28.09.2007
Romaines et Homard
Déjà les temps frisquets et j’ai pas rentré encore ma moisson d’été.
Je vous parlerais bien de Romaine, la modiste d’Ernée qui a refusé la médaille du travail parce que faire des chapeaux l’amusait.
Le beau prénom de cette Mayennaise et ses rubans m’évoquent les courbes des dessins qu’une autre Romaine, le peintre Romaine Brooks -une amie de Natalie Barney et de Jean Cocteau- réalisait vers 1890 pour exorciser sa peur.
Elle avait alors 15 ans et sa mère lui fichait les grelots au point qu’elle voyait, comme Marguerite Burnat-Provins, des êtres pas possible apparaître dans les rideaux.
Je vous parlerais bien de Victor, le miniaturiste de Colombier-du-Plessis que j’ai rencontré dans un bulletin d’infos municipales.
Il ne se contente pas de transformer son église en maquette, il s’essaie timidement à la peinture.
Lui qui n’a jamais visité le musée de Laval, il a trouvé une voie naïve pour tirer le portrait d’un «tonton», mort à la Guerre (la 1ère).
Je vous parlerais bien du homard de Patrick à Tréguier…
23:15 Publié dans Glanures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Romaine Brooks | | Imprimer | | |
31.08.2007
Alfred Jarry, de Laval à La Frênouse
Vous avez le bonjour d’Alfred. Alfred, enfant de Laval qui engendra Ubu, lequel donna naissance à une flopée de marionnettes amindadesques, polpotistes et margaretatcherhyènes.
A un pareil engendreur d’antihéros, sa ville natale se devait d’offrir quelque chose. Laval a donc donné une ruelle à Alfred Jarry. Et, par un trait d’umour vraiment pataphysicien, elle l’a réservée aux vélos ! Difficile de faire mieux, me direz-vous.
Et bien pour le centenaire de la mort de l’écrivain, sachez que Laval s’est décarcassée encore dans le genre topiaire.
Comme votre petite âme errante en avait ras la casquette de se cogner à chaque carrefour à ces commémorations de buis taillés, elle a poussé Bijou, sa petite auto, sur La Frénouse où elle est allée présenter ses respects à cette allégorie dédiée au grand Alfred par Robert Tatin.
Tant qu’elle y était, avant le retour de la pluie, elle s’est fait la totale visite de ce site qu’on ne présente plus et elle vous en a ramené tout un album pour la rentrée.
13:35 Publié dans Glanures, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Alfred Jarry, Robert Tatin | | Imprimer | | |
02.07.2007
Surréalisme turbin et far breton
Harassant samedi de soldes! Votre petite âme errante s’est mis les basquettes en compote en arpentant les boutiques Champs-Elyséennes. Où qu’on aille pourtant, l’art vous rattrape. Je m’apprêtais à faire la queue devant un célèbre bagagiste, lorsque dans la perspective de l’avenue George 5, j’ai découvert la maison qui fond.
Elle fait courir les Parisiens avec sa mollesse à la Dali. Je doute qu’il s’agisse de «surréalisme urbain» comme on nous le rabâche. D’abord parce que «surréalisme» et «urbain» c’est du pareil et puis parce que je ne vois pas là cette étincelle subversive qui - on a tendance à l’oublier – court comme le furet dans le mouvement d’André Breton. Cependant, c’est amusant, même si ça sert surtout à faire de la pub au groupe foncier qui (merci, messieurs) mécène ce bidule. Grâce à Athem, constructeur de sites éphémères qui a habillé le chantier de ce futur siège social, on se paye une bonne tranche d’illusion. Si vous me croyez pas, allez donc voir ici où on vous donne les détails.
Et puisque vous avez entamé avec moi votre partie de ping-pong-blogues, allez donc vous prélasser aussi sur Terribuleska Spazoïde d’Arnaud Le Gouefflec. Il propose un choix scotchant de chansons zarbies et de sauvageon rock’n roll. Ce frère ne dédaigne pas Jules Leclercq et il accompagne sa note du 1er juin 2007 (à propos d’une compil inspirée par le grand nord canadien) d’une drôle de créature.
Pour rester dans la note bretonne, je suis allée goûter dimanche chez ma copine Maïwenn qui m’a fait son fameux far et m’a passé les Frères Morvan (Ar Vreudeur Morvan).
En rentrant j’avais un peu honte d’avoir délaissé mes amis du Poitou, alors pour me faire pardonner, j’ai décidé de leur offrir ce bateau d’un certain Agostini, fait en 1936 à la prison Saint-Paul de Lyon.
