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16.07.2015

Vive l’art à la mie de pain !

Tellement l’art brut est partout aujourd’hui qu’il est difficile de ne pas s’empêtrer dans sa tarte à la crème. Pas facile d’échapper à un lieu commun! C’est à qui cet été créera son événement sur le sujet. Même si le sujet en question a peu à voir avec sa définition.

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Paradoxe de l’Histoire, l’art brut est devenu la première chose qui saute à la cervelle du conseiller culturel lambda en mal d’exposition à base de braves amateurs régionaux de l’étape ou de soit-disant handicapés bombardés artistes pour l’occase.

Les gros collectionneurs, les zinzinstitutions, les espécialistes et les nouvelles dents longues du business d’un art qu'ils voudraient bien faire jouer dans la cour des grands contemporains donnent le mauvais exemple en ne respectant plus ce qui fait le charme de l’art brut : son caractère furtif.

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Pourquoi donc se gêner? Dans cette situtation, une cure d’occultation s’impose aux vrais amoureux d’art brut. A quoi bon relayer l’air d’un temps vicié? A moins… A moins qu’on ne s’attache aux interstices… Où donc repérer les traces fugaces de l’art brut si ce n’est dans les lectures de rencontre?

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Beate Klarsfeld dans ses Mémoires croisés à ceux de Serge relate son incarcération dans la Tchécoslovaquie de 1971 alors en proie à un «redoublement d’antisémitisme». «La bonne humeur règnait» se souvient-elle en évoquant ses compagnes de détention. Elles tenaient au gardien «de grands discours en riant (…). Le reste du temps, elles étaient occupés à se fabriquer des cigarettes elles-mêmes (…). Avec la mie de main que nous ne mangions pas, (une) jeune fille joyeuse sculptait de petites figurines».

Voilà ! Voilà qui fait rêver, non ? Moi, ces petites figurines suffiront toujours à me rendre béate.

20:26 Publié dans art brut, De vous zamoi, Ecrits, Lectures, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : beate et serge klarsfeld | |  Imprimer | | Pin it! |

29.06.2015

Caché dans la maison des fous

Vive la Procure! C’est les meilleurs. Les meilleurs libraires s’entend. Je venais d’écumer sans succès le Quartier Latin pour trouver le dernier Didier Daeninckx. Confetti, ballons et bonne humeur, j’étais tombée dans la Gay Pride. Emportée par le tube des Rita Mitsouko : «et quand tu ris, je ris aussi». 

Le temps de m’en extraire et de couper à la fièvre acheteuse d’un samedi de soldes et il était là dans mes mains ce Caché dans la maison des fous. Un bouquin qui urgeait pour moi depuis que, sur Le Canard enchaîné d’un papy du métro, j’avais looké l’article de Frédéric Pagès en rendant compte : Contre toutes les camisoles.

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Latin, Procure, Marcia Baïla, fierté et tromé, vous allez dire que je me vautre dans «la déconniatrie». Mais comme le dit le psychiatre François Tosquelles dont les propos sont rapportés par Daeninckx : «Déconne, déconne mon petit [ou ma petite]! Ça s’appelle associer. Ici personne ne te juge, tu peux déconner à ton aise.» Francesc Tosquelles j’ai déjà eu l’occasion de vous en parler dans ma note du 6 juin 2007 (suivez les liens, ils sont encore actifs).

Et j’ai déjà évoqué aussi (voir mon post du 14 avril 2013 sur Les Ateliers de Montfavet) Lucien Bonnafé. Tous deux travaillaient pendant la guerre à Saint-Alban en Lozère. S’acharnant à inventer une psychiatrie plus humaine. Faisant des pieds et des mains pour empêcher leurs malades de crever de faim. Exerçant en outre des activités de Résistance.

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Saint-Alban c’est l’asile où Auguste Forestier avait installé son atelier. Il y produisait «des crêtes, des ailes, des mains, des bras, des formes (…) décoratives» qu’il assemblait ensuite pour en faire les rois, les chevaux, les militaires, les bêtes de son Gévaudan personnel. Cela intéressait Paul Eluard qui se réfugia là des mois durant avec Nush, sa compagne. Dès le printemps 1944, Jean Dubuffet découvrira sur leur cheminée une sculpture de Forestier ramenée de Saint-Alban.

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Dans une langue limpide où l’information documentaire n’est jamais lourde, filtrée qu’elle est par un sens aigu de l’existence, Didier Daeninckx nous restitue l’ambiance de cette époque et de ce lieu où l’art brut prit sa source. Comment ? Par l’intermédiaire de Denise Glaser, une personnalité qu’on est un peu surprise de
trouver là.

