09.05.2014
Scottie Wilson à l’université
Au chapitre des re-découvertes, il faut signaler le début d’une exposition Scottie Wilsonnienne à Ottawa le 12 mai 2014. Hé oui, on vernit le lundi au Canada! Ce qu’on nous promet? Des «œuvres inédites» conservées dans les collections du pays. L’occasion, paradoxalement, pour les commissaires, Jill Carrick et Pauline Goutain de montrer là-bas comment le grand Scottie fut chouchouté en Europe par les surréalistes et Dubuffet.
Pauline Goutain, on la connaît bien. C’est un membre du CrAB. L’expo ottawouaise durera jusqu’au 7 septembre 2014. C’est dire que vous pourrez très bien la visiter pendant vos vacances d’été, surtout si vous êtes Québécois.
Elle se tient au Cuag (Carleton University Art Gallery). Cuag, c’est rigolo comme nom. Et c’est facile à stocker dans une mémoire. Même une mémoire de piaf comme la mienne.
16:13 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, scottie wilson, pauline goutain, jill carrick, ottawa | | Imprimer | | |
03.05.2014
Wireman : de Philadelphie à Montmartre
Au stade où j’en suis, une incursion en terre expositoire s’impose. Pas besoin d’aller loin.
L’aventure est au bout de la rue Ronsard, station Halle Saint-Pierre. J’interromps donc l’inventaire de ma garde robe d’été. Découdre les étiquettes qui grattent comme des petits paillassons m’a soudain rappelé les maillages en fil de fer de Philadelphia Wireman (L’Homme Fil de fer de Philadelphie).
Chacune sa tasse de thé, n’est-ce pas ? Et moi je mets du temps à digérer la mienne.
Cela fait certes un bail que j’ai visité l’exposition Raw Vision 25 ans d’art brut mais aujourd’hui ce qui me revient quand je pense à elle c’est la petite vitrine d’angle au premier étage qui contient les interloquantes sculptures de P.W.
C’est injuste, je sais, car il y a plein de choses plutôt choucardes à voir dans cette expo mais c’est ainsi. Faut toujours suivre ses intuitions. Et moi je vous invite à m’emboîter le pas. Il vous reste du temps pour ne pas rater ça.
Ça, ce sont des structures en brin d’acier torsadés, conçues pour garder captifs des morceaux d’objets hétérogènes. Verre, plastique, cuir, batteries, clous, lunettes, emballages alimentaires, baleines de parapluie, papier d’alu, jouets etc.
J’ai d’abord pensé aux fagottages de Jean Bordes (de la Fabuloserie) en voyant ces assemblages. La même dextérité à tirer partie des rebuts par ligature. Mais ces drôles d’œuvres sont moins figuratives, plus symboliques que ludiques. Mentales. Incantatoires en sourdine. Gonglomératoires. Les mécanismes fragiles et subtils d’une pensée qui ne l’est pas moins!
On ne sait rien du gus qui a fabriqué ces étranges pièges à rêves. Comme elles ont été trouvées en 1982 dans un quartier black en pleine rénovation et qu’il faut être costaud pour la torsion des câbles, on suppose qu’il s’agit d’un afro-américain du genre masculin.
Environ 1200 œuvres, datant sans doute des années 70 du 20e siècle. Empilées dans des sacs à ordures, dans l’attente des éboueurs, elle seraient parties à la poubelle si leur découvreur, un étudiant d’art qui traînait la nuit ne les avait repérées sur le trottoir.
La Halle Saint-Pierre en montre une poignée mais il y en a aussi au LaM.
L’étudiant les a mises à l’abri à la Fleisher-Ollman Gallery de Philadelphie qui les a fait tourner de par le monde.
Sous une élégance d’apparence très contemporaine, elles portent à des évocations diverses. On a parlé à leur propos de médecine amérindienne ou de fétichisme africain.
Fétiche africain Wireman
Mais leur pouvoir, leur énergie restent inexplicables et c’est très bien ainsi.
09:10 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | | Imprimer | | |
16.03.2014
Allô, quoi, allô, répondez Armand Schulthess !
Il est bon parfois d’en remettre une couche comme il est bon de relire des livres qui nous ont fait rêver. Et puisque l’occasion m’est donnée de revenir rôder dans Le Labyrinthe poétique d’Armand Schulthess je ne m’en prive pas. Même si je vous en ai parlé pas plus tard qu’à Noël. Je pointais à l’époque vers le futur d’une exposition à Neuchâtel, la patrie de ce bouleversant créateur. Et le futur nous y sommes.
