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20.06.2010

A.C.M. court le monde

Fut un temps où A.C.M. n’envisageait qu’avec répugnance le transport de ces œuvres. C’était il y a plus de 10 ans et cet «architecte du vide» (selon le mot de Béatrice Steiner dans le n°17 de Création Franche en juin 1999) qui construit en donnant le sentiment de déconstruire, parlait à ses machines avec de la tendresse sous ses grosses moustaches à la Flaubert. En ce temps-là, la présence d’un gentil chow-chow à la langue noire lui était consolante.

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Il lui semblait impossible que ses sculptures puissent quitter son atelier installé dans une ancienne manufacture de tissage familial. Pourtant ses assemblages de petites pièces de machines à écrire, vissés, collés, patinés à l’acide étaient parfaitement costauds. Mais A.C.M. qui désignait son travail comme «un effritement qui dessinerait des choses» avait peur d’en perdre quelques morceaux.

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Comme si sa propre chair risquait de partir en lambeaux. Il sortait à ce moment là d’une période où il n’avait cotoyé personne et où il avait pris tous les risques d’une absorbtion dans la création pour la seule création. Environné de ses productions, il souffrait de sa position inconfortable : attaché à sa solitude partagée avec le seul soutien de son épouse, assoiffé cependant d’être mieux compris des autres, sinon reconnu par un public d’amateurs.

Il a fallu de la patience aux petit nombre de ceux qui l’encouragèrent alors pour le décider à affronter le feu des expositions. Il inventa alors des conteneurs en bois où ses chers volumes, parfaitement stabilisés, purent prendre la route. Et quand il le fit, cet «écorché vif» entre le zist de l’art brut et le zest de l’art contemporain rencontra tout de suite des collectionneurs puis des marchands qui donnèrent à son œuvre son retentissement actuel.

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La voilà maintenant qui traverse l’océan. Nous la retrouvons en Amérique, dans une expo de groupe (June 17, August 14) à la Galerie d’Andrew Edlin que votre petite âme errante félicite pour cela et aussi pour autre chose.

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On signale également la présence d’A.C.M. dans notre vieille Europe, à Gent (Gand) en Belgique au sein de l’expo De Wereld Andersom (Le Monde à l’envers).

C’est au Musée du docteur Guislain que ça se passe dans le cadre de la sortie d’été d’une belle part de la Collection abcd.

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Ceci jusqu’au 12 septembre 2010.

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Après le 24 septembre 2010 et jusqu’au 9 janvier 2011, les mordus d’A.C.M. retrouveront l’artiste à la Schirn Kunsthalle de Frankfurt dans l’expo Weltenwandler/World Transformers, Die Kunst der Outsider.

19:12 Publié dans Expos | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, acm, collection abcd, musée du dr guislain, andrew edlin gallery | |  Imprimer | | Pin it! |

19.06.2010

Visages de l’art brut

plouf.jpg«Animula c’est Animula!..» Cette énigmatique affirmation m’a été récemment servie dans un vernissage, avec un sourire au coin de la moustache, par un de mes malicieux lecteurs. Elle m’a plongée (plouf) dans un abîme de réflexions. Bien que proférée sur le ton de la plaisanterie, elle n’en était pas moins grosse d’implications philosophiques, pour ne pas dire métaphysiques.

fil en aiguille.jpgQui étais-je ? pour qu’on m’adresse pareille tautologie calquée sur la boutade de Dubuffet : «L’art brut, c’est l’art brut etc.». Où allais-je? et dans quelle étagère finirais-je?

De fil en aiguille, je me suis mise à chercher le visage de l’art brut qui s’est superposé dans ma rêverie au visage (idéal) d’Animula. Ou l’inverse, je ne sais plus. Et j’ai trouvé ceci :

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Vous en avez deux pour le prix d’un.
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Ces inéluctables visages proviennent du catalogue d’une exposition dont je vous ai déjà parlé à la fin de l’année dernière (le 6 décembre pour être précise), dans ma note : Espagne, 70 ans d’art en hôpital psychiatrique. Ce copieux et richement imagé catalogue est maintenant entièrement consultable sur le net. Page après page, on peut le feuilleter électroniquement avec un bruit de papier froissé très rigolo.