 
Denise Glaser, mon daddy se souvient avec émotion de son écoute et de ses silences quand elle interviouvait des vedettes de la chanson aux temps héroïques de la télé. Jeune, résistante, refusant l’étoile jaune, elle dut se cacher en 1943 à Saint-Alban.

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didier-daeninckx-DR.jpgDaeninckx imagine les rencontres entre le poète, sa muse, le sculpteur fou, la future présentatrice, les psychiatres et leurs épouses. Les rencontres et les conversations. L’écrivain n’hésite pas en effet à dialoguer les scènes comme s’il y avait assisté. Nous y participons avec lui.

Caché dans la maison des fous publié par les Éditions Bruno Doucey n’est pas destiné à rester sous le boisseau. Se le procurer vite par conséquent.

14.06.2015

Pan dans L’Œuf !

Avec L’Œuf c’était fatal. Un jour il devait atteindre la douzaine. C’est chose faite. Claude Roffat, l’infatigable (quoique fataliste) animateur de cette revue qui persiste depuis 25 ans à proposer «un autre regard sur la création», réussit l’exploit de nous donner la cerise sur le gâteau d’une collection déjà collector.
Ce numéro 12 de L’Œuf sauvage qui sort de sa coquille au printemps 2015 s’avance paré des plumes qui ont fait la réputation de ses 11 prédécesseurs. Beau papier couché, visuels couleurs attrayants, typographie soignée au petit poil. Quant au contenu, le choix de Roffat tricote des influences qui se sont toujours équilibrées dans la revue : l’art brut et ses faubourgs, l’expressionnisme, le surréalisme, la fantasmagorie singulière, l’art populaire, la critique du pire.

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Ce qui se traduit sur la couverture par un kakémono énumérant le nom des artistes célébrés : A.C.M. et ses cités oxydées, Denis Pouppeville le funambule des couleurs, Bernard Pruvost, un début d’incendie dans la prunelle, Jean Benoît le mystère en plein soleil, Pierre Martelanche la cabane idéale du vigneron, Nicole Esterolle De la dictature de la bouffonnerie en art contemporain.

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J’avoue qu’avec mes œillères animuliennes, ce sont les sculptures-architectures «en chatoyants haillons de dentelles métalliques et oxydées» d’A.C.M. que j’ai tendance à mettre au top. Elles sont l’objet ici d’une visite de Jean-Louis Lanoux qui, avec Béatrice Steiner, avait, dès 1999 dans la revue Création Franche (n°17) attiré l’attention du public sur ce créateur d’exception.

Selon vos péchés mignons, vous apprécierez aussi le «climat de brume et de grésil (…)» de la peinture «à la tonalité flamande ou nordique» de Pouppeville, évoquée par Joël Gayraud.

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Les calaveras de Benoît dont la morbidité érotique plutôt chiadée me fait penser à Félicien Rops.

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«L’anatomie kaléidoscopique» de Bernard Pruvost. L’idéal républicain incarné dans les terres cuites de Martelanche. Le revigorant vitriol de la prose nerveuse d’Esterolle, au Schtroumph émergent duquel il m’est arrivé d’emprunter (voir ma note scato du 23 septembre 2013). Les fans de Nicole savent déjà qu’elle vient de sortir un bouquin de juteuses chroniques.

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J’oublie personne ? Si. Roffat of Marseille se souvient de ses origines foréziennes. L’article sur Pierre Martelanche, il l’a confié à Jean-Yves Loude et Viviane Lièvre, écrivain et photographe, ethnologues tous deux. C’est au cours d’une dérive ânière dans la région de Roanne pour la rédaction d’un livre qu’ils ont succombé au charme de l’œuvre du créateur populaire.

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Roffat qui, sous ses allures de vieil enragé, aime le beau langage a reçu par ailleurs le concours d’un autre écrivain : Lionel Bourg, ici chantre de Pruvost. A toute princesse tout honneur, je n’aurais garde d’oublier Marine Degli. Cette collaboratrice de Jacques Kerchache, initiateur du Musée du Quai Branly, apporte à ce numéro, outre son admiration pour l’épistolier Jean Benoît, un discret parfum primitiviste.

Le douzième Œuf Sauvage est en vente chez Béatrice Soulié et à la Librairie de la Halle Saint-Pierre.

27.04.2015

Richardo fait le gros dos pour Giraud

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Richardo a bon dos.

