22.05.2014
MOMENTUM! MOMENTUM!
16:13 Publié dans Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : michel nedjar, galerie christian berst | | Imprimer | | |
21.05.2014
Rencontre d’esprits
21:16 Publié dans De vous zamoi | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jacques rigaut, eijiro miyama | | Imprimer | | |
20.05.2014
Les bons plans d’Anglefort
Si j’attendais pas le plombier ce jour là, vous savez où je voudrais être jeudi 22 mai 2014 sur le coup de 17h30 ? Ici : galerie du marche.ch
Il faut savoir reconnaître des images stimulantes pour la curiosité et celles d’Anglefort le sont. Même si, à première vue, les compositions des maîtres du grouillement que sont Henri Cueco et Antonio Segui ont tendance à venir nous sauter dans la mémoire en face de ces plans multiplement colorés, compartimentés mais libres, légendés mais non bavards, peut-être ludiques, plus vraisemblablement soumis à une ordonnance rigoureuse et sous-jacente de la pensée.
Mon petit cerveau est ainsi fait qu’il me présente d’abord des références culturelles (pas parmi les pires, notez le). Mais à bien regarder c’est un vague-à-l’errance qui m’emporte plutôt à suivre Yves d’Anglefort dans ses dédales animés de créatures si personnellement anguleuses.
De ce créateur encore indemne de légende, Jean-David Mermod, le boss de la Galerie du Marché, nous apprend deux choses contradictoires. Qu’Anglefort vînt un jour «frapper à la porte» de sa Maison. Qu’il «remplit ses dessins de codes personnels qu’il refuse souvent d’expliquer par superstition».
Bon! «Pourvou que ça doure» comme disait la maman de Napoléon. Fasse qu’Anglefort se tienne dans cette position entre deux chaises! La chaise du versant social et celle du repli farouche sur le quant à soi. Tel quel, dans son ambiguïté, il illustre une idée qui me trotte dans la tête.
l’art brut n’est pas une case c’est l’envers du miroir aux alouettes
J’illustre cette note avec les moyens du bord des visuels disponibles sur le Marché. Outre une petite bio qui permet d’en savoir davantage sur Yves d’Anglefort, on trouve sur le site de la galerie mermodique une quinzaine d’autres images reproduisant les œuvres de celui-ci.
17:36 Publié dans Ailleurs, art brut, De vous zamoi, Expos, Ogni pensiero vola | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : yves d’anglefort, jean-david mermod, galerie du marché | | Imprimer | | |
16.05.2014
O(U)AF ! O(U)AF ! WAO ! WAO !
Marre. J’en ai marre des choses qui reviennent chaque année comme les feuilles d’impôt dans les boîtes à lettres. Raison pour laquelle je vous ai pas parlé de l’Outsider Art Fair de New York qui s’est tenue du 8 au 11 mai 2014.
Ouaf, ouaf ! Excusez le mouvement d’humeur. A force ça m’use le tempérament ces rendez-vous obligatoires. Et ça finit par enfermer l’art brut dans une case conventionnelle où il s’étiole. D’où mon silence. C’était compter sans les bonnes volontés de mes reporters. L’un d’eux m’envoie des images de la cérémonie rituelle que je vous restitue sans trop trier.
Notre Sylvain Corentin chez Cavin Morris. Ces élégances de brindilles emplâtrées ne sont pas sans me faire souvenir des bois de séverine qu’un certain Chomo tressait dans la forêt de Fontainebleau.
Verbena sur le même stand : toujours bon à prendre.
Sefoloscha chez Judy Saslow.
Et un petit jeune du nom de Nedjar chez la même.
J’arrête parce que ça ressemble trop à l’année dernière (cf. mon post Ça gaze à l’OAF du 8 février 2013). Mon honorable correspondant a ses petites préférences. Mais même quand je m’abreuve à d’autres sources, le sentiment de déjà-vu n’est pas rare. Difficile d’ouvrir les fenêtres. On a l’impression que ça tourne en rond. Le fourmillement de l’art brut est menacé par la rationalisation. Tout se passe comme si le marché se satisfaisait d’une certaine restriction au niveau des créateurs. But de la manœuvre : imposer quelques noms souvent répétés dans l’esprit du public de façon à ne pas excéder les capacités de stockage de celui-ci. Stratégie basée sur quelques réelles pointures : Darger, Ramirez, Deeds (Electric Pencil).
