12.07.2013
Fin d’expo à la BnF
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11.07.2013
BaBaBa BaBa Babel c’est toi qu’on aime !
Temps des vacances. Voici revenu le moment de s’ensauvager on the road again. Carte postale électronique d’une vaillante Animulienne. De retour de la Fabuloserie, «tout à coup» (je cite) «une fulguration! Nous avons découvert le jardin virevoltant d’un monsieur italien : une Babel de girouettes!». Diables d’Italiens! Toujours ardents à la création du bord de nos routes. «Babel», c’est peut-être un peu excessif pour cette ronde de vire-vent dans un ciel pommelé.
Mais je ne saurais en vouloir à Roberta Trapani, ma correspondante, l’une des têtes chercheuses du Collectif de Réflexion autour de l’Art Brut, si elle déborde d’enthousiasme. C’est qu’elle est plongée dans son sujet : celui des bâtisseurs italiens d’univers insolites. Joignant la pratique à la théorie, elle donne en ce moment un sérieux coup de main pour une exposition estivale qui se tiendra sur le site de Jean Linard.
Avec ses amis du PIF (Patrimoines Irréguliers de France), elle remet en état des salles délabrées pour accueillir les œuvres de Joseph Barbiero
Luigi Buffo (voir aussi mon album)
Joseph Donadello
et des photographies d’environnements de Giovanni Cammarata (en Sicile)
Luigi Lineri (en Vénétie)
et Bonaria Manca (dans le Latium)
La signorina Trapani m’avait touché deux mots de ce projet lors de la brillante (et très courue) soutenance de thèse de son camarade Baptiste Brun le 25 juin 2013 à l’INHA. Maintenant elle nous invite, mon chéri et moi, au vernissage, samedi 13 juillet 2013.
«Le climat est agréable, le Sancerre très doux, autant de bonnes raisons de se promener dans le Berry», paraît-il. Hélas, le chantier de ma nouvelle cuisine a pris du retard et je serai obligée de laisser mon auto au garage car j’attends les menuisiers.
Mais cette invitation est valable aussi pour vous! Et pour tutti quanti, naturalmente. Vous pourrez même, en soirée, vous offrir un «dîner babélique». Roberta a l’air de savoir cuire la pasta!
Cette expo made in France + made in Italy de créations dont les auteurs sont (ou ont été) italiens durera jusqu’au 31 juillet 2013 puis sera visible en septembre pendant les ouikènes.
Elle emprunte son titre : Costruttori di Babele au livre de l’anthropologue Gabriele Mina.
Une tour de Babel dans une cathédrale c’est empiler les images bibliques selon le principe des poupées-gigognes.
Ne pourrait-on nous lâcher les basquettes avec les références judéo-chrétiennes?
Ne peut-on penser qu’à l’ombre de la croix? Ou sous l’œil sévère d’un Yahvé ?
Je ne vois, pour ma part, nulle raison d’entraîner les «bâtisseurs italiens» dans une direction mystique. Je doute même de la volonté utopiste de leur démarche car je ne crois pas que leur façon de monter «à l’assaut du ciel» soit si présomptueuse que ça.
C’est pourquoi au «babélisme», je préfère de beaucoup, le concept d’hétérotopie (localisation physique de l’utopie). Il vient de Michel Foucault. Roberta Trapani a raison de s’en servir. Elle ferait même bien d’en abuser.
20:27 Publié dans art brut, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut italien, roberta trapani, baptiste brun, crab, joseph barbiero, luigi buffo, joseph donadello, giovanni cammarata, luigi lineri, bonaria manca, gabriele mina, michel foucault, hétérotopie | | Imprimer | | |
06.07.2013
Les saints polonais en marche à Bègles
Cette exposition a débuté le 6 juillet. Si Dieu le veut, elle se terminera le 8 septembre 2013. Elle s’intitule Les Saints de l’art polonais.