Il accompagnera ceux que Belvert a glissé dans son billet du 1er juin 2007.
23:55 Publié dans Glanures, Images, Zizique | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : art brut | | Imprimer | | |
17.06.2007
Le petit train du monde
Et pendant ce temps là, le monde continue d’aller son petit train. Cela ne saurait tarder, les Japonais seront bientôt fous de Darger et de son « little-know solitary world ».
Le Hara Museum of Contemporary Art de Tokyo lui consacre une expo : A story of girls at war of paradises dreamed.
Si vous passez par là, c’est jusqu’au 16 juillet 2007 mais vous pouvez aussi aller vous vautrer sur le site. C’est en anglais ou en japonais (beaucoup plus chic).
Retour chez nous pour une arcimboldesque, dread-lockesse et samouraïesque image de cet amateur de yorkshire terrier qui fréquente les manifs de profs, la journée de la Fierté homosexuelle ou les marches de sans-papiers.
C’est Francis Beddok qui a mis cette extraordinaire photo (et ses petites sœurs) sur Paris Emoi, son blogue qui relate 1000 petites choses vues à Paris.
S’il y a un Québécois dans l’assistance, qu’il n’oublie pas que le mardi 19 juin 2007 c’est l’inauguration, à Baie Saint Paul, de la Galerie Vincent et moi, l’art en tête qui «se veut d’abord un lieu de diffusion et de sensibilisation au travail d’artistes dits marginaux (…)».
Un petit compte-rendu pour les Animuliens européens serait le bienvenu.
Là dessus, je vous quitte dans un bruit de vaisselle cassée (c’est mon chéri que j’ai qui s’occupe du ménage pendant que je pianote pour vous comme une shadock) et je vous dis : «à la s’maine prôchaine».
11:40 Publié dans Expos, Glanures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Henry Darger, art brut | | Imprimer | | |
03.06.2007
A la Dame maman
Ce chameau-là est tombé sur un obscur Bulletin de la Société Anonyme des Amateurs (texto, sur la tête de ma mère !) datant de 1997 et servant de catalogue à une expo, Stigmates, du Centre d’Art Contemporain de Rueil-Malmaison.
C’est tout juste si elle m’a laissé scanner une des illustrations d’un article d’Emmanuelle Gall sur les Tatouages du milieu parce qu’elle était «scotchée» par les portraits agrémentant un petit Musée criminel constitué par des photos d’archives du Petit parisien, prises entre 1920 et 1945 et retouchées manuellement.
J’ai donc dû me contenter de cette lettre «à la Dame maman», écrite par un certain Joël sur un méchant bout de papelard dentellisé et vaguement décoré.
Comme vous aurez du mal à le lire sur l’image, votre petite âme errante, qui est une mère pour vous, vous le transcrit :
Je te remercie de m’
avoir bien soigne
et j’en te remercie et
t’aime encore
plus si sai possible
car tu ai bien
gentille aussi comme
j’ai du papier et
un crayon j’en
profite pour t’crire
et surtout te rem-
ercier de m’avoir
soigne et d’avoir
fatigue, pauvre
petite chéri de
maman je t’en
remerci beaucoup
et je t’assure que
si tu ete malade
se que j’espere bien
que non je te soignera
fort bien, pardonneme
tout je ce t’ai
fait
Je
fort tembrasse.
Pour celles à qui ça suffirait pas, je leur conseille de se brancher sur le site des gars du New York Naked Ukulele Ensemble qui leur interpréteront Sunny afternoon.
19:50 Publié dans Glanures, Poésie naturelle, Zizique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut | | Imprimer | | |
23.05.2007
La caverne d'Auvers
En passant par Valmondois où je suis été comme il se doit voir ou revoir les photos de Clovis Prévost, j’ai fait un crochet chez le Docteur Gachet dans cet Auvers-sur-Oise tout en longueur où se trouve la chambre de Van Gogh.
La dernière fois que j’y passa dans ma jeunesse folle, l’auberge était encore un bistroquet de campagne sur lequel Robert Giraud, peut-être, n’aurait pas craché. Contre un canon ou un Vichy-fraise pris sur le zinc, la patronne vous laissait monter dans la fameuse mansarde qui n’avait pas changé depuis la mort du peintre.
Aujourd’hui, tout a été boboïsé à mort, du moins de l’extérieur qui a l’air d’un décor de comédie musicale américaine. J’ai pas eu le courage d’entrer de peur d’esquinter mes souvenirs de gamine.
