29.04.2012
Le Petit est malade
Malade. Je suis malade. Mon toubib a diagnostiqué une crise de flemmingite aigüe. Je touitte, je zappe, je baille. Toute la journée. Votre petite âme errante plane au ras de la moquette. Mollement. Thé, fleurs et bâtons d’encens : mon daddy s’inquiète mais si ça me plait à moi de déprimer! Je plonge et replonge dans mon remède favori : la lecture. A la recherche des livres perdus dans mon cafard-naüm.
Sous une pile de vieilles paperolles, je retrouve les curieux carnets d’hôpital d’Alfred Le Petit (1841-1909), un fameux dessinateur, peintre, caricaturiste et photographe et journaliste de la fin du XIXe siècle. A la fin de sa vie, entre 1903 et 1905, il fait de longs séjours à l’Hôtel-Dieu. Il y rédige un journal, accompagné de dessins pathétiques et drôles, mais toujours justes, où il chronique le quotidien de l’humanité souffrante dont il partage le sort.
Comme le dit la 4e de couverture de ce bouquin publié aux éditions Alternatives et présenté en 2007 par Jean-François Le Petit, petit fils de l’artiste et par Guillaume Doizy, spécialiste de la caricature, «Alfred Le Petit nous fait entrer de plain-pied dans la vie d’un hôpital au début du XXe siècle, à une époque où ces établissements de soins sont en pleine mutation». Rien à voir avec l’art brut par conséquent. Quoique. Alfred Le Petit délaisse parfois sa plume et son crayon pour s’aventurer dans la peau d’orange façonnée par repoussage.
Les circonstances particulières dans lesquelles ce virtuose d’un art professionnel calibré se trouve placé (ennui, maladie, désœuvrement) font que, délaissant les techniques et les matériaux où il excelle d’ordinaire, il s’amuse à en expérimenter de nouvelles.
Le résultat est étonnant et je ne résiste pas au plaisir de vous montrer cette série de masques orangesques, séchés et vernis rassemblés sur la page 109.
Les adorateurs fanatiques de châteaux de Versailles diront peut-être qu’il s’agit là de petites friandises «minables» (voir le commentaire indigné à ma note du 20 février 2012) mais moi je trouve que ces petites gueules effrayantes et sympathiques justifieraient à elles seules que vous vous procuriez ces souvenirs d’Alfred tant que c’est encore possible.
17:06 Publié dans De vous zamoi, Images, Lectures | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : alfred le petit, curiosités | | Imprimer | | |
05.03.2012
James Castle : une première en France
Ouf, ça y est! La campagne est retournée chez elle et nos pauvres candidats n’ont plus besoin de flatter le cul des vaches pour grapiller des voix. Déjà, nos amis éleveurs se retroussent les manches dans les prés car on manque de bœuf, figurez-vous (raison de ma note précédente). De bœuf qui fait le bon bouillon.
Mais je graisse, je digresse et si ça continue vous allez cliquer ailleurs. Vous auriez grand tort car vous manqueriez les petites images concentrées de James Castle.
«J’en ai encore les yeux qui piquent» m’avait dit l’Animulien Matthieu (voir son commentaire sur mon post du 11 février 2012) en évoquant l’exposition des dessins de cet Américain de l’Idaho à la super-class Galerie Karsten Greve de Paris jusqu’au 17 mars 2012.
J’ai voulu en avoir le cœur net. La Galerie KG, rue Debelleyme dans le 3e, est un écrin de choix pour ces petits formats tout à la fois denses et silencieux. Les grands espaces blancs de l’endroit, le gris mat du sol servent particulièrement bien ces compositions pour la plupart réalisés dans une gamme allant du noir de la mine de plomb, à la sépia et aux couleurs froides.
L’accrochage en série ou en ligne renforce, s’il en était besoin, le pouvoir de ces scènes intimistes, rurales et mentales, explosantes et fixes comme un gaz comprimé.
Que vous dire d’autre? Je n’en sais guère plus que ce que nous apprend la notice, stricte et pas chichiteuse, distribuée par la galerie pour cette première rétrospective en France. Que James Castle (1899-1977) récupérait des emballages et des prospectus parce que son fermier de père tenait aussi un magasin et un bureau de poste dans le village de Garden Valley où James vécut avec sa famille.
Qu’il «préparait sa palette en mélangeant de la suie, du papier crépon et de la salive». Qu’il «dessinait à l’aide d’une baguette de bois taillée ou d’un carton souple roulé».
