14.09.2010
Hassan, designer brut à Barcelone
L’inconnu de Barcelone. Encore de l’art brut et encore un nouveau cas révélé sur les ondes d’Animula. Un dessinateur. Africain. A l’air libre. Une œuvre. Discrète mais pas mâtinée cochon d’Inde, façon «art tribal en bandoulière» ou «artisanat cauries-raphia» pour touristes (15 % de naïveté et 85 % de beaux-arts mal digérés). Non, non. Un créateur brut de chez brut. Avis à la populace!
J’emprunte cette injonction musclée à l’affiche du Critérium Sauvage des Cascades qui roule ma poule ce dimanche 19 septembre 2010. J’aime la rue des Cascades. J’y ai déjà glané des graffiti que j’ai collé sur mon post du 4 novembre 2007 : Calaveras.
Ses habitants y suspendent des chaises dans le ciel.
On y croise des artistes, des petites filles qui s’appellent Violette et des garçons qui vont au pain en souriant comme Razibus Zouzou, le pote à Bibi (Fricotin).
Les soirs d’été je vais y boire des coups à La Fontaine d’Henri IV, micro-troquet posé comme une fleur au pied des escaliers de la venelle Fernand Reynaud.
J’y donne des RDV à mes fidèles lecteurs car Bellevill’Montant est un vivier d’Animuliens bien informés.
Parmi ceux-ci, un dénommé Eric, le découvreur de l’œuvre de Hassan, le fameux inconnu échoué à Barcelone «avec l’Afrique dans sa tête».
Eric pousse un peu ma théière pour étaler, sur le guéridon du café, les panneaux de bois tracés à la règle et subtilement colorés que je vous montre à mon tour. Choc positif. Emue comme me voilà, j’envoie planer d’un geste maladroit l’i-phone d’Eric sur le trottoir.
«On rentre pas dans son monde» me disait-il à propos d’Hassan. Machiniste de théâtre de son métier, Eric n’a pas l’habitude de garder ses yeux dans sa poche. Il dispose de la bienveillance nécessaire à l’approche des plus farouches créateurs de rue. Même si, comme Hassan, ils paraissent «très perdus dans l’alcool et les joints». Loin de ses Cascades, Eric a donc zoomé, un jour de vacances, sur ce jeune garçon sénégalais recroquevillé le long d’une palissade de la capitale barcelonaise.
Il avait aperçu les dessins sur planchettes de caisses à vin dispersées près du jeune homme. L’auteur de ces dessins, d’une inspiration géométrique qu’on peut seulement rapprocher de celle d’Hélène Reimann,
Collection abcd
affectionne les encoignures, la proximité des poubelles, les lieux sévèrement taggués, l’ombre mitée.
Il en a fallu à Eric de la patience pour parvenir à rencontrer son regard!
Le paradoxe est que ce créateur homeless, qui s’accommode de l’inconfort le plus total et qui vit dans le dénuement, ne semble rêver qu’à du mobilier fonctionnel et à des maisons à toits plats à la déco en damier.
Bauhaus du pauvre sur lequel un grand oiseau semble vouloir se percher.
Des outils aussi, qui font écho au petit matériel qu’Hassan transporte dans une toile roulée et qu’il déballe sur le trottoir pour travailler : crayons de charpentier, marteaux, pieds à coulisse.
Humble matos avec lequel ce designer du type «clochard céleste» sertit élégamment (souvenir de quelle forge de village?) l’émouvant petit poinçon en cuivre qui lui sert de marque de fabrique ou de signature.
