24.07.2011
Le Tour de France par la grand’route et les chemins creux
Le Tour de France s’achève et je vous ai pas parlé du Tour de France. Je vous parle jamais du Tour de France. Il est temps que ce scandale cesse. Le Tour de France n’est-il pas une dérive comme une autre? Je ne saurais donc vous en vouloir, mes sœurs animuliennes, si vous avez eu tendance à déserter mes lignes pour aller jouer les groupies sur les pentes du Galibier.
Pour vous changer de l’éternelle littérature blondinienne sur le sujet, je vous ai sorti de la naphtaline une strophe de Maurice Hallé, poète-chansonnier d’Oucques dans le Loir-et-Cher. Pote au fameux Gaston Couté, il sévissait comme lui dans le Montmartre de la grande époque, publiant à La Vache enragée, éditeur et cabaret.
Le titre de cette pièce ? Les Coureux , ce qui dit bien ce que ça veut dire :
«J’les avins vu sur le grand’route,
Passer en huit ou dix p’lotons,
Même qu’ien a qu’avaient d’la goutte
Su leux guidons, dans des poch’tons.
D’leus sacs, i’s tiraint des p’tit’s fioles,
I’s mettaint ça au bord… du creux.
Pis i’s s’enfilaint la bricole.
Ah ! que l’diabl’brul’ben les coureux!»
Bon, c’est en patois beauceron mais j’adore ça qu’on triture not’ bô langage françois et les poèmes qu’on comprend pas tout de suite. C’en est plein dans le recueil de Maurice Hallé, publié en 1921 et illustré par Germain Delatousche, un vaillant graveur sur bois un peu anarcho su’ les bords. Par la grand’route et les chemins creux que c’est son titre.
Tout un programme pour un été sous le vent de l’art brut, non?
Après Dicy, après Laduz, après Versailles et Malakoff, Mauriac, Bègles et Batz-sur-mer, après Martizay, je continue donc mon Tour de France à moi par le musée Fenaille à Rodez ous’que je vous engage vachement à voir (et jusqu’au 30 octobre, couac le flyer oublie de l’indiquer) les monstres élégants de l’expo Louis Pons, la plume est le dard du dessinateur.
Je vous engage et je suis pas la seule puisque monsieur Benoit Decron n’a pas hésité à changer son braquet soulagesien pour en faire de même.
16:38 Publié dans Ecrans, Expos, Glanures, Miscellanées | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : tour de france, le galibier, la vache enragée, maurice hallé, patois beauceron, germain delatousche, louis pons, la plume est le dard, musée fenaille | | Imprimer | | |
10.07.2011
Odyquité
Parmi les aoûtsiders de Mauriac 2011, les Animuliens observateurs auront remarqué la présence d’Ody Saban. Comme celle-ci, par ses œuvres interposées, a le don d’ubiquité, elle figure aussi jusqu’au 4 septembre à Bègles où le Musée de la Création Franche lui consacre une expo perso.
Il n’y a pas des masses d’infos sur le site de la CF à son propos. Je dois donc me contenter des deux visuels que j’ai reçus (merci Ody). Mais, mais, mais… Il y aura bien des Animuliens qui passeront par là pendant leurs déplacements ou leurs vacances. Qu’ils ne se gênent pas pour nous coucouter sur le sujet!
23:55 Publié dans Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | | Imprimer | | |
07.07.2011
Montez de la mine, descendez des volcans
Montez de la mine, descendez des volcans! Voilà le mot d’ordre aujourd’hui, camarades Animuliens. Esprit mine d’un côté, Outsiders (2e éruption) de l’autre : deux expos recommandables pour peu qu’on erre dans le Nord ou dans le Cantal.
Lewarde et son bois de jacinthes abrite la première.
Mauriac, que traverse la Méridienne verte, sert d’écrin à l’autre.
Esprit mine au Centre Historique Minier de Lewarde (à 8 kms de Douai) c’est pour ceux qui prennent de grandes vacances puisque c’est ouvert depuis le 1er juillet et que ça ira, ça ira, ça ira jusqu’au 31 décembre 2011.
Le timing est plus short pour Outsiders A.D.D.V. (Au-dessous des volcans) à la Chapelle Marmontel, 12 rue du Collège à Mauriac, vu que ça vernit le 16 juillet et que ça baisse le rideau le 24 août 2011.