Que cet analphabète n’en réalisait pas moins des objets avec des collages de lettres. Qu’il n’en couvrait pas moins de ses dessins les pages des livres. Que son œuvre discrète et personnelle avait tout de même, de son vivant, attiré l’œil d’un «cercle restreint d’amateurs d’art»
Que James Castle ne pouvait pas faire autrement que de dessiner, que ses œuvres étaient un «moyen de communiquer avec son entourage et plus encore de réfléchir sur le monde», vous l’avez deviné, grands fans de l’art brut que vous êtes.
Ah, j’oubliais : James Castle était sourd de naissance.
23:45 Publié dans art brut, Expos, Images | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, james castle, galerie karsten greve | | Imprimer | | |
02.03.2012
Graffiti historiques : hommage à Serge Ramond
Bookcrossing dans mon quartier. En allant chez mon boucher acheter du jambon de Bayonne (j’aime bien cette ville brocardeuse de président-candidat), je tombe sur le Club des Cinq abandonné sur du mobilier urbain.
Je me replonge avec délice dans les aventures de Claude, d’Annie, du chien Dagobert et des garçons en faisant la queue (mon boucher est le meilleur). Cela me rappelle ma jeunesse.
J’avais encore l’âge de me passionner pour Enid Blyton quand j’ai visité le Musée des Graffiti de Verneuil-en-Halatte avec mon daddy, déjà dégarni mais toujours à la recherche de promenades du dimanche sortant de l’ordinaire.
Et voilà-t-il pas qu’en 2012, on organise déjà des hommages à Serge Ramond, son directeur, inventeur, prospecteur et cicerone qui a tiré sa révérence en 2010. C’est comme si je m’étais découvert une ride de plus au contour de l’œil. Serge Ramond y’avait pas moyen de l’arrêter tellement il était passionné par son truc. Un peu dur pour une gamouche. J’avoue que je déconnectais un brin des érudits commentaires historiques du sieur Ramond.
Mais je me souviens qu’à la sortie j’avais tout de même exigé de mon daddy qu’il m’achète toute la panoplie de souvenirs en vente au musée : empreinte, moulage, affiche, flyers, revue imagée. Je jette rien, je les ai encore. J’y ajouterai ce beau portrait de l’intrépide chercheur autonome (S.R. recueillait des fois les graffiti dans des endroits impossibles au péril de sa vie).
Dans les temps, on n’aurait pas pensé que les graffiti puissent rameuter les foules. S.R. n’en poursuivait pas moins son recensement en navigateur solitaire. Le monde, en deux/trois décennies, a tellement changé que la Mairie du 11e arrondissement de Paris en est à accueillir (merci madame) rien moins que le 5e Colloque «Graffiti historiques». Plein de pistes à suivre dans celui-ci qui nous entraîne dans les châteaux de la Loire (y’a pas qu’à Versailles qu’on griffe), à Noyers-sur-Cher, à Martizay dans l’Indre.
Suivez le programme du samedi 24 mars 2012 pour en savoir plus et suivez le guide, dimanche 25 mars dans le Donjon de Vincennes et à l’Hôtel de Cluny.
Rencarts à 10h15 et à 15h30 après le déjeuner (qu’est ce qu’on mange?). C’est Christian Colas, un conférencier du samedi qui m’a prévenue. Qu’il en soit remercié. Il est l’auteur d’un livre dont j’ai eu l’occasion de vous signaler l’existence le 3 octobre 2010 dans ma note : Regards d’automne.
00:05 Publié dans Expos, Images, Parlotes | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : graffiti, serge ramond, christian colas | | Imprimer | | |
11.02.2012
Richard Greaves change d’environnement
Le hasard c’est pas comme le lézard.
«Y’a pas de lézard» et
«le hasard fait bien les choses».
La preuve : au moment où des nouvelles de Richard Greaves nous arrivent par l’intermédiaire de la revue 303, des photos récentes du grand créateur québécois sont tombées dans ma messagerie et par ricochet sur vos écrans. Tous les Animuliens du monde entier seront ravis d’apprendre que Richard Greaves, que j’avais un peu perdu de vue, va bien et continue à œuvrer sous le ciel de sa province de Beauce (Qc).
Pour les nouveaux qui se branchent maintenant sur mes lignes, je rappelle brièvement que Richard Greaves, depuis 1989, où il a quitté la ville «qui tue l’être humain» a édifié, sur un terrain avoisinant une forêt, tout un ensemble de bâtisses superbement déstructurées mais solides, témoignant d’une passion pour l’asymétrique.