L’expo Schulthess, «la plus grande jamais consacrée» à son œuvre, aura bien lieu du 30 mars au 3 août 2014 au centre Dürrenmatt. Avec le concours de la Collection de l’Art Brut de Lausanne. Lucienne Peiry, l’une des têtes dirigeantes de la Maison mère, étant commissaire. Les chanceux qui naviguent au bord du lac (de Neuchâtel) pourront sans doute lui demander un autographe dès le samedi 29 mars à 17 h, jour du vernissage.
Ils s’y feront peut-être rôtir un poulet ou ils dégusteront sur le pouce un de ces plats bernois en boîte acheté à la Migros.
Comme Armand Schulthess, de son vivant, le conseillait aux visiteurs de son île-jardin utopique. On peut rêver.
J’emprunte ces détails croustillants à l’article de Hans-Ulrich Schlump (La Seconde vie d’Armand Schulthess) paru, sous couverture bleu Klein, dans le fascicule 14 des Publications de la Collec de L’art Brut. Ce texte raconte une histoire qui a tout pour plaire à la petite âme romantique que je suis restée malgré tout.
Pour une femme inconnue qu’il appelait de ses vœux mais qui ne vînt jamais Armand Schulthess avait aménagé un pavillon sur le terrain de sa résidence de campagne près de Locarno dans le Tessin.
Dès la cinquantaine, il s’était retiré là. Vivant de petits pains et de lait. Distribuant sa science encyclopédique aux arbres du jardin.
Il couvrait ceux-ci de messages philosophoco-scientifiques calligraphiés en cinq langues sur des rondelles de métal ligaturées avec du fil de fer.
Mais il se cachait quand il venait du monde. Il aurait préféré qu’on le joigne au téléphone.
Sur l’un de ces appareils qu’il disposait le long de son réseau compliqué de chemins, d’escaliers, de passerelles aménagé au fil du temps dans son domaine.
Mais les sonneries étaient en panne. Les fils avaient beau courir, les téléphones ne fonctionnaient que dans sa pensée. Et combien riche était sa pensée! Elle abritait des volumes et des volumes réalisés à la main. Ils venaient surcharger sa bibliothèque.
Près de milliers d’objets et de papiers chinés dans les décharges car ils pourraient servir. Une sédimentation d’albums remplis de photos naturistes. Écologiques pin-up, vous partîtes en fumée quand son site magique et chaotique fut détruit après sa mort accidentelle.
A 72 ans, même un pionnier ne résiste pas à deux nuits dans le froid après une chute. Et sans doute est-ce bien ainsi. Mais le monde parallèle de ce doux original (ou schizophrène qui sait ?) comme il manque au nôtre ! Et comme inconsolable, je serais de lui s’il n’y avait l’expo de Neuchâtel pour nous en restituer quelque chose.
BONUS
Paru à Cologne en 1972, l’année de la disparition d’Armand Schulthess.
Le livre d’Ingeborg Lüscher (dont l’époux est Harald Szeeman).
15:11 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos, Lectures | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : art brut, armand schulthess, hans-ulrich schlump, lucienne peiry, ingeborg lüscher, centre dürrenmatt de neuchatel | | Imprimer | | |
03.02.2014
Les niches du génie
Du Canard enchaîné (n°4866) cette brève à propos d’un chirurgien esthétique sud-coréen : «il utilisait les os de mâchoire retirés sur ses patients pour réaliser des objets de décoration». Voir aussi Libération.
Sur gentside.com le 31 janvier 2014, cette apparition mystique révélée par Virginie Guichaoua :«Après être tombée dans l’escalier Paula Asuna voit Jésus-Christ apparaître sur son pied» (De l’hématome au fils de l’homme).
Et grâce à l’Huffington Post du 29 janvier 2014, ce témoignage sur la créativité enfantine ou comment un jeune visiteur de la Tate modern de Londres se vautre sans vergogne dans l’art minimal à 3 millions de dollars.
Les experts vous le diront : le génie se niche partout.
18:34 Publié dans Ailleurs, Blogosphère, De vous zamoi, Nos amies les bêtes | Lien permanent | Commentaires (2) | | Imprimer | | |
29.01.2014
Il était une fois le Shu-Mom
Vous aimez les belles histoires. Les histoires de rois et de pays lointains. Moi aussi.
Alors en prélude au Grand écart sur les écrits, le prochain séminaire du CrAB qui aura lieu samedi 1er février à l'INHA, en voici une glanée dans Chefferies bamiléké, un beau livre de textes et de photos de Gérard Macé devant paraître «dans les tout premiers jours de février 2014» aux éditions Le Temps qu’il fait.