Si je vous parle de l’expo minière de Lewarde, co-curatorisée par André Dubuc, dirlo du C.H.M. et par Carine Fol, aux manettes d’Art et Marges, ce n’est pas pour vous énumérer les «20 artistes internationaux» participants. Reportez-vous au programme. A mélanger ainsi des abstraits, des naïfs, des installateurs, des conceptuels, des vidéastes, des performeurs et des tutti quanti qui n’ont pas grand chose à faire les uns avec les autres, on aboutit toujours à quelque chose, qui pourrait être transposé, pour peu qu’on change de thème fédérateur (à quand Esprit filature ou Esprit ducasse, pour rester dans la note régionale ?). Non, je vous parle de Lewarde parce qu’à Lewarde, il y a aussi, il y a tout de même, Anselme Boix-Vives, Augustin Lesage et Gaston Duf qu’on s’obstine à enrôler dans les «zartistes contemporains». Que ce dossart conviennent aux 2 premiers, particulièrement à Lesage qui mollissait pas sur les expos de son vivant, à la rigueur!
Mais il faudrait revoir la copie pour ce qui concerne Gaston Duf. Ses rhinocéros ont plus à voir avec les bêtes qu’il aimait voir au cinéma avant d’être interné dans un hosto psy qu’avec la mine dont il n’a connu fugacement que le travail en surface.
Côté Cantal, le hic –car il y en a un– c’est que la liste des «artistes internationaux» (encore!) qui composent le spectacle comprend CHOMO et que c’est aussi une œuvre de CHOMO qui sert d’appât sur le flyer. Je croyais les œuvres de CHOMO cataloguées, sécurisées, en instance de classement après la vente publique d’une partie d’entre elles en juin 2010 (voir sur ce point ma chronique du 19 janvier 2010 : Chomo, une œuvre très prisée).
Je me demande donc bien d’où peut venir la longue figure blanche qui sert de fanal à l’expo Outsiders 2 in Mauriac. En tout état de cause il n’est pas sûr que CHOMO -individualiste farouche- aurait accepté de participer à une exposition de groupe. Il n’y a guère que Raymond Reynaud (qu’il appelait cependant «Renaud») avec qui il ait envisagé une collaboration. Et il y a même gros à parier que CHOMO aurait piqué une de ces volcaniques colères à voir une de ses images servir ainsi de locomotive à des travaux qui ne sont pas les siens. Dommage qu’il soit plus là, on aurait bien ri!
22:12 Publié dans Expos, Miscellanées | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : gaston duf, chomo | | Imprimer | | |
24.06.2011
Laduz ou la clef des songes
Avis à la population animulienne avide de plan détente aux trémolos des p’tits oiseaux!
Si vous cherchez un point de chute à la campagne pour le ouikène ou une thébaïde pour une retraite studieuse, afin de rédiger votre mémoire qui n’avance pas sur Paris, allez faire de beaux rêves au Musée de Laduz.
On dit «Ladu» et c’est dans l’Yonne. Vous le savez bien car c’est pas la première fois que je vous cause de cet adorable musée rural des arts populaires. Des arts et pas des «traditions» car la maison n’est pas confite dans le folklore.
Si Raymond et Jacqueline Humbert ont passé plus de 30 ans à rassembler les milliers de témoignages des activités, des rêves et du sens esthétique des gens d’autrefois, c’est pour que ça serve à ceux d’aujourd’hui qui ne sont pas tous des bourriques.
La preuve, Jacqueline Humbert vient de prêter des objets de sa collection aux Morceaux exquis, une expo que je vous ai signalée pas plus tard qu’au début du mois de juin, petits veinards que vous êtes. Raymond Humbert n’est plus de ce monde mais sa présence bienfaisante plane toujours sur le beau jardin du musée où il aimait peindre et où les arbres, quand ils poussent de travers, reçoivent le secours de tuteurs et d’attelles comme on le fait au Japon.
Dans une salle à part meublée de stalles du 18e siècle, rescapées de l’autodafé où elles étaient destinées par leur église, une exposition des peintures sur papier de Raymond Humbert est organisée par son épouse du 26 juin au 18 septembre 2011. Le vernissage de cette exposition intitulée Paysages est prévue pour samedi, le 25 juin 2011 à partir de 18 h à Laduz.
Une occasion rêvée de vous offrir une nuit au musée, du moins dans sa chambre d’hôtes. Car, vraiment, je vous assure, ce n’est pas «foutage de gueule» de ma part, on peut maintenant dormir dans cette maison enchanteresse.
Dans une aile adjacente, deux pièces à l’étage, superbement poutrées,
un petit escalier avec une rampe en forme de harpe en fer forgé vous attendent.