«Saints» est à prendre dans un sens particulier puisque Pascal Rigeade, dans la préface du catalogue, révèle que le Musée de la Création Franche faut ainsi allusion à la phrase : «Ils sont les héros, les saints de l’art» par laquelle Jean Dubuffet qualifiait les auteurs d’art brut. Va donc pour «saints». Même si c’est agaçant que la Pologne évoque toujours les bondieuseries.
Pas trop de papes ni de vierges de Czestochowa cependant dans les œuvres fortes et variées présentées à Bègles. Quelques uns seulement dans la banque d’images que Mikołaj Ławniczak pioche dans les magazines au milieu de pin-up en bikini. Ryszard Kosek qui est dans le collimateur bèglais depuis 1996, célèbre, en couleurs de malaise sarcastique, un autre culte populaire : celui de l’alcool.
12 autres créateurs qui ont «tous un lien avec des institutions qui jouent un rôle important dans la préservation et la promotion de l’art brut» accompagnent Kosek.
350 œuvres de moutons noirs plus ou moins sous la houlette de galeries, associations, fondations, maisons protectrices, certaines du genre thérapiques ou occupationnelles. Une collection privée aussi, celle de Leszek Macak. Je ne comprends pas bien ce que Malgorzata Szaefer, co-commissaire de l’expo, entend par l’expression «Beauté en paquet» dont elle use à propos de cette sélection visiblement rigoureuse. Les mystères de la traduction sans doute. Ma petite âme ignorante aimerait pourtant savoir comment on prononce les noms des auteurs qui l’intéressent.
Iwona Mysera et ses confidentiels et illisibles messages qu’elle aime détruire autant que faire.
Przemysław Kiebzak et ses villes fortifiées-empilées.
Justyna Matysiak et sa maison aux circonvolutions intestinales.
Adam Dembiński aux bouches de chaleur et sexes rougeoyants.
Tous trois présentés sous des facettes différentes de celles remarquées, il n’y a guère dans une expo bruxelloise.
Mériteraient aussi d’être mémorisés les noms de Konrad Kwasek qui sculpte des bûches pour que son entourage les fiche au feu
Roman Rutkowski pastel-animalier au style anguleux
Henryk Żarski qui commença à parler à 45 ans (jusque là il avait trop à dire).
Ce «Nikifor de l’Institut Pakowka» figure dans la Collection de l’Art Brut de Lausanne bien qu’il n’apparaisse pas dans la liste des auteurs sur le site de celle-ci. Son cas paraît pourtant plus intéressant que ceux des peu convaincants Morton Bartlett, Ata Oko ou Charles Steffen dont la Maison mère nous a rebattu les oreilles ces temps-ci. J’aimerais en savoir plus sur la déportation en Allemagne des parents de Henryk Żarski qui, «déficient mental», a dû couper de peu à l’eugénisme puisque né en 1944.
L’expo de Bègles, malgré son titre à l’eau bénite, a l’avantage de nous mettre sous les yeux des œuvres d’art brut de qualité d’auteurs peu connus. C’est la preuve que, dans le monde plutôt confiné de l’art brut, on peut toujours respirer un air non conditionné par le marché international, actuellement restreint à l’axe OAF-GCE-SDV : Outsider Art Fair-Grands Collectionneurs Européens-Salles De Vente.
Axe autour duquel sont invités à graviter, comme les papillons autour de la flamme, responsables d’institutions muséales et intelligences universitaires que l’on voudrait détourner de la découverte pour les voir se consacrer à la circulation des seules valeurs (ou non-valeurs) cotées
16:20 Publié dans art brut, Expos | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : création franche, art brut polonais, ryszard kosek, iwona mysera, przemysław kiebzak, justyna matysiak, adam dembiński, konrad kwasek, roman rutkowski, henryk Żarski, leszek macak, malgorzata szaefer | | Imprimer | | |
27.06.2013
Treize dessins invisibles de Marie Egoroff
Quand elle vous parle de ses intuitions, votre petite âme errante ne fait pas que se vanter. Seulement il faut parfois longtemps pour que lesdites intuitions soient confirmées.
C’est le cas aujourd’hui avec Marie Egoroff dont je vous ai montré les pouchkiniennes illustrations en août 2010.
