Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28.05.2013

Yolande et Candy clôturent la Quinzaine

Elle était Solange dans Mammuth, elle est Rosette dans Henri, le nouveau film réalisé par Yolande Moreau. Revoilà Miss Ming, aujourd’hui Candy Ming et toujours fée. Candy et Yolande ont appris à se connaître sur les plateaux de Gus et Benoit, auteurs grolandais mais pas que. C’est Delépine qui remarque Candy en 2005, pour sa façon décalée de lire les poèmes. Il la fait tourner dans Louise Michel en 2007

 

et en 2010 lui fait mener par le bout du nez Depardieu-Pilardosse, le touchant géant motard, protagoniste principal de Mammuth. C’est dans ce film que Benoit Delépine et Gus Kervern affichent combien ils se sont sourcés à l’art brut. Yolande Moreau, avec Henri, son film présenté à Cannes en clôture de la Quinzaine des réalisateurs, n’hésite pas à faire état de la même référence.

affiche Henri.jpg

«Il y a quelque chose qui me fascine dans l’univers des handicapés mentaux», dit-elle au sujet du personnage féminin de son film qui traite du soutien mutuel que se prodiguent une jeune femme un peu différente et un cafetier italo-belge plutôt paumé.

Rosette et Henri.jpg

«On dirait de l’art brut», poursuit Yolande. Dans le cinéma ce rapprochement est suffisamment rare pour qu’on le remarque! D’autant que Yolande Moreau précise : «Nous on a des codes pour se comporter. Ils n’ont pas les mêmes, c’est plus étrange. Ca me fascine, ils sont sensiblement pareils que nous».

Tellement pareils que Yolande envisagea d’abord d’interpréter le rôle de Rosette. Les pensionnaires du foyer de personnes «handicapées» dont Rosette provient dans l’histoire sont joués par des comédiens de la Compagnie de l’Oiseau-Mouche, Centre d’aide par le travail artistique de Roubaix.

Avec-la-Compagnie-de-l-Oiseau-Mouche_portrait_w858.jpg

Henri  a été tourné dans le Nord/Pas-de-Calais. A Vendin-le Vieil, Aix-Noulette, Carvin et Liévin. henri frites 2.jpg

Ce qui valut au film une idée de promo peu ordinaire : l’installation d’une baraque à frites sur la Croisette. Le bruit court que les pingouins en smokings et les divas en robes du soir, fatigués par les marches, n’ont pas craché sur les cornets distribués à cette occasion par la prod d’Henri.

La fraîcheur lunaire de Candy Ming n’est pas passée inaperçue de la presse festivalière qui a célébré aussi le jeu du comédien et metteur en scène Pippo Delbano dans le rôle d’Henri.

Animula, pour sa part, préconise la lecture du papier de Jean-François Lixon : «Henri» de Yolande Moreau, les grandes errances des petites gens. «Tout est juste dans ce film» dit Lixon. Ajoutons que le philosophe Jackie Berroyer (Bibi, pilier de bar) fait aussi partie de la distribution. Raison de plus pour guetter la sortie de ce film yolandesque à souhait. Pour la fin de l’année sans doute.

16:44 Publié dans Ecrans, Glanures | Lien permanent | Commentaires (2) | |  Imprimer | | Pin it! |

08.05.2013

Le peuple des berges

La Seine monte. C’est le moment de lire Le Peuple des berges. Le moment d’acheter à pleines péniches ce récent titre de Robert Giraud pour en inonder vos amis.

recto peuple des berges.jpg

On y assiste avec trouble et attendrissement au «carnaval perpétuel» de Nénette. A cette époque (dans les années cinquante du siècle de l’auteur), on n’avait pas peur du mot «clocharde».