65 ans après la sortie de Les Tatouages du «Milieu», le livre qui fit connaître «l’homme le plus tatoué du monde», celui-ci prête encore ce dos pour faire la couverture d’un catalogue de libraire.

 

«Je ne sais pas de lecture plus facile, plus attrayante, plus douce que celle d’un catalogue» disait Anatole France, une vieille barbe chahuté par la caillera surréaliste.

Si celle-ci n’avait pas tort, France l’amoureux des beaux livres avait raison sur ce point. Je suis comme lui. Dans les Salons du livre, je remplis mon baise-en-ville.

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S’ensuit une semaine de délices à parcourir, dans l’autobus ou en attendant que mijote mon beurre blanc, des centaines de pages où se pavanent des bouquins pas possible que je pourrais jamais me payer. C’est super les catalogues! On saute d’une notice à l’autre et on se cultive tout de traviole. Le pied! Et puis de temps en temps on en sort un du lot et on se gargarise avec.

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C’est le cas avec cette quatrième mouture de la Librairie du Sandre consacrée -heureuse surprise- à Monsieur Bob et à ses copains d’avant : Jean-Paul Clébert, Michel Ragon, Jacques Yonnet, Albert Vidalie

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J’en passe et des Richardo puisque Guillaume Zorgbibe, le jeune papa du Sandre (un poiscaille de choix pour les pêcheurs en eaux littéraires) nous propose des photos-promo et des lettres pas piquetées des hannetons du personnage immortalisé par Robert Doisneau. Non content d’avoir un nom épatant qui dans un alphabet ferait bouquet final, Zorgbibe Guillaume ressemble un peu à Paul-Jean Toulet.

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Circonstance aggravante, il sourit tout le temps et il reçoit courtoisement, ce qui n’est pas banal pour un éditeur. Car G.Z. cumule les activités de libraire pointu et celles d’éditeur d’auteurs choisis, avec élégance et raffinement, dans les jardins peu fréquentés du 19e siècle surtout.

Mais je m’égare, je me noie. Revenons à la rive et à mes dérives favorites qui sont celles de l’art brut. Parmi de goûteux titres classiques : Enchanteur limousin de Michel Tapié, Les Inspirés et leurs demeures de Gilles Ehrmann, L’Enfant chandelier par Bob, le catalogue Giraud du Sandre brasse des perles rares et des pépites inconnues. Au rang des premières, il fo ranger 5 encres originales de Pierre Giraud, le frangin de l’autre. Sur cet artiste voir mon post du 15 mars 2007.

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Au rang des secondes, j’ai choisi ce numéro de la revue Osmose où sont réunis R.G. et Gabriel Pomerand qui copinèrent pour La Peau du Milieu, le film avec lequel je vous pris la tête le 31 mars dernier.

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Mais ce que j’adore, ce que je préfère c’est un méchant papier «imprimé à l’encre marine sur papier couleur chair». Le carton d’invit à la Nuit du tatouage organisée en 1950 pour la parution du livre de Jacques Delarue et Robert Giraud cité dans la première ligne de cette chronique qui n’a que trop duré.

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08.02.2015

Instantanés à Cotonou

Une chose que j’aurais aimé voir.

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Jean Baronnet.jpgDans un confidentiel recueil d’InstantanésJean Baronnet a consigné, sur un mode poétique et avec un humour retenu, des anecdotes, des impressions fugaces, des observations surprenantes (derrière une banalité camouflante) de sa vie de musicien, reporter et réalisateur, je capte ce souvenir de Cotonou daté de 1966 : «On vend sur le marché des postes de radio. Ils possèdent un cadran lumineux et plusieurs potentiomètres permettant différents règlages. La face opposée ne révèle rien car le poste est fait d’un bloc de bois plein qui exclut toute technologie compliquée».

20:05 Publié dans De vous zamoi, Ecrits, Lectures, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean baronnet | |  Imprimer | | Pin it! |

15.12.2014

Pour Noël, un défilé d'art brut

Peintes avec les pieds ou avec la bouche, je déteste recevoir des cartes de vœux à l’avance.

simpsons_noel.pngA cette époque de l’année, je pense qu’à Petit Papa Noël. Pas le chien des Simpson. Le vrai. Celui qui dépose dans la cheminée où vous n’avez plus le droit de faire du feu des K-DO venus du ciel. Tombés des paniers des officines virtuelles ou des rayons des vraies libraires qui peuvent encore payer un loyer dans le centre ville.

