03.10.2010
Regards d’automne
Bellon, Bellon, Bellon, «à ce prix là, vous m’en mettrez une bourriche!».
C’est ce que vous pouvez dire à votre soldeur si, comme moi vous avez la chance de croiser sa librairie en allant acheter votre salade.
Franchement, ce serait bête de se priver de ce bô bouquin d’Eric le Roy sur la photographe Denise Bellon(1902-1999) qui fut proche du Mouv Surr. Quand il est sorti en 2004 aux Editions de la Martinière, il coûtait plutôt bonbon (55 €), ce qui n’est pas choquant pour un album de cette qualité, reproduisant je ne sais combien de photos avec des entrelardages biographiques, éclairants mais pas pesants.
Aujourd’hui, il en arrive un petit stock sur le marché et vous pouvez vous en goinfrer sans mettre en péril votre budget d’étudiant ou de retraité de plus de 67 ans.
Cela tombe pile pour la dernière ligne droite (jusqu’au 18 octobre 2010) de l’expo Denise Bellon, Regards d’artistes sur le quai de la station St-Germain-des-prés.
Avec Denise Bellon, on entre dans une famille comprenant la comédienne Loleh, la réalisatrice Yannick (ses filles) et Jaime Semprun (fils de Loleh) qui vient de disparaître et qui fut l’âme de L’Encyclopédie des nuisances, «seul surgeon vivace» de l’aventure situ, selon l’article nécro de Jean-Luc Porquet dans Le Canard enchaîné du 11 août 2010.
Denise Bellon, son chemin croisa, au gré des reportages, une mariée gitane, de pauvres petites putes du quartier «réservé» de Casablanca, une danseuse de Côte d’Ivoire aussi bien que Salvador Dali, Marcel Duchamp, Joan Miro. Elle est aussi la belle sœur du cinéaste Jacques Brunius (voir mon post du 10 septembre 2005 : Violons d’Ingres). C’est surtout à ce titre qu’elle m’intéresse, obsédée par mon petit bout de lorgnette brute que je suis. Parce qu’elle a réalisé une centaine de clichés du Palais idéal du facteur Cheval en préparation du film de Jacques Brunius sur celui-ci. Cela se passait en 1936 et ses images, «largement publiées, contribueront à la notoriété du lieu». Vous en trouverez deux dans l’ouvrage d’Eric Le Roy. Je vous les reproduit pas pour vous inciter à l’acheter.
Comme il me reste un peu de place, j’en profite pour zoomer sur un livre d’un certain Christian Colas qui vient de sortir chez Parigramme. Intitulé : Paris graffiti, les marques secrètes de l’histoire, il nous offre pour pas cher (14 €) quantité de repros d’écrits furtifs et de figurations spontanées chinés dans des recoins-coins obscurs de la capitale.
Certains sont très anciens. Tous témoignent d’un besoin impérieux d’expression populaire, voire d’une pulsion artistique sincère qui se donne d’autant mieux libre cours qu’elle s’exerce en catimini. Attention : beaucoup de ces graffiti sont coton à prendre et il ne faut pas toujours s’attendre à une grande netteté de lecture mais l’auteur-photographe a rudement bien fait de ne pas écarter le diaphane au profit du pittoresque.
Dernière minute : vous vous souvenez du post Akkisuitok, Gérard Cambon dont votre petite âme errante vous avait régalé le 16 mars 2010? Et bien, voici que Regard, la petite revue d’art de Marie Morel consacre son n°109 (sept. 2010) à cet artiste chouchouté par la Galerie Soulié.
19:49 Publié dans Ecrits, Expos, Gazettes, Images, Miscellanées, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : denise bellon, jaime semprun, gérard cambon, marie morel, graffiti, photographes, eric le roy, ferdinand cheval, brunius, jean-luc porquet, christian colas | | Imprimer | | |
29.04.2010
Okkulte Kunst
Occulte Art, Art occulte, Art et Occultisme... Je sais pas trop comment traduire ça.