«La cloche en argot c’est le ciel» nous dit la quatrième de couverture de ce recueil de neuf articles parus jadis dans Qui ? Détective.

verso peuple des berges.jpg

A cette époque (8 octobre – 3 décembre 1956), les Nénette élisaient domicile sous les ponts de Paris. Cette âme errante abritait donc sa coquetterie guenilleuse «dans une alvéole du Pont-Neuf, au milieu de ses richesses» de carton. «Eté comme hiver, Nénette porte toute sa garde-robe sur elle» nous dit Robert Giraud. Et «sa toilette se complète obligatoirement d’un chapeau extrait, il y a une dizaine d’années, du plus profond d’une poubelle».

Nénette.jpgImage tirée de "La cloche et les clochards". Film réalisé en 1972 par Robert Bober pour l'émission d'Eliane Victor : "Les femmes aussi"

la cloche et ses clochardes.jpg
Cliquer sur l'image pour voir un extrait

Rien de bien original jusque là. Aujourd’hui que sont revenus les temps mauvais, il suffit de faire un tour sous le périphérique au marché aux puces de Saint-Ouen pour avoir une idée de ce que Bob évoque.

Plus captivantes en revanche, les lignes que Giraud consacre à la pulsion de parure corporelle de ladite Nénette. Pulsion qui en fait presque la prêtresse d’un body art avant la lettre. «Les heures que [Nénette] ne consacre pas à la recherche et au tri de nouveaux haillons (…), elle les passe à faire et à refaire son maquillage». (…) «Un affreux plâtrage  dont le fond de teint est constitué par du Mercurochrome. Pour ses autres fards, Dieu seul sait dans quelles décharges publiques Nénette va en recueillir les ingrédients!».

Pouvoir de ce style ému mais précis du grand reporter littéraire! Giraud sait comme personne communiquer au lecteur sa fascination. Atteindre comme une balle le nœud du problème. Sans lui ôter de son mystère. «Nénette garde le secret du drame qui a dérangé sa cervelle».

Citons encore la relation de son jeu d’esquive facial: «De ce paquet de loques émerge le visage de Nénette, une face de gargouille peinturlurée où l’on ne remarque rien de ce que l’on regarde ordinairement : la couleur des yeux, la forme du nez, les dessins des lèvres…».

Les amoureux du vieux Paris, les amateurs de petits métiers insolites, ceux qui apprécient combien l’humanité et la créativité des gens du très-commun se dégagent du pittoresque, voudront lire ce recueil de chroniques nouvelles et néanmoins ressuscitées.

robert giraud,robert bober,robert doisneau,eliane victor,nénette

Personne ne s’étonnera qu’il soit préfacé par Olivier Bailly. Ni qu’il soit édité par Le Dilettante qui ne cesse d’inscrire à son catalogue les Bob-sellers de l’«envoyé spécial au royaume de la nuit».

16.02.2013

Un cri passage du Mississipi

La lasagne contemporaine au canasson roumain vous dégoûte? Alors : Jambalaya, crawfish pie, fillet gumbo! C’est la saison sud. Faut en profiter.

Sud, sud, sud : gros arrivages en ce moment! Sud des Etats-Unis s’entend. Les autres c’est pas class. Sud, sud, sud, même l’art brut s’y met. Il ne m’est art brut que du sud. Il n’est bon bec brut que du sud. Le sud, le sud, toujours renouvelé. Le sud, vous dis-je. Bon, c’est un peu agaçant ces campagnes promotionnelles. Sud par ci, sud par là, sud arrive, sud est là…

DEEP-SOUTH_1_.jpg

Quand tout le monde est poussé à regarder dans la même direction, on a envie de se faire une sortie de route. Mais on ne peut pas s’empêcher de suivre la musique quand même.

 

Et la musique, la musique du sud, est bonne chez Christian Berst. C’est la seule chose dont le galeriste ne parle pas sur son site super bien documenté, à propos de son exposition des œuvres de Mary T. Smith (jusqu’au 2 mars 2013). Elle prend pourtant dans ses bras consolants le visiteur qui franchit la porte du 3/5 passage des Gravilliers (75003).

passage des gravilliers.jpg

Ce n’est pas la première fois à Paris que nous voyons ces tôles ondulées et ces panneaux de bois, bichromes ou monochromes mais toujours peints avec une autorité fervente qui semble venir d’un fond de lucidité sauvage, d’une histoire de labeur et de douleur où se conjuguent surdité, misère, ostracisme et expressivité.

