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28.05.2013
Yolande et Candy clôturent la Quinzaine
Elle était Solange dans Mammuth, elle est Rosette dans Henri, le nouveau film réalisé par Yolande Moreau. Revoilà Miss Ming, aujourd’hui Candy Ming et toujours fée. Candy et Yolande ont appris à se connaître sur les plateaux de Gus et Benoit, auteurs grolandais mais pas que. C’est Delépine qui remarque Candy en 2005, pour sa façon décalée de lire les poèmes. Il la fait tourner dans Louise Michel en 2007
et en 2010 lui fait mener par le bout du nez Depardieu-Pilardosse, le touchant géant motard, protagoniste principal de Mammuth. C’est dans ce film que Benoit Delépine et Gus Kervern affichent combien ils se sont sourcés à l’art brut. Yolande Moreau, avec Henri, son film présenté à Cannes en clôture de la Quinzaine des réalisateurs, n’hésite pas à faire état de la même référence.
«Il y a quelque chose qui me fascine dans l’univers des handicapés mentaux», dit-elle au sujet du personnage féminin de son film qui traite du soutien mutuel que se prodiguent une jeune femme un peu différente et un cafetier italo-belge plutôt paumé.
«On dirait de l’art brut», poursuit Yolande. Dans le cinéma ce rapprochement est suffisamment rare pour qu’on le remarque! D’autant que Yolande Moreau précise : «Nous on a des codes pour se comporter. Ils n’ont pas les mêmes, c’est plus étrange. Ca me fascine, ils sont sensiblement pareils que nous».
Tellement pareils que Yolande envisagea d’abord d’interpréter le rôle de Rosette. Les pensionnaires du foyer de personnes «handicapées» dont Rosette provient dans l’histoire sont joués par des comédiens de la Compagnie de l’Oiseau-Mouche, Centre d’aide par le travail artistique de Roubaix.
Henri a été tourné dans le Nord/Pas-de-Calais. A Vendin-le Vieil, Aix-Noulette, Carvin et Liévin.
Ce qui valut au film une idée de promo peu ordinaire : l’installation d’une baraque à frites sur la Croisette. Le bruit court que les pingouins en smokings et les divas en robes du soir, fatigués par les marches, n’ont pas craché sur les cornets distribués à cette occasion par la prod d’Henri.
La fraîcheur lunaire de Candy Ming n’est pas passée inaperçue de la presse festivalière qui a célébré aussi le jeu du comédien et metteur en scène Pippo Delbano dans le rôle d’Henri.
Animula, pour sa part, préconise la lecture du papier de Jean-François Lixon : «Henri» de Yolande Moreau, les grandes errances des petites gens. «Tout est juste dans ce film» dit Lixon. Ajoutons que le philosophe Jackie Berroyer (Bibi, pilier de bar) fait aussi partie de la distribution. Raison de plus pour guetter la sortie de ce film yolandesque à souhait. Pour la fin de l’année sans doute.
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21.05.2013
L’abbé Fouré passe à l’Ouest
A peine quelques jours qu’un Animulien de bonne volonté nous signalait, par un commentaire, la sortie de l’ouvrage de Joëlle Jouneau sur L’Ermite de Rothéneuf dans la Collection L’Esprit du lieu éditée par les Nouvelles Editions Scala.
Et déjà l’actualité nous rappelle au souvenir de ce diable d’abbé Fouré, l’ermite créateur des rochers sculptés. L’ermite et non l’hermite comme l’indique par étourderie le site de La Procurequi doit penser que l’art sacré s’écrit avec une hache.
Soutane à part, l’œuvre de Fouré n’a pas plus à voir avec l’art sacré qu’avec les histoires de pirates dont la légende locale affubla ses rochers. C’est une belle et bonne vieille création d’art brut tout à fait impressionnante par son ampleur. Les deux pieds dans la matière ingrate du rocher. Ce qui ne l’empêche pas d’être fort visitée.
Aujourd’hui comme hier (du vivant même du sculpteur de tempêtes, avant 1910), par des promeneurs en quête de curiosités et de bons bols d’air. Une exposition des cartes postales éditées au début du vingtième siècle en témoigne jusqu’au 29 juin 2013 à la Bibliothèque municipale de Brest.