Sans pitié du dos du Père No, mon chéri et mon daddy m’ont commandé des kilos de coffee table books pour avoir l’air intelligents et actualiser leurs connaissances sur l’art brut à un moment où le premier blaireau venu n’a plus que ce mot à la bouche.blaireau.jpg

Le plus lourd mais le plus souple est un bel objet de couture japonisante, dans une couverture façon smoking déstructuré sous cape-étui au palladium avec titre gaufré (Art Brut, Collection abcd/Bruno Decharme).

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Programme de la soirée cousu de fil rouge au dos. La doublure à fond noir et impressions sismographiques énumère les noms des stylistes ayant contribué à la confection.

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Prix : 49,90. Lavage en machine non recommandé.

Le plus léger, dans une veste sable mandalesque avec discret logo de la marque et pantalon cerise à petit revers, est le complément parfait du premier car il traite du même sujet : l’actuelle exposition à la maison rouge.

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livre noir abcd.jpgLa version pour la ville en quelque sorte puisque le précédent, qui actualise un modèle de 2000 ayant largement fait ses preuves, ne saurait être consulté dans le métro du fait de son ampleur.

Bruno Decharme, son inspirateur, qui affiche volontiers une formation philosophico-cinématographique des temps structuralistes, a en effet la religion de la pluridisciplinarité. Et le souci de l’exhaustivité poussé un peu loin. Était-il nécessaire, par exemple, de nous gratifier d’une ènième contribution sur l’art des fous avant l’art brut, je me le demande.

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Surtout avec l’adjectif brut entre guillements comme si il fallait prendre cette notion avec des pincettes.

pincettes 2.jpg Moins enveloppant mais plus pratique, l’ensemble sable-cerise Antoine de Galbert a toutes les qualités qui ont fait la réputation des catalogues maison rouge. Bilinguisme, présentation claire des thèmes de l’expo notamment. Ceci pour 24 €.

Les deux books puisent à une iconographie commune, version luxe pour l’un, plus prêt-à-porter pour l’autre. Chacun contient des entretiens avec le collectionneur où celui-ci chouchoute son image. Il serait passionnant de les comparer avec des déclarations antérieures.

Là je n’ai pas le temps car je m’en voudrais de ne pas signaler, dans des prix intermédiaires (35€), le multifilaire catalogue de l’exposition L’Autre de l’art au LaM de Villeneuve d’Ascq.

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Ce concept nordique rappelle bien sûr Un art autre, le légendaire ouvrage de Michel Tapié qui date de 1952 et qui traitait de «nouveaux dévidages du réel». Le sous-titre du catalogue du LaM, sous une couverture classe grise et rose genre tailleur Chanel, est plus ambitieux : Art involontaire, art intentionnel en Europe, 1850-1974.

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On dirait que le LaM plante son drapeau partout : sur le temps, sur l’espace, sur un corpus des plus large donc des plus vague. Le résultat est aguichant. C’est un vrai feu d’artifice qui part dans tous les sens. Les productions asilaires, l’art naïf, les graffiti, Dada, les dessins d’enfants, l’espace acoustique, Mary Barnes, la poésie naturelle, le graphzine, que sais-je encore? Avec ça, on est paré pour l’hiver.

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Chacun dans cet ensemble tout terrain choisira sa partie amovible. Pas d’erreur, ça plaira à tout le monde! Même à moi qui me suis drapée illico dans La grande muraille d’Adrien Martias (styliste : Béatrice Steiner) et dans l’Hôpital brut par Corinne Barbant.

20.11.2014

maison rouge : suivez le guide

Pas plus grand qu’un smartphone, le livret qu’on distribue à l’entrée de l’exposition des deux chevaliers de la maison rouge! Il mériterait pourtant d’être oscarisé. Antoine de Galbert, la puissance invitante, Bruno Decharme, le collectionneur on the air et le staff de la programmation culturelle ont soutenu là une gageure : faire une présentation de la collection abcd (et des notions complexes qui tournent autour) qui ne soit ni bête ni prétentieuse. La clarté est chose trop rare pour qu’on ne la salue pas au passage.

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Le petit journal de cette expo d’art brut, qui est un must en la matière, s’adresse aussi bien à ceux qui ne connaissent rien au sujet qu’aux afficions chevronnés. Les premiers n’y sont pas pris pour des billes.

billes-et-calots.jpgLes seconds y trouveront un billet pour un voyage au pays de leurs connaissances.