P1060156.jpg

Christian Berst lui-même en avait déjà présentées en 2009 dans American Outsiders I, une exposition collective. Et Mary T. Smith, aux belles robes très «peinture», figurait déjà dans Art Outsider et Folk Art des Collections de Chicago à la Halle Saint-Pierre en 1998.

Mary-T.-Smith-by-her-house-Image-via-Christian-Berst-gallery.jpg

J’emprunte à la biographie de cette créatrice, établie à cette occasion par Martine Lusardy et Laurent Danchin, ces lignes significatives : «Aujourd’hui, et depuis longtemps, il ne reste rien du musée en plein air de Marie T. Smith : le succès et les nombreux amateurs sont passés par là, obligeant même vers la fin cette étonnante artiste improvisée à produire sur commande des travaux de plus petit format, parfois le temps d’une simple visite et en présence du destinataire».

P1060174.jpg

Je les emprunte pour souligner un mérite de l’exposition actuelle de la Galerie Christian Berst. C’est que, non seulement elle crée l’ambiance en nous berçant dans le blues feutré et enveloppant mais elle n’occulte pas ce fait essentiel : les productions de Mary T. Smith, loin de relever d’un art de chevalet, sont les pièces orphelines d’un véritable environnement d’art brut.

P1060167.jpg

P1060172.jpg

Des parties d’une œuvre globale qui leur donnait plus de force encore d’être inaliénable, c’est-à-dire non consommable dans l’acception commerciale du terme. C’est pourquoi j’ai trouvé beaucoup d’intérêt à visionner le diaporama qui passe en boucle sur grand écran dans la berstienne galerie.

P1060155.jpg

Surtout avec mon séant (les petites âmes errantes en ont aussi) mollement enfoncé dans le canapé blanc antonionesque de ce vaste lieu. On y saisit au vol bon nombre d’images de cet univers de plein air si personnel, au temps où il fonctionnait à son plein régime.

P1060158.jpg

C’est à dire à son usage exclusif. Pour ceux et celles qui aiment les souvenirs, ils ou elles pourront emporter le catalogue où cette impression se prolonge par plusieurs clichés.

catalogue.jpg

16.01.2013

«Regard sur la folie» passe à la télé

Ma télé déconne. Tantôt j’ai le son et pas l’image et tantôt l’image sans le son. C’est commode, je vous jure! Tout de même, on s’y fait et on trouve même des bénéfices secondaires à regarder la manif des mariagephiles sans les paroles et Fantasia chez les ploucs sur écran noir. 


Je branche, je débranche, je bidouille. De temps en temps, miracle, j’arrive à coincer une chaîne avec les deux options à la fois. Dimanche dernier, c’était Ciné-Classic. Je suis tombée et bien tombée sur un petit bijou documentaire de Mario Ruspoli (1925-1986), un pote à Chris Marker et à Jean Rouch.

décadrages dossier ruspoli.gif

Regard sur la folie que ça s’appelle. Un film de 50 mn, tourné à l’hosto psy de Saint-Alban en 1960 avec une caméra 16 mm et un magnétophone synchrone. J’attendais des séquences relatives aux occupations artistiques des patients et je n’ai pas été déçue du voyage. Même si elles sont limitées aux activités d’un atelier fonctionnant dans l’établissement et sous son contrôle, c’est toujours émouvant et rare ce genre de témoignage.

seul.jpgMais de toutes façons, le reste est passionnant. On y entend le discours des gens soignés à Saint-Alban. Lucide et triste, monotone et plaintif mais aussi précis et d’une étrange logique intérieure : non filtré par le travail des soignants mais tel qu’il se déploie vraiment. On y entend la voix off de Michel Bouquet et la grande voix des textes d’Artaud qui donnent de la cohérence à l’ensemble.

le deconnetier Libération 16 nov 1989.jpg


On y croise François Tosquelles et ses hauteurs de vues dans une réunion de professionnels de l’endroit. Tendre l’oreille à cause de l’assez redoutable accent de ce grand praticien catalan exilé en France à cause de son activité antifasciste. Admirer au passage la façon dont il bouscule la psychiatrie pour éviter qu’elle ne ronronne comme une vieille daronne (ou dragonne).