Il était une fois un sultan «qui régnait sur le pays Bamoun» dans l’ouest du Cameroun.
Ce sultan, non content de se faire construire un palais en dur, «sans plans ni calcul» inventa une écriture en 1896.
Ceci parce que, dans son sommeil, une apparition lui avait commandé de dessiner une main humaine sur un tableau noir. Puis d’effacer ce signe avec de l’eau. Eau qu’il devait boire pour conserver la mémoire de la chose représentée. Ce «rêve d'autodidacte» venait un peu tard.
L’écriture arabe et l’alphabet latin déjà se propageaient en Afrique. Dès 1924, les autorités françaises interdirent la langue de Njoya (c’était le nom du sultan). Dommage : le sultan Njoya s’était donné du mal.
Peu secondé par son peuple auquel il demanda de répéter l’expérience de l’eau des mots, il dut «s’y reprendre à plusieurs fois avant d’inventer les signes» de l’écriture Shu-Mom (le vrai nom de l’invention de Njoya). A partir d’une base de pictogrammes associés à des lettres d’un alphabet original.
Quand, dans la ville de Foumban, on visite le palais de Njoya dont «l’architecture empirique est encore debout» on apprend que cet écrituriste sultan essaya aussi de fonder une religion «dont on ne nous dit à peu près rien».
17:35 Publié dans Ailleurs, Ecrits, Images, Lectures | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : crab, gérard macé, chefferies bamiléké, editions le temps qu'il fait, ibrahim njoya, écritures, écriture shu-mom, cameroun | | Imprimer | | |
25.01.2014
Des cercueils sous le Siège d’Arthur
Sombre jour. D’ordinaire, je mets pas mon nez dans les cérémonies mortuaires mais là : une amie à soutenir dont le grand-père vient de perdre son combat en 15 rounds contre la maladie. Tout de même je m’ennuyais ferme en écoutant les histoires de l’oncle saint-paul tomber cahotiquement (et catholiquement) de l’accent polonais du curé.
Mon esprit s’envolait pour retomber dans le memento mori. Je pensais à l’art brut qui aurait intérêt à s’enterrer pour échapper aux inopportunes dévotions dont il est l’objet.
Les petits cercueils du National Museum of Scotland ont alors refait surface dans ma petite âme errante.
De retour dans mon laboratoire animulien, j’ai rouvert mon dossier sujets-à-traiter. Ils attendaient là, sur le site de l’écossais musée, que je m’occupe d’eux.
Sont-ils pas mimi avec leur 95 mm de long ces coffins contenant de petits corps rudement sculptés et vêtus?
Il n’en resterait plus que 8 aujourd’hui mais ils étaient 17 en 1836 quand une bande de gamins chasseurs de lapins tomba dessus.
Empilés en trois couches avec un solitaire sur le dessus, ces cercueils étaient enfouis dans une grotte proche du Siège d’Arthur (Arthur’s Seat), une colline de légende de la ville d’Édimbourg.
Diverses théories ont été émises à leur propos.
La plus pittoresque voudrait que ces cercueils et leurs contenus évoquassent les 17 victimes de Burke et Hare. Deux joyeux drilles accusés d’avoir en 1828 zigouillé des gens pour vendre leurs corps comme matériel de dissection à un toubib du coin.
Plus probablement, ce pourrait être des statuettes conjuratoires ou des objets de sorcellerie.
La sorcellerie c’est souvent à touche-touche avec l’art brut. Du point de vue formel au moins.
En l’absence d’informations précises, je ne saurais cependant affirmer que ces productions de l’époque romantique sont de l’art brut.
En tout cas c’est mieux que bien des choses qu’on nous présente aujourd’hui comme tel, n’est-ce-pas ?
15:25 Publié dans Ailleurs, Jadis et naguère | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : arthur’s seat coffins, edimbourg, national museum of scotland, burke et hare, sorcellerie, art brut | | Imprimer | | |
31.12.2013
Outsider art magical tour
Attendre les 12 coups de minuit, j’voudrais bien mais c’est trop dur.
Heureusement, un Animulien charitable m’envoie un petit film pour passer le temps. Un docu BBC de Jack Cocker style voyage autour du monde à la recherche de l’art brut perdu et retrouvé en pleine marée montante du 21e siècle.
L’Everything of course, Gugging, la fondation Carlo Zinelli, le Social Welfare Organization Aisekai, la Galerie Henry Boxer, le Creative Growth Art Center où ça respire à donf avec Tom di Maria et le casque bleu Dan Miller.