Une petite fée animulienne d’une ravageuse érudition vient de me mettre sous le nez une brochure de 16 pages qui éclaire le cas de la dessinatrice d’origine russe. Je soupçonnais cette dernière d’être du genre médiumnique. Je n’étais pas loin. C’est bien du côté de l’ésotérisme qu’il fallait chercher.
Mais c’est au sein du courant de l’occultiste Papus que l’œuvre de Marie Egoroff a été remarquée par Anna de Wolska puis par Emile Michelet, l’auteur du Catalogue commentant treize dessins symboliques de Madame Egoroff dont je vous parlais plus haut.
Emile Michelet, ami de Villiers de L’Isle Adam, est un poète fin de siècle.
Et, si j’en crois la prose de son introduction à ce catalogue, un amateur d’art non moins raffiné qui cite à la rescousse Le Triomphe de la mort d’Andrea Orcagna,
les Caprices de Goya
et La Tentation de St Antoine de Jacques Callot
Esotériste évidemment. On nage donc avec lui dans le monde astral et le monde empyréen. On se croirait dans un jeu vidéo! A part ça, c’est un analyste précis. Ses descriptions des 13 dessins sont rédigées dans un langage artistiquement rythmé qui fait penser à Félix Fénéon, le grand critique de l’époque.
Ainsi le commentaire du dessin intitulé Le Problème du mal : «Le mal, allégorisé sous la forme d’oiseaux noirs monstrueux, qui tombent dans la nuit. La tête d’un de ces sombres oiseaux, tranchée par une sorte d’étrange guillotine, choit, le bec ouvert». Qui pourrait s’approcher d’une telle scène de nos jours? Christine Sefolosha peut-être. Le lecteur du catalogue devra s’en remettre à son imagination car l’opuscule ne fournit aucune reproduction des dessins d’Egoroff.
Emile Michelet cultive même l’opacité : «Je garde le silence sur le caractère mystérieux qui scelle l’origine de ces dessins (…)». Il n’en fournit cependant pas moins quelques renseignements précieux. D’une famille de militaires, veuve d’un artiste qui «ne lui avait pas permis d’apprendre le dessin», Marie Egoroff «vécut, recluse volontaire, dans son deuil».
Quand «elle sentit en elle une force irrésistible la poussant à prendre un crayon, elle obéit (…)». Ses dessins «d’une étrange beauté» témoignent d’une rapidité d’exécution «hors de l’ordinaire». «Ils ne ressemblent à rien de ce que nous connaissons dans l’art d’Occident. (…) Aussi leur originalité déconcertera-t-elle bien des esprits», souligne Michelet.
On veut bien le croire. D’autant qu’il trouve des accents qui feraient presque croire qu’il a lu Dubuffet (mais il écrit ces lignes en 1894!) : «Les treize dessins symboliques dont il est ici question ne sont pas l’œuvre d’un artiste. L’auteur est une femme qui jusqu’alors avait ignoré le mécanisme du dessin, et qui soudain, a pris le crayon sous l’influence d’une force : l’Inspiration. L’esprit souffle où il veut. Il a soufflé sur le front d’une femme qui vivait obscure et solitaire, étrangère au mouvement artistique, et ne demandant autre chose que de rester obscure (…)».
16:58 Publié dans De vous zamoi, Glanures, Images | Lien permanent | Commentaires (0) | | Imprimer | | |
16.06.2013
Aloha Oléron
Dans la série : les choses qui me rendent jalouse. Aujourd’hui : la chemise de Jean-Louis Faravel sur la photo de David Briand empruntée à un article de Sud Ouest. Sur le côté : des dessins de Paul Duhem.
S’il n’y avait pas la PQR, on oublierait presque qu’il y a de l’art brut en province. JLF vient de la PQR. Le temps des loisirs venu, il est devenu organisateur de biennales. Son truc c’est L’Art partagé, un label qui lui permet de réunir régulièrement toutes sortes d’autodidactes s’adonnant ou s’essayant à la création d’art.