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Comment ne pas s’arrêter aussi sur ces photos des murs du Manicomio Provincial de Murcie, prises dans les années trente?

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17:21 Publié dans Blogosphère, Expos, Glanures, Images | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, manicomio, hôpital psychiatrique, murcia, espagne, graffiti | |  Imprimer | | Pin it! |

13.06.2010

Covoiturages bruts

Avalanches brutes et/ou de la famille brute au rayon expositions. On voit que l'été approche.

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10_antid.jpgJe rêve de co-voiturage, je pose des congés, je jongle avec les horaires de la SNCF. Je fais ma Petite Jehanne de France et mon chéri-que-j'ai son Blaise Cendrars.

vert.jpgJ'écarquille les yeux sur la carte de l'Hexagone comme si c'était l'itinéraire du Transsibérien. Je m'autoprépare, j'ai des voyants qui s'allument dans la tête : Vendée, Lozère, Allier, Bordelais ... Je trace des lignes imaginaires qui passent par Les Sables d'Olonne, Lapalisse, Bègles, Saint-Alban-sur-Limagnole.
C. comme classique, É. comme émeraude, c'est l'expo C. comme calligrammes au Musée de l'Abbaye de Sainte-Croix des Sables jusqu'au 7 novembre 2010.

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Chaissac a 100 ans cette année car il est toujours vivant dans nos cœurs. Epaulé par des collections privées, le MASC nous sort pour l'occasion des dessins écriturés tendance calligrammes.

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rouge.jpgMalgré les commentaires un peu dissuasifs du dossier de presse qui attire votre attention sur les possibilités d'hébergement restreintes, précipitez-vous (au moins par la pensée) aux 25e Rencontres de St-Alban (Sent Auban) les 18 et 19 juin 2010. Au programme, en accompagnement des savants bla-bla, un laïus de Christophe Boulanger sur Jayet, l'Aimable boucher

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et dans le fond de la cour une expo sur l'art brut polonais (bon sang, je voudrais bien voir ça).

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jaune.jpgSi L'Art en Marche n'existait pas, il faudrait sans doute l'inventer.
Qu'on me pardonne cette évidence puisque je vous emmène maintenant à Lapalisse où vous avez jusqu'au 30 septembre 2010 pour traîner vos tongs dans l'expo sur La Tinaia organisée avec la Susi Brunner Galerie de Zurich.

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Marco Raugei - La Tinaia

Ceux qui, comme moi, l'ont vue dans le cellier de Clairvaux à Dijon pendant la Biennale de l'Asso Itinéraires Singuliers (voir mon post L'Echo des Colloques du 9 mars 2010) y retourneront avec plaisir parce qu'elle vaut le détour et même le retour.

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Claudio Ulivieri - La Tinaia

Même si Luis Marcel en fait un peu trop en la qualifiant d'«événement d'envergure internationale». Mais c'est dans la nature donquichottesque (ou sancho-pancesque) de ce pittoresque personnage qui cette fois-ci ne se contente pas de provocations et nous offre de quoi nous attirer dans ses filets.


bleu.jpgEnfin, car je sens que vous fatiguez, ne faites pas votre cure annuelle de grands Bordeaux sans faire étape à Bègles pour Un Autre Regard, l'exposition, la petite dernière de la Collection Création Franche (21 ans d'âge) qui, jusqu'au 5 septembre 2010, sera bourrée jusqu'à la gueule (11 salles sur 2 niveaux) de pionniers, de doteurs, de créateurs venus des 5 continents, de voyageurs, d'hommes du commun, de visionnaires, de tourmentés et j'en passe.

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La présentation est aussi un peu hyperbolique. On leur pardonne (Ah ces Gascons !) parce qu'il y a du lourd. J'ai coché : Bonjour, Madge Gill, Lobanov, Gene Merrit, Duhem, Ratier, Robillard, Grünenwaldt, la bande à Gugging, Ted Gordon pour ne parler que de mon cœur de cible.