De toutes façons, des piaules de Van Gogh y’en a partout. Le mois dernier, de passage à St-Rémy-de-Provence, j’ai vu celle (reconstituée) de la maison de santé St-Paul, l’ancien asile où Vincent crècha de mai 1889 à mai 1890, après l’histoire de l’oreille.
Un atelier d’art-thérapie (Association Valetudo) fonctionne ici. On vend ses productions aux visiteurs de passage. J’ai rien vu de bouleversant. Tout est trop propret. Une certaine qualité picturale mais on a l’impression que c’est trié et que les choses plus hardos ont été épargnées aux touristes.
Je vous ai quand même ramené un Polichinelle en carte postale pour vous donner une idée.
Pour en revenir à Auvers, sachez que pour me consoler, je me suis rendue à la Caverne aux Livres qui est maintenant l’endroit vivant du coin. En fait de caverne, c’est de wagons dont il faut parler car cette méga-bouquinerie est installée, près de la gare, dans des voitures postales à la retraite.
Les livres sont posés dans les casiers qui servaient au tri du courrier. C’est un endroit qui aurait ravi Blaise Cendrars, sûr qu’il aurait éclusé un p’tit gorgeon à sa santé. Votre petite âme errante s’est sentie là-dedans comme une souris dans un fromage. Un aimable bordel règne.
Pour celles et ceux qui craindraient de se mettre les mains dans le cambouis documentaire, tout est quand même classé par thèmes.
Dans le rayon art, j’ai eu beau fouiner, j’ai pas trouvé d’art brut excepté, dans un vieux numéro de L’Œil (sept.-oct. 1971) le chouette article de François Loyer, truffé de photos de Bernard Lassus, sur le site disparu de Charles Pecqueur (voir album).
23:55 Publié dans Glanures, Vagabondages | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Charles Pécqueur, Clovis Prévost, Vincent van Gogh, art brut | | Imprimer | | |
14.05.2007
Médaille, caresse et couronnement
Oyez, oyez donc braves gens que le 15 de ce mai magique la médaille de la ville de Paris sera remise à mister Chand (Nek) de passage dans notre capitale par un adjoint au maire (et député) dont le nom est si proche de Caresse que je ne résiste pas à l’évoquer.
Le couronnement aura lieu à la
00:30 Publié dans Glanures, Vagabondages | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Jean-Michel Sanajouand, Nek Chand, art brut | | Imprimer | | |
09.04.2007
D'Hauterives à Lens-Lestang
Une chose en entraînant une autre, faut pas j’oublie de vous conseiller de vous grouiller pour rendre visite au Palais du bon Cheval. Dans 5 ans d’ici il aura sans doute fondu comme un bonbon sous la langue d’un galopin de cours élémentaire.
Usé par le passage de millions de claquettes et de basquettes, érodé par le frottage de tant de mains et de derrières baladeurs.
Si les créations d’art brut sont menacées par l’indifférence, elles le sont aussi par le succès touristique à son stade industriel-ravageur. On ne piétine plus le Parthénon, on ne tourne plus autour des pierres de Carnac.
Je me demande pourquoi on ne laisserait pas le Palais idéal respirer tranquille. Avec un peu de recul, il n’en est pas moins extra et on pourrait exploiter mieux les moyens de médiatisation modernes. Pour une fois ça se justifierait. Heureusement, la création d’art c’est comme le chiendent. Arrachée ici, elle repousse à côté.
Pas plus loin que dans le village voisin de Lens-Lestang, sur la D 538, en direction d’Hauterives, l’œil de l’automobiliste est attiré par la touchante et modeste installation d’un monsieur surnommé « le marin » en raison de son passé de matelot et des beaux tatouages (un aigle, un Christ, un indien coiffé de plumes) qui ornent ses bras et ses épaules.
Faut voir comment ça chante sous le soleil d’avril toutes ces pierres, ces objets que cet homme affable et spontané a trempé dans la couleur bleue, orange ou vert d’eau et disposés en savant désordre devant l’entrée de son petit domaine et sur la façade de sa maison séparée de la route par un fossé profond.
Amateur de machines à coudre,
de moules à gaufres, de serpes, de cafetières, monsieur G. le marin (qui a touché aussi à la brocante) s’est plu à donner à ces vestiges une seconde chance.
En dehors de tout mobile artistique, ça va de soi, son truc à lui étant plutôt les moutons qu’il abrite dans des cabanes malicieusement pourvues par ses soins de pancartes récupérées du genre : LIBRAIRIE
21:50 Publié dans Glanures, Sites et jardins, Vagabondages | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : ferdinand cheval, art brut | | Imprimer | | |
15.03.2007
Un enchanteur limousin, Pierre Giraud
Animula, c’est bien connu, est un puits de science. Un petit puits à côté des profondeurs de ses lecteurs. Comment une petite âme errante serait pas larguée devant le savoir giraudien d’Olivier Bailly, son récent commentateur ?