Et maintenant Marcel Storr dont on apprend qu’il a rejoint l’écurie d’Andrew Edlin, créateur de Wide Open Arts, la Société propriétaire de l’Outsider Art Fair. W(h)oa! A ce propos, MDR je suis quand Art actuel, le magazine des arts contemporains m’apprend que «la Galerie Andrew Edlin est très fière d’annoncer qu’elle est devenue la toute première à représenter les œuvres» de cet «artiste (sic) français autodidacte» qui n’a, bien entendu, jamais souhaité vendre quoi que ce soit de son vivant.
L’Andrew Edlin Galery projette une exposition Storr en septembre 2014. Celle du Pavillon Carré de Baudouin à Paris (France) dont j’ai rendu compte le 24 février 2012 (Storr j’adore!) n’aurait elle donc servi qu’à stimuler des appétits américains ? On peut se le demander. L’avenir dira si Mr Edlin renouvellera, grâce aux découvreurs de Marcel Storr, l’opération commerciale si bien montée avec Nathan et Kiyoko Lerner, les découvreurs de Henry Darger.
Il faut simplement avoir conscience que chaque fois qu’on parlera maintenant de Marcel Storr, cela équivaudra (du fait de cette exclusivité) à mettre deux thunes dans le bastringue du marchand new yorkais. Ce qui n’est pas à priori déconseillé, ouaf, ouaf, wao, wao.
BONUS 1 : Un autre Animulien nous envoie ce lien avec d'autres photos de l'édition 2014 de O(U)AF
BONUS 2 : la réaction d'un lecteur épris d'anonymat et de points sur les i.
Ça commence très fort.
Cliquer pour lire la suite
20:39 Publié dans Ailleurs, art brut, De vous zamoi | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : oaf 2014, outsider art fair | | Imprimer | | |
13.05.2014
Crimes et châtiments : Zoom sur Zoummeroff
Le hasard veut qu’au moment où paraît Subjectivité et vérité, le cours de Michel Foucault au Collège de France en 1980-1981, la Bibliothèque Philippe Zoummeroff passe en vente à l’Hôtel Drouot. Du moins sa partie consacrée aux Crimes et châtiments.
Un fort documenté catalogue dostoïevskien, décrivant 423 numéros, accompagnera cette vacation du vendredi 16 mai. Des bouquins, des manuscrits, des photos, des dessins, et même des objets curieux, tel un meuble à système contenant un trombinoscope criminel.
Ils méritent tous d’être estampillés «Surveiller et punir»! A la réserve peut-être du Capital de Karl Marx (n°353) dont on se demande ce qu’il fait là. Ce n’est pourtant pas l’œuvre de ce philosophe barbu qui fera problème. La Maison d’enchères Pierre Bergé & Associés a préféré en revanche retirer deux lots de la vente. L’un était une reliure à insertions de peau humaine (n°237). Celle de Louis-Marius Rambert (1903-1934).
Cet assassin repenti avait légué ses superbes tatouages à son médecin, le lyonnais Jean Lacassagne, auteur en 1934 d’un Album du Crocodile sur les Tatouages du «Milieu».
De semblables «prélèvements» seront montrés dans l’Exposition Tatoueurs, tatoués qui commence au Quai Branly mais la dimension commerciale change -on en conviendra- la donne.
Aussi Benoît Forgeot, l’un des experts de la vente, aurait-il tort de se désoler. C’est avec raison qu’il rappelle dans Le Monde du 9 mai 2014 que «cette collection n’a rien de fétichiste, elle est au contraire militante». Clarisse Fabre, auteur de l’article qui cite ces propos, précise : «Industriel à la retraite, Philippe Zoummeroff est un collectionneur engagé. Militant contre la surpopulation carcérale, il a créé une bourse pour la réinsertion des détenus».
Ceci dit, c’est étonnant que dans un corpus qui brasse les méfaits d’autant de grands sacripants (Landru, Dillinger, Bonnot, Marie Besnard, Dominici, Petiot, etc.), un corpus qui traite d’un tas d’horreurs historiques (tortures, massacres, sorcelleries, injustices), on n’enregistre pas de véritables dérapages.