07.06.2010

Loïc Lucas, brodeur du vivant

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Un catalogue accompagne l'exposition Loïc Lucas, la petite dernière de la Galerie Christian Berst qui se tiendra à Paris, 24 rue de Charenton, du 11 juin au 17 juillet 2010. Et sur ce catalogue on voit le visage de ce «brodeur du vivant» à côté d'une de ses œuvres.

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En avant-première au vernissage qui aura lieu le jeudi 10 juin 2010 de 18 à 21 h (6-9 P.M.), votre petite âme errante, pourtant si peu finaude, s'est procuré quelques images inédites de l'artiste dans son atelier, de sa table de couleurs avec un dessin inachevé, de sa boîte aux lettres.

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Le voici perplexe devant un encadrement récalcitrant, affairé avec son épouse Stéphanie qui est également peintre et dont on aperçoit une œuvre sur le mur jaune. Un éclairage à la Vermeer! J'en suis assez contente! J'espère qu'il contribuera à créer de la proximité avec ce peintre de la vibration vitale, de la translucidité organique et de la lumière perlée.

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Fasse que cet éclairage ajoute encore à la curiosité déjà vive qui se manifeste autour de la révélation que Loïc Lucas incarne! Et que les amateurs lui tombent dessus comme des mouches sur le miel! Là où il sont, Loïc et Stéphanie, c'est super-mignon et les voisines déposent des gâteaux devant leur porte pour les remercier d'exister et d'aller peinturant si bravement comme ils le font.

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Chez Christian Berst aussi c'est super-mignon et je gage que les gâteaux ne manqueront pas non plus dans les assiettes à dessert pour célébrer jeudi prochain le travail impressionnant, radical et nécessaire de Loïc Lucas, cet ancien postier qui fut aussi croque-mort, ce peintre d'aujourd'hui qui fouille les abstractions jusqu'à l'os.

A jeudi.

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00:05 Publié dans Expos | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : loïc lucas, galerie christian berst | |  Imprimer | | Pin it! |

06.06.2010

La Galerie du Marché se mobilise

pedibus.JPGTrains, camions, voitures, tout sera bon pour se rendre à l'exposition du même métal qui se tiendra à la Galerie du Marché du 11 juin au 17 juillet 2010. Et pedibus cum jambis si on est Lausannois, puisque c'est à Lausanne que ça se passe.
Les trois œuvres représentées sont celles de Hans Ploos Van Anstel (automobiles)

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David Braillon (trains)

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david braillon 2.jpg

Joseph Vignes, la locomotive

pepe vignes 2.jpg
pepe vignes.jpg

Bon, je vois pas trop de camions dans les visuels mis à dispo par la galerie mais on peut lui faire confiance : il doit y en avoir puisque l'expo toute entière s'intitule Mobility.
Pourquoi Mobility et pas Mobilité? Est-ce que les Américains ne verraient pas le rapport, par hasard? Ils comprennent bien, j'en suis sûr, la parité du dollar et du franc suisse, ce qui est autrement plus coton. Mais bon, va pour ity, du moment qu'il y a du mobil
dedans.


Si c'est de moyens de locomotion qu'on nous parle ici c'est parce que de par le monde, les créateurs d'art brut s'intéressent volontiers aux bagnoles, aux chemins de fer et autres gros cubes.

MOTOOKA Hidenori - Trains - Vers 1995 à... - halle saint pierre.jpg

 

L'Art brut Japonais en ce moment à Paris en témoigne par exemple avec l'œuvre de Motooka Hidenori ou de Nobuo Mizutani.

Est-ce que ce seul critère de représentation, limitée à un type particulier d'objets, est assez pertinent pour servir de concept à une expo?

Je m'interroge. J'espère sincèrement que celle-ci contribuera à nous éclairer sur cette fascination sérielle dont font volontiers preuve ceux qui s'adonnent à l'art brut.

Et ceux qui le collectionnent, peut-être.