Et, jouxtant l’entrée du musée proprement dit,
une petite cuisine avec des carreaux bleus et des confitures.
L’Usage du monde de Nicolas Bouvier sur une table
Un tableau en laine de Marie-Rose Lortet accroché dans la bibliothèque.
Un coffre paysan à décor gravé, des galoches à châtaignes sur une armoire
quelques beaux objets ou ustensiles populaires fixés au mur ou suspendus.
Et un p’tit déj bio au soleil le dimanche matin car il y en aura.
Avouez qu’il y a pire!
00:38 Publié dans De vous zamoi, Expos, Jadis et naguère, Oniric Rubric, Poésie naturelle, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musée de laduz, arts populaires, raymond humbert, jacqueline humbert, marie-rose lortet | | Imprimer | | |
13.06.2011
De l’Aliénisme au Surréalisme
Saviez-vous que Jean Delay, le biographe d’André Gide, était l’auteur de La Cité grise, un roman, proche de L’Etranger d’Albert Camus, situé «dans les services de la Salpêtrière hantés par les fantômes de Charcot (…)»?
Ou que Hans Prinzhorn, après Heidelberg, n’est resté que quelques mois au «prestigieux Burghölzli» (hosto psy de Zürich) parce que son patron, Eugen Bleuler (l’inventeur de la schizophrénie) n’estimait guère ses «capacités de travail» et «son comportement envers le personnel féminin» ?
Si oui, chapeau, vous avez mérité la médaille de l’art brut! Sinon, j’ai le plaisir de vous l’apprendre. Je tire ma science du catalogue de la vente publique Auction Art (Rémy le Fur & Co) intitulé : De l’Aliénisme au Surréalisme.
Elle aura lieu jeudi 16 juin 2011 à Drouot Riche (salle 8). Mais même si vous pouvez pas y aller, ça vaut le coup de vous procurer ce catalogue pour les super notices qu’il contient.
On ne dit pas qui se les est appuyées. L’expert, Mr Oterelo, est connu pour ses lumières surréalistes. Il reçoit ici le renfort de Dagobert Asmara, qui n’a pas mis sa science à l’envers dans les 310 numéros qui composent la première partie provenant de la Bibliothèque du neurologue suisse Julien Bogousslavsky.
Des tas de choses goûteuses là-dedans pour une Animulienne doctorante à cœur (je sais qu’il y en a). Mais même si vous avez passé l’âge d’être étudiant vous aurez de quoi satisfaire votre curiosité avec le n°231 : un article de Walther Morgenthaler paru en 1919, soit 2 ans avant son fameux livre sur Adolf Wölfli. Ou avec le n°99 qui propose le rare catalogue du Cabinet de M. Georges Courteline (1927) recensant 32 petites horreurs «naïves». Je pourrais vous citer aussi le n°270 : un tirage argentin du livre de Rogues de Fursac de 1905 et pleins d’autres trucs encore. A signaler dans la 2e partie une Ronde des filles de l’air (n°397), dessin d’un pensionnaire de Charenton.
Il chapeaute des documents concernant Nadja (n°398). Voir aussi, à ce propos, dans le n°148 (Un souvenir d’enfance de Léonard de Vinci) la dédicace de Freud à Henri Claude.
Sur ce psychiatre non hostile à la psychanalyse, la notice du catalogue Le Fur apporte de très intéressantes précisions : «Il ne mérite pas (…) le terrible portrait au vitriol qu’en fait Breton dans Nadja. Breton l’accusait d’avoir interné Léona Delcourt et de la maintenir emprisonnée dans des conditions atroces.
Des recherches ultérieures ont pu établir que, ramassée sur la voie publique pour racolage et en proie à une grande confusion intérieure, elle avait été transférée chez Gatian de Clérambault au dépôt de la Préfecture de Police, avant de passer aux admissions de Sainte-Anne où elle ne resta que quelques jours avant d’être déplacée à Perray-le Vaucluse, puis dans le nord où elle finit ses jours».
En conclusion, l’auteur de la fiche croit bon de mettre les points sur les i : «Une accusation surréaliste dont il fallait innocenter le professeur Claude!».
23:26 Publié dans Ecrits, Expos, Gazettes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : aliénisme, surréalisme, ventes publiques | | Imprimer | | |
08.06.2011
Carlo et les convulsionnaires
C’est la saint-Médard. Retour des convulsionnaires. L’occasion idéale de sortir la dernière phrase de Nadja. Bon, elle a déjà beaucoup servi, d’accord. Mais elle fait toujours son petit effet. Surtout si on n’oublie pas de hurler au milieu quand on l’écrit : «La beauté sera C.............E ou ne sera pas».