Pas trop mon truc à moi généralement. Mais tout de même, en petite proportion, il y a parmi les poulains de Faravel des tempéraments hautement recommandables comme la chère mamie Grunenwaldt.
Et quand Jean-Louis Faravel délaisse son Dauphiné habituel pour dériver vers la lumière saintongeaise, pourquoi ne pas le suivre? Vous avez donc jusqu’au 30 juin pour sortir vos belles liquettes hawaïennes et vos colliers de fleurs et vous rendre à la salle polyvalente de Saint-Trojan les Bains dans l’île d’Oléron où J.-L. Faravel, lui-même collectionneur, témoigne de ses choix.
15:36 Publié dans Expos, Gazettes | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : jean-louis faravel, paul duhem, martha grunenwaldt, art brut | | Imprimer | | |
05.06.2013
Marseille, reportage impossible
Beatrice Soulié m’a posé un lapin. Involontairement bien sûr. Je me suis cassé le nez sur son dernier vernissage. Pourtant j’avais tout juste. C’était le bon jour : samedi, premier juin. Et la bonne heure : dans les 18 h de rigueur dans la capitale.
Mais j’ai fait tintin pour l’expo Pierre Dotte, le regard d’un collectionneur. J’avais oublié que Béatrice Soulié, émérite galeriste guénégaudisque est aussi une authentique Frioulaise. Je m’étais donc trompé de ville. Le vernissage était à Marseille près du Vieux-Port et non à Paris sur Seine.
Heureusement que le soleil était au rendez-vous pour une fois. Ses rayons qui tombèrent sur l’invitation que je tenais à la main me permirent de constater que je n’avais pas bien lu l’adresse. C’était bien rue Glandevès, au 8, dans le premier arrondissement de Marseille qu’il fallait être et non 21 rue Guénégaud dans le sixième de Pantruche. Un peu tard pour changer de direction. J’aurais bien demandé à monsieur Spock de me téléporter sur la Canebière.
Hélas, votre petite âme errante ne fait pas encore partie du casting de Star trek. Dommage : le programme de l’exposition souliérienne, bien que ne comportant que des noms d’artistes apparentés à l’art brut, avait quelque chose d’alléchant.
Simone Le Carré-Galimard, Louis Pons, Patrice Cadiou, Jano Pesset par exemple. J’aurais aimé vous faire un méga reportage avec mon petit Kodak. Vu les circonstances, c’est impossible. Je me contente de vous relayer les deux visuels offerts par le leporello de la galerie : des oeuvres de Mario Chichorro et Stani Nitkowski.
L’exposition de la Collection Pierre Dotte précédera sa dispersion. C’est dire qu’il ne faut pas la manquer. Jusqu’au samedi 29 juin, elle sera visible à Marseille. A MARSEILLE, je vous dis. Ce qui arrange plutôt les Marseillais, les Aixois et même les Avignonnais. Les Parisiens, plus nombreux dans le Luberon qu’à Saint-Germain des prés, ne sont pas trop mal lotis non plus. Les Klingons, les Vulcains et autres Borgs n’ont qu’à s’affréter un Enterprise en co-voiturage!
Ah, j’oublie encore un truc. Ce regard de collectionneur est célébré «avec la complicité de l’œuf sauvage». Claude Roffat, l’animateur de cette revue, récemment re-née de ses cendres, nous rappelle qu’il fut jadis marchand d’art «en dessous de Pigalle» et que Pierre Dotte «fut vite un assidu de la galerie».
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28.05.2013
Yolande et Candy clôturent la Quinzaine
Elle était Solange dans Mammuth, elle est Rosette dans Henri, le nouveau film réalisé par Yolande Moreau. Revoilà Miss Ming, aujourd’hui Candy Ming et toujours fée. Candy et Yolande ont appris à se connaître sur les plateaux de Gus et Benoit, auteurs grolandais mais pas que. C’est Delépine qui remarque Candy en 2005, pour sa façon décalée de lire les poèmes. Il la fait tourner dans Louise Michel en 2007
et en 2010 lui fait mener par le bout du nez Depardieu-Pilardosse, le touchant géant motard, protagoniste principal de Mammuth. C’est dans ce film que Benoit Delépine et Gus Kervern affichent combien ils se sont sourcés à l’art brut. Yolande Moreau, avec Henri, son film présenté à Cannes en clôture de la Quinzaine des réalisateurs, n’hésite pas à faire état de la même référence.