Peut-être qu'il faut le laisser en allemand : Okkulte Kunst; mais il y aurait aussi une version en tchèque.
Toujours est-il que j'ai rapporté ce livre de chez un libraire praguois. Natürlich puisque qu'il a été publié à Prague en 1924. L'année du Manifeste du surréalisme pour vous situer. Si je continue à attendre, cet album de dessins aura bientôt un siècle. Mais ce serait dommage de pas mettre tout de suite sous les yeux du pauvre monde ces images assez extraordinaires dans le genre abyssal.
Elles ont pour auteur un certain Eugen Mirsky dont je me suis échinée pour essayer de comprendre la préface en allemand très trapue, pleine de mots composés et de phrases à la structure compliquée. Ma parole, il faudrait avoir lu Hegel pour comprendre ça. Il y est question d'un Codex Gigas, un livre géant de 75 kgs, qui compile des textes sur la médecine, sur la magie et des textes des Testaments chrétiens. Il contient un grand portrait du diable, raison pour laquelle on l'appelle aussi Bible du Diable (Teufelsbibel).
Minsky s'en est-il inspiré ? Je n'en sais rien.
Il évoque aussi des médiums : Frieda Gentes, Mrs Jenken (Kate Fox) et la médumnité. Finalement, ces dessins (?), gravures (?) ou découpis (?) -on le qualifiait de «scherenvirtuos» (virtuose du ciseau)- seraient tout simplement de l'art médiumnique.
Encore qu'on y discerne évidemment des influences du Modern Style anglais et de l'Art Nouveau russe.
Aucune précision autobiographique n'étant fourni par Eugen sur son cas, j'ai gratouillé sur internet sans résultats.
Le mystère demeure. Alors si ça dit quelque chose à quelqu'un cet album, cet album, cet auteur, ce visage, qu'il (ou elle) se lève pour le crier bien fort dans le tuyau de l'oreille électronique de votre petite âme errante.
23:50 Publié dans Ecrits, Glanures, Images | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : okkulte kunst, art occulte, codex gigas, eugen mirsky, prague, découpages | | Imprimer | | |
20.04.2010
L’Art brut, un fantasme de peintre
Retour aux fondamentaux. Art brut, Art brut et encore Art brut. «L'Art brut c'est l'art brut et tout le monde...» n'a peut-être pas très bien compris. C'est pour ça qu'on n'arrête pas d'écrire des livres sur le sujet. Le dernier en date c'est celui de Céline Delavaux paru à la Palette. Non, pas le bistrot de la rue de Seine. Palette l'éditeur. L'Art brut, un fantasme de peintre que ça s'intitule. Et ça se sous-titre : Jean Dubuffet et les enjeux d'un discours, vu que cet assez gros bouquin (350 pages) «est issu de la thèse de doctorat» de l'auteur «sur les écrits de Jean Dubuffet».
Je guillemette parce que j'emprunte ces lignes à la 4e de couv qui nous signale aussi : «Révéler la force poétique du concept d'art brut et l'évidence de la valeur littéraire de l'écrit de peintre : tel est l'enjeu de cet essai». «Concept», «valeur littéraire», moi ça me va. Même si, en l'absence d'illustrations c'est forcément un peu austère. Si les volcans ne s'étaient pas mis en travers, j'aurais certainement dépassé la page 63 marquée par ma carte d'embarquement. Mais la lecture n'est pas vraiment permise aux pauvres rescapées de l'espace. Allez donc vous concentrer en attendant que la poussière retombe et que votre avion décolle!