23:55 Publié dans Ailleurs, Glanures, Images | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : art brut, rue des cascades, hassan le designer brut, barcelone, hélène reimann | | Imprimer | | |
11.09.2010
Corps accords dans la rue Haute
Corps accords, nouvelle expo de l’art & marges musée. J’y étais. Je dis pas ça pour vous faire bisquer : vous avez jusqu’à la Saint Sylvestre 2010 pour la visiter. Elle est très tendance. En plein les pieds dans le plat dans le débat contemporain sur l’art brut qui monte en mayonnaise au fur et à mesure qu’approche l’ouverture du musée d’art brut de Villeneuve d’Ascq. Non pas tant par son titre qui rappelle celui de l’expo abcd au Pavillon des Arts à Paris en 2004 (A Corps perdu). Ni par sa thématique «ancestrale»: dévoilement et exploration du corps. Mais par son parti pris de regrouper des œuvres d’artistes siders (out et in) comme si c’était du même tabac. Tout pour me défriser quoi! Comme si la pluie bruxelloisse ne s’y était pas déjà employée. Mais allez ronchonner quand tout le monde est gentil avec vous ! Quand Madame Carine Fol herself vous dit, non pas 2, mais septante, mais nonante mots. Quand des verres de jus d’orange vous tendent les bras. Quand des têtes connues vous font la bise : Gaëla Fernandez, par exemple. Elle entame le lendemain un pas de danse avec le Mad musée de Liège.
Ambiance empreinte de cette aimable bonhomie que nos amis belges savent mettre dans les vernissages. Pour une fois, les Français présents dans l’assistance en oubliaient de se tirer la bourre.
J’ai taillé une bavette avec Stéphanie et Loïc Lucas dont les couleurs chatoient sur les rabats du beau catalogue de l’expo.
Je venais d’user mes Converse à remonter la Chaussée de Waterloo jusqu’à la porte de Hal. La rue Haute montrait ses cicatrices comme ces nouvelles poupées colorées de Michel Nedjar où il inclut des objets, à la façon de Judith Scott.
Et c’était beau. Mais à 18h15, c’était la foule au 312-314. Pas fastoche de se faire une idée sur l’accrochage. Alors j’ai nagé de salle en salle, à chaque fois portée par une valeur sûre : Michel Nedjar, Lubos Plny, Loïc Lucas, à laquelle se greffe plus ou moins bien une œuvre autodidacte moins assurée (je ne parle pas de Marilena Pelosi qui tire son épingle du jeu).
De l’une à l’autre on a l’impression qu’on a sollicité je ne sais quel transfert de substance. Un peu comme si on demandait à une grosse cylindrée de prêter ses teuf-teuf à une mobylette et qu’en retour celle-ci soit invitée à se la jouer gros-cube. Mais il n’y à rien à gagner, à convoquer le fauvisme à propos des travaux de Dominique Bottemanne alors que ses linogravures (peut-être plus discrètes) paraissent plus mystérieuses que ses tableaux.
Pouf, pouf ! Tout cela pour dire que l’exposition nous mène en douceur vers son point d’orgue : un triptyque de gravures de Louise Bourgeois !!! Pas mal choisi certes : dans ces meilleurs moments l’art contemporain qui n’est pas-idiot se donne des faux-airs d’art brut. Est-ce que par cette pratique confusante on espère un peu naïvement que les «petits» vont jouer dans la cour des «grands» ?
Je me le demande.
Au moment où je mets en ligne, je tombe sur l’édito d’André Rouillé sur Paris Art n° 325 (9 sept. 2010) qui dissipe un peu ma perplexité.
Lisez-le-me-le à tête reposée, imprimez-le, conservez-le dans une liseuse en maroquin du Cap. C’est ce que j’ai lu de plus lucide ces temps derniers.
12:41 Publié dans De vous zamoi, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, art & marge musée, loïc lucas, mad musée, michel nedjar, lubos plny, marilena pelosi, dominique bottemanne, louise bourgeois, andré rouillé | | Imprimer | | |
08.09.2010
Dialogues sans marges à Pecs
«Cinq églises», vous vous demandez bien comme ça se dit en hongrois. Et bien ça se dit Pécs. Si je vous bassine avec cette ville qui est une des plus grandes de Hongrie, ce n’est pas parce qu’elle vient d’être bombardée «capitale européenne de la culture». C’est parce que du 18 septembre au 19 octobre 2010 s’y tiendra l’exposition Dialogues sans marges.
