Seules la faim et l’arrivée inopinée de la racaille des Turbulents (qui s’échappèrent bientôt en direction du lac) eurent raison du conférencier qui charmait la galerie.
Avant de poursuivre le programme scientifique avec la séance médianimique du Sâr J.-L. Lanoux qui évoqua les mânes de Simone Le Carré-Galimard
on se rua sur le pique-nic. Pauline Goutain mit au service de la collectivité des talents insoupçonnés de découpeuse de terrine .
Pour finir Jano Pesset pointa sa belle barbe de Père Noël que l’on aperçoit ici derrière le franc sourire d’Emilie Champenois.
La présence réelle de Michel Ragon fut attestée par le biais d’un entretien filmé chez lui par les soins de Débo et d’Agnès.
Maintenant, si Caroline B veut me donner la recette du délicieux flan qu’elle tient à la main, qu’elle ne se gêne surtout pas!
23:55 Publié dans art brut, De vous zamoi, Jeux et ris, Parlotes, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : la fabuloserie, art hors les normes, alain bourbonnais, caroline bourbonnais, agnès bourbonnais, art brut, les rencontres du crab, francis marshall, pierre avezard, roberta trapani, françois montchâtre, catherine ursin, nedjar, fanny rojat, giovanni battista podesta, marcel landreau, déborah couette, baptiste brun, jean-louis lanoux, simone le carré galimard, pauline goutain, jano pesset, emilie champenois | | Imprimer | | |
13.06.2011
De l’Aliénisme au Surréalisme
Saviez-vous que Jean Delay, le biographe d’André Gide, était l’auteur de La Cité grise, un roman, proche de L’Etranger d’Albert Camus, situé «dans les services de la Salpêtrière hantés par les fantômes de Charcot (…)»?
Ou que Hans Prinzhorn, après Heidelberg, n’est resté que quelques mois au «prestigieux Burghölzli» (hosto psy de Zürich) parce que son patron, Eugen Bleuler (l’inventeur de la schizophrénie) n’estimait guère ses «capacités de travail» et «son comportement envers le personnel féminin» ?
Si oui, chapeau, vous avez mérité la médaille de l’art brut! Sinon, j’ai le plaisir de vous l’apprendre. Je tire ma science du catalogue de la vente publique Auction Art (Rémy le Fur & Co) intitulé : De l’Aliénisme au Surréalisme.
Elle aura lieu jeudi 16 juin 2011 à Drouot Riche (salle 8). Mais même si vous pouvez pas y aller, ça vaut le coup de vous procurer ce catalogue pour les super notices qu’il contient.
On ne dit pas qui se les est appuyées. L’expert, Mr Oterelo, est connu pour ses lumières surréalistes. Il reçoit ici le renfort de Dagobert Asmara, qui n’a pas mis sa science à l’envers dans les 310 numéros qui composent la première partie provenant de la Bibliothèque du neurologue suisse Julien Bogousslavsky.
Des tas de choses goûteuses là-dedans pour une Animulienne doctorante à cœur (je sais qu’il y en a). Mais même si vous avez passé l’âge d’être étudiant vous aurez de quoi satisfaire votre curiosité avec le n°231 : un article de Walther Morgenthaler paru en 1919, soit 2 ans avant son fameux livre sur Adolf Wölfli. Ou avec le n°99 qui propose le rare catalogue du Cabinet de M. Georges Courteline (1927) recensant 32 petites horreurs «naïves». Je pourrais vous citer aussi le n°270 : un tirage argentin du livre de Rogues de Fursac de 1905 et pleins d’autres trucs encore. A signaler dans la 2e partie une Ronde des filles de l’air (n°397), dessin d’un pensionnaire de Charenton.
Il chapeaute des documents concernant Nadja (n°398). Voir aussi, à ce propos, dans le n°148 (Un souvenir d’enfance de Léonard de Vinci) la dédicace de Freud à Henri Claude.
Sur ce psychiatre non hostile à la psychanalyse, la notice du catalogue Le Fur apporte de très intéressantes précisions : «Il ne mérite pas (…) le terrible portrait au vitriol qu’en fait Breton dans Nadja. Breton l’accusait d’avoir interné Léona Delcourt et de la maintenir emprisonnée dans des conditions atroces.