Non que le livre de Céline Delavaux soit difficile à lire. Il est écrit dans une langue limpide et pourvu de belles marges que j'ai commencé à couvrir de repères au crayon. Mais retrouvez donc votre crayon quand vous revenez de Chateauroux dans un train plein comme un œuf! C'est de ma faute aussi, j'ai trop eu la bougeotte ces temps-ci. Pourtant j'avais bien commencé puisque Céline m'avait dédicacé son travail (Pour Ani «dont je trouve la verve ...») quand nous nous sommes rencontrées le 25 mars 2010 à la journée d'étude de Dijon sur laquelle Aurelie Linxe, jeune et efficace doctorante en muséologie saupoudrait sa bonne volonté et sa bonne humeur réunies. Et oui, j'y étais en chair et en os à ce colloque, aux côtés de Mr Baptiste Brun qui roule si finement sa cigarette d'après le repas et de Mr Bruno Decharme dans la collection duquel l'éditeur de C.D. a emprunté son image inaugurale.
Et puis, je suis partie sur les routes de Corse et je me suis contentée de rôder autour des 1000 petits accès ménagés par Céline pour entrer dans son livre : index des auteurs et des notions (le rêve!), bibliographie (15 pages!), tables des matières super-chiadée, préface de Gérard Dessons, notes en bas de pages (et pas au diable vauvert).
Dans les limites qui sont celles d'un blogounet comme le mien, il est exclu que je vous décortique en détail un aussi scientifique bouquin qui va s'imposer comme un instrument de travail incontournable pour les initiés.
Et comme un état de la réflexion actuelle qui va prendre le relais 13 ans après le L'Art brut de la citoyenne Lucienne Peiry.
Il faut donc que je me pose pour lire à fond le Céline Delavaux nouveau.
Vous aussi, naturellement.
23:52 Publié dans Ecrits, Lectures, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, céline delavaux, lucienne peiry | | Imprimer | | |
07.02.2010
Alain Gheerbrant, L’Homme troué
Rencontrer Alain Gheerbrant, je croyais pas ça possible alors j'ai rien préparé. Ma foi, tant pis, faut quand même que je vous dise que cet homme aux multiples casquettes (écrivain, éditeur, explorateur, cinéaste), fidèle toujours à la poésie, vous attend mardi 9 février 2010 à la Maison de l'Amérique latine, 217 bd St-Germain.
Venez à 18 h 30 pour la présentation de L'Homme troué, le récent livre de cet aventurier nonagénaire qui fit ami-ami avec les indiens Yanomami et Antonin Artaud dans les années cinquante, publia Arp et Benjamin Péret et -c'est surtout en quoi il intéresse les Animuliens- découvrit la «poésie naturelle» avec le peintre Camille Bryen à peu près au moment où Jean Dubuffet inventait «l'art brut».
Gheerbrant et Bryen en firent en 1949 une Anthologie qu'on a d'autant plus de plaisir à mettre sur ses rayons qu'elle est illustrée de photos de Brassaï représentant des vitres cassées et des lèpres de murs. Ce qui les cassait aussi, les vitres, c'était les drôles de textes réunis là dedans. Gaston Chaissac, le Facteur Cheval, le Douanier Rousseau, des «fous littéraires» (Auguste Boncors, Jean-Pierre Brisset), une médium-peintre (Hélène Smith).
Et puis des sortes de ready-made de l'écrit : liste de machines extraites d'un annuaire professionnel, prospectus d'un magasin d'articles de pêche, selon le principe que la poésie «pousse comme les truffes»
comme dit Alain Gheerbrant dans La Transversale, ses mémoires parus en 1995.
Je vous offre ci-joint un exemple de ces ready-made : le bonus jaune qui ne figure que dans la version luxe (sur beau papier) de L'Anthologie de la poésie naturelle.
Sur le cousinage des deux notions (Art brut/Poésie naturelle) , aux développements pourtant séparés, il faut lire l'entretien que Gheerbrant a donné il y a 10 ans au gros bouquin coédité par Actes Sud et abcd, intitulé : abcd une collection d'art brut. C'est aux pages 336 à 338.