Dans le cadre d’un «festival» intitulé L’Art brut à l’ouest où sont montrées aussi des sculptures de Pierre Jaïn et, parallèlement, des photos de Gilles Ehrmann à l’Artothèque que j’écrirais bien l’Artaud-thèque pour rigoler.
Mais les rochers sculptés ce n’est pas de la rigolade et une asso se remue joliment pour la bonne cause de la falaise érodée par les marées, les fréquentations touristiques, les belles histoires sans fondement véridique et, depuis peu, par de romantiques lieux communs sur «la poésie des ruines».
Un article récemment paru dans le journal numérique de Libération (18 mai 2013), sous le clavier de Bernadette Sauvaget, envoyée spéciale à Saint-Malo vous en dit plus. C’est de loin le meilleur papier que j’ai lu sur le sujet dans un quotidien depuis longtemps. Ironie du sort, la journaliste est en charge des sujets religieux à Libé. Non d’une rubrique artistique.
Bien documentée, elle n’en mène pas moins de front une présentation vivante et accessible de l’histoire de l’abbé, un aperçu précis sur l’œuvre et une enquête sur l’état actuel des problèmes posés par ce site indisciplinable. L’angle qu’elle a choisi pour intéresser ses lecteurs : le travail de proximité de l’association de protection et d’information.
Elle a, ce faisant, le mérite de brosser le portrait de l’animatrice de cette asso : Joëlle Jouneau elle-même.
Portrait qui manquait jusqu’alors.
22:36 Publié dans art brut, Expos, Lectures, Sites et jardins, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : art brut, abbé fouré, rothéneuf, joëlle jouneau, bernadette sauvaget | | Imprimer | | |
20.05.2013
Ostie d’câlisse de tabarnak d’art brut
Pauvre Belgique! Animula te laisse tomber. Pourtant avec tous ces maudits Français qui ont colonisé Bruxelles, j’aurais dû signaler, chez Art & Marges, l’exposition d’art brut polonais intitulée -Dieu sait pourquoi- Une hostie dans une bouteille/Een hostie in een fles. «Art brut», je risque le mot bien qu’il soit tricard dans le matériel promotionnel de l’expo de la rue Haute organisée avec la collaboration d’un tas de chouettes partenaires de Pologne (galeries, musées et hostos psy).
On ne répugne pas en revanche du côté d’A&M à l’usage du mot «artiste». Ce qui nous donne un sous-titre aussi vague que le titre est obscur : Artistes polonais/Poolse kunstenaars. In english : Polish artists. On peut rien rêver de plus général? Dacodac comme dirait Alex dans Orange mécanique.
Aux dernières nouvelles, Dieu contacté m’a tout de même fait savoir que l’hostie et la bouteille provenaient d’une phrase de Maria Wnęk, l’une des personnalités présentes dans l’expo polono-bruxelloise. Sauf que la phrase est amputée de son début : «Du lait au lait»!
L’hostie, on comprend : ça plait aux cathos. Et la bouteille vous a un petit air si «art populaire» qu’on crache pas dessus. Mais les deux ensemble, c’est moins évident question communication. Heureusement que le public n’est pas obligé d’apprendre ce titre par cœur! S’il se souvient du contenu, ce sera déjà très bien. Car ce contenu le mérite puisqu’il conjugue des talents profondément variés sur l’échelle de la brutitude : Marian Henel
N’oublions donc pas qu’il ne reste que peu de jours pour se précipiter à l’exposition d’art brut polonais de Bruxelles/Brussel. Cela fait déjà un moment que des Animuliens vigilants me suggeraient d’y faire un détour.
Mais le temps tout pourrave… Mais le Père Cepteur qui a ratissé toute ma thune… Mais un certain désenchantement aussi dont je retrouve l’écho dans un article de Danièle Gillemon dans Le Soir m’ont détournée de ce «voyage vers les univers» d’une vingtaine de créateurs parmi lesquels le grand Edmund Monsiel.
Créateurs bruts ou brutoïdes dont on n’a pas souvent l’occasion de voir les œuvres. Et qui nous changent des «vedettes américaines» (certes incontestables) : Traylor, Ramirez, Darger, et maintenant Deeds dont le marché dominant de l’art brut nous impose la ronde -à force monotone- de New York à Lausanne City en passant par les salles de vente du huitième arrondissement de Paris.