Et que cette expo m’intéresse parce qu’elle puise dans la Collection artistique de l’hosto psy de Pécs dont je crois bien vous avoir déjà soufflé deux mots dans une de mes précédentes causeries scientifico-loufoque intitulée Vu de Budapest : l’art brut hongrois et autrichien (6 octobre 2008).
A propos notamment du bouquin d’Irène Jakab (1956).
Comme je suis déjà pas en avance, que je dois prendre un train aux aurores demain et que je dois fermer mes zolis z’yeux avant 2 h du mat, sinon j’aurai des valises dessous, je n’ai aucun scrupule à vous recommander de faire un détour par le site WBI (Wallonie Bruxelles International) qui vous expliquera tout sur cette expo soutenue par la Cocof (du diable si je sais ce ke c ke ça) et commissariarisée par Julia Fabenyi et Carine Fol, directrice, comme vous le savez, du Art & Marges Musée (je vous passe les parenthèses). Vous verrez que cette expo, éprise d’«universalité», vise à instaurer le dialogue entre les œuvres pécsiennes et celles du musée bruxellois. Elle sera abritée par le Müvészetek és Irodalom Haza (grosso modo : Maison de l’Art et de la Littérature) situé en plein centre de Pécs.
Un Musée Janus Pannonius (ethnographie et arts appliqués si j’ai bien compris) apporte sa collaboration à l’affaire. La honte que j’ai eu quand j’ai vu sur Wiki que ce Janus était un maous-poète de la Renaissance et même qu'il tutoyait sa petite âme à lui :
Ô mon âme dont la lumière a pris source en la Voie lactée,
Captive te voici des bas-fonds de mon corps.
Je n'ai reproche à te faire, ô clarté fidèle et vaillante,
Tu scintilles si fière en ta sérénité...
Je n’en avais jamais entendu parler. Faut vraiment que je me mette au Hongrois Pour Les Nulles.
23:56 Publié dans Ailleurs, Expos | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : art brut, art & marge musée, irène jakab, janus pannonius | | Imprimer | | |
05.09.2010
Cinq ans aussi, Tonnerre de Berst!
C’est la cata ! Y’a pas que moi qu’ait 5 ans, la Galerie Berst aussi ! Comme chaque année, à la rentrée, ce sympathique établissement est pris d’une frénésie d’expos, d’inaugurations, de communications en feu roulant. Mais là, attention, c’est spécial. C’est du «vraiment H.L.N.», H.L.N. voulant dire Hors Les normes, pour ceux qui ne parlent pas encore couramment le berstien.
Votre petite âme errante vous dirait bien que ça déménage et elle aurait raison. Christian Berst brandit son étendard sur lequel est écrit : «Vive le Marais!». Suivi de sa vaillante équipe, il se propulse dans le quartier des Enragés, sur le territoire de cette section des Gravilliers qui fit parler d’elle pendant la Révolution française. Bon, on n'est plus au XVIIIe siècle mais après la Bastille, «l’enragé» Christian s’agrandit et atterrit, emporté par son élan, dans le passage des Gravilliers (n° 3-5) pour y propager la flamme de l’art brut.
L’année dernière sa galerie changeait de nom, cette année elle change d’adresse pour rejoindre ce cœur du cœur de Paris où on accède par une rue qui sent bon : la rue Chapon.
Comment a-t-il fait, Christian Berst, pour opérer ce changement en un seul été? Je ne le sais, ayant été tremper pendant ce temps là mes petits pieds dans un lac jurassien.