Tendre l’oreille aussi au dialogue de Roger Gentis avec la vieille dame lozérienne alitée. Apprécier cette ambiance de respect mutuel que le travail du médecin suscite parce qu’elle seule peut permettre à la souffrance de se dire.

regard photo 2.jpg

Chanceux que vous êtes, ce petit chef d’œuvre de cinéma direct, repassera par la case Ciné-Classic à plusieurs reprises durant le mois de janvier 2013. Jeudi 17 à 8h35 pour les lève-tôt, samedi 19 à 2h05 pour les insomniaques, lundi 21 à 11h55 pour la Sainte Agnès, lundi 28 à 1h50.

regard photo 1.jpg

Regard sur la folie est suivi d’un court métrage intitulé La Fête prisonnière. C’est la fête annuelle à St-Alban. Les enfants s’amusent. Tout le monde danse avec tout le monde. Fous et non fous. On ne les distingue plus sous leurs chapeaux pointus, turlututu. Un peu à l’écart, sous l’œil de la caméra, deux résidents qui ne sont pas dupes : la fête est mélancolique comme toutes les fêtes.

regard-sur-la-folie.jpg

10.01.2013

Le voyage divers de Laurent Hasse

J’ai beau faire (ou ne pas faire), je reste une incomprise.

Prenez mon nom, c’est fou ce qu’on le charcute : «chère Anima» par ci, chère «Vague Hoola» par là (chez les surfeurs). Prenez mon titre, il est limpide! Pas de jours pourtant où l’on n’en restreigne la signification. Rives encore ça va mais dérives!

On croit toujours que je m’acharne sur ce qui cloche, que je stigmatise les déviations. Comme si l’art brut pouvait être une norme! Alors que ce soit une fois pour toute gravé dans le marbre : par dérives, j’entends aussi, j’entends surtout le passage hâtif à travers des ambiances variées. Point barre.

ombre.jpg

Ces temps-ci comme naguère, on dérive dans sa tête et on dérive avec les pieds. C’est pourquoi je me suis dirigée d’emblée vers Le Lucernaire, attirée par Le Bonheur…, le film de Laurent Hasse.

affiche bonheur 2.png

Question «ambiances variées», il s’y connaît, ce jeune réalisateur. Il a parcouru, 82 jours durant, une France d’hiver, pas trop vaillante mais où des gens aux accents différents s’efforcent quand même de «faire corps avec la vie». Laurent Hasse se sert de sa tête et de ses pieds à raison de 30 kms par jour. Sans laisser à l’une plus qu’aux autres le poste de commandement.

méridienne verte.jpg

Dans l’Aude, en Aveyron ou dans le Cantal, dans la Creuse, le Cher, sur les bords de la Loire, à Aubervilliers ou dans la Somme, il a emboîté le pas et la solitude de ceux qu’il a rencontré, qui lui ont offert un café, une place près de leur feu, de leurs souvenirs, de leurs regrets.

bande photos 2.jpg

«On ne s’improvise pas nomade, on le devient pas après pas» dit la belle voix off de ce témoin armé d’une caméra numérique et de la patience nécessaire pour laisser venir la parole de ses interlocuteurs.