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Personnellement, j’ai apprécié que ce «livret de visite» constitué d’un plan et d’un glossaire aborde la question de l’éthique. Souligner que «l’exposition et la circulation des œuvres» doivent se faire «dans le respect de leurs auteurs» et dans l’assurance «qu’ils profitent, d’une manière ou d’une autre, des bénéfices générés par le commerce de leurs œuvres» est indispensable par principe et juste dans les termes.

Ceci posé ça peut pas faire de mal de chercher la petite bête dans le langage documenté et précis employé par les rédacteurs des notices du glossaire.

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Comme tonton Niezstche le dit dans Humain trop humain : «les convictions sont des ennemis de la vérité plus dangereux que les mensonges».

C’est donc du côté des certitudes qu’il faut chercher dans le petit journal de l’exposition art brut de la maison rouge les endroits où ça coince. La notice art contemporain / art brut démarre ainsi par une pétition de principe : «Les temps sont au décloisonnement (…)». Une fois que vous avez reçu cet uppercut dans le plexus scolaire, votre petite cervelle de piaf vacille dans ses Converse.

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Vous voilà mûrs pour l’enchaînement suivant : l’art brut s’était constitué «à travers une opposition à un art dit culturel (sic)» mais «actuellement» (sous entendu : c’est fini) «de nombreuses expositions tendent à le confronter à des réalisations intégrées au monde de l’art contemporain» (tout court)».

Et patapoum, admirez le travail! Si vous n’y prenez garde, cette voltige démonstrative vous envoie au tapis, prêts à admettre que l’art brut c’est kif kif le soi-disant art soi-disant contemporain (en fait vieux comme mes robes duchampomyennes).

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La méthode pour parer c’est d’abord de prendre conscience que l’argument des «temps» (autant dire la dictature de la mode ou du marché) ne vaut pas un clou. L’Histoire est pleine de ces moments où une époque se crut à tort au bord de quelque chose qui s’ouvrait devant elle (que ce soit le communisme, le royaume de Dieu ou l’abstraction lyrique).

La méthode c’est ensuite de  reconnaître que ce qu’on nous présente comme du décloisonnement n’est en fait que du confinement au sein d’une catégorie unique (l’art contemporain) où le ferment corrosif de l’art brut serait enfin édulcoré par ses célébrateurs mêmes.

11.11.2014

Le Prix Renaudot pour Charlotte Salomon

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Le Renaudot c’est pas mon lot. Les Prix littéraires d’ordinaire ça m’fait braire. Mais là quand même comment ne pas joindre mes youyous animuliens au concert de louanges qui salue le livre de David Foenkinos?


Et tant pis si sa forme poètique en défrise certains. Et tant pis si la vogue du roman biographique le porte.

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L’important, de mon point de vue, c’est qu’il rende à Charlotte Salomon un peu de l’existence qui lui a été crapuleusement volée.

17.10.2014

Kopac & Cie, un catalogue d’anthologie

Slavko Kopac est de retour. A supposer qu’il soit jamais parti. Le veston pied de poule sur la photo historique de l’inauguration de la Collection de Lausanne c’est lui.

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Dans notre quotidien amnésique qui voudrait nous faire croire que l’art brut est né avec le marché émergent aux alentours de 2005, elle témoigne du rôle essentiel de cet excellent artiste croate dès la constitution de la collection de l’Art brut dont il fut le conservateur jusqu’au transfert de celle-ci en Suisse en 1976.

C’est pourquoi, il est positif de constater qu’au moment où deux expositions d’envergure reviennent sur le sujet de l’art brut, L’Autre de l’Art au LaM et collection abcd/bruno decharme à la maison rouge,

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il se trouve une Librairie-Galerie parisienne pour consacrer un catalogue à Kopac & Cie.

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Entendre par là : Kopac et ses amis, au premier rang desquels Jean Dubuffet, Kopac et ses livres, Kopac et ses œuvres (du moins quelques unes), Kopac et l’art brut.

Ceci pour reprendre les grandes divisions d’Emmanuel Hutin, le libraire dont on peut saluer le sens de la trouvaille et la capacité à la mise en valeur, par le commentaire et par l’image, des 71 numéros rassemblés.
Le show commence par un remarquable portrait de Slavko Kopac dû à Miguel Hernandez tout en formes sinueuses comme à son habitude.

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Il est émouvant de voir ainsi réunis par un même tableau une des grandes figures d’origine de l’art brut (Hernandez) et un artiste qui, «parallèlement à ses activités à l’Art Brut» n’a cessé «de poursuivre son travail de peinture, sculpture et céramique» (Kopac). Qui possèdera cette toile de 1949 (n°43 du catalogue) prouvera son flair historique.