 

Motooka Hidenori

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Nobuo Mizutani

01.06.2010

Coquillages et Crustacés à la brestoise

musee-brest3.jpgUn bon point pour le Musée des Beaux-Arts de Brest c'est qu'il ouvre à l'heure. Idéal quand on traine dans cette grande ville du bout de la terre à cause du bizeness! J'avais pas que ça à faire aussi fus-je ravie de constater qu'à 10 h tapantes une dame vint m'ouvrir la porte de l'Exposition Coquillages et Crustacés et avec le sourire en plus! :-)

L'expo est réalisée en partenariat avec le MIAM de Sète. C'est grosso-modo la même que celle que j'avais loupée en 2008, n'ayant pu faire escale au Pays de la Pointe Courte. Le pourquoi du comment de l'expo brestoise c'est que (je cite le flyer rose-bonbon distribué à l'entrée)-: «Centrée sur l'art contemporain, l'exposition se déploie dans tout l'espace du musée, mettant en perspective la production de trente artistes avec des œuvres de l'art brut, des objets ethnographiques et d'art populaire, des coquillages et la collection du musée».

flyer coqu et crus.jpg

Moi, l'art dit contemporain c'est pas mon truc. Je me contre-tamponne par exemple des chirurgies esthétiques d'Orlan ou des «détournements» du logo de la Shell par Raymond Hains.  Et, pour ce qui est de «perspectiver», je n'ai toujours pas compris en quoi ça consiste. Mais cette juxtaposition d'œuvres qui s'ignorent superbement les unes les autres est, paraît-il «très stimulante pour les visiteurs» nous dit Madame Françoise Daniel, la conservatrice.

On voudrait la croire sur parole, ça lui fait tellement plaisir à cette dame de penser que son expo s'inscrit «dans la lignée de l'artiste américain Jeff Koons exposant au château de Versailles!» (propos recueillis par Frédérique Guiziou dans Ouest-France du 13 mai 2010). «Américain», «Versailles», sont des mots qui, à Brest, conservent leur prestige. Et l'art «koonsternant», cette variété gargantuesque de la disneyrisation globale :-) :-) ça ne fait pas sourire ici. :-( Par chance, les moyens ont manqué à Mme Daniel, sinon elle nous présentait «le fameux Lobster, le homard géant du roi du pop kitsch!» :-) :-) :-)

Je préfère de beaucoup (même si c'est pas de l'art brut) l'ironique Berceau à dimension humaine de Patrick Van Caeckenbergh reproduit sur l'affiche. Heureusement l'expo du Musée des Beaux-Arts, qui passera l'été pour s'éteindre le 24 octobre 2010, a de quoi satisfaire quand même des amateurs aux exigences animuliennes. S'ils se contentent comme moi de faire leur marché.

J'ai revu avec plaisir la porte en cuivre d'Hippolyte Massé prêtée par le musée de l'Abbaye de Sainte-Croix

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Hippolyte Massé par gilles Ehrmann.jpg

et le «Fétiche belge toujours vivant» (Ci-gît Maquenpise), une patte de crustacé en érection dans un cercueil. Je me suis plongé dans les aquariums de Paul Amar (façon céramique de Bernard Palissy). J'ai grimpé vers sa Vierge de Fatima clignotante (là c'est presque trop).

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J'ai retrouvé -hélas placée trop bas et presque minimisée de ce fait- la «Tête d'Apollinaire», un petit masque de Pascal-Désir Maisonneuve qui appartint à André Breton et qui est ici de par la courtoisie de la Galerie Ritsch-Fisch.

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C'est déjà pas mal.

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28.05.2010

Le Japon hors norme sort dans Télérama

telerama3150.jpgUn Japon hors norme, c'est à vous faire sortir de votre petit for intérieur, non? Donc, même si vous n'êtes pas une grande télérameuse devant l'Eternel, même si vous ne regardez jamais la télévision ou que vous avez bousillé votre écran plat depuis un certain soir de mai 2007, n'attendez pas la grève des Maisons de la presse pour aller vous procurer le dernier en date des numéros de Télérama. Le n°3150 couvrant la période du 29 mai au 4 juin 2010, pour être exacte. The Télérama et surtout son supplément Sortir qui «ne peut être vendu séparément». Sur la couv de ce sup vous reconnaîtrez une des œuvres présentées en ce moment à la Halle Saint-Pierre dans le cadre de l'expo Art brut japonais.