Cela tient sans doute au choix rigoureux de l’iconographie du catalogue, toujours curieux, jamais complaisant. Vous m’avez comprise : il faut vous procurer cet ouvrage avant que l’étude soit en rupture de stock. Il deviendra vite collector.
Outre des infos sur des incunables du tatouage (les 12 photos de Robert Doisneau du n°245), il contient en effet bien des choses dignes de passionner des Animuliens addict aux dérivés de l’art brut.
Par exemple une flamboyante section de Dessins de prisonniers dont ceux d’Emile Simonet, dit Fanfan, chef d’une bande d’apaches dont le talent fut remarqué aussi par Jean Lacassagne.
Toutes ces merveilles, y compris la dernière (?) lettre et le dernier (?) dessin de Jean-Baptiste Troppmann (1849-1870) l’assassin de Pantin, sont visibles le jeudi 15 mai (11-18 h), salle 7.
Après, faudra sortir votre thune pour les avoir et les revoir. Mais ça, ce n’est pas interdit.
BONUS La photo de Rambert torse nu figurant dans la vente a été publiée en novembre 1932 dans le n°15 de la revue Paris Magazine. Elle illustrait un article de Roger Frédéric sur les Tatouages. Elle y est attribuée aux services du Docteur Locard, Directeur du Laboratoire de Police de Lyon.
19:39 Publié dans Encans, Images | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philippe zoummeroff, michel foucault, dessins de prisonniers, jean lacassagne, tatouages, tattoo, crimes et chatiments, tatoueurs tatoués | | Imprimer | | |
09.05.2014
Scottie Wilson à l’université
Au chapitre des re-découvertes, il faut signaler le début d’une exposition Scottie Wilsonnienne à Ottawa le 12 mai 2014. Hé oui, on vernit le lundi au Canada! Ce qu’on nous promet? Des «œuvres inédites» conservées dans les collections du pays. L’occasion, paradoxalement, pour les commissaires, Jill Carrick et Pauline Goutain de montrer là-bas comment le grand Scottie fut chouchouté en Europe par les surréalistes et Dubuffet.
Pauline Goutain, on la connaît bien. C’est un membre du CrAB. L’expo ottawouaise durera jusqu’au 7 septembre 2014. C’est dire que vous pourrez très bien la visiter pendant vos vacances d’été, surtout si vous êtes Québécois.
Elle se tient au Cuag (Carleton University Art Gallery). Cuag, c’est rigolo comme nom. Et c’est facile à stocker dans une mémoire. Même une mémoire de piaf comme la mienne.
16:13 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, scottie wilson, pauline goutain, jill carrick, ottawa | | Imprimer | | |
08.05.2014
Versailles : le Rose et le Noir
Encore Versailles. La poésie naturelle fleurit partout. Pourquoi pas à Versailles? A la mairie, par exemple : ce billet rose trouvé par un de mes émérites correspondants au guichet de l’Etat-civil. Un petit texte un peu sinistre rédigé d’une main légère, presque fantômatique.
Tombé de quel porte-cartes? Tout piqueté d’aiguille fine comme un talisman. «Bien sûr, ce n’est pas moi qui ai tenté de corriger l’orthographe des derniers mots dont le double sens m’enchante» souligne mon informateur.
C’est au verso d’un papillon officiel qui ne date pas d’hier que ce document autographe, digne de figurer dans mon reliquaire électronique, a été réalisé. J’espère qu’il vous plaira autant qu’il me plait, selon le souhait de l’Animulien sagace qui le découvrit
12:28 Publié dans De vous zamoi, Glanures, Ogni pensiero vola, Poésie naturelle | Lien permanent | Commentaires (0) | | Imprimer | | |
03.05.2014
Wireman : de Philadelphie à Montmartre
Au stade où j’en suis, une incursion en terre expositoire s’impose. Pas besoin d’aller loin.
L’aventure est au bout de la rue Ronsard, station Halle Saint-Pierre. J’interromps donc l’inventaire de ma garde robe d’été. Découdre les étiquettes qui grattent comme des petits paillassons m’a soudain rappelé les maillages en fil de fer de Philadelphia Wireman (L’Homme Fil de fer de Philadelphie).
Chacune sa tasse de thé, n’est-ce pas ? Et moi je mets du temps à digérer la mienne.
Cela fait certes un bail que j’ai visité l’exposition Raw Vision 25 ans d’art brut mais aujourd’hui ce qui me revient quand je pense à elle c’est la petite vitrine d’angle au premier étage qui contient les interloquantes sculptures de P.W.