Toujours est-il qu’il a trouvé moyen au mois d’août de repeindre, bricoler, staffer, restructurer, enrichir, faire rutiler son site internet. Et de planter, faire pousser, éclore une newsletter gaie comme un ruban de distribution des prix,
une invitation (avec un visuel poilu de Guo Fengyi) à son prochain spectacle du jeudi 16 septembreu 2010, (il y aura des musicos), un dossier de presse surtitré «Art brut à Beaubourg»! car il faut dire que la nouvelle galerie n’est pas loin du Centre Pompom.
19:36 Publié dans Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, galerie christian berst, guo fengyi, giovanni bosco, anna zemankova, joseph barbiero | | Imprimer | | |
03.09.2010
Animula : une valeur sûre depuis 5 ans !
Ne pas oublier… que ça fait 5 ans déjà que votre petite âme errante fait profiter le ouaibe de son jus de cervelle. Donc inscrire dans la partie en pointillés de ce rouge pense-bête, inspiré d’une gravure du XVIIe, la mention Anniversaire d’Animula en jolis caractères de civilité si possible.
J’emprunte au Tampographe Sardon ce «très utile» support mnémotechnique que me signale ma copine Sophie avec des gloussements de plaisir dans le clavier : «un truc sommes-toutes (sic) assez rafraîchissant même si c’est très mauvais goût».
Et d’une impertinence très lucide, ajouterais-je (faut toujours que j’ajoute) comme toute la production originale de ce fabricant de tampons qui s’achète à boire avec les sous quand il en vend.
Sophie me signale «une affection» particulière pour «Maman Brigitte», un tampon «dans une splendide boîte faite à la main» visible sur le site du Tampographe Sardon en compagnie de quantité d’autres que j’ai collés sous le nez de mon chéri et de mon daddy, dès fois qu’ils veuillent me faire un cadeau pour me récompenser des 600 posts et des que j’ai collés sur mon blogounet depuis septembre 2005.
Moi, bien sûr, j’ai un faible pour la Boîte «Usage de faux Dubuffet» et je déteste pas non plus le Coffret Posada.
Je kiffe grave aussi «LE MAIL-ART C’EST DE LA MERDE» et le coffret «Tampons vulgaires».
Ainsi que le resplendissant : «J’EN AI RIEN A FOUTRE» que j’utiliserais volontiers comme ornement frontal de certaine caboche prétendument subtile.
Le Tampographe, au mois d’octobre 2010, sera l’invité (pour une journée seulement) du Centre Pompidou (des sous!) pour un impromptu (relututu) durant lequel ses maudits tampons seront mis gratuitement à la dispo du public. En attendant il reçoit en son atelier. Son jour c’est le vendredi de 15 h à 19 h, si j’ai bien compris. Son affiche est sérigraphiée par Le Dernier Cri et «la grande dessinatrice Caroline Sury a fait quatre magnifiques tampons» pour lui. C’est pour moi une référence
23:55 Publié dans Blogosphère, De vous zamoi, Images, Jeux et ris | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : le tampographe sardon, caroline sury | | Imprimer | | |
31.08.2010
Martha Grünenwaldt : une expo et un livre
Epouvantail de potager, têtes de fous dans une église. A peine si j’ai le temps de ranger mes clichés de vacances dans ma photothèque que ça repart à fond la caisse.
L’épouvantail à nez de Pinocchio et visage de quille en bois, c’est en me dirigeant vers la forêt de Chaux que je l’ai aperçu, veillant à la sécurité d’un carré de tomates.
J’allais visiter les baraques de forestiers du village de La Vieille-Loye dans le Jura qui ont mis les clés sous la porte vers 1935 (maintenant c’est un mini-éco-musée).
Plutôt pêchu, le guignol avec sa capuche de sac à grains!
Les têtes de fous ce sont les sculptures qui courent, non loin de là, sur les corniches intérieures de l’église de Chissey-sur-Loue.