A noter que j’emprunte mes images ci-dessus (hors vernissage) ainsi que celles des œuvres de Przemyslaw Kiebzak
à des sources extérieures à l’exposition bruxelloise car le leporello d’Art & Marges et son site Internet sont plutôt chiches en reproductions. Raison de plus pour avaler l’hostie et la bouteille en live si c’est dans vos moyens. Vous l’avez compris : c’est pas du petit lait.
18:57 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos, Images | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art & marge musée, art brut polonais, maria wnęk, marian henel, adam dembiński, justyna matysiak, edmund monsiel, przemyslaw kiebzak, ksawery zarębski, danièle gillemon | | Imprimer | | |
19.05.2013
Prague 2013 : Jan Křížek sort de l’oubli
C’est une chose qu’on ignore parfois mais la Tchèquie existe et à Prague un Institut français où il se passe des choses. Tiens, le 6 mai dernier : on y présentait l’importante monographie d’Anna Pravdová sur Jan Křížek. Anna Pravdová, conservatrice à la Galerie Nationale de son pays, a des liens avec le nôtre et parle le français. Ce qui nous vaudra peut-être dans l’avenir des éclaircissements supplémentaires sur son travail.
Entretien d'Anna Pravdová avec Anna Kubišta
Sa monographie, qu’on dit nourrie et fort illustrée, accompagnera du 31 mai à la fin septembre 2013 une grande exposition Křížek (1919-1985), intitulée Jan Křížek et la scène artistique parisienne des années 1950.
Dans le Manège du Palais Wallenstein, grosse perle baroque du quartier de Malá Strana.
Occasion pour les Tchèques de se réapproprier l’œuvre de cet artiste qui, après le Coup de Prague en 1948, vécut chez nous. D’abord à Paris puis au fond de la Corrèze où il se bâtit une maison dans les bois. La notice Wiki sur Křížek est plutôt anorexique. Elle le décrit coincé entre surréalisme et art brut. Il serait surtout du genre inclassable et l’expo de Prague ambitionne de mettre en lumière sa captivante spécificité.
Qu’on le veuille ou non, il appartient cependant à la légende de l’art brut. Son nom reste attaché à la période pionnière où ce concept découvert par Jean Dubuffet s’affinait progressivement.
Avec Miguel Hernandez, Juva, Pierre Giraud et le controversé Robert Véreux, Jan Křížek eut les honneurs de l’une des 5 brochures historiques que René Drouin, galeriste de Dubuffet, édita pendant la période d’activité du Foyer de l’Art brut (15 novembre 1947/été 1948).
Le texte de Michel Tapié qui figure dans cette plaquette ne cache pas l’origine «culturelle» de la découverte du «cas» Křížek.
C’est le sculpteur cubiste espagnol Honorio Condoy qui lui signale (ainsi qu’à Henri Pierre Roché par ricochet) les sculptures du jeune tchèque, selon lui «tout à fait dans la même ligne» que les Barbus Müller.
Le destin de Křížek montre ensuite que Condoy, Tapié et Roché ne se trompaient pas tout à fait sur la nature «brute» du talent du sculpteur. Deux faits sont là pour en témoigner. Un épisode iconoclaste au cours duquel Křížek détruit certaines de ses sculptures sous prétexte qu’il n’a pas les moyens de les transporter à la campagne. Une phrase révélatrice qu’il prononce quand il renonce à la création sculpturale (1962) pour devenir apiculteur : «enfin je suis guéri, je peux arrêter mon travail artistique».
Photo tirée de la monographie d'Anna Pravdová
L’histoire retient que Dubuffet ôtera très vite les rênes de l’art brut des mains de Michel Tapié. Ce dernier, dans une note additionnelle à son texte de la plaquette Drouin, a conscience du problème posé par Křížek : «Tant pis pour ceux qui penseront que je brouille les cartes. Souvent trop des mêmes qui -avec raison- protestent contre les brimades, voire les honteux internements arbitraires des champions du verbe et de la vision ne voudraient, sans quoi ils ne marchent pas, voir en l’Art Brut qu’un asile ou une cage à singes (…)».