C’est injuste, je sais, car il y a plein de choses plutôt choucardes à voir dans cette expo mais c’est ainsi. Faut toujours suivre ses intuitions. Et moi je vous invite à m’emboîter le pas. Il vous reste du temps pour ne pas rater ça.
Ça, ce sont des structures en brin d’acier torsadés, conçues pour garder captifs des morceaux d’objets hétérogènes. Verre, plastique, cuir, batteries, clous, lunettes, emballages alimentaires, baleines de parapluie, papier d’alu, jouets etc.
J’ai d’abord pensé aux fagottages de Jean Bordes (de la Fabuloserie) en voyant ces assemblages. La même dextérité à tirer partie des rebuts par ligature. Mais ces drôles d’œuvres sont moins figuratives, plus symboliques que ludiques. Mentales. Incantatoires en sourdine. Gonglomératoires. Les mécanismes fragiles et subtils d’une pensée qui ne l’est pas moins!
On ne sait rien du gus qui a fabriqué ces étranges pièges à rêves. Comme elles ont été trouvées en 1982 dans un quartier black en pleine rénovation et qu’il faut être costaud pour la torsion des câbles, on suppose qu’il s’agit d’un afro-américain du genre masculin.
Environ 1200 œuvres, datant sans doute des années 70 du 20e siècle. Empilées dans des sacs à ordures, dans l’attente des éboueurs, elle seraient parties à la poubelle si leur découvreur, un étudiant d’art qui traînait la nuit ne les avait repérées sur le trottoir.
La Halle Saint-Pierre en montre une poignée mais il y en a aussi au LaM.
L’étudiant les a mises à l’abri à la Fleisher-Ollman Gallery de Philadelphie qui les a fait tourner de par le monde.
Sous une élégance d’apparence très contemporaine, elles portent à des évocations diverses. On a parlé à leur propos de médecine amérindienne ou de fétichisme africain.
Fétiche africain Wireman
Mais leur pouvoir, leur énergie restent inexplicables et c’est très bien ainsi.
09:10 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | | Imprimer | | |
01.05.2014
Robinson : de l’hôpital au grand Pal
Courir à droite, courir à gauche. Mes basquettes qui prennent l’eau, mes courgettes qui en font trop.
No time at all pour poster. Je vais, je viens, je prends du retard.
A ce train là c’est les ménisques qui trinquent. L’art des malades du genou me guette! Pas croire pour autant que je délaisse l’art brut. En avril, je l’ai traqué comme le Snark de Lewis Carroll. Pas dans les lieux qui sont faits pour lui mais au cœur de cette citadelle parisienne de la culture qu’on appelle Salon International du Livre Ancien. Et si je l’ai manqué, on peut dire que je m’en suis approché de près.
Avec un mignon petit catalogue distribué sur le stand A30 par la Librairie Vignes. Il reproduit la goûteuse couverture des Histoires d’un vacher de Gaston Chaissac. Comme ce petit livre a été imprimée en 1952 à dose homéopathique, on ne la voit jamais jamais. Grâce à cette heureuse initiative, on se la met dans l’œil. Merci qui ? Merci Ani.
Et c’est pas fini. En B13 (le Grand Pal c’est un peu une bataille navale) la Librairie Godon était venue de Lille avec un délirant manuscrit illustré des années trente sous le bras.
J’ai longtemps tourné autour de la vitrine où il trônait, irrésistiblement attirée par ce grain de pure folie. Cette centaine de grandes pages traite de crise mondiale, de chômage, de sécurité, de guerre, d’Europe… tous plats que l’histoire nous resert obsessionnellement et qui constituent notre ordinaire de citoyens normaux.
L’auteur, qui se savait investi d’une mission, avait élaboré un projet pour sauver le monde, à partir de son centre : la France. Me touche le fait qu’il s’appelait Robinson car il fut en son genre un naufragé solitaire dont un romancier pourrait écrire l’histoire. Robinson voulait faire profiter de ses lumières le ministre des affaires étrangères. Mal lui en prend. Un gendarme du Quai d’Orsay l’expédie jusqu’au fond d’un hôpital psychiatrique du Nord.