 
Devant ces paysages gelés, ces panoramas ouverts, ces images de ponts suspendus qui rythment le temps au son de la guimbarde et alternent avec des entretiens cadrés dans une intimité libératoire, on pense naturellement au Sans toit ni loi ou aux Glaneurs et la glaneuse d’Agnès Varda. Et ce n’est pas mince compliment. Mais nulle fiction mêlée au documentaire et une interrogation récurrente plutôt qu’une fantaisie papillonnante. «C’est quoi, le bonheur pour vous?» cherche à savoir le réalisateur.

bande photos.jpg
Et le pâtissier, le soldat, la veuve, l’ornithologue, la fermière sans ferme de la Beauce agro-alimentaire finissent par lui communiquer leur conception de cette terre promise, seconde partie du titre de ce film. «Aucune idée» dit l’un, «être capable de se fabriquer de bonnes heures» dit l’autre. «Je cherche le calme», «c’est pas quelque chose d’universel», «le verre et le bonheur, ça casse très vite»… On imagine les quantités de rushes qu’il a fallu pour apprivoiser ces hommes, ces femmes, ce brouillard farouche, ce soleil timide qui caresse les grosses chaussures du marcheur.

paysage 2.jpgSoulignons le travail de Matthieu Augustin, le monteur. Les images sont limite japonisantes mais ce parti pris esthétique a de la grandeur : oh, les éoliennes! Pas le moindre patenteux parmi les personnages rencontrés. Encore qu’avec un bâtisseur qui ligature l’osier comme un oiseau avant de staffer, on n’en soit pas loin.


Sorti du coma où l’avait plongé une automobile qui l’avait renversé, Laurent Hasse s’est mis à marcher des Pyrénées orientales jusqu’à la mer du Nord, la mer toujours recommencée et son rire en ressac (dernière image).

la mer.jpg

11.09.2012

100 bougies pour le Palais Idéal

Toutes proportions gardées, les anniversaires se suivent. Et bien sûr, ils ne se ressemblent pas. J’ai eu beau faire «un travail opiniâtre», je ne peux prétendre, même si c’est «mon rêve», aux 34 ans, 9000 jours, 65000 heures du champion d’Hauterives! C’est un boulot de Titan pour ne pas dire de Cheval.

cheval échafaudages.jpg

De facteur Cheval s’entend, en l’honneur des 100 ans duquel la Collection de l’Art Brut consacre une nuit et une exposition. Lausanne, ne faisant rien comme les autres villes, s’offre en effet, le samedi 22 septembre, une nuit des musées au cours de laquelle sera projeté Violons d’Ingres, le fameux court-métrage de Jacques-Bernard Brunius dont je vous avais rappelé l’intérêt pionnier dès mes débuts en septembre 2005. La projection de ce film de 1939 où figure le Palais Idéal sera suivie de celle du «premier film de fiction dédié à Cheval» (y’en a-t-il eu d’autres?) de 15 mn chrono, intitulé, pour faire simple, Palais Idéal.

kyrou cheval 2.jpg

Ado-Kyrou.jpegL’auteur, Ado Kyrou, écrivain et critique porté sur le cinéma surréaliste, est aussi un admirateur de Brunius. Sa contribution à la cinématographie chevaline, n’ayant pas eu la chance d’être enrôlée dans le DVD des frères Prévert, me fait l’effet aujourd’hui d’être plus à découvrir que celui de Brunius. Bien que Palais Idéal ait été tourné en 1958, soit près de 20 ans après Violons d’Ingres.

andré hodeir jazz groupe.jpgLe carton d’invitation de la CAB nous vante par ailleurs la musique jazz du film dont le «côté improvisé et l’esprit de liberté correspond bien au Palais Idéal» à ce qu’il paraît. Cette musique est de André Hodeir.

gaston modot.jpg

Il n’est pas indifférent de souligner également que, dans le film d’Ado (comme Adonis : il était grec), les textes du facteur Cheval sont dits par Gaston Modot. Cela vous laisse froids? Et bien revoyez L’Âge d’or, le brûlot surréaliste de don Luis (Bunuel) qui date de 1930. Le personnage de «L’Homme», prototype de l’amoureux fou et bien c’est Gaston Modot!