Vous voyez la Saline d’Arc-et-Senans de Claude-Nicolas Ledoux? Et bien, vous pouvez pas vous tromper, Chissey c’est -vu d’avion- «un triangle tendant vers l’ovale» à côté sur la gauche. Je chipe ces lignes à la monographie de Pierre Lacroix (sic) qu’on se procure en glissant 4 € dans le tronc. L’auteur qui signe : «Conservateur départemental des objets d’art du Jura» est aussi un curé, ce qui explique qu’il fasse un peu la fine bouche à propos de ces «babouins» (comme on dit dans le coin) : environ une trentaine de visages éblouis, clos, hagards, lisses, innocents, idiots, bestiaux, ravagés, coiffés des grelots dont l’étrangeté dispute la vedette au bon Dieu.
En cette église Saint-Christophe où une mâchoire du patron des chauffards trône sur un autel, on guérissait les malades mentaux à grands renforts de neuvaines et d’exorcismes au moyen-âge. Ces sculptures, parfois doubles (la schize?)
constituent un formidable document sur cette période et sur un pèlerinage thérapeutique que les autorités regardèrent de travers dès 1578.
La tête encore à l’ouest après une traversée de la France en diagonale et un ouikène rillettes et fouaces dans le Maine-et-Loire, qu’est-ce que j’apprends? Mais que l’expo Martha Grünenwaldt qui sera accrochée demain à la Halle Saint-Pierre de Paris (où votre petite âme errante est de retour) et vernie après-demain 2 septembre 2010 sera accompagnée d’un ouvrage consacré à cette «grande dame de l’art brut» comme dit le carton d’invitation.
Elles sont rares les publications au sujet de cette femme qui fut domestique comme Séraphine et qui trouva comme elle la force de satisfaire son désir de création malgré les injustes contraintes (sa patronne lui interdisait de jouer du violon). Aussi celle- ci mérite-t-elle d’entrer dans vos intérieurs, chers Animuliens même si ce n’est pas exactement un «coffee table book». Dans cette plaquette, vous plongerez direct dans le regard de Martha. Vous y trouverez plusieurs clichés la montrant au travail et quantité de repros couleurs de ses dessins, peut-être pas sublimement maquettées mais ayant le mérite d’exister.
Quant aux textes, le plat de résistance sort tout chaud du cerveau d’Alain Bouillet et l’entrée de celui de Carine Fol qui nous rappelle que la découverte des œuvres de M. G. est due à des personnes proches d’Art en Marge. Bon, j’ai pas eu le temps de les lire mais l’expo ne durant que jusqu’au 28 septembre 2010, j’ai préféré me grouiller pour sonner l’alerte. En tête de ce petit livre, des souvenirs de Josine Marchal, la fille de Martha, précieux pour la précision de certains détails : «Elle traçait des schémas de visages qu’elle laissait de côté pour les achever plus tard».
23:55 Publié dans Expos, In memoriam, Miscellanées | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art brut, martha grünenwaldt, halle st pierre, "babouins", épouvantails, alain bouillet, carine fol, art en marge | | Imprimer | | |
22.08.2010
Nous, ceux de la parole toujours en marche
Impossible de quitter Lausanne sans vous expédier les cartes postales Giovanni Bosco proposées à l’accueil de la Collection de l’Art brut. Les deux premières qui représentent des œuvres feutrales sur papier ou vulgarus cartonus ont été photographiées par Arnaud Conne.
La troisième est un cliché de Lucienne Peiry herself d’après une peinture murale à Castellammare del Golfo en Sicile, patria du créateur-fétiche d’Animula Vagula.
Ces C.P. émanent de l’Associazione Outsider Art Giovanni Bosco et de la Collec de l’Art brut de Lausanne réunies.