18:18 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos, Gazettes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, surréalisme, jan krisek, anna pravdová, radio prague, rené drouin, michel tapié | | Imprimer | | |
16.05.2013
Laduz au temps des cerises
Laduz aux cerises! Tout un programme! Evocateur de clafoutis dans un jardin. Je sais bien que je mets la charrue avant les bœufs. Je ferais mieux d’attendre la fin mai pour les infos promises par Jacqueline Humbert sur le site de son musée.
Mais je résiste pas à l’envie de vous dire : «Save the date». Tant le carton reçu est promesse de rendez-vous avec de bonnes et vénérables choses. Allusion à la chanson de Jean-Baptiste Clément que cette image de plein air? Elle combine en effet le plus populaire des fruits rouges avec l’uniforme militaire d’une République coincée entre la guerre de 70 et celle de 14. Aucune plaie ouverte cependant.
Le sourire moustachu du pioupiou, l’émouvante facture rustique, la naïve boutonnière nous porte d’abord à l’attendrissement que l’on ressent toujours devant les beaux objets d’art populaire. Si proches, par l’invention, puisée à la source de l’ingénuité, de certaines productions d’art brut. Un vire-vent. Pas tout à fait ordinaire. Les trop longs bras du militaire dotés de mains en forme de pales. A la réflexion : un automate actionné par l’eau d’un ruisseau peut-être? Il sera toujours temps d’approfondir.
Le Musée de Laduz apportera, le moment venu, des précisions sur ce petit trésor. Ainsi que sur d’autres «sortis des malles» spécialement pour la présentation de l’exposition Coups de cœur qui aura lieu le samedi 1er juin 2013 en fin d’après-midi.
11:50 Publié dans De vous zamoi, Expos, Jadis et naguère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art populaire, musée de laduz, jacqueline humbert | | Imprimer | | |
11.05.2013
L’Asphyxiante culture passe la nuit à Bègles
«La culture procure à qui en est doté l’illusion de savoir, qui est très pernicieuse, car un qui ne sait pas cherche et débat mais un qui croit savoir dort satisfait».
Cela fait un moment que j’avais pas lu ça. Je me replonge pas tous les jours dans Asphyxiante culture. J’ai tort. Si j’étais pas aussi cossarde j’apprendrais par cœur certaines des vérités finement paradoxales qui jalonnent ce petit livre de «libertés nouvelles» publié par Jean Dubuffet en juillet 1968 chez Pauvert (merci Jean-Jacques!).
Par exemple celle-ci qui sonne comme un avertissement aux «intellectuels prétendus révolutionnaires» de l’époque et qui conserve tout son sel aujourd’hui :
«La position de subversion cesse bien sûr s’il advient qu’elle se généralise pour devenir à la fin la norme. Elle s’inverse à ce moment de subversive en statutaire».
Bien jeté, non ? De nos jours où c’est la mode de discréditer Dubuffet tout en lui faisant les poches, où bon nombre de ceux qui ont l’art brut à la bouche se croient fondés (au nom dont ne sait quelle modernité) à «promouvoir» celui-ci en imposant une régression théorique «visant à nier la coupure épistémologique de son inventeur», il est réconfortant de savoir qu’une Nuit des musées va être consacrée à Bègles à une lecture publique de larges extraits d’Asphyxiante culture.
Réconfortant aussi de lire dans le dossier de presse de la Création Franche -puisque c’est dans cet établissement qu’aura lieu le 18 mai la performance- que «c’est un texte facile à lire, un manifeste dans lequel Dubuffet affirme que la culture (…) n’est plus au service des œuvres» et que «ce constat est encore terriblement d’actualité».
Qui c’est qui dit ça? Frédéric Maragnani. La voix qui portera ce soir là une pensée toujours novatrice qui ne demande qu’à s’envoler vers les âmes errantes de bonne volonté dont vous êtes (ou vous serez) chers Animuliens et Animuliennes de choc. Que vous ayez lu, mal lu ou pas lu du tout encore ce philosophe qu’était Jean Dubuffet.
23:05 Publié dans art brut, De vous zamoi, Lectures, Ogni pensiero vola, Parlotes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, jean dubuffet, frédéric maragnani, création franche | | Imprimer | | |
10.05.2013
Hollywoodoo et Panos du Dernier cri
«Les amis d’Avignon sont mes amis» : on m’écrit pour me le dire. Sachez que c’est réciproque. Et réciproque aussi avec les amis de Marseille. Ce n’est pas parce que je me suis fait saucer en plein carnaval que je n’aime pas le vieux port et son nouveau miroir par dessus tête.