Le show se termine en beauté par des œuvres kopaciennes dont deux chouettes très chouettes (n°68)

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et une encre et collage de 1959 (n°66)

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Entre temps j’ai noté tellement de choses que c’est impossible de tout vous raconter. Des affiches, des paperolles hyper rares, des invitations, un ex-libris du collectionneur Edmond Bomsel par Alberto Giacometti (n°35)

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des lettres de Gaston Chaissac, un Crabe sur la plage, gouache et collage d’épluchures de Philippe Dereux, un zinc clouté de Fernand Michel intitulé Bergeries (n°42). Ler dla canpane de Dubuffet avec une impression supplémentaire (n°11)

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un exemplaire d’Evolucion d’Hernandez (n°12)

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un exemplaire de La sourieuse rose de Jean L’Anselme avec des poèmes autographes (n°46)

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Petits bouquins adorables parce que palpitants de la ferveur des débuts. Toutes ces merveilles sont proposées rue d’Argenson, au 5, dans le 8e arrondissement de Paris, près de l’église Saint Augustin.

A deux pas de cet Hôtel Le A où se tiendra du 23 au 26 octobre 2014, l’Outsider Art Fair.

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13.09.2014

Les glyptolithes d’Ica, c’est le Pérou

En cette fin d’été d’une douceur presque philosophique, on se sent gagné par la PPAC.

La Peur de Passer À Côté devant toutes les expos qui nous tombent sur le paletot.

L’Art différencié international aux Sables d’Olonne, jusqu’au 28 septembre 2014.

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Ficties rond de oorspong  (Fictions des origines de l’art) dans la rue Haute, jusqu’au 12 octobre.

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Willem Van Genk 

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et Ralph Fasanella qui viennent de commencer à New York.

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Sous le vent 2 qui hissera la voile le 16 septembre au bon vieux port de la Halle Saint-Pierre.

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On ne saurait suivre. C’est presque trop. A force, l’envie prend d’aller voir ailleurs si l’art brut y est. Au Pérou par exemple. A Ica, plus précisément. Une ville viticole au sud sud de Lima. Pourquoi? Mais pour les pierres naturellement! Les mystérieuses Pierres d’Ica.

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Ce que j’aimerais c’est visiter le Museo cientifico Javier Cabrera qui abrite ces milliers de galets, plus ou moins gros, gravés de scènes animées d’une grande variété où voisinent créatures de la préhistoire et personnages d’allure précolombienne.

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D’emblée, ce musée fait penser au musée d’Emile Fradin à Glozel ou au musée du silex de Robert Garcet à Eben-Emael, près de Liège en Belgique. On y respire le même parfum d’escarmouche entre la science officielle et les théories autodidactes superbement sinueuses.

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En dépit des preuves qu’on ne cessa de lui opposer, le Dr Javier Cabrera, le collectionneur de ces pierres dont le style narratif, allusif et primitiviste sans-peine frappe par son adaptation à la nature du matériau et à la forme des supports, ne cessa de leur assigner des origines fabuleuses.

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Que celui qui n’a jamais rêvé lui jette la première critique!

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Robert_Charroux_L_Enigme_des_Andes.jpgSes spéculations ufologiques sur les premiers astronautes, peuple d’extraterrestres dont les exploits dinosauromachiques et technologiques seraient représentés sur les galets d’Ica ont certes été relayés, dans les années 70 du XXe siècle, par les tenants d’un réalisme fantastique popularisé par la revue Planète.

robert charroux.jpgNotamment par Robert Charroux, jonglant avec la fiction et l’ésotérisme, dans son livre L’Énigme des Andes.

Pas sûr que les conceptions plutôt fumeuses de cet écrivain sportif et aventurier aient beaucoup servi les Pierres d’Ica!

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Mais ce n’est pas une raison pour ne pas les regarder car elles en valent la peine. Derrière elle se profile une légende qui attribue à un paysan local la confection de ces œuvres.

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ica.coeur2.JPGL’histoire dit qu’il les aurait trouvées dans une grotte dont il garda l’emplacement secret. Mais lorsqu’il fut accusé de trafic d’objets archéologiques pour avoir présenté et vendu comme tels ses soi-disant trouvailles, le «découvreur» changea de version et reconnut (ou prétendit) en être l’auteur.

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Dans ce jeu d’esquive avec la responsabilité de la création, on reconnaît -et c’est troublant- un comportement fréquent chez les auteurs d’art brut.