Les convulsionnaires se réuniront deux fois ce mois-ci. Non sur la tombe du diacre Pâris mais dans cette Jérusalem céleste de l’art brut qu’est la Galerie Berst.
Jeudi 9 juin de 18 h à 21 h, à l’occasion du vernissage Carlo Zinelli
et le mardi 14 juin 2011 à 19h où l’on se convulsera d’aise en écoutant la conférence donnée par Daniela Rosi. «Si tu n’es pas crétin, regarde!» nous interpelle quelque part le flyer.
Tant pis pour ceux qui n’aiment pas se faire tutoyer.
23:14 Publié dans art brut, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, carlo zinelli, galerie christian berst, daniela rosi, nadja, st médard | | Imprimer | | |
03.06.2011
Morceaux exquis rue Récamier
Il s’en passe de belles dans le sixième! Chose vue carrefour Croix-Rouge, autrement dit place Michou-Lapin. Un petit canaillou n’a pas craint d’escalader le gros bourrin en bronze qui exhibe là ses phallocratiques avantages pour aller lui planter sur la tête un turlututu détourné de la circulation. Passant par là pour me rendre au déballage de livres place Saint-Sulpice, je n’ai pas pu empêcher mon chéri-que-j’ai d’immortaliser avec son kodak cette customisation sauvage.
Il faut disait Victor Hugo «mettre un bonnet rouge au dictionnaire». Il n’est pas mauvais non plus de mettre un chapeau de sorcière aux commandes de l’état qui s’imaginent qu’il suffit de fourrer un balai mécanique dans le derrière d’un poncif de la mythologie antique la plus machiste pour en faire un chef d’œuvre de l’art urbain contemporain.
Un peu plus loin, chez Rachida, c’est une autre chanson. La mairesse a de la chance puisque son arrondissement abrite la charmante sous-station de la rue Récamier, une confortable impasse qui prend des allures de chaise-longue en ces temps caniculaires. Il ne se fait plus d’électricité au numéro 6. La sous-stat est devenue l’Espace Fondation EDF.
S’y déroule en ce moment et jusqu’au 25 septembre 2011 une expo qui a l’avantage de faire sortir des caisses marseillaises où ils étaient enfermés quatre centaines d’objets provenant pour l’essentiel du défunt (snif, snif!) Musée des Arts et Traditions Populaires.
Si vous n’avez pas eu la chance de connaître cet établissement vénérable du temps où il crèchait dans le Bois de Boulogne, allez voir cette expo intitulée Morceaux exquis.
Bien que le joyeux mélange, choisi pour animer, autour du double thème du corps et des proverbes, les vitrines consacrées aux divers morceaux (nez, bouche, œil, ventre, peau, poils etc.), aurait sûrement fait bondir son fondateur Georges-Henri Rivière, mort en 1985.
L’année même où naquit le Centaure de César dont je vous causais plus haut! Si vous êtes comme les blés (fauchés), allez-y aussi. C’est gratuit. Et le catalogue coûte que 10 €.
C’est pas si fréquent pour une expo de qualité où vos moutards aimeront caresser les fesses d’une noix de coco et vous poser des questions embarrassantes sur la Fanny qui montre son postérieur sur une plaque émaillée ou sur Gina et ses trois lolos.
Coll. MuCEM, Paris/Marseill © Christophe Fouin
Je vous en fais pas des tonnes parce qu’il y a un dossier de presse. Impresssionnable comme je suis, j’ai été surtout conquise par une poupée d’envoûtement venue de Talence en Gironde en 1960. J’en fouette encore. Elle vaut à elle seule le déplacement.
Coll. MuCEM, Paris/Marseill © Christophe Fouin
Mais j’ai revu avec plaisir des objets sculptés par Xavier Parguet (ou Parguey?), dit Le Zouzou, sculpteur sur bois de Vuillafans dans le Doubs, jadis célébré dans le Fascicule 5 des Publications de l’Art brut.
Coll. MuCEM, Paris/Marseill © Christophe Fouin
J’ai regoûté aussi aux beautés candides des pierres sculptées par Fernand Duplan qu’on admirait autrefois au Petit Musée du Bizarre à Lavilledieu en Ardèche. Ce Fernand Duplan dont on sait peu de choses, si ce n’est ses dates (1899-1976) et son pays : Ruoms.