Le Dernier Cri! comme dirait l’autre. L’autre c’est Pakito Bolino et sa Belle de mai, bien entendu. Mai lui est un joli prétexte pour faire ses Hollywoodoories. Le lundi 13 mai à 18 h, en son Atelier de la Friche, il attaque sévère du côté de l’art populaire de maintenant tout de suite. Et en avant pour les affiches de vidéo-club ghanéennes et hardi petit pour les panos nord-américains! Woopoopidou!
Cette expo va courir sur ces jambes jusqu’au 11 juin. Pas besoin de mot d’excuse de vos parents si vous loupez le vernissage fricheux.
Vous pourrez vous rattraper le 14 mai à la Poissonnerie ou le 15 aux Dermonautes. Au besoin, tatouez-vous le programme avec l’adresse de ces trois lieux associés.
Question panos, le Pakito s’est acoquiné avec Reno Leplat-Torti, un graphiste-sérigraphe collectionneur de ces petites chicaneries. Car pour ceux qui l’ignoreraient encore «panos» est un diminutif de «panuelo» (mouchoir), support d’activité artistique des «chicanos» (Américains originaires du Mexique) dans les prisons.
Cette tradition remonte peut-être à l’intervention française au Mexique sous Napoléon III. Les pioupious de chez nous ayant pour habitude de décorer soigneusement leur tire-jus réglementaire avant l’invention du kleenex. Ce que m’a confirmé mon daddy qui a vu de ses yeux des conscrits se livrer encore sans réfléchir à cette charmante activité populaire pendant son service militaire dans les années soixante-dix du défunt vingtième siècle.
Qui dit populaire ne dit pas brut mais : apparentement possible car affinités évidentes.
16:48 Publié dans Expos, Images | Lien permanent | Commentaires (1) | | Imprimer | | |
08.05.2013
Le peuple des berges
La Seine monte. C’est le moment de lire Le Peuple des berges. Le moment d’acheter à pleines péniches ce récent titre de Robert Giraud pour en inonder vos amis.
On y assiste avec trouble et attendrissement au «carnaval perpétuel» de Nénette. A cette époque (dans les années cinquante du siècle de l’auteur), on n’avait pas peur du mot «clocharde».
«La cloche en argot c’est le ciel» nous dit la quatrième de couverture de ce recueil de neuf articles parus jadis dans Qui ? Détective.
A cette époque (8 octobre – 3 décembre 1956), les Nénette élisaient domicile sous les ponts de Paris. Cette âme errante abritait donc sa coquetterie guenilleuse «dans une alvéole du Pont-Neuf, au milieu de ses richesses» de carton. «Eté comme hiver, Nénette porte toute sa garde-robe sur elle» nous dit Robert Giraud. Et «sa toilette se complète obligatoirement d’un chapeau extrait, il y a une dizaine d’années, du plus profond d’une poubelle».
Image tirée de "La cloche et les clochards". Film réalisé en 1972 par Robert Bober pour l'émission d'Eliane Victor : "Les femmes aussi"
Cliquer sur l'image pour voir un extrait
Rien de bien original jusque là. Aujourd’hui que sont revenus les temps mauvais, il suffit de faire un tour sous le périphérique au marché aux puces de Saint-Ouen pour avoir une idée de ce que Bob évoque.
Plus captivantes en revanche, les lignes que Giraud consacre à la pulsion de parure corporelle de ladite Nénette. Pulsion qui en fait presque la prêtresse d’un body art avant la lettre. «Les heures que [Nénette] ne consacre pas à la recherche et au tri de nouveaux haillons (…), elle les passe à faire et à refaire son maquillage». (…) «Un affreux plâtrage dont le fond de teint est constitué par du Mercurochrome. Pour ses autres fards, Dieu seul sait dans quelles décharges publiques Nénette va en recueillir les ingrédients!».
Pouvoir de ce style ému mais précis du grand reporter littéraire! Giraud sait comme personne communiquer au lecteur sa fascination. Atteindre comme une balle le nœud du problème. Sans lui ôter de son mystère. «Nénette garde le secret du drame qui a dérangé sa cervelle».