Sous la houlette de Sarah Lombardi, actuellement en charge de la CAB de Lausanne, et de Valérie Rousseau, cofondatrice de la SAI (Sté des Arts indisciplinés), un bouquin du genre incontournable est sorti en 2005 sur l’œuvre de Richard Greaves, anarchitecte. Remarquablement illustré de photos dues à Mario del Curto, c’était fatal qu’il s’épuise. Tant mieux pour les petits chanceux qui le possèdent.
On peut aussi glaner de l’information par ci, par là. Le bruit avait couru que Richard avait abandonné son site. Ce n’est pas vraiment le cas. L’article de Jean-Louis Lanoux dans 303 (Richard Greaves, bâtisseur de l’oblique) précise des choses indispensables à connaître pour ne pas désespérer de «l’urbaniste funambule (…) à l’allure d’éternel adolescent, mince et dansant». Richard que diverses péripéties «ont éloigné de son site historique, s’est installé dans un village voisin où il crée derechef».
Et son public peut donc continuer à l’encourager de loin en respectant la tranquillité nécessaire à son travail, à sa vie et à celle de ses proches puisqu’il a fondé une nouvelle famille.
Dans son nouveau cadre, Greaves travaille toujours avec «la vidange du monde», ces «monstres» (comme nous les appelons en Europe) que la société industrielle multiplie autour de nous. Il transforme et inclut ces «déchets» pleins de promesses dans des installations qu’il assemble au moyen de cordelettes plutôt que de clous qui agressent les matériaux.
Lanoux, à ce sujet, cite un propos fort éclairant de Richard Greaves : «J’ai beaucoup aimé et observé les vieux objets, les objets utilisés, les objets rongés par la force du temps et les histoires humaines. Je ne me considère pas différent : une chose qui a beaucoup servi, qui a vécu, que l’emploi et l’abus ont usée et polie».
Les photos de mon post sont de Louise Boucher, la compagne de Richard. Merci Lou, de les avoir prises pour Ani et ses lecteurs! Elles nous donnent une forte envie d’hiver québecois. Merci de nous faire savoir que «Richard continue de défaire des anciens bâtiments : école, grange, pour en faire des nouvelles cabanes selon ses méthodes et sa marginalité».
C’est réconfortant de savoir que, de temps à autres, il retourne dans le rang Chaussegros s’occuper de ses anciennes bâtisses. «L’action de la neige et de la pluie peut avoir raison d’elles mais de patrimonialisation il n’a cure» écrit l’auteur de l’article sur Greaves dans le n°119 de 303. L’action de l’eau, c’est bien connu, fascine Richard Greaves. «Toutes mes cabanes sont devenues croches (= tordues) grâce à l’eau». Laissons lui ce mot de la fin.
17:28 Publié dans Ailleurs, De vous zamoi, Images, Sites et jardins | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : richard greaves, mario del curto, jean-louis lanoux, sarah lombardi, valérie rousseau | | Imprimer | | |
14.01.2012
Métamorphoses et regards
Clovis et Pol. Pol et Clovis. Attention : gardez le carton. Le carton d’invitation à l’exposition de la Galerie Maeght. Il sera collector.
Et pointez vous jeudi, le 19 janvier 2012 de 6 pm à 8 pm, rue du Bac au 42, près du magique taxidermiste Deyrolle
(je dis ça pour ceux qui seront arrivés en avance). Pour ceux qui arriveraient en retard ou pour celles qui en profiteront pour s’offrir un petit balthazar intime avec leur(s) chéri(s), c’est pas loin non plus de la super brasserie 1900 baptisée Les Ministères car on trouve beaucoup d’immeubles officiels par là.
C’est dire que le coin ne fait pas purée, à une petite cuiller du boulevard Saint-Germain. Que nos Animuliens étrangers ou provincialiers en visite à Paris se rassurent donc. L’expo s’intitule Métamorphoses et regards, photographies et ça fait pas de mal de voir Clovis Prévost dans les beaux quartiers. Je vous parlais de Pol Bury parce que la photo choisie pour nous entraîner au spectacle provient du tournage de 8500 tonnes de fer, un court métrage expérimental réalisé en 1971 par CP et PB. Je vous dis pas qui est Pol Bury. La honte sur vous si vous savez pas mais je vous dis que 8500etc. est un cinétique hommage à la Tour FL. Que vous vous serez faite dans la matinée avec vos chers bambins, chers amis de Cahors, de Libourne, de Niort, de Villeneuve d’Ascq.