Coll. MuCEM, Paris/Marseill © Christophe Fouin
Après ça j’étais mûre pour une petite balade dans le square Roger Stéphane qui sent le jasmin et qui sait délicieusement se faire oublier à deux pas de la ronflante rue de Sèvres.
23:55 Publié dans Expos | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art brut, art populaire, atp, xavier parguet, fernand duplan, petit musée du bizarre | | Imprimer | | |
01.06.2011
L’œuvre secrète de Lucy Vines
Attention! Ceci n’est pas de l’art brut! L’auteur de ces figures hors du temps, qui émergent silencieusement du noir ou y retournent, vit dans un milieu d’artistes et d’écrivains. Pas de l’art brut donc, ces dessins de petit format, réalisés au crayon Comté sur papier grené.
Pas de l’art brut mais ça mériterait d’en être. Du moins entre eux et lui n’y a-t-il pas incompatibilité. Il est même extrêmement troublant de voir comment, avec des moyens qui sont ceux de la culture, Lucy Vines parvient à s’approcher du foyer incandescent où l’art brut se consume.
Cette Américaine de Paris, qui n’est plus -loin s’en faut- une jeune fille, voit ses œuvres exposées jusqu’au 13 juillet 2011 à la Maison de l’Amérique latine, 217 boulevard Saint-Germain. Je ne la connais pas car c’est je crois la première fois qu’on voit son travail à Paris. Et jusqu’à une date récente (expo à la Fondation Morat à Fribourg-en-Brisgau en 2005-2006 et à l’Ecole des Beaux-arts de Nîmes en 2007) il était même resté secret.
Secret, on n’imagine pas ça aujourd’hui! Pourtant seuls quelques happy-few avaient accès à ces images sans clé ni serrure et ils échouaient jusqu’à présent à convaincre Lucy de les montrer. Voilà qui est fait maintenant et il ne faut pas manquer l’occasion. Un livre-catalogue accompagne l’exposition. Avec 4 études critiques par Homero Aridjis, Alain Madeleine-Perdrillat, Jean-Paul Michel, François Lallier.
Ils vous diront mieux que moi tout ce qu’il y a à savoir sur les traits aux circonvolutions chaotiques, sur l’absence de décor et d’accessoires, sur la lumière orangée et diffuse (comme dans la peinture de Georges Seurat) qui caractérisent la manière de Lucy Vines. Il faut de bonnes plumes pour appréhender cette œuvre intimiste, fragile et mystérieuse, dépourvue d’intentions de fantastique, sans besoins de recours onirique trop évident.
Aussi j’y renonce. D’une manière plus terre-à-terre, je dirai que Lucy Vines me fait penser à La Petite fille aux allumettes de Hans christian Andersen. Ses figures poreuses, un peu mangées de nuit, ont l’air d’être saisies pendant le court instant de lumière procuré par la combustion d’un bâton soufré
Détails supplémentaires mais qui ont leur prix : Lucy Vines se tient à l’écart du monde des galeries, elle livre peu de choses de sa vie car elle ne désire pas que sa biographie influence notre interprétation de son œuvre. De quoi faire une exception, non? Ouvrez les yeux, fermez les yeux : c’est Lucy Vines.
Les photos, extraites du catalogue, sont de Michel Nguyen .
12:11 Publié dans Expos | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : lucy vines | | Imprimer | | |
08.05.2011
Turin, Lausanne, Gugging : un trio d’expos
Je cause, je cause, souvent pour ne rien dire. Je ferais mieux de garder un œil sur le calendrier plutôt que de tchatcher. Voilà que j’ai loupé le vernissage de la Galleria Rizomi. Même si je ne pouvais vraiment pas être à Turin vendredi dernier, j’aurais pu vous le signaler pour le cas où. Enfin, vous avez jusqu’au 5 juin pour aller vous baigner dans l’ambiance tout à fait «mortelle» de Giovan Battista Podesta. J’emploie cet adjectif à cause du beau carton d’invitation mais il y aurait beaucoup d’autres choses à dire à propos de ce peintre-modeleur-décorateur dont les hippies des années de jeunesse à mon daddy aimaient les couleurs vives et les messages de vieux sage.
Par exemple, ce commentaire que j’emprunte au dit carton et qui nous éclaire sur le goût des costumes chamarrés de Podesta quand il accompagnait, à leur dernière demeure, ses concitoyens récemment décédés : «Fermato dai passanti incuriositi da barba e capelli lunghi, dal bastone scolpito con le stazioni della sua vita e da una cravatta decorata con becchini (squelettes) e scheletri (fossoyeurs) Podestà si preparava ad accompagnare ogni defunto di Laveno nel giorno della sua dipartita».