Citons encore la relation de son jeu d’esquive facial: «De ce paquet de loques émerge le visage de Nénette, une face de gargouille peinturlurée où l’on ne remarque rien de ce que l’on regarde ordinairement : la couleur des yeux, la forme du nez, les dessins des lèvres…».
Les amoureux du vieux Paris, les amateurs de petits métiers insolites, ceux qui apprécient combien l’humanité et la créativité des gens du très-commun se dégagent du pittoresque, voudront lire ce recueil de chroniques nouvelles et néanmoins ressuscitées.
Personne ne s’étonnera qu’il soit préfacé par Olivier Bailly. Ni qu’il soit édité par Le Dilettante qui ne cesse d’inscrire à son catalogue les Bob-sellers de l’«envoyé spécial au royaume de la nuit».
20:26 Publié dans Ecrans, Ecrits, Lectures, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : robert giraud, robert bober, robert doisneau, eliane victor, nénette | | Imprimer | | |
07.05.2013
Recreation avignonnaise
Avignon, du coin de l’œil me regarde. On peut dire que j’aime ça. J’y traîne mes savates comme dans une photographie ancienne.
A l’écart du pittoresque karchérisé des rues à touristes, c’est une ville qui vous fait signe à sa façon d’aujourd’hui et de toujours. Ici, où Melpomène et Thalie règnent en maîtresses une partie de l’année, tout est permis aux muses et elles ne s’en privent pas.
Muse des rêveurs-bâtisseurs comprise. J’emprunte cette image à l’un d’eux qui agrémenta de personnelle façon le mur d’enceinte de sa maison.
Avignonnaise façon de procéder! Avec sa ceinture de remparts et son cercle flâneur formé par les rues Joseph Vernet, Henri Fabre et des Lices, la festivalière cité des papes est un cœur emboîté comme une poupée gigogne. De cet intra-muros historique, de cette pelote urbaine ensoleillée s’échappe, du côté où le Rhône ne s’y oppose pas, tout un réseau de fils et d’artères qui s’en vont faire des nœuds aux noms de quartiers : St-Véran, La Croisière, St Jean, Pont des Deux Eaux.
C’est dans l’un d’eux qu’Antonio, un maçon italien, est venu pour le travail dans les années cinquante du siècle dernier. C’est là que lui, qui parlait à tout le monde, a édifié pour son plaisir et pour celui des passants son mur d’images, décoré autant à l’intérieur qu’à l’extérieur.
C’est là que vit encore -princesse en son potager- sa veuve Tina dont les beaux yeux ne se fatiguent jamais de contempler les têtes brutes, amusantes et grotesques de cette clôture historiée qui fait de sa demeure une modeste et moderne villa Palagonia. Là, c’est-à-dire dans une impasse.
Un coin de campagne dominé par une barre d’immeubles. Ce fleuron, perdu dans un lacis où les rocades et les avenues sont métissées de routes et de chemins, n’est pas simple à trouver. Même un GPS s’y casse les dents en tombant sur des fourchettes. «Tournez à droite» vous dit-il et ce sont trois voies qui s’offrent à vous.
Mieux vaut donc un cicerone. Tant qu’à faire, j’ai eu recours au meilleur qui soit : l’impénitent blogueur et l’aimable connaisseur es-choses avignonnaises, Michel Benoît. C’est lui qui m’avait filé le tuyau. Mais pour être déjà venu, il n’en était pas blasé. C’est d’un sourire intact qu’il a salué le Gepetto qui lui rappelait un masque de son enfance.
Antonio, pour ses moulages en plâtre, affectionnait de telles choses. J’ai fait, pour ma part, un bisou au portrait d’une chanteuse populaire (je vous laisse deviner laquelle) dont la famille voisina jadis avec le maçon.
Les chats, les barbus, les fantômes étaient un peu trop haut pour pareilles effusions. Divers collages d’objets manufactés aussi. J’aime trop aussi les visages aux yeux d’agate, «tout en pierres récupérées aux décharges» comme me le dit la signora Tina de son bel accent calabrais.
00:49 Publié dans art brut, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (4) | | Imprimer | | |