Là, Robinson passe son temps à écrire qu’il n’est pas fou. Et il le fait avec une ampleur qui prouve artistiquement l’épanouissement de sa folie. Le manque de papier le fait souffrir tout autant que le manque de liberté. C’est qu’il se met la pression pour faire part de ses idées! Au service de celles-ci, il met son talent de dessinateur (un peu trop confirmé pour mon goût). Aux ressources de la caricature ou d’une aimable grivoiserie d’époque, il emprunte sans vergogne.
En homme semble-t-il habitué à la lecture d’une presse politique, satirique et coquine, typique de l’avant-guerre. A ce cadre de convention, il sait mêler son sens des relations entre les êtres et/ou les foules qu’il représente. Les méridiens du globe terrestre, les ratures en lasso, une chaîne au poignet, un lourd faisceau de câbles témoignent de ce système d’assujetissement.
18:37 Publié dans De vous zamoi, Images | Lien permanent | Commentaires (1) | | Imprimer | | |
10.04.2014
Préempter l’art brut
Dans la jungle de nos villes, le lion de l’État n’est jamais mort ce soir.
Non content de rugir des taux de TVA intimidants, il arrive qu’il ôte carrément de la bouche du collectionneur sa pauvre proie capturée en vente publique.
C’est ce qui est arrivé récemment lors de la Saison 3 d’une vacation Beaux-Arts à la Galerie rue Visconti.
Un de ces effrontés guépards qui courent derrière la moindre feuille volante qui passe, avait réussi à mettre la patte sur les Cinq petits inventeurs de la peinture.
Sans trop s’essoufler car les guépards, s’ils ont de l’appétit, manquent de thune sur la fin, c’est bien connu. Pour ce modeste papier plié en deux, notre infortuné enchérisseur avait pourtant de la réserve. C’est que ce tract-présentation d’une exposition lilloise de 1951 à la Librairie Marcel Evrard promettait la substantifique moëlle de Paul End (Paul Engrand),
Photo : Collection de l'art brut
Alcide, Liber, Gasduf (Gaston Duf),
Photo : Collection de l'art brut
Sylvocq (Sylvain Lecocq),
Photo : Collection de l'art brut
figures de l’art brut des origines, issus de l’Hosto Psy de Lommelet. De quoi saliver quand on a la fièvre acheteuse! Hélas, le coup de marteau fut suivi d’une claironnante «préemption» et notre guépard dut rentrer à la niche en maugréant.
Pour ceux qui l’ignorerait encore, la préemption est un droit régalien permettant à une collectivité publique, musée, archives (ou comme ici bibliothèque) d’acquérir en priorité un bien acquis aux enchères par un particulier. Rien à redire à ça puisque c’est la loi. Dura lex sed lex.
N’empêche qu’il n’est de loi qui ne s’applique avec doigté. Comme le dit Fabien Bouglé dans sa note sur Le Bon usage de la préemption parus dans Les Lois du marché sur le site de La Gazette de l’Hôtel Drouot : «En principe, la préemption, procédure exceptionnelle, n’est possible que pour les biens représentant pour la collectivité un intérêt majeur. (…). Si le bien est plus commun, l’État ou les collectivités publiques réaliseront leur achat comme un acheteur ordinaire, en entrant dans le jeu naturel des enchères».
Les amoureux de l’art brut seront ravis de constater que les Cinq petits inventeurs qui montèrent le samedi 5 avril 2014 jusqu’à la somme astronomique de 110 € (cent dix malheureux euros, vous avez bien lu !) furent considérés par la Bibliothèque Kandinsky, le préempteur, comme un bien d’un intérêt majeur. Même si le texte de Jean Dubuffet qui y figure est parfaitement accessible dans le tome 1 (pages 509-511) de Prospectus et tous écrits suivants publié à grand nombre par Gallimard.
La morale de cette histoire, je l’emprunte à cet écrit : «On appelle sain et raisonnable l’homme qui adhère totalement au mythe collectif». Et je la dédie à ceux qui, parmi les marchands d’art, seraient tentés de multiplier les clins d’œil aux institutions pour qu’elles affectent leurs maigres crédits à cet art brut dont elles ne voulaient pas hier et qu’elles vont enterrer aujourd’hui.
20:24 Publié dans art brut, De vous zamoi, Encans | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : paul engrand, gaston duf, sylvain lecocq, jean dubuffet | | Imprimer | | |