Pour le reste, la vie d'Alain Gheerbrant est trop riche, je saurais pas par quel bout commencer.
Sans compter tout ce qu'il va faire encore. Je suis obligée de renoncer, excusez mais ce n'est qu'hier que j'ai trouvé le flyer annonçant la soirée à la Maison de l'Amérique latine en fouinant à la Librairie Gallimard, partenaire de l'événement.
Si vous voulez en savoir davantage, allez sur le site de Sabine Wespieser, l'éditeur de L'Homme troué. Mardi soir, elle tiendra compagnie, avec Raphaël Sorin (celui du blogue Lettres ouvertes), à Alain Gheerbrandt.
23:02 Publié dans Ecrits, Lectures, Parlotes, Poésie naturelle, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : alain gheerbrant, l’homme troué, camille bryen, poésie naturelle, auguste boncors, fous littéraires, yanomami, truffe, jean-pierre brisset | | Imprimer | | |
25.10.2009
L'Aube se lève pour l'art brut
André Breton, des fois tu me vénères avec ta façon de poser pour la gloire sur les photos. On dirait une statue du Commandeur et le marbre c'est froid. Aussi, faut-il saluer l'Aube, ta fille, qui a donné le feu vert à ces messieurs Gallimard pour la publication des lettres que tu lui as écrites entre 1938 (elle avait 2 ans) et mai 1966 (4 mois avant ta disparition). Tu l'appelles «ma jaguarine», «ma petite papillonne», «mon petit lion d'or» et c'est grave beau. Pour elle, tu signes Ada, ce tendre compromis d'André et de papa qu'elle a inventé ton Aube chérie.
Et toi qui proclamait en 1928, dans l'enquête des surréalistes sur la sexualité, ton opposition farouche à la paternité («si cela m'arrivait malgré tout je m'arrangerais pour ne jamais le voir. L'Assistance publique a du bon») te voilà 10 ans après qui fond de partout. Et c'est très bon parce que tu sais le faire avec les ressources de ta poésie à toi : «je te serre de tout le lierre du monde». Te voilà soudain loin de cette image de «pape» qu'on te colle souvent sous les pieds comme une peau de banane.
Tu restes un écrivain mais tu es aussi un père qui voudrait que sa fille soit bonne en classe, qu'elle ne manque pas de cadeaux pour son anniversaire, qu'elle soit assez gentille pour écrire à son grand-père. Tu lui demande des nouvelles de son petit chien. Tu la recommandes à ceux que tu aimes : Elisa, Dora, Benjamin et tu lui parles comme à une grande de ce qui te tient à cœur sur le moment. Par exemple : cet almanach d'«art brut» auquel tu travailles ce 12 octobre 1948 : «Tu te demandes peut-être ce que ça peut être que l'art brut ? Cela groupe tous les tableaux et objets que font quelquefois des gens qui ne sont pas artistes : par exemple un plombier zingueur, un jardinier, un charcutier, un fou, etc. C'est extrêmement intéressant».
Bref, tu existes ! Tu n'es plus André Breton, le septembriseur mais un brave type qui a oublié son chapeau de paille et qui en as besoin pour bricoler autour de sa maison de Saint-Cirq-Lapopie. Et ça te va peut-être mieux au teint qu'une libellule sur le front ou que l'aigrette de vent aux tempes. Cela nous rappelle que quelque part tu es notre petit Ada à toutes (n'en déplaise à mon daddy perso).
14:45 Publié dans Ecrits, Lectures, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : art brut, andré breton, aube breton-elleouet, st cirq lapopie | | Imprimer | | |
12.10.2009
Les Gants rouges de Christine Sefolosha
Les Gants Rouges
Avec Christine Sefolosha, il ne faut pas prendre de gants. Lui témoigner illico presto que c'est super son travail même si elle le sait. On risque pas de la gâcher. Elle est la voisine de palier de Carlo Zinelli, un vrai sucre d'orge de l'art brut, dans une exposition américaine dont la durée de vie ira du 16 octobre au 1er décembre 2009.