Des recherches ultérieures ont pu établir que, ramassée sur la voie publique pour racolage et en proie à une grande confusion intérieure, elle avait été transférée chez Gatian de Clérambault au dépôt de la Préfecture de Police, avant de passer aux admissions de Sainte-Anne où elle ne resta que quelques jours avant d’être déplacée à Perray-le Vaucluse, puis dans le nord où elle finit ses jours».
En conclusion, l’auteur de la fiche croit bon de mettre les points sur les i : «Une accusation surréaliste dont il fallait innocenter le professeur Claude!».
23:26 Publié dans Ecrits, Expos, Gazettes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : aliénisme, surréalisme, ventes publiques | | Imprimer | | |
08.06.2011
Carlo et les convulsionnaires
C’est la saint-Médard. Retour des convulsionnaires. L’occasion idéale de sortir la dernière phrase de Nadja. Bon, elle a déjà beaucoup servi, d’accord. Mais elle fait toujours son petit effet. Surtout si on n’oublie pas de hurler au milieu quand on l’écrit : «La beauté sera C.............E ou ne sera pas».
Les convulsionnaires se réuniront deux fois ce mois-ci. Non sur la tombe du diacre Pâris mais dans cette Jérusalem céleste de l’art brut qu’est la Galerie Berst.
Jeudi 9 juin de 18 h à 21 h, à l’occasion du vernissage Carlo Zinelli
et le mardi 14 juin 2011 à 19h où l’on se convulsera d’aise en écoutant la conférence donnée par Daniela Rosi. «Si tu n’es pas crétin, regarde!» nous interpelle quelque part le flyer.
Tant pis pour ceux qui n’aiment pas se faire tutoyer.
23:14 Publié dans art brut, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, carlo zinelli, galerie christian berst, daniela rosi, nadja, st médard | | Imprimer | | |
03.06.2011
Morceaux exquis rue Récamier
Il s’en passe de belles dans le sixième! Chose vue carrefour Croix-Rouge, autrement dit place Michou-Lapin. Un petit canaillou n’a pas craint d’escalader le gros bourrin en bronze qui exhibe là ses phallocratiques avantages pour aller lui planter sur la tête un turlututu détourné de la circulation. Passant par là pour me rendre au déballage de livres place Saint-Sulpice, je n’ai pas pu empêcher mon chéri-que-j’ai d’immortaliser avec son kodak cette customisation sauvage.
Il faut disait Victor Hugo «mettre un bonnet rouge au dictionnaire». Il n’est pas mauvais non plus de mettre un chapeau de sorcière aux commandes de l’état qui s’imaginent qu’il suffit de fourrer un balai mécanique dans le derrière d’un poncif de la mythologie antique la plus machiste pour en faire un chef d’œuvre de l’art urbain contemporain.
Un peu plus loin, chez Rachida, c’est une autre chanson. La mairesse a de la chance puisque son arrondissement abrite la charmante sous-station de la rue Récamier, une confortable impasse qui prend des allures de chaise-longue en ces temps caniculaires. Il ne se fait plus d’électricité au numéro 6. La sous-stat est devenue l’Espace Fondation EDF.
S’y déroule en ce moment et jusqu’au 25 septembre 2011 une expo qui a l’avantage de faire sortir des caisses marseillaises où ils étaient enfermés quatre centaines d’objets provenant pour l’essentiel du défunt (snif, snif!) Musée des Arts et Traditions Populaires.
Si vous n’avez pas eu la chance de connaître cet établissement vénérable du temps où il crèchait dans le Bois de Boulogne, allez voir cette expo intitulée Morceaux exquis.
Bien que le joyeux mélange, choisi pour animer, autour du double thème du corps et des proverbes, les vitrines consacrées aux divers morceaux (nez, bouche, œil, ventre, peau, poils etc.), aurait sûrement fait bondir son fondateur Georges-Henri Rivière, mort en 1985.
L’année même où naquit le Centaure de César dont je vous causais plus haut! Si vous êtes comme les blés (fauchés), allez-y aussi. C’est gratuit. Et le catalogue coûte que 10 €.
C’est pas si fréquent pour une expo de qualité où vos moutards aimeront caresser les fesses d’une noix de coco et vous poser des questions embarrassantes sur la Fanny qui montre son postérieur sur une plaque émaillée ou sur Gina et ses trois lolos.