Elles vous parviennent au moment où ça bouge en Italie du côté de ce peintre qui reste la plus belle découverte récente en matière d’art brut. Son travail «extraordinaire» figurera en compagnie de ceux de 5 autres créateurs «hors normes» dans une expo collective à Gênes du 3 septembre au 3 octobre 2010. Si j’en crois le carton d’invitation au vernissage du vendredi 3 septembre qui a privilégié une tête-cœur graffitée par Bosco, c’est l’œuvre de celui-ci qui fait office (ça ne m’étonne pas) de locomotive à cette exposition qui se tiendra au Musée-Théâtre de la Commenda di Pré.
Joli nom pour un lieu destiné à recevoir voyageurs, pélerins et pélerines. Un lieu ouvert «pour relier peuples et cultures». Bravo aux Gênois et à la province de Gênes, bravo à la région ligure qui défend de telles valeurs un peu méprisées de notre côté des Alpes. Nous, ceux de la parole toujours en marche, titre de l’exposition, sonne pour nous Français comme une agréable manifestation de tolérance envers l’errance expressive en cet été 2010 synonyme d’imbécile ostracisme d’état.
Ce titre rappelle à mon daddy ces Voix d’en bas, une anthologie de poètes-ouvriers du XIX ème siècle, concoctée en des temps héroïques (1979) par Edmond Thomas, éditeurfan de typographie bien propre sur elle.
C’est pas idiot, sauf que là c’est plutôt le sous-commandant Marcos qui a donné le titre de l’expo gênoise faisant un clin d’œil (pas facile avc un passe-montagne) à une petite poésie de l’anti-leader mexicain : «Nous les sans voix, nous les sans visage».
Evitez de vous couvrir la figure mais passez les frontières, animuliens suisses, français et autres de passage dans la botte pour vous rendre à cette expo où Giovanni Bosco est en bonne compagnie. Notamment celle de Oreste Fernando Nannetti, champion de la boucle de ceinturon dont mon ravissant petit blogue vous a déjà parlé le 15 novembre 2009.
Les autres participants, dont Melina Riccio,
je les connais pas plus que ça, donc le mieux c’est d’aller faire un tour sur le dossier de presse de l’expo. Vous y verrez que Noi, quelli della parola che sempre càmmina a pour commissaire un danseur du nom de Gustavo Giacosa, épris de scénographie-installation et d’écritures anonymes.
17:00 Publié dans Ailleurs, Expos, Images | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, giovanni bosco, collection de l'art brut, oreste fernando nannetti, melina riccio, gustavo giacosa, edmond thomas, editions plein champ | | Imprimer | | |
17.08.2010
Ataa Oko à tombeaux ouverts
C’est le tombeau ouvert de l’affiche pour l’expo Fabuleux cercueils du Ghana et d’Angleterre qui m’a séduite. La mort en Rolls Royce sortie des mains d’un menuisier africain, ça vous a un look d’enfer, même s’il faut aller à Besançon (Doubs).
Hélas, cette bonne ville franc-comtoise la joue plutôt dur pour l’automobiliste de passage. Le voyageur sur 4 roues est impitoyablement craché vers l’extérieur. Quand au parking en plein air, point de départ vers la Citadelle où l’expo se tient, il faut de la patience pour y trouver place. Le bus-navette pour le sommet est gratuit mais le billet pour la visite est global de chez global!
Comme elle n’avait pas envie de se farcir les fortifs de Vauban en bonus, l’Auvergnate que je suis a refusé de casquer les 10 euros et 25 cents réclamés par la fonctionnaire du tourisme local. Je me suis contentée de la vidéo et des images du dossier de presse mais vous n’êtes pas obligés de faire pareil : l’expo dure jusqu’au 4 septembre 2010. Avis aux cyclotouristes!
De rage, j’ai mis le cap sur Lausanne pour voir l’expo Ataa Oko (nettement plus facile de parquer et seulement 7,50 euros l’entrée).