Opening reception : Friday october 16 th (5-8 P.M.) à la Judy A. Saslow Gallery. Je dis ça pour ceux qui pourront être à Chicago ce jour-là et aussi pour l'information des autres qui n'ont pas pour habitude de trainer leurs Converses en Illinois. Avec Chris and Carlo feront bande à part deux autres «outsiders» : Clyde Angel qui fait la soudure et réalise des sculptures en métal
et Michael Smith qui est inconnu à mon bataillon. Le site de la galerie vous en dira plus.
Chris. Sefolo., pour en revenir à elle, on nous explique que «she began drawing as a child, often during bouts of chronic insomnia». Comme je vous ai déjà parlé de son cas, par exemple le 26 juillet et le 1er décembre 2007, je m'étouffe pour cette fois et je passe la trompette à un de mes fidèles assistants qui s'époumonne pour Les Gants rouges, une peinture sefoloshienne de 2008.
20:05 Publié dans Ecrits, Expos | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : christine sefolosha, carlo zinelli, art brut, clyde angel | | Imprimer | | |
18.07.2009
Dereux et Dubuffet font les Beaux-Arts
Dereux + Dubuffet = Lyon. Même si vous êtes nuls en calcul c’est une addition facile à faire, mes p’tits Gnafrons. Et si vous vous sentez une petite faim pour le jésus, la rosette, le tablier de sapeur et la cervelle de canut, si vous vous sentez prêts à vous envoyer derrière le tchador un vieux pot de Beaujolais, c’est le moment de descendre ou de monter dans cette bonne cité de Lugdunum.
Lyon nous offre cet été deux bonnes occasions d’aller bouchonner dans ses murs. First of all parce que le Musée des Beaux-Arts (rien que ça !) a le bon goût de se souvenir que Philippe Dereux est un régional de l’étape. Il lui offre, jusqu’au 21 septembre 2009, une expo en compagnie de son ami et mentor Dubuffet Jean pour ne pas le nommer.
Philippe Dereux, c’est le type aux épluchures, cet artiste sincère et discret sur lequel Tom Le Guillou avait porté le projecteur de la Galerie Messine à la fin de sa vie.
Dereux : on n’imagine pas plus belle figure de «l’homme du commun à l’ouvrage» ! Avec son sourire timide et son look de gentil cousin de province, on croyait pas, dans les vernissages, que c’était lui l’auteur de ces théâtres de graines, d’écailles et d’épluchures délicatement assemblés par collage.
© Photo Jac Perrichon
Quand on lui rendait visite, chez lui, à Villeurbanne c’était pareil. Dans un décor de peaux de pêches achevant de sécher sur un radiateur, il se tenait bien sage dans un chandail couleur de terre, tout à fait dans la gamme chromatique de ces «tableaux» fruiteux-légumineux qu’il réussissait à préserver de la corruption et des injures du temps par toute une petite chimie de techniques patiemment mises au point depuis la fin des années 50 où il avait commencé à œuvrer pour lui même.
Et non plus comme assistant de Dubuffet qui, à Vence, s’était gagné le concours de cet instituteur en vacances, un peu empêtré dans son désir intimidant d’écriture. Ayant renoncé au statut d’homme de lettres, Philippe Dereux devait renouer d’ailleurs avec sa passion littéraire à l’occasion de sa nouvelle activité plastico-éplucheuse où il s’était engagé en toute ingénuité, «tout à fait par hasard, sans but préconçu, pour voir, comme disent les enfants (…)».
J’abrège pour vous dire que, si vous vous grouillez un brin, vous pourrez aussi, jusqu’au 28 août, courir à la Bibliothèque Municipale de La Part Dieu où ce que vous verrez l’expo Archives de l’infamie montée autour de La vie des hommes infâmes, un texte anti-plutarquien de Michel Foucault.