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A l'intérieur, un article de Bénédicte Philippe à propos de cette expo. Le Japon sort des règles de l'art, tel est son titre. Et cet article vaut le détour. D'abord parce qu'il est bien documenté, B. P. s'étant donné la peine de s'abreuver à plusieurs sources parmi lesquelles celles de Jean-Pierre Klein qui touche sa bille en art-thérapie, Yves le Fur, Directeur du Patrimoine et des Collections au musée du Quai Branly, Céline Muzelle qui a contribué au catalogue de l'expo à la Sainte-Halle. Ensuite parce que cet article sur 4 colonnes point trop longues se donne les gants de ne jamais oublier de parler des œuvres et des créateurs tout en éclairant le grand public (sans avoir l'air d'y toucher) sur la notion d'art brut, son passé et son nouveau visage.

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Surtout, surtout, l'article de Bénédicte Philippe ne cède jamais à la facilité des présentations déficitaires, genre : dansons avec la poussière puisque l'art brut ne fait jamais le ménage. Elle n'a certes pas peur d'employer les mots vrais : «autistes, trisomiques ou psychotiques» mais c'est toujours pour rappeler que les créateurs japonais concernés par ces mots sont simplement «mentalement différents» et qu'ils tirent de cette différence des avantages certains : «Employant des moyens détournés pour s'exprimer, ils nous forcent à sortir des a priori, des connaissances figées en nous-mêmes. (...) ils nous rendent justes plus vivants». Cela s'appelle le tact, une vertu indispensable quand on prétend parler d'art brut. Le tact, c'est pas si répandu dans le grand (et le petit) journalisme. Sans doute parce qu'il demande un travail d'écriture supplémentaire. Cela mérite donc d'être salué au passage.

23:55 Publié dans Expos, Gazettes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, art brut japonais, halle st pierre, télérama, bénédicte philippe | |  Imprimer | | Pin it! |

19.05.2010

Camille Renault inédit à la BnF

Je reviens de la BnF avec du nouveau sur Camille Renault. C'est pas tous les jours que ça arrive, l'environnement de ce fameux créateur d'art brut ayant été ratiboisé. Il ne reste que des miettes par ci par là, à Lausanne, du côté de L'Aracine, dans la Collection abcd. Camille Renault, maintenant il a sa notice Wiki donc je me fatigue pas pour vous dire qui c'est.

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Il refait timidement surface à l'occasion d'une exposition à la Galerie des donateurs qui se prolongera jusqu'au 20 juin 2010. Son titre : La Collection Alain et Jacqueline Trutat (livres et manuscrits). Les fans de notre Johnny Hallyday national pourront y voir une photo du rockeur bébé. Le père de celui-ci, un certain Léon Smet, comédien belge évoluant dans les cercles surréalistes (il a tourné un Fantômas en 1937 avec Ernst Moerman) fut en effet le premier mari de Jacqueline. Le père de Johnny est mort en 1989 et son parrain qui n'était autre que Alain Trutat, le deuxième époux de Jacqueline, disparut en 2006. atelier_de_creation_radiophonique.jpgAlain Trutat, pour aller vite est un homme de radio, l'un des fondateurs de France Culture et le papa de l'ACR (Atelier de Création Radiophonique). paul-and-nusch-eluard-1944.jpgLui et Jacqueline se sont trouvé mêlés à la vie de Paul Eluard après la mort de Nusch (28 novembre 1946).

C'est eux qui dissuadèrent le poète de se flinguer et qui firent des pieds et des mains pour lui remonter le moral après la disparition subite de son amour.