Ces deux films de la nuit lausannoise apporteront le soutien de leurs projecteurs à l’expo de photographies en couleurs de Michel Guillemot que vous pourrez voir à la CAB jusqu’au 30 septembre 2012. Un petit détour à la librairie de la Collection vous permettra de vous offrir le livre Palais Idéal du Facteur Chevalparu aux Nouvelles Editions Scala en 2011. Les photos de Guillemot y accompagnent (ou y sont accompagnées par) un texte de Gérard Denizeau.

palaisideal denizeau.jpg

montage expo cheval.jpgLes petits malins parisiens qui voudraient maintenant pousser un grand hennissement à la Bobby Lapointe pour saluer à leur tour le centenaire de l’achèvement du Palais d’Hauterives pourront le faire bientôt aussi : exposition-hommage au Musée de la Poste en perspective.

Montage en cours!

03.03.2012

Ma postière est une sorcière

affiche 2.jpgCela me fait doucement rigoler de lire sur le prospectus de l’expo Sorcières que celle-ci «s’inscrit dans l’engagement de La Poste dans la lutte contre les discriminations (…)» etc.

Cet ex service public, qui transfère aux usagers le boulot de ses préposés qu’elle remplace par des machines n’acceptant jamais mes billets de banque fripés, n’est jamais en retard d’une auto-promotion.

Sorcières.JPG

Mais bonne fille comme je suis, j’oublierai un moment les crises de nerfs que je pique dans mon buro d’affranchissements et je vous vanterai les mérites de cette exhibition du Musée de la poste (près de la gare Montparnasse) rebaptisé L’Adresse (!) sans doute pour figurer en tête des listes.

On va voir Sorcières, mythes et réalités (jusqu’au 31 mars 2012) comme on irait se faire désenvoûter dans nos campagnes. Un conseil à ce propos : commencer par la fin en pénétrant directement chez Madame P, une «sorcière» qui officiait dans un hameau de la Creuse jusqu’aux années 50 du XXe siècle. Vous n’en prendrez que mieux la réalité (y compris artistique) de la chose en pleines mirettes sans passer par le filtre du parcours savant que le plan de l’expo tend à nous faire suivre.

vitrine 2.JPG

Il sera bien temps de relativiser ensuite mais pour ces premiers instants mieux vaut faire avec sa sensibilité qu’avec son intellect. C’est qu’on est d’emblée de plain-pied avec une sorte de vaudou rural bien de chez nous.

vitrine.JPG

Les vitrines sont pleines d’objets ayant accompagné des pratiques magiques. Objets découverts dans la maison de Madame P. après sa mort. Des têtes de diables, fabriquées sur commande par un potier local.

figure du diable.jpg

Des figures humaines ou des cœurs plantés de clous comme des fétiches africains.

fétiche.JPG

Des souches d’arbres sculptées de formes fantastiques où l’on touche aux territoires de l’art brut.

racines.JPG

Respect, respect, respect! C’est pas de la rigolade. Ces objets ont été recueillis par l’ethnologue Daniel Pouget. Ils proviennent de sa collection du Couvent de Chazelles sur Lavieu (Loire) qui m’a l’air bien passionnant.

le_couvent.jpg

La place me manque pour vous raconter les autres sections de l’expo mais il y a encore pas mal de curieuses choses à se mettre sous la paupière : statuette d’envoûtement, cannes de bergers, tuile faîtière, anti-sex-toys destinés à couper le sifflet d’un nouveau marié à qui on veut faire des misères (on appelait ça «nouer les aiguillettes»).

aiguillettes nouées.JPG

affiche.JPGA la sortie, avant de vous précipiter sur le catalogue ou sur Le Mag qui contient un entretien avec Hugues Berton et Christelle Imbert, les deux ethnologues dont beaucoup d’objets figurent dans l’expo, n’oubliez pas de looker l’extrait de Häxan, le film muet du grand cinéaste danois Benjamin Christensen. C’est de 1920 et c’est magique.

11.11.2011

La muraio dis óufrèndo : espousicioun foutougrafico

Vous me connaissez, je résiste pas à un bon mot. Alors quand j’ai croisé Espousicioun c’était fatal que je m’y intéresse. Espousicioun, c’est pas sorcier, c’est exposition en langoustique avignonnaise. Exhibition for our english friends visiting the city of the popes. Une espou (en abrégé) à signaler aux Animuliens de tous les pays.

expo mur avignon 3 au 30 nov.jpg

Celle de l’Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse qui, jusqu’au mercredi 30 novembre 2011, expose une série de photos grandes et petites relatives au mur votif de la prison Ste-Anne dont je vous ai encore touché deux mots pas plus tard que pendant les vacances d’été. Voir mon post du 18 août 2011 : Adieu prison, bonjour palace.