Clovis Prévost photographie la Tour comme Bill Brandt photographiait les corps sur la plage. De près et en détail, il scrute la dentelle d’acier, révèle son côté arachnéen comme une encre de Madge Gill. En résultent d’étonnantes distorsions à la Kertesz où le miroir déformant capte les sinuosités végétales de ce toujours étrange monument populaire qui exerce de par le monde une influence certaine sur l’imagination de bien des créateurs autodidactes.
Monsieur G.
Ceci pour dire que Clovis Prévost possède, sans avoir l’air d’y toucher, une façon toute personnelle de lier par un fil de rêve des choses de la meilleure culture et des apports de l’art brut. Non seulement en s’attachant aux formes mais aussi en s’autorisant cette empathie discrète et légèrement en retrait qui lui font témoigner en live du travail de Miro, Ubac ou Calder aussi bien que de celui de Monsieur G. ou de Robert Garcet, édificateur d’une autre tour apocalyptique, celle d’Eben Ezer, près de Liège en Belgique.
De ce point de vue, les images de Clovis Prévost ont le mérite de témoigner du style du photographe sans prendre la vedette à ceux qu’il portraiture. Clovis Prévost possède l’art de créer une proximité avec les grands artistes qui lui vient de son intérêt pour les «petits» créateurs. Les «icônes» ou les «hommes du commun» c’est tout un pour lui.
Clovis Prévost ne place pas le spectateur dans une attitude de révérence intimidante et ça nous soulage de quelques kilos de carapace. On appréhende, l’esprit léger, les univers de Ferdinand Cheval, Antoni Gaudi, Jacques Monory. Voyez le texte du carton pour les autres cas.
Y figure aussi le ministre André Malraux. L’exaltation dalinienne de celui que les caricaturistes baptisaient «l’esthétique tranquille», exaltation qui culmina en 68 dans une fameuse manif gaulliste en compagnie de «Michou lapin» (Michel Debré), est parfaitement saisie au vol par l’objectivité douce de cet observateur-témoin hors pair : Clovis Prévost.
17:55 Publié dans art brut, Expos, Images | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : clovis prévost, pol bury, monsieur g, robert garcet, ferdinand cheval, andré malraux, galerie maeght | | Imprimer | | |
10.01.2012
Animula à la loupe
Cette fois ci, je l’ai pas loupé. Les circonstances étaient propices : pas de pluie, assez de lumière, j’avais mon petit kodak, même mon iphone je l’avais pas oublié. J’aurais pu lui tirer deux fois le portrait à cette loupe de mon quartier qu’un arbre un peu exubérant s’emploie à faire grossir d’année en année.
Dernièrement un petit malin l’a customisée dans le genre arcimboldesque léger; et j’ai trouvé ça revigorant, ce ready made naturel aidé.
10:59 Publié dans De vous zamoi, Glanures, Images, Poésie naturelle | Lien permanent | Commentaires (2) | | Imprimer | | |
26.12.2011
Une terrible beauté arrive à sa fin
Vous reprendrez bien deux ou trois oies pour la route? Alors voici celles-ci dessinées au pochoir sur peau de phoque par des Inuits dans les années soixante du siècle dernier. Sont-elles pas mimi? On sent que ces gars-là ont la forme dans la tête.
J’ai trouvé ce dessin au milieu d’autres bien chamaniques dans un numéro de Graphis (N°108-1963–vol.19), un superbe canard d’arts graphiques et d’arts appliqués qu’on m’a offert hier, sachant mon goût pour les eskimos glacés.
Car j’ai été blindée de Kdo figurez-vous. C’est un peu tard d’accord mais c’est toujours comme ça : à peine on vient de pondre une note que le hasard vous donne du rab de doc.
C’est un peu tard aussi pour vous orienter sur la Biennale de Lyon 2011 qui se termine le 31 de ce mois de décembre. C’est la 11edu genre et cette fois-ci elle pousse ses ramifications jusqu’à Vaulx-en-V’lin comme on dit là-bas.
Si je vous en parle c’est parce que parmi cette «terrible beauté» qui est née côté Rhône-Saône, Victoria Noorthoorn, l’argentine commissaire de cette manifestation qui ambitionne de «restaurer un dialogue de proximité entre les œuvres, les artistes et le spectateur» (propos de VN recueillis par Geneviève Nevejan dans la Gazette de l’Hôtel Drouot du 28 oct. 2011) n’a pas craint de s’autoriser un petit coup d’art brut avec Arthur Bispo do Rosario.