Non sans me perdre auparavant dans des dédales de petites routes plus ou moins montagneuses où l’on croise parfois (près de Lons-le-Saunier) de timides tentatives artistico-rurales des bûcheurs de la région
ou des musées du jouet (à Moirans-en-Montagne) avec des transistors Philips bricolés par de petits Africains qui rêvent de technologies nouvelles.
Même si ses réalisations sont beaucoup plus impressionnantes, le Ghanéen Oko Addo (il signe ainsi) est le grand frère de ces autodidactes en herbe. Le grand frère ou l’arrière grand-père car, si ça ne fait que 7 ans qu’il est tombé dans le dessin, il a tout de même 90 ans d’âge.
Créateur de cercueils figuratifs personnalisés depuis 1945 (année d’invention de l’art brut), ses volailles pour l’au-delà sont de merveilleux jouets pour les défunts et leurs familles.
J’aurais pu vous en parler plus tôt mais puisque l’expo de ses œuvres à la Collection de l’Art brut est prolongée jusqu’au 30 janvier 2011, un p’tit rappel peut pas faire de mal.
Ataa Oko a ceci de particulier qu’il est passé d’une activité artisanale étroitement dépendante de la commande à un univers plus personnel où les emblèmes des autres ont fait place aux signes de son «commerce» intime avec les esprits.
Du moins est-ce ainsi que l’expo et le chouette album qui l’accompagne nous présentent la chose. Mais on peut se demander si le désir de l’ethnographe qui a encouragé Ataa Oko à dessiner, alors qu’il était inactif et à la retraite, n’a pas simplement pris le relais de l’ancienne demande collective, joyeuse et funèbre.
Peut-être bien qu’il en subsiste quelque chose dans ces excès de montres et de métamorphoses qui font certes l’attrait de la production récente de l’ex-menuisier-artiste mais qui ont l’air un peu sur-jouées en face de l’innocente fraîcheur des dessins où il se souvient de ses cercueils d’autrefois
13:02 Publié dans Ailleurs, Expos | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : ataa oko, collection de l'art brut, fabuleux cercueils, besançon, ghana | | Imprimer | | |
11.08.2010
Ne manquez pas Bonaria Manca!
Ne manquez pas Bonaria Manca! Carte postale de Roberta Trapani qui butine le miel d’Aubagne. A tous les Animuliens non tout à fait absorbés par le bar de la plage, elle adresse ce beau portrait de Bonaria récemment pris dans la maison du peintre à Tuscania, dans le Latium.
C’est en 1951 que Bonaria Manca s’est installée sur cette terre étrusque. Un drame familial et la nécessité d’éviter une vendetta l’ayant arrachée dès 1948 (elle avait alors 23 ans) à son pays natal : Orure en Sardaigne. Née dans une famille de bergers, Bonaria menait la vie des siens, gardant le troupeau, fabriquant les fromages, filant, tissant, aidant sa mère à élever les petits frères. Elle s’est mariée tard et n’a pas eu d’enfants. C’est à 55 ans qu’elle a ressenti le besoin de s’exprimer de façon artistique, chantant l’amour de la campagne et peignant la vie des bergers.
Roberta Trapani qui a eu carte blanche pour l’accrochage de ses tableaux au Festival aubagnais vous racontera ça mieux que moi : “Elle utilise d’abord la broderie et les travaux d’aiguille pour se fabriquer des vêtements, en se libérant peu à peu des formes d’expression traditionnelles sardes. Les images qui apparaissent dans ces travaux minutieux de broderies sont ensuite transposées dans la peinture : d’abord sur des toiles, puis, les toiles venant à manquer, sur des murs.(…) Peu à peu toute la maison se couvrira de fresques murales donnant forme à ses souvenirs et à ses visions ».
Je reprends la parole et quitte à regret mon rhum-coca pour vous signaler que c’est cette partie in situ de l’œuvre de Madame Manca qui me paraît la plus intéressante mais vous êtes pas obligés de me croire. Mario del Curto a photographié l’intérieur de la maison de Tuscania en avril 2010. Certains de ces clichés sont présentés à Aubagne, en compagnie d’un documentaire de Marie Fanulicki à propos de Bonaria Manca («pas un film sur elle mais avec elle»).