Nusch et Paul Eluard en 1944

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Paul Eluard encadré par Jacqueline et Alain Trutat

A force de se balader dans la bibliothèque de Paul Eluard, ils eurent envie de collectionner les beaux livres et les écrits. C'est cette collection que Jacqueline Trutat vient de donner à la grande dame du Quai François Mauriac. Je furetais pendant le vernissage de l'expo (qui présente ici quelques uns des fleurons de la collec du couple), en me demandant si je pourrais pas trouver des traces de ce roi d'Auguste Forestier que Paul Eluard avait juché sur sa cheminée, quand je suis tombée sur Camille Renault. Pour préciser, deux petites photos prises vraisemblablement par Jacqueline lors d'une visite au Jardin des suprises à Attigny un jour de 1951 en compagnie d'Alain et d'Emmanuel Peillet, grand manitou du Collège de Pataphysique et auteur d'une petite monographie sous pseudo sur le Camille.

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Deux photos ça vous paraitra pas beaucoup mais, vu qu'elles sont inédites, qu'elles font sans doute partie d'une série existante et que les documents d'époque sur le jardin de Camille Renault sont hyper rares, ça vaut le coup de courir à la BnF pour les voir. Malheureusement, je ne peux pas les reproduire mais croyez-moi pour sur parole si vous voulez faire preuve de positive animulattitude.

14.05.2010

Nuit des musées : délire et sauvagerie

Nuit2010_HD.jpgLa Nuit des Musées à Biarritz : si je commence comme ça, n'allez pas croire que je m'acharne sur les institutions culturelles ou que je manque de respect au Pays Basque.
planete musee du chocolat 1.JPGJ'avoue que me fait rire le mot de Christian Dotremont : «Et je ne vais dans les musées que pour enlever les muselières» mais je suis comme tout le monde, une bonne tasse de chocolat devant l'océan, je suis pas contre.
C'est vous dire combien j'aimerais descendre gratuitement dans la crypte Sainte-Eugénie, le samedi 15 mai, de 19 à 22 heures, avec ma petite laine, pour visiter l'Expo L'œil à l'état sauvage dans le cadre de la NDM.

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Au cas où vous le sauriez pas, Eugénie c'est la Première Pouffe du Second Empire. Elle convertit son Petit Napoléon à la prestigieuse station balnéaire de la côte atlantique.
Et au cas où vous l'auriez oublié, c'est notre André Breton national qui a clamé le premier que «l'œil existe à l'état sauvage». Aucune mention de cette citation fétiche (dont une défunte revue fit jadis à peu près ses choux gras) dans les présentations de l'expo biarrote.

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Pour faire bon poids les organisateurs en ont rajouté une couche en sous-titre : Les Délirants de la création. Nom d'un Badinguet, ça ferait presque peur! Avec pareil label, on s'attend à du lourd : des zinzins, des fêlés, des barrés, des z'hors-les-normes.

public enfantin à l'expo.jpgEt bien pas tout à fait. L'exposition a beau être vendue au public captif des écoles comme une «exposition d'art brut et singulier», on nous promet surtout un cheval de «grands noms de l'art contemporain» et une alouette d'«artistes emblématiques de l'art singulier» pour une pincée d'art brut (limité dans les énumérations existantes au seul cas d'Anselme Boix-Vives).
Je suis pas sûre que Michel Macréau dont une image sert à l'affiche aurait été ravi d'être enrôlé sous la bannière «délirants» mais ne boudons pas notre joie : une soixantaine d'œuvres de 28 artistes de la trempe de ceux qu'apprécient les grands collectionneurs, style Daniel Cordier,  c'est toujours bon à prendre.
Bien que Gaston Chaissac, Louis Pons, Fred Deux :

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Robert Combas, n'aient depuis longtemps (ou depuis toujours) rien à voir avec le soit-disant «art singulier», surtout tel qu'il se pratique de nos jours.

Bien que, Paul Rebeyrolle (!) :

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Zoran Mušič (!!) :

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Vladimir Velickovic (!!!) ne puissent être rapprochés de l'art brut et de ses alentours que par tout un système de poulies, de ficelles, de courroies de transmissions, de précautions.
L'exposition de Biarritz me semble encline à en faire l'économie. Ce qui peut se comprendre : présenter un bon choix d'œuvres fortes en espérant infléchir le regard du public local, c'est déjà pas mal. Nul besoin alors du renfort de la «sauvagerie» et du «délire». Mieux aurait valu élucider l'intention sous-jacente au rassemblement de ces tableaux et sculptures.