Je vous incite maintenant à un rendez-vous sur l’Avignon blog du graphiste Michel Benoit, réalisateur de cette exposition et grand organisateur de tentatives de sauvetage dudit mur.

 article avignon.jpg

Ceux qui ne seraient pas convaincus par son décarcassage en faveur de ce fragile petit patrimoine en apprendront plus en allant sur la video de Felip Hanula qui s’y trouve. Tournée apparemment le jour du vernissage de l’espousicioun, elle en propose un panorama (c’est pas une raison pour vous dispenser d’y aller, hein!). Panorama entrelardé d’entretiens de Michel Benoit, à l’enthousiasme jovial : «lieu exceptionnel!, Phénomène d’art!, Valeur symbolique! » et du photographe Philippe Rabstejnek dont j’aime bien le cri du cœur : «un mur actif!». Les autres interviewé(e)s appartenant plutôt au giron de l’Alma Mater. 

Parmi ceux et/ou celles-ci, de sympathiques étudiantes hyper-sérieuses et la bouche pleine de «communication». Elles se dépensent bravement pour promouvoir l’éventuelle conservation future de ce morceau de bravoure d’art et de dévotion populaires qu’elles viennent de découvrir. Même si elles admettent bien volontiers que le mur est actuellement «peu utilisé, peu décoré» (Sarah) ou «pas au meilleur de sa forme», selon Marion dont je kiffe les grosses lunettes d’intellectuelle.

On ne peut malheureusement pas leur donner tort car c’est toujours quand les carottes sont cuites pour ce genre de créations collectives à la limite de l’art brut que l’université s’intéresse à elles.

expo.jpg

Heureusement que la blogosphère n’a pas attendu quant à elle pour rodailler autour du mur votif d’Avignon qui renoua si spontanément avec la tradition des ex-votos, si vivace en Provence. Le blogue de Michel Benoit en énumère une dizaine d’autres qui depuis 2007 ont documenté la chose. Animula Vagula s’honore d’être dans cette liste, même si ses communications sur le sujet sont relativement récentes (2010 et 2011).

ART.JPG

En tous cas, votre petite âme errante n’est pas peu fière d’être la seule à avoir construit un «espace de communication» (pour m’exprimer comme Emmanuel Ethis, le président de l’Université d’Avignon) entre l’extérieur et l’intérieur de la prison. Les clichés des fresques peintes par les prisonniers que je donne ici et sont évidemment un écho aux offrandes restées logées dans le mur d’enceinte.

caravelle détail.jpg

fresque détail.jpg

chapelle tuyau détail.jpg

graffito bulle.jpg

28.10.2011

Aloïse en noir et blanc

Aloïse en noir et blanc. C’est L’art brut à Cery. Une émission médicale provenant des Archives de la Télévision Suisse. Dans la série : Progrès de la médecine. Animateur : Alexandre Burger. Un Jacques Chancel suisse. On radioscopise aussi des dessins de Jules Doudin en compagnie d’un psychiatre qui a des faux-airs de Jean-Jacques Pauvert. Radiateurs, micros, cameras, interrupteurs, téléphones… tout est gros. Un peu d’indulgence : on est en 1965. Dame TV est encore balbutiante. Le commentateur fait ce qu’il peut avec les «patients psychiatriques» qu’on lui présente. Des dames dessinatrices. Mais il n’est pas à l’aise. Quant à la blouse blanche, elle s’obstine à ne voir dans les églises représentées que des «bâtiments»! Observez au passage l’agitation du stylo dans un coin de l’image quand le psy déplace la créatrice de mouettes qui a tendance à se coller devant l’objectif. M’est avis qu’elle lui porte un peu sur les nerfs avec sa «science» qu’elle ramène quand il l’interroge. Le toubib aimerait mieux qu’elle lui dise que c’est un aigle. Point barre. La télé est là, c’est plus le moment de délirer. Cliquez!