Elle nous promet des photos d’asile, des images de sans-papiers, des empreintes de mains du début de la criminologie, des cahiers de détenus et des dessins ou tatouages de bagnards.
Moi, je crains de pas pouvoir mais si vous passez par là, n’hésitez pas à lâcher vos commentaires.
23:55 Publié dans Ecrits, Expos | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art brut, philippe dereux, jean dubuffet, michel foucault, archives de l'infamie | | Imprimer | | |
09.06.2009
Eric Dussert Fabrique des Icebergs
Pair, Impaire et manque. J'ai du mal avec les anniversaires. Aussi ai-je étourdimulement manqué celui de la Galerie Impaire. Un premier anni pourtant, ça aurait du marquer votre Ani! D'autant que la soirée du 5 juin, rue de Lancry, était sous le signe de 2 icônes.
Du côté américain, un certain George. A la veille de la visite d'un certain Barack sur les plages de la liberté en Normandie, c'était tout indiqué un Washington. Du côté français, pouvait-on mieux choisir que de choisir la Parisienne la plus people, quoiqu'un peu italienne sur les bords. J'ai nommé ... (non, pas celle-là !) Mona Lisa.
Mona et George,
George et Mona,
idéales figures tutélaires pour l'an 1 d'une Galerie américano-française. Un doigt de Bourbon, un doigt de Beaujolais, un doigt de Cinzano. Et un peintre pour mélanger un peu tout ça. Ike Morgan dont on pouvait voir les œuvres ce soir-là, le temps d'un vernissage exeptionnel, est du genre à s'acharner sur ces deux-là : Washington et Lisa.
Du moins sur leurs images. Du fin fond de son atelier du Texas (en fait son hosto psy où il vit depuis pas mal de temps), il travaille dur à créer des tableaux à la ressemblance acérée et lacérée.
Allez là pour en savoir plus et hissez vous ici pour visionner les photos de la teuf impairiale. Vous y reconnaitrez plusieurs Animuliens et Liennes dans l'assistance. Donc tout baigne.
00:03 Publié dans Ecrits, Expos, Gazettes, Images, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : art brut, ike morgan, galerie impaire, galerie objet trouvé, mona lisa, georges washington, eric dussert | | Imprimer | | |
23.04.2009
Monsieur Bob est sorti !
Bob en stock ou Giraud c'est pas trop tôt. Mon usine à titraille fonctionne à pleins poumons. Je cherche la formule. La bonne formule pour me positionner comme il faut sur le netvibes. C'est que je voudrais pas que vous la loupiez, mes animulecteurs et lectrices préféré(e)s. Quoi donc ? Mais la sortie du livre d'Olivier Bailly, badame ! Monsieur Bob, c'est son titre (le vrai), dans la Collection Ecrivins, chez Stock justement. 14,50 €, c'est donné pour une très classe brique plate de 190 pages qui déformera pas vos poches de costard, messieurs, ni vos sacs à malice, mesdames, quoique dépassant tout de même vers le haut.
A force d'en entendre parler sur Le copain de Doisneau, le blogue de l'auteur (que j'appelle moi : Robert Giraud et ses copains), j'avais fini par m'en faire une idée qui ne correspond pas à la réalité. Je m'attendais à une bio un poil roborative, positiviste à l'américaine, avec tout le tremblement de notes, index et biblio en veux-tu, en voilà.
Suis-je bêtasse ! C'est aéré, fruité, sensible et informé. D'une information jamais lourdingue même quand l'enthousiasme d'Olivier Bailly pour son sujet l'amène à répéter un détail pittoresque : les 40.000 cartes postales de Robert Giraud, par exemple.
Mais une conversation de bistrot s'accommode de ces retours et le bouquin d'O.B. en a la saveur un peu nostalgique. Pas de pédagogie, une capacité à développer les arômes. Monsieur Bob se déguste comme une gaufrette au fromage au rythme d'un nectar de la Loire.