«Il y a quelque chose qui me fascine dans l’univers des handicapés mentaux», dit-elle au sujet du personnage féminin de son film qui traite du soutien mutuel que se prodiguent une jeune femme un peu différente et un cafetier italo-belge plutôt paumé.
«On dirait de l’art brut», poursuit Yolande. Dans le cinéma ce rapprochement est suffisamment rare pour qu’on le remarque! D’autant que Yolande Moreau précise : «Nous on a des codes pour se comporter. Ils n’ont pas les mêmes, c’est plus étrange. Ca me fascine, ils sont sensiblement pareils que nous».
Tellement pareils que Yolande envisagea d’abord d’interpréter le rôle de Rosette. Les pensionnaires du foyer de personnes «handicapées» dont Rosette provient dans l’histoire sont joués par des comédiens de la Compagnie de l’Oiseau-Mouche, Centre d’aide par le travail artistique de Roubaix.
Henri a été tourné dans le Nord/Pas-de-Calais. A Vendin-le Vieil, Aix-Noulette, Carvin et Liévin.
Ce qui valut au film une idée de promo peu ordinaire : l’installation d’une baraque à frites sur la Croisette. Le bruit court que les pingouins en smokings et les divas en robes du soir, fatigués par les marches, n’ont pas craché sur les cornets distribués à cette occasion par la prod d’Henri.
La fraîcheur lunaire de Candy Ming n’est pas passée inaperçue de la presse festivalière qui a célébré aussi le jeu du comédien et metteur en scène Pippo Delbano dans le rôle d’Henri.
Animula, pour sa part, préconise la lecture du papier de Jean-François Lixon : «Henri» de Yolande Moreau, les grandes errances des petites gens. «Tout est juste dans ce film» dit Lixon. Ajoutons que le philosophe Jackie Berroyer (Bibi, pilier de bar) fait aussi partie de la distribution. Raison de plus pour guetter la sortie de ce film yolandesque à souhait. Pour la fin de l’année sans doute.
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21.05.2013
L’abbé Fouré passe à l’Ouest
A peine quelques jours qu’un Animulien de bonne volonté nous signalait, par un commentaire, la sortie de l’ouvrage de Joëlle Jouneau sur L’Ermite de Rothéneuf dans la Collection L’Esprit du lieu éditée par les Nouvelles Editions Scala.
Et déjà l’actualité nous rappelle au souvenir de ce diable d’abbé Fouré, l’ermite créateur des rochers sculptés. L’ermite et non l’hermite comme l’indique par étourderie le site de La Procurequi doit penser que l’art sacré s’écrit avec une hache.
Soutane à part, l’œuvre de Fouré n’a pas plus à voir avec l’art sacré qu’avec les histoires de pirates dont la légende locale affubla ses rochers. C’est une belle et bonne vieille création d’art brut tout à fait impressionnante par son ampleur. Les deux pieds dans la matière ingrate du rocher. Ce qui ne l’empêche pas d’être fort visitée.
Aujourd’hui comme hier (du vivant même du sculpteur de tempêtes, avant 1910), par des promeneurs en quête de curiosités et de bons bols d’air. Une exposition des cartes postales éditées au début du vingtième siècle en témoigne jusqu’au 29 juin 2013 à la Bibliothèque municipale de Brest.
Dans le cadre d’un «festival» intitulé L’Art brut à l’ouest où sont montrées aussi des sculptures de Pierre Jaïn et, parallèlement, des photos de Gilles Ehrmann à l’Artothèque que j’écrirais bien l’Artaud-thèque pour rigoler.
Mais les rochers sculptés ce n’est pas de la rigolade et une asso se remue joliment pour la bonne cause de la falaise érodée par les marées, les fréquentations touristiques, les belles histoires sans fondement véridique et, depuis peu, par de romantiques lieux communs sur «la poésie des ruines».