© Stella Production
Bonaria volontiers paie de sa personne. Au vernissage d’Aubagne, elle était là et elle a chanté.
Roberta Trapani nous rappelle que des œuvres de Manca ont figuré dans une expo de 1999 au Musée de Stadshof de Zwolle en Hollande et que le Museum Dr Guislain en Belgique possède 3 œuvres de cette créatrice.
«J’envisage (nous dit Roberta) de diriger la rédaction d’un petit ouvrage consacré à l’œuvre de Bonaria Manca. Ce livre, dont les textes seront en français, anglais et italien, permettra de mettre en valeur et diffuser son œuvre extraordinaire -qui reste largement méconnue en Italie et ailleurs- même si certains médias (journaux, télévision) se sont parfois amusés de son personnage pittoresque de «pastora pittrice».
23:55 Publié dans Expos, Images | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art brut, bonaria manca, roberta trapani, aubagne | | Imprimer | | |
05.08.2010
Sous les volcans, les Aoûtsiders
Pouchkine à Strasbourg, Doisneau à Chalon, Sefolosha sous les volcans. Aux quatre vents des vacances, quelques expos à signaler pour les dispersé(e)s de l’été.
Pouchkine, je vous en parle pas. C’est un peu loin de mon sujet. Quoique. Cela fait un moment que ça me démange de vous montrer les fantômatiques illustrations de Marie Egoroff qui ornent une édition du poème Rouslane et Ludmila (traduit du russe par Véra Starkoff) paru en 1898 à la Librairie de l’Art indépendant.
Je les trouve tellement curieuses que j’ai fait réparer mon exemplaire qui était en loques par un relieur. Je profite de l’occasion qui m’est offerte par le BNU de Stras pour vous les mettre sous le nez.
La Bibliothèque Nationale et Universitaire de Strasbourg présente en effet jusqu’au 19 septembre 2010 une expo consacrée au grand écrivain russe, dans le cadre de l’année France-Russie. Elle présente un vaste panorama d’œuvres illustrées. J’ignore si les images de Marie Egoroff y figurent mais avouez qu’elles le mériteraient.
Sur Marie Egoroff, on a beau fureter, on trouve rien mais mon petit animulidoigt me dit qu’elle devait être bien frottée de médiumnité.
Au Musée Nicéphore Niepce et jusqu’au 19 septembre 2010 aussi, Robert Doisneau, Les tatouages du milieu, ça plaît toujours. Et c’est réalisé avec le soutien de l’Atelier R.D. et du Centre National des Arts Plastiques.
Une chapelle sous les volcans, c’est Marmontel qu’elle s’appelle. Curieux pour une chapelle ce nom de pote à Voltaire. Mais enfin c’est à Mauriac (rien à voir avec François) dans le Cantal (15200) où sont les bons fromages.
L’expo qui s’y déroule jusqu’au 5 septembre 2010 s’intitule Outsiders. Comme ce n’est pas très original, la P.Q.R. a déjà baptisé les artistes qui y figurent : «aoûtsiders». Comme je suis bon public, je trouve ça rigolo. Le flyer (qui joue le mystère du noir) reproduit une œuvre du sculpteur Jean-Yves Gosti.
Parmi les noms des 15 participants, j’ai noté vite fait 3 artistes présentés par le Musée de l’Art en Marche : Carles-Tolra, Kurt J. Haas, François Montchâtre et un Michel Nedjar par la Galerie Susi Brunner. Je ne saurais (comme disent les Belges) citer tout le monde mais sachez qu’il y a aussi Joël Lorand dont je vous ai déjà parlé un peu et Christine Sefolosha (cha, cha, cha!) qui vaut le détour.
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