J’ai pensé à vous en faire profiter au cas où y’en aurait parmi vous qui souhaiteraient aussi peigner la girafe avant le réveillon. Un conseil : sautez les bla-bla pour vous concentrer sur les créateurs au turbin! Cette manie qu’ils ont de nous refiler leurs grains de sel les spécialisses!
Espèrons qu’en 2014 quelqu’un nous bricolera un outsider art documentary dans le genre no comment de la chaîne Euronews pour changer. Turning the Art World Inside Out est tout de même un film qui tient ses promesses en 5 épisodes et puis la fin très magical mystery bisounours devrait vous faire marrer sans cotillons ni langues de belle-mère.
19:50 Publié dans Ailleurs, art brut, De vous zamoi, Ecrans | Lien permanent | Commentaires (1) | | Imprimer | | |
27.12.2013
Musées d’art brut : les jeunes pousses
Inaugurations ici et là. En cette fin 2013, les musées d’art brut poussent comme branches de houx sur bûche de Noël.
A Zurich, Le Musée visionnaire.
Près de Crémone, le Mai Museo. Peu d’infos, peu d’images pour le moment. On verra plus tard ce que ces p’tits nouveaux ont dans le ventre.
A noter quand même que ça commence dur au MAImu avec une expo Armand Schulthess jusqu’au 31 janvier 2014.
Les Tessinois de 1972 qui ont ratatiné le jardin messagé de ce savant polyglotte et autosuffisant créateur vont se mordre les doigts.
23:38 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos, Musées autodidactes disparus, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, armand schulthess, musée visionnaire, mai museo | | Imprimer | | |
24.11.2013
Barcelone : des nouvelles de Hassan le créateur sénégalais
Hassan news. Barcelone sans Hassan : c’est ce que me câble un Animulien accro aux planchettes de ce créateur sénégalais dont mon blogounet suit pour vous les aventures depuis ce jour de septembre 2010 où un gars de Ménilmontant lui en a révélé l’existence.
Merci ô Guillaume de me tenir au courant de la suite des événements et permettez que je refile vos bons tuyaux à mes lecteurs. La palissade qui servait de toile de fond à Hassan n’existe plus. Elle a été murée. Bon. Mais le lieu est «toujours occupé et plein des traces de son travail».
Guillaume n’a pas réussi à revoir Hassan mais il a fait son petit Pepe Carvalho et mené l’enquête auprès des serveuses de bar alentour. Gràcies dames! puisque vous veillez «assez sérieusement» sur Hassan. Selon vous, tout va bien mais il arrive que ses frères sénégalais prennent Hassan chez eux pour des semaines.
Guillaume Couffignal, l’auteur des visuels qui illustrent cette note, ne lâche pas l’affaire. Il ne manquera de s’enquérir du gars Hassan lors de son prochain voyage dans la capitale de la Catalogne. Attention, monsieur Guillaume : obligation de résultat !
16:28 Publié dans Ailleurs, art brut, De vous zamoi | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : barcelone, hassan, guillaume couffignal | | Imprimer | | |
15.10.2013
Kiss-in avec Rabat pour les peintres d’Essaouira
Aujourd’hui le Maroc. La preuve qu’on se turlupine partout au sujet de l’art brut. Puisque la Galerie Fan-Doc de Rabat se pose la question par le truchement de son hommage aux peintres d’Essaouira : «art naïf, art brut?». Il n’y a pas si longtemps, on aurait tranché sans hésiter en faveur du premier label.
Lire l’article de Siham Jadraoui dans le n°3027 (10 octobre 2013) d’ALM. Il a le mérite de la clarté. Et celui d’entrer d’emblée dans le vif de la peinture. Sans l’écraser sous une tonne d’érudition inopportune, de témoignages empruntés aux visiteurs européens et de légendes plus ou moins vérifiables sur la vie des créateurs.
Regraguia Benhila
Rien à ajouter donc. Sinon que cette exposition sur les «génies ordinaires» d’une ville au nom prédestiné (Essaouira, la bien dessinée) se tiendra au 14 de la rue Jbel Moussa jusqu’au 10 novembre 2013.
L’occasion d’un kiss-in avec la capitale du Maroc, amis touristes! Et d’une nouvelle rencontre avec votre royaume de la couleur et de l’esprit, amis marocains! A prolonger sur le blogue de votre petite âme errante : Animula Vagula, pour ainsi dire.
14:21 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut marocain, art naïf, regraguia benhila, galerie fan-doc, siham jadraoui, maroc, essaouira, rabat | | Imprimer | | |