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Je sais bien que l'art brut aujourd'hui c'est médiatiquement porteur et que certains (ou certaines) croient bien faire en accrochant le mainstream à sa remorque mais parer le meilleur de l'art contemporain des plumes multicolores de l'art brut cela ne rend service à personne. Sauf à ceux qui se réjouissent de trouver là une occasion de mettre en doute la spécificité foncière de ce dernier. Il n'est qu'à faire un tour sur le net en rôdant autour de Biarritz, de ses états sauvages et de ses délirants de crypte pour s'en rendre compte.

08.05.2010

Art brut et alentours ...

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Art brut et alentours .... Vous avez reçu le carton de cette expo qui se tient à la grande petite Galerie Chave jusqu'à la fin juin 2010? Elle a commencé le 27 mars mais Vence c'est pas la porte à côté. Faut trouver du temps pour y aller. Raison pour laquelle je ne l'ai pas vue. C'est dommage. vence_galerie_chave1.jpg

J'aime bien la Galerie Chave, grande par son histoire et par ses trois étages et petite par son abord toujours modeste de boutique de village.

 

J'attendais le catalogue pour vous en parler. Le voilà.

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C'est un objet qui fleure bon l'épicerie d'enfance dont parle Jean Follain, celle où on emballait les choses, dans la jeunesse folle de mon daddy, avec du gros papier chamois. C'est du papier de ce style qui a servi à réaliser ce catalogue sauf que là c'est plutôt l'encre qui lui a communiqué son parfum, vu qu'il est imprimé «sur des feuilles intercalaires appelées macules, utilisées dans des ateliers de lithographie depuis une centaine d'années pour les tirages de chromolithographies, d'images pieuses, de cartes postales, d'affiches de Carnaval, de tickets de rationnement ... et plus récemment d'estampes originales d'artistes contemporains». catalogue 59.jpg

En voilà une idée qu'elle aurait plu à Dubuffet! Cela tombe à pic puisque le catalogue 2010 des Chave la joue discrétement «cinquantenaire» de l'expo historique de la Galerie Les Mages : Alphonse Chave présente l'art brut, qui vit Dubuffet relancer grâce à A.C. sa collection chérie. Aussi ne jetez pas votre catalogue Art brut et alentours à la poubelle, sous prétexte qu'il contient des pages à traces, à plis, à manques marginaux. C'est fait ek-se-près!

Cela l'empêche pas de redonner la lumineuse préface du Jeannot que vous feriez bien de copier 100 fois si vous la connaissez pas par cœur. Au moins les deux premières phrases : «Le parti de l'art brut c'est celui qui s'oppose à celui du savoir, de ce que l'occident nomme (un peu bruyamment) sa culture. C'est le parti de la table rase».

L'expo Chave de mai-juin 2010 montre les œuvres de 36 créateurs autodidactes dont certains (Aloïse, Jacqueline B., Marthe Isely, François Ozenda, Francis Palanc) figuraient déjà dans l'expo de la fin 1959. Mais là, y'en a en a un tas en plus que vous découvrirez en allant vous balader sur le site chavounet ou directement dans le catalogue orné de repros-couleurs collées sur la page-support.

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Jean Deldevez

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Jacqueline B

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Jules Godi

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Francis Palanc

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Thomas Grégoire

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François Ozenda

Je vous donne en prime une page noire qui chapeaute le tout.

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Toutes les reproductions d'œuvres sont extraites du catalogue - ©Galerie Chave

En ces temps de confusions généralisées où l'on mélange l'art brut avec n'importe quel pastis, le court texte de présentation de M. et P. Chave paraît rafraîchissant dans le genre remise des pendules à l'heure. Vous serez pas plus de 300 happy-few à posséder cet ouvrage parce que son tirage est limité et numéroté. Alors, soyez pas des cavounets et grouillez vous de l'acheter. C'est que 20 € et l'euro baisse.

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12:25 Publié dans Expos, Images, In memoriam | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, galerie chave | |  Imprimer | | Pin it! |