Allez-y voir son site si je mens !
Sa note du 11 février 2007 : Chaissac, Giraud et les épluchures m’a rappelé que Robert Giraud avait un frère Pierre qui était peintre.
C’est lui l’Enchanteur limousin exposé au sous-sol de la Galerie Drouin en 1947. Il reste le triptyque sur papier pain d’épices édité à l’occasion avec un texte de Michel Tapié qui nous ramène une sœur dans la famille Gi :
«J’ai rencontré dernièrement, dans une mansarde de la rue Visconti, trois spécimens passionnants de ce pays inouï : Pierre Giraud, son frère et sa sœur, m’ont bouleversé par le fanatisme aussi enflammé que farouche avec lequel ils m’ont décrit leur Haut-Limousin».
Pierre Giraud en ce temps-là faisait des dessins madréporiques qui n’étaient pas sans évoquer quelque chose de Chaissac avec leurs formes aléatoires, leur petits poils de minéraux, végétaux sur les bords, leurs points criblants.
Il semble que des deux frères ce soit Pierre au début le personnage clé, encore que très jeune, 22 piges en 47. C’est lui qui connaissait Chaissac first. J’ai entre les mains l’invitation pour une expo qu’il a faite ensuite en 1950 à la Galerie Louise. Elle est adressée (le monde est petit) au journaliste et collectionneur Jean Selz.
Chez papa Rougerie, le vaillant éditeur des poètes (à Limoges bien sûr) les deux frangins ont pondu ensemble en 1958 L’Enfant chandelier
«J’ai planté mon royaume de pierre calcinées
Lanternes sourdes flèches de braises».
Plus tard, il semble que Pierre est revenu à des sentiments plus naïfs comme nous l’indique un dépliant San Francisconien de vers 1961 : «Despite this recognition, Giraud in 1950 decides to forego the rigors of the Art Brut movement, and to return to what he really was, a naive, autodidactic painter».
Vous noterez qu’on employait déjà le mot «Art brut» aux U.S.A. à l’époque et vous n’oublierez pas d’aller vous rincer la dalle «Au Rêve», rue Caulaincourt, sympathique troquet devenu très tendance mais où la patronne se souvient toujours de «Bob»
21:30 Publié dans Ecrits, Expos, Glanures, Jadis et naguère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Pierre Giraud, Robert Giraud | | Imprimer | | |
25.01.2007
Home-made in Russie
Des patenteux, je croyais qu’il n’en existait qu’au Québec. Je me souviens d’une nuit passée dans une école de rang à Saint-Joseph Lepage près Montjoli (gîte de la Vieille école).
Et bien des patenteux, il y en a aussi en Russie. C’est ce que j’ai compris en feuilletant Home-made (Contemporary russian folk artifacts), le bouquin de Vladimir Arkhipov paru récemment chez Fuel, cet éditeur anglais dont je vous ai déjà présenté l’excellente Russian criminal tattoo encyclopaedia. Arkhipov est un artiste autodidacte né en 1961. Depuis le début des années 90, il s’est intéressé aux objets utilitaires faits-à-la-maison pendant la pénurique période de la perestroika. C’est pour lui un phénomène fascinant de culture contemporaine. La collection qu’il a constituée comprend plus d’un millier d’objets régulièrement exposés en Europe. Son livre en reproduit 220 avec portraits-photos des auteurs et notices les concernant. J’ai noté pour ma part une demi-douzaine d’antennes radio ou télé à rendre des points à Marcel Duchamp. L’une d’elle, époustouflante, utilisant des fourchettes, figure sur la couverture. J’aime aussi la locomotive de d'Aleksandr Chebotaryor (page 231)
le navire de guerre d’Evgenii Skrynnikor
(page 270)
le revolver d’Aleksandr Sigutin (page 12).
En dehors des jouets pour les enfants, ça crépite d’inventions toutes plus astucieuses les unes que les autres dans le genre moyens du bord : brosses, stylos, cartes à jouer, outils pour la pêche, forme à suspendre les bottes d’un exquis minimalisme. Conçus par des «vrais gens» (comme dirait l’autre), contraints par la nécessité à mobiliser des ressources créatives insoupçonnées, ces objets n’ont pas été réalisés dans une intention artistique. Ils n’en sont que plus beaux.
00:05 Publié dans Ailleurs, Glanures, Images, Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : vladimir arkhipov, art brut | | Imprimer | | |