Croustillant comme une évocation, suave comme une célébration, astringent comme une vieille tristesse qu'on caresse sur la langue.
Olivier Bailly n'est pas un sauvage. Ne comptez pas sur lui pour appuyer sur les plaies. Mais la fêlure, présente chez un écrivain comme Robert Giraud depuis sa libération en août 1944 de la zonzon nazie pourrie où il attendait la mort à 22 ans, O. B. nous la fait sentir en douceur.
On a traité Robert Giraud de cossard. Lui, ce documentaliste hors pair ! Lui, cet auteur d'un chef d'œuvre (Le Vin des rues), de plusieurs romans et d'une tripotée d'articles sur l'argot, les clodos et les tatoués !
C'est vrai qu'il donne le sentiment parfois de ne pas s'acharner à terminer les choses. I prefer not to ..., diraient certains. C'est ce qui fait son charme.
Je ferai bien d'en prendre de la graine.
09:10 Publié dans Ecrits, In memoriam, Lectures, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : robert giraud, olivier bailly, le vin des rues, stock | | Imprimer | | |
27.02.2009
Jacques Chessex et sa Suisse
Roule ma poule ! Une fois le pied en Suisse, je vais pas lâcher l’affaire. En shorter voilà : pistant comme à mon habitude le mot «brut», je suis tombée sur «l’ogre Jacques Chessex». Pas au détour d’un bois vaudois mais dans un article de François Dufay paru dans l’Express du 19 février 2009 à propos du nouveau livre de l’auteur, Un Juif pour l’exemple.
L’ogre a vieilli et son visage ressemble maintenant à celui du Père Noël mais il collectionne toujours les couteaux des Dracula alpestres.
Son livre fait donc son petit effet dans les librairies de chez lui. Ceci parce que, se basant sur un fait-divers sinistre survenu en 1942 dans sa ville natale de Payerne, Chessex y déterre une ambiance antisémite à faire gerber que certains de ces compatriotes préféreraient oublier.
L’écrivain, qui n’y va pas par quatre sentiers de randonnées, a depuis un moment déjà une autre corde à son arc : la peinture.
Cliquer sur la photo pour voir le diaporama
Selon François Dufay, le résultat de ses «fureurs picturales» se situe «entre art brut et figuration libre». Je ne suis pas si catégorique et d’ailleurs Jacques Chessex non plus : bien qu’il n’ait jamais appris à peindre de manière académique, il est catégorique, ses peintures ne peuvent pas être assimilées à de l'art brut.
En fait, ce qui me botte (de 7 lieues) chez Chessex c’est que tout «gens-de-lettres» qu’il est, il n’a pas des opinions de Petit Poucet du ciboulo. «Je déteste l’art grec, ce mensonge en plein soleil» gronde-t-il dans sa barbe et je trouve ça marrant.
Pour rester dans la note de ma note fribourgeoise précédente, je ne résiste pas à vous surligner encore ce passage de Chessex à propos de son pays: «De la France, vous ne voyez que les vitrines de chocolat, les banques qui d’ailleurs s’effondrent et les horlogeries qui ont été délocalisées. Ce qui demeure c’est un peuple guerrier, sauvage, violent, qui a un goût baroque des armes, de l’héraldique, du bestiaire. Toute notre histoire exalte des brutes, des coupeurs de gorges, des saigneurs de cochons».
Si après ça, vous pensez toujours que la Suisse est, comme se l’imaginent trop les Français (selon François Dufay) «une contrée aseptisée» plutôt qu’un pays «où la folie couve», demandez à votre libraire Un Juif pour l’exemple paru chez Grasset .
Surtout si vous êtes Français, ça vous aidera à comprendre pourquoi l’Helvétie est une terre d’art brut.
23:55 Publié dans Ecrits, Expos, Gazettes, Images, In memoriam, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jacques chessex | | Imprimer | | |