Une image de veste décorée par lui, trouvée dans la blogosphère en dira plus aux régionaux de l’étape qui trouveraient encore moyen de se rendre à la Biennale.
Excusez du peu, j’ai pas le temps de faire mieux. Si je tarde à poster vous en prenez pour deux ans.
11:11 Publié dans art brut, Blogosphère, Expos, Gazettes, Images | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : art brut, arthur bispo do rosario, biennale de lyon, victoria noorthoorn, revue graphis, art inuit | | Imprimer | | |
19.11.2011
La Jeune Création Contemporaine à l’Hôtel Drouot
Arrivage de créations franches. Avec la proximité des fêtes de fin d’années, les ventes publiques vont croissant. On peut, pour l’exemple, retenir celle de Neret-Minet Tessier du samedi 26 novembre 2011 à l’Hôtel Drouot, consacrée à la Jeune Création Contemporaine. Pourquoi? Parce que cette JCC est entrelardée de CF. C’est à dire d’œuvres d’auteurs représentés par le Site de la Création Franche, au premier rang desquels Gérard Sendrey qui fut longtemps son principal animateur. Il y a aussi, tous collaborateurs ou familiers du lieu : Raâk, Jacques Karamanoukian, Claudine Goux, Ruzena. On note encore, parmi ceux dont les travaux se retrouvèrent sur les cimaises du musée municipal de Bègles dans le passé, la présence de Eric Gougelin, Evelyne Postic, Adam Nidzgorski et Albert Louden.
Martha Grünenwaldt
J’ignore quel collectionneur se défait ainsi de ses valeurs made in «création franche, notion plus ou moins clone de la Neuve Invention de Dubuffet. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ne domine pas dans cet ensemble le côté brut de la force. A l’exception d’un beau Martha Grünenwaldt à fond noir cependant. Dans ces conditions on a plutôt tendance à se tourner vers des œuvres n’appartenant pas à ce courant CF, tel cet efficace Paysage oniriqued’Eliane Larus, troublant jusqu’à vous mettre l’âme au bord des lèvres avec ses plans cahotiques et biseautés et son étrangeté coupante.
C’est le N°104 du catalogue Neret-Minet. «Oh, z’ai clu voil un gros Neret-Minet!» dirait Titi.
Moi aussi.
23:55 Publié dans art brut, Gazettes, Images | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : art brut, martha grunenwaldt, eliane larus, création franche | | Imprimer | | |
01.11.2011
Sépulcrales de saison
Hier il faisait beau et aujourd’hui un temps de Toussaint. Chaque année, c’est pareil, c’est réglé comme du papier à musique. On ne sait pas quoi mettre sur son blogue. Pas facile d’éviter les sujets par trop folichons en ces temps «d’effluves de chrysanthèmes» (merci à l’Animulienne qui m’a fourni la formule). Et on peut pas toujours vous recycler des calaveras en cascade : voir mon post du 4 novembre 2007. Les squelettes à force ça use si on s’en sert trop.
Or donc j’ai choisi cette année de vous brancher sur les Sépulcrales, martyrologe de Pierre Joinul. Pourquoi? D’abord parce que c’est une jolie plaquette dépliante à tirage petit, mise en page par Jean-Luc Thierry et imprimée à Nîmes Par SEP pour les Editions Double Quark.
Ensuite parce que Joinul est un pseudo qui dissimule à peine un découvreur d’art brut hors pair puisqu’il a à son actif Emmanuel le Calligraphe, René le Bedeau et Pierre Jaïn. Joinul est aussi un pote à J.D. qui s’est fait son éditeur pour La bataille de mo
et son illustrateur pour la couvrante de Mézavi chez Pierre Jean Oswald en 1975
Robert Tatin et Slavco Kopac ont pareillement décoré ses recueils, le premier en 1973 : Oublions nos querelles voici que s’avance le vitrier boiteux
le second en 1976 : Mon prof de maths sent le tabac, ah
Cela faisait longtemps que je n’avais pas lu de ces drôles de poèmes décalés dont je vous laisse juges. Je les préfère à ses grosses machines de mots qu’il lui arrive de pondre de temps à autres (car c’est un enragé langagier) et où il a un peu tendance à se prendre pour un ordinateur emballé qui nous largue dans un encyclopédisme échevelé.