Un article récemment paru dans le journal numérique de Libération (18 mai 2013), sous le clavier de Bernadette Sauvaget, envoyée spéciale à Saint-Malo vous en dit plus. C’est de loin le meilleur papier que j’ai lu sur le sujet dans un quotidien depuis longtemps. Ironie du sort, la journaliste est en charge des sujets religieux à Libé. Non d’une rubrique artistique.
Bien documentée, elle n’en mène pas moins de front une présentation vivante et accessible de l’histoire de l’abbé, un aperçu précis sur l’œuvre et une enquête sur l’état actuel des problèmes posés par ce site indisciplinable. L’angle qu’elle a choisi pour intéresser ses lecteurs : le travail de proximité de l’association de protection et d’information.
Elle a, ce faisant, le mérite de brosser le portrait de l’animatrice de cette asso : Joëlle Jouneau elle-même.
Portrait qui manquait jusqu’alors.
22:36 Publié dans art brut, Expos, Lectures, Sites et jardins, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : art brut, abbé fouré, rothéneuf, joëlle jouneau, bernadette sauvaget | | Imprimer | | |
20.05.2013
Ostie d’câlisse de tabarnak d’art brut
Pauvre Belgique! Animula te laisse tomber. Pourtant avec tous ces maudits Français qui ont colonisé Bruxelles, j’aurais dû signaler, chez Art & Marges, l’exposition d’art brut polonais intitulée -Dieu sait pourquoi- Une hostie dans une bouteille/Een hostie in een fles. «Art brut», je risque le mot bien qu’il soit tricard dans le matériel promotionnel de l’expo de la rue Haute organisée avec la collaboration d’un tas de chouettes partenaires de Pologne (galeries, musées et hostos psy).
On ne répugne pas en revanche du côté d’A&M à l’usage du mot «artiste». Ce qui nous donne un sous-titre aussi vague que le titre est obscur : Artistes polonais/Poolse kunstenaars. In english : Polish artists. On peut rien rêver de plus général? Dacodac comme dirait Alex dans Orange mécanique.
Aux dernières nouvelles, Dieu contacté m’a tout de même fait savoir que l’hostie et la bouteille provenaient d’une phrase de Maria Wnęk, l’une des personnalités présentes dans l’expo polono-bruxelloise. Sauf que la phrase est amputée de son début : «Du lait au lait»!
L’hostie, on comprend : ça plait aux cathos. Et la bouteille vous a un petit air si «art populaire» qu’on crache pas dessus. Mais les deux ensemble, c’est moins évident question communication. Heureusement que le public n’est pas obligé d’apprendre ce titre par cœur! S’il se souvient du contenu, ce sera déjà très bien. Car ce contenu le mérite puisqu’il conjugue des talents profondément variés sur l’échelle de la brutitude : Marian Henel
N’oublions donc pas qu’il ne reste que peu de jours pour se précipiter à l’exposition d’art brut polonais de Bruxelles/Brussel. Cela fait déjà un moment que des Animuliens vigilants me suggeraient d’y faire un détour.
Mais le temps tout pourrave… Mais le Père Cepteur qui a ratissé toute ma thune… Mais un certain désenchantement aussi dont je retrouve l’écho dans un article de Danièle Gillemon dans Le Soir m’ont détournée de ce «voyage vers les univers» d’une vingtaine de créateurs parmi lesquels le grand Edmund Monsiel.
Créateurs bruts ou brutoïdes dont on n’a pas souvent l’occasion de voir les œuvres. Et qui nous changent des «vedettes américaines» (certes incontestables) : Traylor, Ramirez, Darger, et maintenant Deeds dont le marché dominant de l’art brut nous impose la ronde -à force monotone- de New York à Lausanne City en passant par les salles de vente du huitième arrondissement de Paris.