Aloïse Corbaz,art brut

23:21 Publié dans Ecrans, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, aloïse corbaz | |  Imprimer | | Pin it! |

15.10.2011

L’art brut se met au vert

Semaine granny en perspective. Elle commencera bien, dans une tonalité vert pomme. Car tout d’abord, qu’est-ce-que j’apprends? Le 23e Cahier de l’Art brut pointe son museau. A force j’y croyais plus. Le dernier en date remontait à perpète (2007). «Cahier» bien sûr est un abus de langage. C’est «Publications de la Collection de l’Art brut» qu’il faut dire, bien que maintenant -innovation- ce numéro vert soit publié par InFolio, éditeur suisse spécialisé dans l’archéo, l’archi, l’hist-art ou la photo.

l’art-brut-23.jpg

On avait eu toute la palette de la tranche napolitaine avec ces cahiers depuis leur début, du temps où mon daddy était minot (1964). On a eu le bon goût de ne pas changer la maquette de la couverture avec le titre en écriture à la Dubuffet. La seule excentricité est dans la couleur qui change à chaque fois. Et cette fois-ci, elle est d’un vert «granny Smith» appétissant.

fresh-granny-smith-apple.jpg

Le contenu est mondialiste et transchronique. Les œuvres abordées sont celles de créateurs européens, américains et asiatiques découverts il y a longtemps (Guillaume Pujolle, Laure Pigeon) ou plus récemment (Alexandre Lobanov, George Widener, Guo Fengyi), etc. Allons-y voir. Pour 48 Francs suisses, on va se régaler!

blackstock portrait.jpg

Il y a aussi, ça va de soi, Gregory Blackstock qui n’en finit pas d’inventorier les fouets

Gregory Blackstock

les oiseaux

Gregory Blackstock

les cafards du monde

Gregory Blackstock

Je vous avais parlé de ce gaillard là, il y a des lustres (voir mon post du 3 novembre 2006, Art brut ami, partout, toujours)

lulu et greg.jpgLa Maison mère de Lausanne lui consacre une expo.

La «première en Europe».

Gregory Blackstock

Ce n’est pas parce qu’elle dure juqu’au 19 février 2012 qu’il ne faut pas prendre votre billet pour y aller. Les grands ouikènes approchent et les pauvres morts de la guerre de 14-18 ne vous en voudront pas si vous préférez la visite du Château Beaulieu à la dépose de chrysanthèmes sur la tombe de poilus inconnus.

rose verte.jpgToujours côté vert mais avec des reflets roses cette fois, vous trouverez bien, dans votre garde robe un petit haut et un petit bas pour faire bonne figure au vernissage de la rue Haute (312-314) pour la nouvelle expo d’art & marges (économisons les parenthèses) à Bruxelles le jeudi 20 octobre 2011.

C’est qu’il ne faut pas plaisanter avec ça, les filles! ARTHUR BISPO DO ROSARIO c’est du lourd question ART BRUT.

Arthur Bispo do Rosario

Même si le leporello d’invitation en trois langues se croit obligé de nous prendre pour des pommes en nous assénant que ABDR «est une figure incontournable de l’art contemporain brésilien» («is een sleutelfiguur voor de hedendaagse Braziliaanse kunst»).

Arthur Bispo do Rosario

Saluons à ce propos l’effort soutenu de Carine Fol, co-commissaire de cette expo qui promet et promettra juqu’au 15 janvier 2012. En quelques années, elle aura réussi à se débarrasser de ce vilain petit concept d’art brut qui faisait tache dans les soirées mondaines bruxelloises ;-) . On n’est pas obligés de suivre son exemple mais réjouissons nous en, mes sœurs et mes frères : l’art brut n’est jamais plus lui-même que quand on ignore son nom.

arthur bispo do rosario