Là cette série de 32 sépulcres à ressorts comiques, lyriques et discrètement blasphématoires a de quoi plaire. D’abord parce qu’elle est à taille humaine (c’est ma taille) et qu’elle s’arrange pour enterrer je ne sais quel ton secrètement désespéré qu’on sent en filigrane dans les écrits joinuliens. D’autres diraient «à noyer le poisson» mais on n’est pas en avril. Les amoureux de beaux papiers kifferont les couleurs virant délicatement du rose à l’orange doux, du lilas au violet.
Le revers de la feuille est un poème chromatique muet. C’est à Federica Matta que l’on doit le sinueux et narratif décor qui fait le liseron autour des strophes joinuliennes imprimée en blanc.
18:34 Publié dans Ecrits, Images, Lectures, VU SUR ANIMULA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pierre joinul, jean dubuffet, robert tatin, slavco kopac | | Imprimer | | |
26.08.2011
Des Rives sous roches
Le vent se lève. Il fait moins chaud. Mon petit cerveau n’est plus ramollo et mon écran est moins brûlant. Encore deux, trois mauresques, un mojito et ce sera le boulot. La rentrée s’annonce grave avec un 2 septembre à la clé. C’est ce jour-là que débute l’expo Des Rives à L’Auberge de Baulmes, charmant abri sous roche au pied du Jura.
Des Rives, à qui voulez-vous que ça parle, sinon à Animula Vagula qui a toujours fait de ce jeu de mots son cheval de bataille?
Récemment c’est sur les bords de l’Escaut qu’une expo belge à géométrie variable empruntait à mon blogue son sous-titre!
Ici, dans cette exposition suisse organisée par Mordache of Lausanne, une asso qui promeut le travail du photographe «autodidacte» (selon le copieux pedigree joint à la présentation du show) Mario Del Curto, ce n’est pas pareil. Céline Muzelle, en bonne lectrice, reprend ma balle au bond et marque un panier en filant avec brio la métaphore : «Les remous n’ont pas manqué dans la vie des artistes que Mario Del Curto a choisi de photographier . Des événements tragiques, un parcours chaotique ou un rêve inaccompli sont souvent la source de leur création. Celle-ci épouse les méandres de leur existence tout en constituant pour eux un refuge, une rive où se retirer lorsque les vents soufflent trop fort».
Merci madame, c’est joliment dit et je ne peux qu’applaudir à cette extension du domaine de mon sous-titre calembourgeois!
Attention, l’expo Des Rives ne crèchera à Baulmes que jusqu’au 2 octobre 2011. Elle se déploiera ensuite en janvier 2012 dans un autre lieu décentré de Suisse romande : au Vide-Poches de Marsens dans la Gruyère, au cœur d’un genre d’hosto psy. Entre temps, elle visitera en novembre 2011, la Villa Piaggio de Gênes. A chaque étape la présentation sera différente. Les accros pourront donc se farcir les 3. Personnellement, je passerai vite sur les photos de La Demeure du (soit-disant) Chaos car je me contre-tamponne de cette «folie» (au sens aristocratico-architectural du terme).
Mais MDC peut bien perdre un peu de temps puisqu’il nous gratifie par ailleurs de très chouettes zimages de nos lascars favoris. A côté de Melina Riccio et Bonaria Manca déjà célébrées par votre Petite âme errante, je note dans le programme : Gu Ya, modeste jeune femme du Sud-Ouest de la Chine, auteur d’un rouleau dessiné sur 1000 mètres
Guy Brunet qui fait une fixette sur le cinéma
Yuchi Yamamoto, pêcheur japonais, créateur d’un sacré environnement orné de milliers de coquillages
Veijo Rönkkönen, du Nord-Est d’Helsinki, et ses 500 personnages sculptés grandeur nature. Ceux qui voudraient que je leur fasse un cours n’ont qu’à consulter le dossier de presse qui est trop bien fait. On en voudrait toujours des comme ça!
En pinaillant comme une bête, je n’ai pu y trouver qu’une coquille, enrichissante à souhait : «Les lieux qui accueillent l’exposition sont des endroits conviviaux, propices à de rires (sic) échanges avec un public qui n’est pas nécessairement habitué à de telles manifestations».
Quand le rare devient rire (et vice versa)
c’est le refoulé animulien qui fait retour
dans le discours savant!
Poil aux dents.
16:35 Publié dans Ailleurs, Expos, Images, Ogni pensiero vola | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, mario del curto, céline muzelle, bonaria manca, gu ya, guy brunet, yuchi yamamoto | | Imprimer | | |