Coll. MuCEM, Paris/Marseill © Christophe Fouin
Je vous en fais pas des tonnes parce qu’il y a un dossier de presse. Impresssionnable comme je suis, j’ai été surtout conquise par une poupée d’envoûtement venue de Talence en Gironde en 1960. J’en fouette encore. Elle vaut à elle seule le déplacement.
Coll. MuCEM, Paris/Marseill © Christophe Fouin
Mais j’ai revu avec plaisir des objets sculptés par Xavier Parguet (ou Parguey?), dit Le Zouzou, sculpteur sur bois de Vuillafans dans le Doubs, jadis célébré dans le Fascicule 5 des Publications de l’Art brut.
Coll. MuCEM, Paris/Marseill © Christophe Fouin
J’ai regoûté aussi aux beautés candides des pierres sculptées par Fernand Duplan qu’on admirait autrefois au Petit Musée du Bizarre à Lavilledieu en Ardèche. Ce Fernand Duplan dont on sait peu de choses, si ce n’est ses dates (1899-1976) et son pays : Ruoms.
Coll. MuCEM, Paris/Marseill © Christophe Fouin
Après ça j’étais mûre pour une petite balade dans le square Roger Stéphane qui sent le jasmin et qui sait délicieusement se faire oublier à deux pas de la ronflante rue de Sèvres.
23:55 Publié dans Expos | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art brut, art populaire, atp, xavier parguet, fernand duplan, petit musée du bizarre | | Imprimer | | |
01.06.2011
L’œuvre secrète de Lucy Vines
Attention! Ceci n’est pas de l’art brut! L’auteur de ces figures hors du temps, qui émergent silencieusement du noir ou y retournent, vit dans un milieu d’artistes et d’écrivains. Pas de l’art brut donc, ces dessins de petit format, réalisés au crayon Comté sur papier grené.
Pas de l’art brut mais ça mériterait d’en être. Du moins entre eux et lui n’y a-t-il pas incompatibilité. Il est même extrêmement troublant de voir comment, avec des moyens qui sont ceux de la culture, Lucy Vines parvient à s’approcher du foyer incandescent où l’art brut se consume.
Cette Américaine de Paris, qui n’est plus -loin s’en faut- une jeune fille, voit ses œuvres exposées jusqu’au 13 juillet 2011 à la Maison de l’Amérique latine, 217 boulevard Saint-Germain. Je ne la connais pas car c’est je crois la première fois qu’on voit son travail à Paris. Et jusqu’à une date récente (expo à la Fondation Morat à Fribourg-en-Brisgau en 2005-2006 et à l’Ecole des Beaux-arts de Nîmes en 2007) il était même resté secret.
Secret, on n’imagine pas ça aujourd’hui! Pourtant seuls quelques happy-few avaient accès à ces images sans clé ni serrure et ils échouaient jusqu’à présent à convaincre Lucy de les montrer. Voilà qui est fait maintenant et il ne faut pas manquer l’occasion. Un livre-catalogue accompagne l’exposition. Avec 4 études critiques par Homero Aridjis, Alain Madeleine-Perdrillat, Jean-Paul Michel, François Lallier.
Ils vous diront mieux que moi tout ce qu’il y a à savoir sur les traits aux circonvolutions chaotiques, sur l’absence de décor et d’accessoires, sur la lumière orangée et diffuse (comme dans la peinture de Georges Seurat) qui caractérisent la manière de Lucy Vines. Il faut de bonnes plumes pour appréhender cette œuvre intimiste, fragile et mystérieuse, dépourvue d’intentions de fantastique, sans besoins de recours onirique trop évident.
Aussi j’y renonce. D’une manière plus terre-à-terre, je dirai que Lucy Vines me fait penser à La Petite fille aux allumettes de Hans christian Andersen. Ses figures poreuses, un peu mangées de nuit, ont l’air d’être saisies pendant le court instant de lumière procuré par la combustion d’un bâton soufré
Détails supplémentaires mais qui ont leur prix : Lucy Vines se tient à l’écart du monde des galeries, elle livre peu de choses de sa vie car elle ne désire pas que sa biographie influence notre interprétation de son œuvre. De quoi faire une exception, non? Ouvrez les yeux, fermez les yeux : c’est Lucy Vines.
Les photos, extraites du catalogue, sont de Michel Nguyen .
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