A noter que j’emprunte mes images ci-dessus (hors vernissage) ainsi que celles des œuvres de Przemyslaw Kiebzak
à des sources extérieures à l’exposition bruxelloise car le leporello d’Art & Marges et son site Internet sont plutôt chiches en reproductions. Raison de plus pour avaler l’hostie et la bouteille en live si c’est dans vos moyens. Vous l’avez compris : c’est pas du petit lait.
18:57 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos, Images | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art & marge musée, art brut polonais, maria wnęk, marian henel, adam dembiński, justyna matysiak, edmund monsiel, przemyslaw kiebzak, ksawery zarębski, danièle gillemon | | Imprimer | | |
19.05.2013
Prague 2013 : Jan Křížek sort de l’oubli
C’est une chose qu’on ignore parfois mais la Tchèquie existe et à Prague un Institut français où il se passe des choses. Tiens, le 6 mai dernier : on y présentait l’importante monographie d’Anna Pravdová sur Jan Křížek. Anna Pravdová, conservatrice à la Galerie Nationale de son pays, a des liens avec le nôtre et parle le français. Ce qui nous vaudra peut-être dans l’avenir des éclaircissements supplémentaires sur son travail.
Entretien d'Anna Pravdová avec Anna Kubišta
Sa monographie, qu’on dit nourrie et fort illustrée, accompagnera du 31 mai à la fin septembre 2013 une grande exposition Křížek (1919-1985), intitulée Jan Křížek et la scène artistique parisienne des années 1950.
Dans le Manège du Palais Wallenstein, grosse perle baroque du quartier de Malá Strana.
Occasion pour les Tchèques de se réapproprier l’œuvre de cet artiste qui, après le Coup de Prague en 1948, vécut chez nous. D’abord à Paris puis au fond de la Corrèze où il se bâtit une maison dans les bois. La notice Wiki sur Křížek est plutôt anorexique. Elle le décrit coincé entre surréalisme et art brut. Il serait surtout du genre inclassable et l’expo de Prague ambitionne de mettre en lumière sa captivante spécificité.
Qu’on le veuille ou non, il appartient cependant à la légende de l’art brut. Son nom reste attaché à la période pionnière où ce concept découvert par Jean Dubuffet s’affinait progressivement.
Avec Miguel Hernandez, Juva, Pierre Giraud et le controversé Robert Véreux, Jan Křížek eut les honneurs de l’une des 5 brochures historiques que René Drouin, galeriste de Dubuffet, édita pendant la période d’activité du Foyer de l’Art brut (15 novembre 1947/été 1948).
Le texte de Michel Tapié qui figure dans cette plaquette ne cache pas l’origine «culturelle» de la découverte du «cas» Křížek.
C’est le sculpteur cubiste espagnol Honorio Condoy qui lui signale (ainsi qu’à Henri Pierre Roché par ricochet) les sculptures du jeune tchèque, selon lui «tout à fait dans la même ligne» que les Barbus Müller.
Le destin de Křížek montre ensuite que Condoy, Tapié et Roché ne se trompaient pas tout à fait sur la nature «brute» du talent du sculpteur. Deux faits sont là pour en témoigner. Un épisode iconoclaste au cours duquel Křížek détruit certaines de ses sculptures sous prétexte qu’il n’a pas les moyens de les transporter à la campagne. Une phrase révélatrice qu’il prononce quand il renonce à la création sculpturale (1962) pour devenir apiculteur : «enfin je suis guéri, je peux arrêter mon travail artistique».
Photo tirée de la monographie d'Anna Pravdová
L’histoire retient que Dubuffet ôtera très vite les rênes de l’art brut des mains de Michel Tapié. Ce dernier, dans une note additionnelle à son texte de la plaquette Drouin, a conscience du problème posé par Křížek : «Tant pis pour ceux qui penseront que je brouille les cartes. Souvent trop des mêmes qui -avec raison- protestent contre les brimades, voire les honteux internements arbitraires des champions du verbe et de la vision ne voudraient, sans quoi ils ne marchent pas, voir en l’Art Brut qu’un asile ou une cage à singes (…)».
18:18 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos, Gazettes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, surréalisme, jan krisek, anna pravdová, radio prague, rené drouin, michel tapié | | Imprimer | | |