Pour rester dans le domaine italo-inspiré et parce que je suis encore dans les temps, je vous rappelle -parce qu’étourdis comme vous êtes vous l’avez peut-être oublié- que jeudi 12 mai 2011 à la Maison-mère sise à Lausanne c’est le vernissage du Colonel Astral, autrement dit Fernando Oreste Nannetti dont je vous ai déjà tout dit le 15 novembre 2009. Ce «diariste extravagant», comme l’appelle le dépliant invitatoire de la Collection de l’Art brut, a créé toute une épopée murale à la pointe d’une boucle.
Ces textes gravés qui font penser à de l’écriture étrusque seront présentés avenue des Bergières juqu’au 30 octobre 2011. On n’a pas pu transporter la cour de l’hosto psy de Volterra en Toscane où Nannetti a œuvré dans les salles de Château Beaulieu mais il y aura des fragments en fac-sim et des photos. Un catalogue contiendra un panorama de 7 mètres montrant le toutim et I graffiti della mente, le film de Pier Nello Manoni, le réalisateur-photographe à l’origine de cet hommage. Parmi les auteurs des textes, mon curseur s’est arrêté sur les noms de Lucienne Peiry, de l’écrivain Antonio Tabucchi et sur celui de Vincent Capt du collectif de recherche dénommé CrAB.
Pour compléter ce bouquet d’expos recommandables -animulatiquement parlant- comment se priver d’une floraison viennoise? Gaston Chaissac ! (avec un point d’exclamation s.v.p.) montre au Gugging Museum, jusqu’au 25 septembre 2011, une grosse centaine de dessins, collages, peintures, sculptures et totems du peintre-épistolier. «Zeitlebens war Chaissac nicht in der Lage, seinen Lebensunterhalt durch sine Kunst zu bestreiten» nous dit le dépliant qui présente cette expo. Grosso modo : «Durant toute son existence, Chaissac n’a pas été en mesure de gagner sa vie avec son art». C’est peut-être aller un peu vite et ne pas tenir compte des efforts de ses marchands, Iris Clert et Cordier-Ekstrom notamment.
Mais le Gastounet n’était pas toujours, sans le faire exprès, des plus coopératif. En bonus, au Novomatic salon (?), on nous promet une cinquantaine de travaux sur papier encore inédits car provenant d’Annie Chaissac. Parallèlement à la Galerie Gugging est annoncée aussi une «Einladung» où Chaissac est associé à d’autres artistes qui n’ont en commun que d’être français.
Organisée avec le concours de 3 galeries, respectivement parisienne, anglaise et suisse. Le vernissage est le 26 mai et elle durera juqu’au 2 octobre 2011. Elle s’intitule : Vive la France !
Bon, je vous quitte car ça me fait penser à mes pommes de terre frites.
17:05 Publié dans Ailleurs, art brut, Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, giovanni battista podesta, fernando oreste nannetti, gaston chaissac, gugging, galleria rizomi, collection de l'art brut | | Imprimer | | |
28.04.2011
Tête de brigand mise à prix
Piqûre de rappel au rayon art populaire. Une bonne dose dans ma boîte ce matin. Le catalogue de la vente Martine Houze dont je vous ai parlé le 10 avril dernier. Par chance, la factrice s’était levée avec les poules. Sacré bel objet. Vous pouvez vous contenter de le consulter sur le site de l’expert mais cette version papier, ce serait dommage de vous en priver. Là, j’ai pas le temps, alors je me contente de vous reproduire une image tout à fait dans vos cordes.
Mais sachez aussi qu’il y a des tas de pièces brillantes, curieuses, émouvantes dans ce catalogue qui témoigne de l’intérêt passionné de l’expert pour des productions paysannes délicieusement «terre à terre», tels ces pièges à assommer les rats si ingénieux qu’on dirait des outils fabriqués par les Inuits.
Sur le plan de la langue, on se délectera aussi de la lumineuse précision des descriptions accompagnant les images. Style : «Sculpture d'art brut façonnée dans un tronc d'arbre fruitier. La bouche comporte une dentition naturelle. Les yeux en verre bleu apparaissent dans les fentes d'un loup. Le front ceint d'une cartouchière en cuir garnie de quelques plumes et d'une matière rose».
00:25 Publié dans Encans, Expos, Gazettes | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art brut, art populaire, martine houze | | Imprimer | | |